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Promis, je vous parlerai de tout sauf du Budget !

Il y a une vie après l'Assemblée, la chronique d'Emmanuelle Ménard


Promis, je vous parlerai de tout sauf du Budget !
Emmanuel Macron reçoit le Premier ministre libanais, Najib Mikati, à l'Élysée, 23 octobre 2024 © Thomas Hubert/SIPA


Le monde à l’envers

Je croyais avoir tout entendu de Sandrine Rousseau, mais elle arrive toujours à me surprendre. Le jeudi 26 septembre dernier, réagissant sur France Inter au meurtre de Philippine, l’élue écologiste explique que si on pense qu’un étranger sous OQTF devrait quitter notre sol, c’est qu’on n’est pas féministe. Vous ne comprenez pas ? Je recommence : prenez l’assassin de Philippine, déjà condamné en France pour viol. Il aurait dû être renvoyé dans son pays d’origine, le Maroc. Mais pour Sandrine Rousseau, ce n’est pas si simple. Écoutez plutôt : « Je m’inquiète quand même du fait que nous n’ayons aucune espèce de considération sur le fait que ce type est dangereux, manifestement, puisqu’il a tué Philippine, et que s’il était dans un autre pays il [serait] tout aussi dangereux et mettrait en danger d’autres femmes, donc en fait la question c’est pas tant l’OQTF. » Bref, pour Sandrine Rousseau, pas question de renvoyer l’individu dans son pays puisqu’il pourrait y mettre en danger… les Marocaines ! Bon sang, mais c’est bien sûr ! Je propose à Madame Rousseau d’aller tenir son raisonnement à la famille et aux proches de la jeune étudiante assassinée…

Démagogie

OQTF toujours… Le maire de Béziers (je ne vous le présente plus, n’est-ce pas ?) a annoncé son accord pour la construction d’un CRA (centre de rétention administrative). Son raisonnement est le suivant : environ 7 % des OQTF sont exécutées aujourd’hui en France. Sauf lorsque les étrangers passent par des CRA, le pourcentage d’exécution desdites OQTF grimpent alors à plus de 40 %. Question de logique : si les étrangers n’ayant rien à faire en France peuvent davantage être expulsés lorsqu’ils sont placés en centre de rétention, construisons donc ces fameux CRA (je suis davantage son raisonnement que celui de Sandrine Rousseau, mais vous le savez, je suis un peu de parti-pris dans cette affaire…). Ce projet n’est pourtant pas au goût de tout le monde. La gauche y est opposée, vous vous en doutez. Plus surprenant, le RN local aussi. Le 19 octobre dernier, le préfet de l’Hérault, François-Xavier Lauch, s’exprime dans Midi libre au sujet de ce CRA : « À mon grand étonnement, le député de la circonscription de Béziers me dit qu’il est opposé à ce CRA. Je me dis qu’il faudrait réconcilier les discours nationaux et locaux. » En clair, le député de Béziers (RN) fait le grand écart : à Paris, il veut lutter contre l’immigration et faire exécuter les OQTF, mais à Béziers, c’est plus compliqué, parce que moins populaire. Il s’explique d’ailleurs quelques jours plus tard dans le même quotidien : « 45 % des personnes retenues en CRA sont expulsées, pourra-t-on assurer un suivi des autres ? Avec un accompagnement par des structures médico-sociales ? » Si je comprends bien, puisqu’on ne peut pas exécuter 100 % des OQTF, ne faisons rien ?Voilà qui s’appelle rétropédaler. Ou exceller dans l’art de la démagogie…

A lire aussi, Olivier Dartigolles: Le président et la presse

Électoralisme ?

On sent Emmanuel Macron peu à l’aise sur la question d’Israël. Soufflant le froid et le chaud. Son refus de participer à la marche contre l’antisémitisme en novembre 2023, d’abord. Puis, sa déclaration lors du 19e sommet de la Francophonie à Paris, où, deux jours avant la commémoration du pogrom du 7-Octobre, il se dit favorable à un arrêt des livraisons d’armes à Israël. Le « maître des horloges », comme il aime à se nommer lui-même, a une nouvelle fois choisi un « timing » parfaitement déplacé, pour ne pas dire indécent, voire dégueulasse…S’il avait voulu provoquer une crise diplomatique avec Israël, il n’aurait pas fait autrement. Que se passe-t-il dans la tête de notre président ? Quelle mouche l’a donc piqué pour flatter ainsi l’électorat de La France insoumise ? Le voilà qui récidive quelques jours plus tard, en déclarant en Conseil des ministres que l’État hébreu « a été créé par une décision de l’ONU », ce qui laisse entendre qu’une autre décision pourrait le supprimer. Et comme si tout cela ne suffisait pas, lors de la conférence internationale sur le Liban organisée le jeudi 24 octobre à l’Élysée, Emmanuel Macron claironne qu’on « ne défend pas une civilisation en semant la barbarie »… Une intervention aussitôt partagée sur X par Jean-Luc Mélenchon. Le baiser de Judas ?

Islamisme encore

On en pleurerait. L’hommage rendu le 13 octobre au professeur Dominique Bernard, un an après son assassinat par un ancien élève radicalisé islamiste, a un goût amer. Le maire d’Arras n’a en effet jamais prononcé le mot qui fâche : islamisme. Sur scène, une artiste a réalisé en direct une « performance », comme on dit maintenant. Une grande toile représentant une colombe – ça ne s’invente pas ! – sur fond bleu-blanc-rouge et les mots « Liberté, égalité, fraternité ». Je vous évite les poèmes et les séquences de danse contemporaine qui avaient pour objectif de mettre « en lumière les valeurs de la République, la liberté et le vivre-ensemble », comme l’a souligné le maire. Triste prémonition, trois ans plus tôt, lorsqu’ils ont appris l’assassinat de Samuel Paty, l’épouse de Dominique Bernard a dit à son mari : « Qui sera le prochain ? Parce qu’il y en aura un. » Pas certaine que les colombes suffisent à y mettre un terme…

Comme les autres

Finalement, Michel Barnier fait comme tous les autres. Quelle déception ! Quand un gouvernement sait qu’il ne pourra pas agir sur le plan économique pour améliorer la vie des Français, il se rabat sur les questions de société. Alors qu’il avait mille raisons de surseoir, le voilà qui annonce la reprise des débats sur la loi « fin de vie ». Sans doute pour montrer patte blanche à ceux qui, depuis la dissolution, se démènent pour faire de l’euthanasie une priorité. Monsieur le Premier ministre, la vraie priorité, c’est le déploiement des soins palliatifs dont près de la moitié des patients qui en auraient besoin sont encore aujourd’hui exclus. Eh oui, être vieux, malade ou invalide ne signifie pas qu’on a perdu sa dignité !

Novembre 2024 - Causeur #128

Article extrait du Magazine Causeur




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Ancienne députée

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