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Sandra Muller balance tout… sauf la vérité

L’instigatrice de “Balance ton porc” de nouveau devant le tribunal


Sandra Muller balance tout… sauf la vérité
Sandra Muller et Francis Szpiner, septembre 2019 © Thibault Camus/AP/SIPA Numéro de reportage: AP22381700_000001

Mercredi 27 janvier, l’instigatrice du mouvement “Balance ton porc” était jugée en appel à Paris. En septembre 2019, elle avait été condamnée en première instance à payer 15 000€ de dommages à Éric Brion, et à supprimer le message le diffamant sur Twitter. Causeur était présent à l’audience de ce procès emblématique de deux phénomènes préoccupants: le néoféminisme revanchard et la violence sur les réseaux sociaux.


On connait le célèbre tweet de la journaliste Sandra Muller : « Tu as de gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit. Éric Brion ex-patron de Equidia #balancetonporc ». Publié sur un coup tête le 13 octobre 2017 depuis New-York, il déclenche la vague accusatrice que l’on sait. De nombreuses têtes tombent. Mille torts sont reprochés aux hommes. Pour les rares pourfendeurs du mouvement, comme Catherine Deneuve, Balancetonporc c’était la délation en ligne dans tout ce qu’elle a de plus sale. Pour tous les autres, qui ont patiemment travaillé l’opinion publique à accepter de tels procès virtuels, c’était l’expression légitime de la parole “libérée” des femmes.

Tout l’enjeu du procès est de savoir si la nature des propos prêtés à Éric Brion[tooltips content= »Précisons que Brion n’a jamais reconnu avoir prononcé ces mots. Tout juste reconnait-il s’être pris un mémorable râteau à la fin d’une soirée, et s’être excusé le lendemain de son indélicatesse. »](1)[/tooltips] justifie que celui qui les aurait prononcés porte à vie l’étiquette infamante de harceleur sexuel. Et, si tel n’est pas le cas, de définir comment réparer l’injustice faite à celui dont des mots malheureux colportés ont valu la mort sociale.

Suite au tweet de Madame Muller, un million de messages ont été publiés avec le fameux hashtag “balance ton porc” sur Internet, et pas moins de 900 articles de presse ont relaté l’affaire en trois jours.

Éric Brion ne supporte plus le doute dans le regard des gens

Évidemment, les propos reproduits par Sandra Muller sont moches. C’est ce qu’il ne faut surtout pas dire quand on veut avoir de la classe. C’est ce qu’il ne faut surtout plus dire quand le néoféminisme victimaire est exalté par la classe politique et les médias.

Éric Brion se présente à la barre. Il sort de dépression, il a pris jusqu’à 20 kilos. Calme mais visiblement ému, il témoigne : “À partir de la publication de ce tweet, ma vie a été complètement brisée, réduite en miettes. J’ai perdu mon travail, ma compagne, ma réputation, le pire étant ce que mon entourage a subi, notamment mes deux filles. D’un seul coup, toutes les portes se sont fermées. Ma jeune société de conseil dans l’audiovisuel a perdu toutes ses missions.” Il se considère comme un pestiféré, un paria, Sandra Muller s’étant soigneusement acharnée sur lui des semaines durant, le qualifiant de “dommage collatéral d’une cause” dans un livre publié en 2018 ou le requalifiant de prédateur sexuel.

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La veille des faits qui lui sont reprochés, Sandra Muller a pu lire dans le Parisien le premier article de presse française qualifiant de “porc” le producteur Harvey Weinstein, reconnu coupable de viols. Le 13 octobre, avant de s’en prendre à Brion, Muller avait écrit sur Twitter « .#balancetonporc !! toi aussi raconte en donnant le nom et les détails d’un harcèlement sexuel que tu as connu dans ton boulot. Je vous attends ». Si ce premier message ne rencontre pas de succès, la délation, elle, paie. Quand Muller jette en pâture le nom de Brion dans le message suivant bien connu, il est partagé massivement. Enfin ! En écrivant “toi aussi” sur Twitter, puis en accolant au hashtag Balancetonporc le nom de Brion, nul doute que la journaliste amalgame volontairement Brion au producteur coupable de violences sexuelles.

Brion reconnait avoir pu retravailler “en pointillés” après le premier jugement, ce qui lui a redonné un peu d’espoir. Il s’adresse aux juges: “Je vous demande de confirmer le premier jugement pour lever définitivement le doute que je vois dans le regard des gens”.

Sandra Muller ne confond-elle pas drague lourde et harcèlement?

