Quand le parti qu’on soutient se prend une taule, ce sont des lendemains d’élections qui déchantent, on a la gueule de bois, on enrage, on s’énerve. Et plus l’abstention a été forte, plus le risque est élevé de croiser un abstentionniste. Alors, autant ne pas sortir.
Les lendemains de défaite électorale, j’ai toujours une pensée pour cette vieille pub dans Hara-Kiri avec des bulles sur une photo où quelqu’un demandait au professeur Choron : « Que pensez-vous de ceux qui n’achètent pas HARA KIRI en 1975 tout en sachant qu’ils avaient tort de ne pas l’acheter en 1965 ? » Et Choron répondait en levant les yeux au ciel : « Qu’ils crèvent ! »
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Les lendemains de débâcle électorale, je n’ai plus de famille et je n’ai plus d’amis, je ne réponds plus au téléphone qu’à mes clients, et par oui ou par non. Plus l’abstention a été forte et plus le risque est élevé de tomber sur un abstentionniste, alors par précaution, je ne cause plus à personne, je laisse sonner, je m’abstiens, j’ignore, et quand je croise dans la rue une connaissance civiquement peu fiable, je change de trottoir. Je pourrais avoir des mots et peut-être même en venir aux mains avec un de ces sous-citoyens à qui on trouve toutes les excuses et qui n’en ont aucune, un bourrin qui connaît l’état de santé de N’Golo Kanté mais pas la date du scrutin, un veau qui a mieux à faire ce jour-là que donner de la voix au pays de Samuel Paty et de Mila, une buse qui prend son dimanche quand toute la semaine, à l’arme blanche, des types en survêtement tuent des Français innocents, une taupe que la prolifération de femmes voilées sur les trottoirs de la Ville lumière ne dérange pas et qui le jour du vote, ne se dérange pas.
Les lendemains de désespoir électoral, je ne peux plus voir mes amis parisiens héritiers de gauche ou rentiers d’extrême gauche, universitaires inutiles, artistes indésirables, auteurs indigents, intermittents parasites ou avocats de la racaille, ouverts, tolérants et bien planqués intra-muros à l’abri du tiers-monde et de l’ensauvagement. Ces jours funestes, je ne peux plus entendre ces excusistes qui accusent l’absence de mixité sociale dont souffrent les enfants d’immigrés et qui détournent la carte scolaire, je deviens allergique à ces faux-culs qui luttent par le verbe contre la montée du fascisme, dénoncent le RN comme le parti de la haine mais qui recommandent à leurs enfants de ne pas dire à l’école qu’ils sont juifs, comme si les collégiens juifs de Seine-Saint-Denis avaient fui les harcèlements de sympathisants du Front national, comme si Mohammed Merah était un militant du « parti de la haine ». Les lendemains qui déchantent, je me détourne de ces imbéciles de gauche, de n’importe quelle gauche, LGBT et pistes cyclables, menu hallal bio et cour genrée, ségrégation raciale positive et féminisme en burkini équitable, qui s’exécutent le jour des élections en votant pour que les trans se reproduisent, que la Palestine triomphe du sionisme et que les Blancs se taisent.
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Les lendemains de désastre électoral, je reste aussi à bonne distance de mes amis de droite, ces traîtres mous et idiots inutiles qui votent au secours de la défaite, régulièrement, obstinément, désespérément, ces socio-traîtres centristes et pacifistes qui se méfient des aventures souverainistes, des populismes et des extrêmes mais qui s’accommodent des occupations et des abandons, qui votent « pas de vagues », à l’OTAN comme en banlieue, qui s’affirment gaullistes et qui donnent toujours les pleins pouvoirs à Pétain. Ces jours de deuil, je fuis la droite humaniste et honteuse, qui s’étrangle et s’indigne quand on parle de répressions, de déchéances et d’expulsions au nom des valeurs de la République, qui aux affaires, pose le Kärcher et se couche devant l’obstacle du premier Conseil d’État venu. Ces matins gris, je maudis cette droite molle qui ne défend que des intérêts de classe, ces Français Figaro qui oublient le jour du vote le sort de leurs compatriotes enclavés dans des territoires occupés qui n’ont pas les moyens d’épargner à leurs enfants les colonies de vacances colonisées, les piscines municipales racaillisées, les terrains de sport islamisés. Ces lendemains qui énervent, je hais les hypocrites qui s’inquiètent dans la presse du délitement de la France et du naufrage de notre civilisation mais qui regardent pour commencer et pour finir comment sera imposée leur assurance et de combien seront taxés les droits de succession, j’enrage contre la droite du calcul et de l’intérêt qui voit bien la submersion et le remplacement, l’ensauvagement et la tiers-mondisation, mais qui voit le RN passer devant et se soucie du financement des retraites et des barrières douanières. Ces jours sombres, je conchie la droite bourgeoise qui s’inquiète pour sa civilisation mais pas autant que pour son taux d’imposition et je ne peux plus voir ces électeurs BCBG qui voient des Français lynchés dans des ZEP et des Françaises violées dans des RER, mais qui font la fine bouche devant le « populisme » et alors que toutes leurs observations les amènent à la conclusion qu’il faut stopper l’immigration, refusent par pure distinction, comme des ânes snobs et butés, de voter pour le seul parti qui ne soit pas immigrationniste, parce que c’est celui de leur femme de ménage ou de leur artisan maçon.
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Voilà pourquoi, les lendemains de découragement électoral, je suis ermite et misanthrope, j’attends en silence que la colère retombe et que la haine passagère redevienne mépris ordinaire. Je pense à ceux qui ne votent pas RN en 2021 tout en sachant qu’ils avaient tort de ne pas voter Le Pen en 1974, année du regroupement familial, comme en 81, en 88, en 95, et en 2002, 2007, 2012 et 2017 ; je pense à ces planqués qui par de petites lâchetés et pour de petites raisons, s’abstiennent, dans la guerre de civilisation, de monter au front, et je repense à la réplique du professeur Choron.