Au lieu de stigmatiser les méchants nationalistes, Emmanuel Macron devrait faire son examen de conscience. Car c’est l’illusion d’un monde sans nations ni frontières, jadis entretenue par Blair et Clinton, qui plonge les peuples dans l’abîme.
Le débat public en France sur le populisme repose sur une alternative simpliste. D’un côté, les populistes sont ceux qui cultivent l’esprit de fermeture et de « haine de l’autre », la flatterie sans mesure des instincts de la masse, le simplisme, l’inconséquence et l’irresponsabilité. Au fond, le populisme, c’est inévitablement le chaos. Les « ouverts », les « diversitaires », les « postnationaux » seraient, de l’autre côté, les seuls acteurs capables de porter de manière réaliste l’intérêt national en préservant les acquis de la mondialisation et de la fédéralisation européenne. Les ouverts, c’est la paix.
Rejeter le mot « populisme »
Disons-le tout net : cette injonction à choisir l’un des deux camps est puérile et dangereuse. Elle insulte l’intelligence des Français et de ceux, au-delà de nos frontières, qui sont bien décidés à ne pas se laisser intimider. Le mot « populisme » lui-même pose problème et ne devrait pas être accepté. D’une notion bien identifiée par la science politique, les penseurs de l’époque ont fait un instrument d’assignation de toute pensée critique aux extrêmes. Les mots du débat sont ceux de nos adversaires.
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Nous refusons cette vision simpliste car les ouverts ne sont en rien responsables et clairvoyants. Ils sont au contraire porteurs d’un projet d’ouverture, mis en œuvre depuis trente ans, qui a partout mis en péril la démocratie. Ils ont créé les conditions du populisme en jetant les peuples occidentaux en pâture d’une mondialisation non maîtrisée génératrice d’inégalités extrêmes, de désindustrialisation et de désespoir pour des pans entiers de la société. Les Blair, Clinton, Strauss-Kahn des années 1990, dont Emmanuel Macron, loin d’être le porteur d’un « nouveau monde », est l’ultime avatar, sont les vrais responsables de la situation que nous vivons.
L’ouverture à la folie
Leur vision ouverte était littéralement révolutionnaire. Comment caractériser autrement l’idée folle de forger un monde sans frontières, une humanité nouvelle de nomades déracinés et faite d’un mélange infini de cultures et de peuples, un marché unifié ultra concurrentiel élargi à l’échelle de la planète entière, tandis que les États nationaux seraient vidés de toute substance ? La civilisation occidentale avait prospéré dans l’écrin national et fait émerger, patiemment, un mode ordonné de vie collective et de solidarité. Quelques décennies ont suffi pour menacer ces acquis.
Condamner par principe tous ceux qui s’opposent aux ouverts, en les désignant comme les « populistes », revient donc à refuser le débat sur le bilan des trente dernières années.
Certes, la référence au passé est utile quand elle permet de mettre en garde contre les dangers extrêmes du populisme, au sens originel du terme. Les régimes fascistes européens ou populistes d’Amérique latine nous ont vaccinés contre trois dérives inadmissibles : la violence comme instrument politique, le racisme comme doctrine et le socialisme comme mode de gestion de l’économie. Pour les générations européennes présentes, l’attachement à la démocratie politique, à la paix civile et au libéralisme économique est une ligne rouge.
Une fois ces lignes tracées, il est temps de reconsidérer le vaste espace politique qui reste à explorer, entre les extrémistes de l’ouverture et les totalitarismes du passé.
La nation est notre héritage le plus précieux
L’exigence de notre époque est d’apporter une réponse viable à la fuite en avant des ouverts, tout en refusant de tomber dans un populisme au sens originel du terme, qui rime avec irresponsabilité. Cette réponse est à chercher du côté des principes qui sont au fondement de notre civilisation française et européenne. Pour nous, il en existe trois.
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D’abord et surtout, la réaffirmation de la nation comme cadre de référence de toute action politique. La nation est notre héritage le plus précieux et son abandon est à la source de tous nos maux. Sans nation, pas de démocratie vivante, pas de solidarité réelle et pas de vie collective active. Sans nation, pas de frontières, donc pas de sécurité. Sans nation, pas d’État puissant capable de limiter le pouvoir de l’argent, pas de saine concurrence et pas de justice. L’Europe n’a pas attendu les fédéralistes pour exister et rayonner de toute la diversité de ses nations. Elle ne progressera pas dans le monde qui vient sans un réarmement moral, économique et politique de chacune d’entre elles reposant sur leurs fondations millénaires. Penser fabriquer une puissance européenne en niant les nations et en les fusionnant dans une purée de pois postnationale est une vision d’illuminé. On peut croire à la nation sans être démagogue et xénophobe. La nation est une solution réelle au populisme, car elle offre des institutions saines pour donner la parole au peuple sans tomber dans la déraison. Nos dirigeants sans mémoire l’ont simplement oublié et renoncé à tout esprit de nuance.
La liberté dévoyée
Ensuite, la liberté, dans un cadre national assuré, comme l’exigence absolue de toute politique. Là encore, la liberté politique, la liberté économique et plus généralement les libertés publiques sont un héritage fondamental de l’histoire européenne. La liberté de nos ouverts a perdu toute substance. Nous vivons une époque de liberté individuelle en apparence sans limite (la PMA étant la nouvelle frontière de cette extension du domaine des droits individuels), mais que vaut-elle face à la rétractation de nos libertés collectives ? L’abandon de la nation place nos collectivités humaines sous la coupe du pouvoir débridé des grandes entreprises mondialisées, des GAFA, des techniciens non élus des instances internationales et des grandes puissances étrangères. Où sont les marges de manœuvre collectives du peuple français dans le monde qui vient, maintenant que l’État-nation a été dévitalisé et que l’Europe-puissance promise par nos ouverts n’est en réalité que l’adjuvant des puissances de l’argent ? Pour redonner une substance aux libertés politiques et aux libertés économiques, il faut des frontières qui assurent la sécurité, et un État fort capable de défendre le faible face au fort. Ces leçons de l’histoire, les ouverts les ont aussi oubliées. Le populisme qui effraie Macron voudrait-il redonner au peuple une liberté réelle en ayant de nouveau prise sur le monde ?
Marchez aussi vite que nous galopons
Enfin, le travail et le mérite comme valeurs cardinales de la société. Tout le monde a compris que la France et l’Europe doivent aujourd’hui se remettre au travail et retrouver des valeurs d’effort pour compter dans la compétition mondiale face à l’Asie et à une Amérique qui reste toute puissante. La période de l’expansion sans fin des prélèvements obligatoires et de la redistribution sans limites est finie et emporte avec elle la social-démocratie. Les mondialistes de tout poil n’ont pas peur de demander aux classes populaires et aux classes moyennes occidentales de s’adapter à marche forcée à un monde farouchement concurrentiel et dur aux faibles. Le macronisme n’a pas de mots assez durs pour les petits Blancs accusés de fainéantise, incapables de se rendre mobiles pour traverser la rue et trouver un emploi… Cette arrogance des élites crée le populisme. Elle rend odieux aux peuples des dirigeants donneurs de leçons, capables par ailleurs d’une mansuétude infinie pour les minorités promues au rang de victimes d’une société injuste.
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La nation, la liberté, le travail ne sont pas des valeurs « populistes ». Elles sont pourtant combattues par les mondialistes. Ce sont ces valeurs qui sont porteuses d’un avenir pour la France fidèle à sa nature et son histoire. Il faut refuser qu’elles soient prises en otage par la tactique macroniste et refonder sur elles une famille politique qui n’aurait pas dû cesser de les défendre.
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