Curieusement, l’avocat François Baroin qui défendait l’accusée en première instance, s’il suit toujours le dossier, ne plaide plus pour elle et n’est pas présent à l’audience. L’accusée non plus ne s’est pas déplacée : elle est à New York. Rétrospectivement, son tweet cinglant apparait comme savamment préparé pour faire du mal, il était calibré pour générer un “buzz” revanchard sur les réseaux sociaux.

Mais la défense de Madame Muller demande la relaxe. Pour y parvenir, le ténor du barreau Francis Szpiner se grime en grand défenseur de la cause des femmes ! Parlons vrai: il en fait des caisses. Son emphase cocasse est à la mesure du degré de ridicule des propos grivois qu’aurait tenus Brion en 2017, et qui tout compte fait n’étaient pas grand-chose. Cependant, quand les questions sociétales ont pris l’ascendant sur le politique – Emmanuel Macron n’a-t-il pas fait des femmes la grande cause de son quinquennat ? – un procès comme celui-ci est de facto un procès politique. Selon Maître Jade Dousselin, avocate proche des Insoumis, Madame Muller serait injustement reconnue “coupable de s’être libérée et d’avoir manqué de prudence” en ne consultant pas le code pénal avant d’accuser Brion de harcèlement sexuel. On pourrait lui rétorquer que nul n’est censé ignorer la loi… Mais comme on l’a dit, c’est un procès politique, cela ne compte pas. Me Dousselin puis Me Szpiner invitent ainsi le tribunal à retracer la faute de Muller dans une “perspective plus large”. Muller ne peut pas être condamnée, le “progrès nous y oblige” affirme Me Dousselin.

Me Szpiner se fait menaçant : si le tribunal condamnait Sandra Muller en se bornant à suivre la jurisprudence sur les limites de la liberté d’expression, il ferait preuve d’un raisonnement simpliste qui ignorerait le “contexte dans lequel se trouve la société”…  “Vous allez débouter M. Brion, et ce sera justice” affirme-t-il. Selon les avocats de la défense, la Cour devrait ni plus ni moins comprendre le “ressenti des jeunes générations qui ne supportent plus ce genre de comportements et ne veulent plus se taire”. Une allusion au cas de Camille Kouchner est faite opportunément.

Décision le 31 mars

Mais quid des rumeurs et calomnies diverses relayées pendant des jours par Madame Muller ? Quid de cette fameuse “faille spatio-temporelle” évoquée un temps ?[tooltips content= »Muller avait affirmé à un moment avoir oublié pendant cinq ans le traumatisme qu’auraient représenté les mots de Brion à son endroit. Mais dans cette même période d’amnésie, elle menaçait Brion de parler s’il ne s’abonnait pas à la Lettre de l’audiovisuel qu’elle édite (1700€ l’année), dans un échange privé sur Facebook dont le tribunal a pu prendre connaissance. »](2)[/tooltips] Et où sont tous les témoignages d’autres femmes ayant à se plaindre de Monsieur Brion, un temps évoqués par Madame Muller, ailleurs que dans son imagination ?

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Madame Marie Burguburu, l’avocate de Brion, a rappelé qu’il revenait à la justice de complètement laver l’honneur de son client. Selon Me Burguburu et Me Bénoit, condamner Sandra Muller est la seule façon de stopper la pire des délations: celle qui ment et qui fonctionne. Selon eux, Éric Brion ne peut être accusé de harcèlement au travail. Non seulement Sandra Muller ne travaillait pas avec lui, et quand bien même des propos déplacés auraient été échangés lors d’une soirée professionnelle à Cannes, pour qu’un harcèlement soit caractérisé, il faut qu’il y ait répétition, menace ou violence. Brion réclame 200 000€ de dommages pour préjudice moral et patrimonial, le retrait du tweet et des publications judiciaires dans la presse pour que son innocence soit portée à la connaissance de la société. A l’issue de l’audience, il a déclaré à Causeur être « serein ». Verdict attendu le 31 mars.

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[1] Précisons que Brion n’a jamais reconnu avoir prononcé ces mots. Tout juste reconnait-il s’être pris un mémorable râteau à la fin d’une soirée, et s’être excusé le lendemain de son indélicatesse.

[2] Muller avait affirmé à un moment avoir oublié pendant cinq ans le traumatisme qu’auraient représenté les mots de Brion à son endroit. Mais dans cette même période d’amnésie, elle menaçait Brion de parler s’il ne s’abonnait pas à la Lettre de l’audiovisuel qu’elle édite (1700€ l’année), dans un échange privé sur Facebook dont le tribunal a pu prendre connaissance.



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Rédacteur en chef du site Causeur.fr

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