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En 2027, tout ce qu’il ne faudra pas faire et être…

Le billet politique de Philippe Bilger


En 2027, tout ce qu’il ne faudra pas faire et être…
Emmanuel Macron le soir de son élection, au Louvre, le 7 mai 2017 © DAVID NIVIERE/SIPA

Avant même l’échéance de 2027, il convient de remercier Emmanuel Macron pour les enseignements qu’il prodigue, souvent contre son gré, depuis 2017. Grâce à lui on sait précisément ce que les futurs candidats à l’élection phare de notre vie démocratique devront ne pas faire, ne pas être.


Je parie – et j’espère – que la gauche et l’extrême gauche seront hors-jeu au second tour. Je rejoins Alexis Corbière qui a déclaré sur Sud radio que Jean-Luc Mélenchon, s’il était qualifié pour la joute finale, serait nettement battu par Marine Le Pen[1].

Le casting pour 2027 se précise

Je m’en tiendrai, même si la liste n’est pas exhaustive, à la « bataille qui vient » pour l’après-Macron, selon le titre du JDD (voir ci-dessous), et qui pourrait mettre aux prises Gabriel Attal, Édouard Philippe, Michel Barnier, Bruno Retailleau et Gérald Darmanin. Il convient d’y ajouter au moins Xavier Bertrand, David Lisnard et Laurent Wauquiez, le Rassemblement national étant assuré, autant qu’on peut l’être dans notre démocratie déboussolée, d’être présent lors de l’emballage terminal.

Aussi bien, tant lors de la campagne que du mandat présidentiel, il y a un certain nombre de commandements et de principes qui devront être respectés, la plupart à rebours de ce que le météore Macron, si décevant ensuite, aura diffusé depuis 2017.

Ras-le-bol des « révolutionnaires »

D’abord ne pas promettre la révolution. On n’en veut pas et elle tombe vite en quenouille si on y croit le temps d’une illusion.

Ensuite ne pas s’imaginer que président, on est devenu le roi du monde et qu’on doit traiter de haut tous ceux qui vous entourent, classe politique comprise dans toute sa palette d’opinions.

Préférer aussi les actes aux mots et ne pas multiplier les discours alternatifs, contradictoires ou flatteurs par démagogie ou par manque de convictions stables.

Admettre que la vertu essentielle est le courage. Si on l’a, la développer, l’amplifier, si elle manque, tenter d’en faire preuve, en souhaitant que la fonction vous transcende.

Ne pas flatter au-delà de toute mesure les dirigeants étrangers en traitant avec causticité son propre pays.

Ne pas compter sur sa seule séduction pour l’emporter dans les multiples rapports de force mondiaux que la France doit affronter. Elle ne sert à rien. Pendant que l’un fait le beau, les autres avec réalisme voire brutalité, sauvegardent leurs intérêts et gagnent leurs arbitrages.

Moins un pouvoir est ostentatoire, plus il est respecté

Ne pas prendre des décisions, nommer des proches ou choisir des ministres sous l’unique inspiration d’un désir de se distinguer même absurdement au lieu de, tout simplement, faire fond sur le bon sens, l’assentiment populaire, la compétence et l’honnêteté.

Refuser la vulgarité et privilégier l’allure, qui n’est ni repli sur soi et son pré carré ni surabondance narcissique et médiatique. Se rappeler que moins un pouvoir est ostentatoire, plus il est respecté. Que les Français aspirent à un président à la fois comme eux et le contraire d’eux : une personnalité digne d’estime pour tous même si sa politique ne plaît pas à tous.

Tenir ses engagements et ne pas considérer que les trahir relève seulement d’un pragmatisme intelligent : ce peut être l’effet d’un caractère défaillant, d’une personnalité peu fiable.

Honorer l’institution judiciaire même quand elle s’attache à vous-même, à l’un de vos proches, l’un de vos affidés. Accepter l’idée qu’exercer le pouvoir ne rend pas forcément la morale superfétatoire. La placer au centre de tout.

Ne pas attendre la fin de son mandat pour se réveiller sur le plan régalien. La France en péril n’est pas une expression toute faite : une réalité qui impose des armes autres que les hommages, les bougies, les marches blanches et les cérémonies post-mortem.

Ne pas confondre, dans la vie internationale, ses amis avec ses ennemis. Il y a des pays avec des défauts qui valent pourtant bien mieux que d’autres. On ne doit pas mélanger les boucliers avec les glaives.

Ne pas s’illusionner et se vanter d’avoir toujours raison, même en cherchant désespérément à justifier des choix politiques aberrants. Réfléchir d’abord pour ne pas risquer de les effectuer.

Ne pas être jaloux des personnalités qu’on a voulues auprès de soi et qui prennent trop la lumière, ne pas faire peser sur les ministres une responsabilité qui est la sienne. Ne jamais se laver les mains des fiascos qu’on a créés.

Ne pas songer dès le premier jour de son mandat au suivant : méthode redoutable pour faire échouer le premier et éventuellement le second.

Ne pas se laisser influencer par une épouse, un ami, des réseaux, des considérations délétères, ne pas avoir peur de ne compter que sur soi puisque la légitimité présidentielle n’a été dévolue qu’à vous.

À partir de tout ce dont Emmanuel Macron devra nous détourner, qui mériterait de l’emporter ? Il y a ceux clairement à laisser de côté, les faux durs, les vrais mous, ceux qui portent encore trop de leur passé dans le présent d’un côté. Et de l’autre ceux qu’on néglige, qu’on prend de haut, ceux qui ne sont pas obsédés par 2027 parce que l’état de la France est leur angoisse maintenant, tous les jours, ceux qui sont sincères quand ils affirment ne pas ressentir cette ambition pour le futur. Je vous laisse deviner.

Merci à Emmanuel Macron qui se voyait comme un modèle et finit comme un contre-exemple.


[1] https://x.com/SudRadio/status/1847172079759548881




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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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