L’Allemagne, l’Italie et la France ont toutes trois, durant la Seconde guerre mondiale, été dirigées par des partis autoritaires et démagogues. Pourtant, seule la France accorde aujourd’hui une place électorale si considérable à un mouvement politique qui tire l’essentiel de sa propagande de thèmes utilisés il y a soixante-dix ans : absurde et mortifère repli sur soi économique, xénophobie, et enfin un antisémitisme, hier encore affiché, aujourd’hui dissimulé mais toujours « dans son ADN ».
Le peuple allemand et le peuple italien ont eu à subir la défaite et l’humiliation en raison des décisions prises par deux démagogues dans lesquels ils avaient placés de grands espoirs lors de circonstances économiques difficiles. De Gaulle a apporté à la France, presque miraculeusement et par son inflexible volonté patriotique, une victoire qui lui a permis de figurer au rang des grandes nations alliées et de siéger au Conseil de Sécurité des Nations Unies
Au-delà des Alpes et du Rhin, les consciences politiques italienne et allemande ont assimilé une pénible leçon qui a été épargnée à la France et qui les a détournées du démagogue. C’est sans doute moins le cas en France.
Outre la conséquence du chômage élevé et de la crise qui déchaîne toutes les intolérances, cette percée du FN est aussi une réaction épidermique au refus obstiné de la vaste majorité de l’intelligentsia et du « système » de reconnaître l’héritage chrétien de la France et la volonté profonde des Français de maintenir leur identité nationale. Cet héritage chrétien de la France existe, il se manifeste par les clochers autour desquels se regroupent tous les villages et toutes les villes. Il en va de même pour l’héritage historique et héroïque de la France qui, réalité unique dans le monde, se manifeste par un monument aux morts dans chacune de nos 37 000 communes exprimant la volonté indéfectible de la France et des Français, aux prix des plus grands sacrifices, de demeurer libres et Français. Nos coutumes ont été élaborées par des siècles de vie commune, c’est un héritage global auquel nous nous identifions même s’il se modifie progressivement au gré des influences et du temps qui passe. Les Français sont d’accord pour que les choses changent à un rythme d’omnibus mais pas à un rythme de TGV. Ils ne sont pas réactionnaires pour autant.
L’immigration que l’on ne parvient pas, ou que l’on ne veut pas, contrôler joue elle aussi un rôle prépondérant dans la montée du FN. Toutes les vagues d’immigration ont posé des problèmes, il a fallu du temps pour que les étrangers s’intègrent mais le flux d’immigration récent, celui des trente dernières années, pose plus de problèmes : les cultures sont différentes, la religion et la manière de vivre au quotidien cette religion aussi. Cela ne signifie pas que ces personnes ne peuvent pas s’intégrer, une vaste majorité l’est, mais une frange ne l’est pas et cela cause des problèmes.
Il faut baisser l’immigration – non pas parce qu’il y a trop d’étrangers en France, la France est loin d’avoir le premier rang en ce domaine – mais parce qu’une partie des étrangers venant du Maghreb ou de l’Afrique sub-saharienne ne veut pas ou ne peut pas faire d’efforts pour s’intégrer, tout en en voulant au pays qui les accueille, alors que la France est un pays généreux par rapport à presque tous les autres pays sur la planète.
La France n’est pas raciste ou pas plus et certainement moins que d’autres nations. Les Français saluent les vertus du métissage, les sangs qui se mélangent, le renouveau que cela apporte, le brassage des cultures, l’énergie qui s’en développe mais ils veulent que cela se fasse sur des valeurs communes et ces valeurs sont surtout : le respect du pays dans lequel on arrive pour s’y installer, le respect des femmes, celui des traditions et surtout une manière discrète de pratiquer sa religion.
Pour combattre l’extrême droite, la gauche doit adapter son idéologie aux nouvelles circonstances. Quant à la droite, si elle revient au pouvoir, elle devra, cette fois ci, assurer ce qu’elle promet : restaurer l’autorité de l’Etat et, jusqu’à ce que les conditions économiques s’améliorent, diminuer sensiblement l’immigration. Avant d’accéder au pouvoir, elle devra expliquer aux électeurs, sans démagogie, sans formule lapidaire mais concrètement avec pédagogie comment elle réalisera en pratique cet objectif tout en maintenant nos valeurs d’humanité.
Mais l’électeur de droite classique doit toujours se souvenir que le Front national c’est :
– L’appauvrissement immédiat de la plupart des Français en cas d’élection
– L’absence de programme économique ou le caractère contradictoire de ce dernier
– La gerbe sur la tombe de Pétain et sa réhabilitation
– La sortie de la France de l’Europe, qui assure depuis près de 70 ans la paix ;
– La solidarité sans faille envers son président d’honneur, pour qui « les chambres à gaz, si elles ont existé, sont un point de détail de la seconde guerre mondiale » et pour qui « l’occupation allemande en France n’a pas été particulièrement inhumaine, même s’il y eut des bavures, inévitables »
– Le retour sur les discours historiques de Jacques Chirac et François Hollande au Vel’ d’Hiv
– La complaisance amicale envers les dictateurs les plus sanguinaires, tels Assad ou avant lui Saddam
– La légitimité pour l’Iran de se doter de la bombe atomique
Tout cela, c’est ce qui est sûr, mais nous savons aussi par les leçons du passé que dès que les démagogues extrémistes accèdent au pouvoir, la misère, la répression policière, les carcans idéologiques et une explosion de xénophobie et d’antisémitisme s’abattent sur les peuples. Ceux qui ont voté national-socialiste en 1933 croyaient obtenir l’ordre et la paix, ils ont eu la destruction et la guerre.
Pour toutes ces raisons, si j’ai le choix entre un candidat FN et un candidat PS, je ne m’abstiendrai pas mais voterai toujours pour le candidat du Parti socialiste.
*Photo : GILE MICHEL/SIPA. 00683492_000003.
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