L’inquiétude de Bénédicte allait croissant. Depuis quelque temps, son président de mari, pourtant rompu aux exigences et incertitudes propres à sa fonction, donnait de plus en plus de signes de nervosité. D’inquiétude, voire de désarroi, devant les situations imprévues, fussent-elles anodines. Sans doute, lors des interventions télévisées dont il raffolait, faisait-il montre de l’assurance, du contentement de soi, voire de la morgue auxquels étaient accoutumés les Français. Son second mandat était largement entamé et rien, en apparence, ne laissait présager un effondrement qu’il parvenait à dissimuler en public. En privé, toutefois, il était de plus en plus en proie à des accès de mélancolie qui se traduisaient par de longs mutismes et des soupirs à fendre l’âme. De quoi angoisser Bénédicte dont les sentiments à l’égard de son époux offraient un curieux mélange d’amour maternel et d’affection conjugale. Elle était, il est vrai, de quelque vingt ans son aînée. Peu d’exemples dans l’Histoire, sinon les rapports entre Henri II et Diane de Poitiers, à ceci près que le palais de l’Élysée avait succédé au château d’Anet.
N’y tenant plus, Bénédicte se décida à rompre le silence. C’était un matin de printemps. De la fenêtre donnant sur le parc du palais, parvenaient, mêlés aux effluves de lilas, les dialogues énamourés des oiseaux
