Si le dopage est le grand absent de ces jeux olympiques (j’imagine que les experts des labos de contrôle étaient partis, eux aussi, aux sports d’hiver), deux autres fléaux sociaux sont malheureusement venus entacher les jeux « propres » de Vancouver : le tabac et l’alcool.
Faut dire que ça avait très mal commencé : avant même l’ouverture des Jeux, un petit malin avait cru opportun, lors du passage de la flamme olympique dans les rues de Vancouver, d’allumer sa clope à la torche sacrée. Après quoi il retourne gentiment fumer en paix sur le trottoir. Sauf qu’en moins de temps qu’il n’en faut pour tirer une bouffée, surgis de nulle part, cinq policiers anti-émeutes se ruent sur le polisson, le plaquent au sol, le menottent et l’arrêtent. On ne sait pas ce qu’est devenu le mégot… Il doit être sous scellés, on rappellera que le pays hôte des Jeux s’honore d’avoir l’une des législations anti-tabac les plus rigoureuses de la planète – plus ou moins à égalité avec l’Iran.
L’incident – assez peu médiatisé sur place – était à peine oublié quand a éclaté le vrai grand scandale alcoolo-tabagique qui fait depuis jeudi dernier les choux gras de la presse locale – tant québécoise qu’anglophone. Figurez-vous qu’après avoir empoché rien moins que la médaille d’or (2-0 contre les USA), les hockeyeuses canadiennes ont arrosé leur victoire à la bière et au champagne, plusieurs d’entre elles auraient même allumé des cigarillos. Certes, tout cela s’est passé quarante minutes après la fin de la cérémonie protocolaire, certes les gradins de la patinoire étaient déserts depuis longtemps. N’empêche, quelques photographes traînaient encore dans le secteur et leurs images ont déclenché un sacré foutoir. Il faut dire qu’ils ont été non seulement témoins de pratiques contraires à l’éthique de l’olympisme, mais aussi de faits délictueux : une des joueuses vedettes de l’équipe, Marie-Philip Poulin, a été surprise une canette de bière à la main. Il se trouve que cette demoiselle – à qui l’on doit au passage les deux buts ayant amené la victoire canadienne – a 18 ans et 11 mois. Or, en Colombie britannique, l’âge légal pour consommer de l’alcool est de 19 ans. Tabarnac !
Dès le lendemain des faits le porte-parole du Comité international olympique, Mark Adams, a indiqué qu’une lettre allait être transmise aux dirigeants du Comité olympique canadien (COC) pour les sommer de se justifier sur ces agissements gravissimes, beaucoup plus répréhensibles, semble-t-il, qu’un banal cas d’achat de vote au CIO. Le président du COC a donc du faire des excuses au CIO, tout comme la Fédération canadienne de Hockey qui, dans un communiqué, a cru utile de regretter officiellement que « dans l’excitation du moment les festivités ont débordé du vestiaire, ce qui n’aurait pas dû se produire ». On s’en doute, la pauvre Marie-Philip Poulin a été obligée elle aussi de faire acte de contrition devant la presse : « Je m’excuse pour ce qui est arrivé. Je vais apprendre de ça », a-t-elle déclaré, en québécois dans le texte.
Bref, l’affaire aurait pu en rester là, si certains ne s’étaient pas mis à faire du mauvais esprit. Ou plutôt certaines. Car le Canada n’est pas seulement le pays des lois vertueuses sur le tabac et l’alcool, c’est aussi celui du féminisme triomphant et de la parité absolue. Et dans ce concert de mea culpa, une responsable du Comité olympique canadien, Nathalie Lambert, a émis une fausse note tout à fait bienvenue : « Je ne suis pas sûre qu’on en parlerait si c’étaient des gars. Le hockey est tellement associé à la bière qu’on ne peut même pas s’imaginer qu’ils ne prendront pas une bière après la partie. »
Pour ma part, je suis d’accord à 100 % avec cette dame. Et pour une fois que paritarisme et bon sens font cause commune, ça s’arrose !
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