Pour la première fois, en droit français, la filiation reposera sur la seule volonté et non plus sur la biologie. « Une révolution qui fera date » a affirmé Nicole Belloubet. La filiation d’un enfant né de PMA d’un couple de lesbiennes avait pourtant de quoi tourner au casse-tête…
Macron est dans une impasse. On a beau déclamer que l’heure de l’acte II du quinquennat a sonné, les journaux disserter de la verticalité plus souple de Macron et, même si son pas de deux séduit encore les dames, le quinquennat est en panne. Il y a le problème des retraites qu’il n’aborde pas frontalement, la réforme de l’Etat, les urgentistes, les gilets jaunes. La croissance qui décroît et les chômeurs qui chôment. Les femmes qui se font tuer par leur conjoint. Bref, le climat social est détestable. Même si (ou parce que) l’opposition rejoint son camp, il y a une paralysie politique. Certes, à partir du 6 octobre, le centre de Paris deviendra piéton, le premier dimanche de chaque semaine, afin de faciliter les grandes manœuvres à venir. N’empêche: la seule carte que notre maître des horloges peut jouer, c’est la diversion. Traîner en longueur la réforme des retraites avec la promesse de « débats. » Or, une affaire est là, cuite à point, pour combler le vide et échauffer les esprits. Le temps est venu de sortir la carte de l’As de Cœur.
Le signal fort de Nicole Belloubet
Le 10 septembre, donc, Madame Belloubet donne « un signal fort » en annonçant, à l’Assemblée, une victoire sans précédent de l’égalité des femmes. Pour la première fois, en droit français (roulement de tambour) la filiation reposera sur la seule volonté et non plus sur la biologie, là où la vraisemblance biologique ne peut, à l’évidence selon le Garde des Sceaux, pas jouer. Rien de plus ne sera donc demandé aux lesbiennes que la volonté de s’engager dans un projet commun.
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Ce même jour, et en même temps, filtre, dans les médias, la nouvelle que serait rendue obligatoire « la retranscription des enfants nés par GPA à l’étranger. » La fameuse circulaire Taubira de 2013 arrive donc « dans les tuyaux ». La rumeur court et enfle. Sauf qu’une circulaire n’est pas une loi. Mais « Patience, mon cœur » comme dirait Ulysse dans l’Odyssée.
Scène 3 : rétropédalage d’un porte-parole présidentiel : cette reconnaissance ne se ferait pas à n’importe quelle condition. C’est le remake du coup d’éclat de Schiappa, pointant, dans Valeurs Actuelles, en février dernier, une accointance entre les propos des islamistes et de LMPT. Aussi, le soir, à l’Assemblée, sur l’air des « Barricades mystérieuses » de Couperin, la Garde des Sceaux « recadre le débat ». Mais le buzz est lancé : dans les médias, on ne parle que de la GPA. A l’émission de Cnews, sont réunis Albéric Dumont, Caroline Mécary, l’avocate des LGBTQI bien connue des téléspectateurs, qui balaie, comme toujours, en bonne juriste, l’intérêt de l’enfant d’un revers de main : pour Madame Mécary, l’indignation a toujours tenu lieu d’argumentation. Les deux membres de gouvernement, présents, orphelins de naissance ou enfants trouvés, prônent la GPA pour les enfants, objets non identifiés, venus d’ailleurs, dans notre belle terre de France.
Aujourd’hui, c’est déjà demain
La langue orwelienne est formidable. La « sécurisation du lien de filiation » et « la vraisemblance biologique » ainsi que la modélisation « à l’évidence » sont des trouvailles juridiques ! On se souvient que, lors du Grand Débat à l’ Elysée, Madame Théry, professeur du droit de la famille à l’EHESS, avait plaidé pour une « distinction de sexe entre personnes du même sexe » ce qu’elle appelait : la « civilité sexuelle ». Suggérons cette idée à l’historien Ivan Jablonka pour l’invention de nouvelles masculinités dont il vient de donner une fresque allant du néolithique à nos jours.
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La PMA est donc bien le seul sujet où LREM n’est pas dans une « impasse » mais dans sa politique des « petits pas ». L’essentiel du buzz était de faire « passer » l’idée de la PMA pour lesbiennes en détournant l’attention sur la GPA : technique du discours bien connue.
Caroline Mécary a gagné
Va-t-on remplacer la famille traditionnelle par la famille contractuelle comme le prophétisait Dean Spielmann, l’ancien président de la CEDH ? Pour Caroline Mécary, l’heure de gloire serait-elle arrivée ? Quand « les forces réactionnaires vont-elles céder le pas au jour où tout sera permis ? Pour notre bonheur… Quand l’absence de père sera-t-elle institutionnalisée ?
En attendant, est-ce bien moral d’avoir abusé si longtemps de la bonne foi de beaucoup de Français ?
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