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PMA/GPA: l’enfant pour tou·te·s est arrivé!


PMA/GPA: l’enfant pour tou·te·s est arrivé!
"Bruno" avec Sacha Baron Cohen.

L’enfant de l’amour est de retour : le serpent de mer. Corrigeant la communication exaltée de Marlène Schiappa, le Premier ministre a annoncé récemment que le gouvernement profiterait de la révision de la loi de bioéthique de 2018 pour y inclure la PMA pour tous, ouvrant ainsi la voie à la GPA. Ce qui s’appellera faire d’une pierre deux coups. Merci à notre revue préférée de nous offrir, ce mois-ci, un avant-goût du match inédit à venir, avec  la photographie de la gaie farandole d’Anne, Jack et les autres, à la frimousse épanouie, tenant une banderole qui vaut son pesant d’égalité, de fraternité et de constitutionnalité : « PMA Filiation Egalité. »[tooltips content=’Voir Causeur n°50, octobre 2017, page 25′]1[/tooltips] Macron ne lâche rien. Les « bioconservateurs » non plus. A vos marques !

Et Taubira créa le mariage pour tous

Cette loi à venir s’inscrit dans le long temps. Le très long temps. Des millions d’années après le Big bang originel, on tombe sur Homo sapiens. Passons les étapes suivantes. En  un tour de cuiller à pot, autre big bang : l’ère Taubira, inaugurée par Amandine, avec l’homo sexualis sexualis. Plus besoin de copuler à l’ancienne, sur un lit de bruyères fossilisées, avec un partenaire d’un autre sexe. On est père et/ou mère (inclusion oblige) par action, par intention et par omission. On s’y… perd un peu mais comptons sur la chambre incubatrice de cerveaux pour nous y retrouver. Ce sera du lourd. Avec ce saut anthropologique, impossible de revenir en arrière. On ne sait pas trop pourquoi mais c’est ainsi. Aussi bien Madame Taubira avait-elle salué dans le « mariage pour tous » non seulement une révolution (c’est dans nos gènes) mais l’avènement d’une nouvelle civilisation.

Le mariage, c’est le mariage. Autrefois, dans des temps très anciens, l’impuissance était une cause de nullité. Mais ça, c’était le code Napoléon (un sacré machiste). Nos mariés de l’ère I, on ne peut dire que, s’ils sont heureux, on puisse leur souhaiter, pour l’instant, beaucoup d’enfants.

La technique au service de l’infécondité

Pour pallier cette infertilité sociale et/ou culturelle, l’homo sapiens sapiens a bien inventé des techniques opérationnelles depuis pas mal de temps, en attendant le droit opposable de l’enfant. Seulement voilà, ces moyens de production ou de reproduction restent à voter chez les primates que nous sommes et cette loi, ne nous le cachons pas, aura forcément une incidence sur le panier de la ménagère. Les gamètes, c’est comme les ortolans, c’est rare et cher. Le marché, il est vrai, s’avère de plus en plus juteux. Qui veut des gamètes ! Achetez mes gamètes ! Pour un p’tit gars tout frais, tout beau !

Madame Taubira avait l’art du verbe (dont n’a pas hérité son émule). On se souvient de ses élans poétiques à la Chambre des députés qui lui avaient valu, dans l’hémicycle, des éloges unanimes. Elle avait réuni les représentants des sept cultes (un chiffre sacré ?) et leur avait dit avec pertinence : « Le Code civil n’est pas votre champ. Ce n’est ni la Bible ni le Coran ni la Torah ». Fermez le ban. Tant il est vrai que l’ère de la Révolution française n’est jamais close. Et les muphtis de partir tout penauds. Madame Taubira avait dit aussi un jour : «  Qu’est-ce que la sexualité ? Seulement la reproduction ? » Là, pas besoin d’être grand muphti pour dire que ça y aide quand même un peu. Napoléon affirmait que ce qui resterait de lui, ce n’était pas Austerlitz mais son Code civil. Napoléon est un fils aléatoire de la Révolution et le nouveau Code civil achoppe sur la voie naturelle. A moins de passer au forceps, faire des enfants à plusieurs et les enregistrer sur un code de nationalité, ce n’est pas simple comme bonjour. En attendant que Marlène garde son sang-froid! La France n’est pas encore dans la rue.

Un saut anthropologique

Pour arriver à ses fins, que ne ferait l’espèce ? L’être humain ne cesse de jouer sur les deux tableaux de la nature et de la société. On comprend que le monde puisse être classé en « bioconservateurs » et les autres, adeptes de la révolution anthropologique. On peut dire aussi que, s’il y a, pour certains, une origine divine à la loi naturelle de la procréation, force est de reconnaître que cette loi l’emporte par sa simplicité sur une procréation assistée où les humains besognent à qui mieux mieux et plutôt mal que mieux, faute de l’outillage requis. La Nature fait efficacement les choses, avec le minimum de moyens et sans tralala. Economie non négligeable dans cette période de crise que nous vivons dont la Sécurité Sociale est la première victime. Avouons-le aussi. Tous ces débats procréatifs n’entravent-ils pas la joie de vivre nécessaire à la fertilité d’une nation ? Nul doute que des études démographiques très sérieuses vont le prouver prochainement. Dans ces conditions, invoquer un saut anthropologique irréversible est peut-être aller vite en besogne. Le calendrier révolutionnaire a duré treize ans. Un recul s’imposerait de quelques années lumière sur ce saut anthropologique avant de l’inscrire dans une loi.

La manif pour tous diabolisée

Quand il y a eu les manifs contre le mariage pour tous, que n’a-t on dit dans les médias télévisuels et les autres sur l’homophobie des manifestants ! Ce fut une accusation récurrente et indigne. Alors que les médias et les gens avertis savaient pertinemment que le Pacs ouvrait sur le mariage et tous ses droits. Et que le mariage entraînerait l’ouverture à la PMA et la GPA. On y est. Elisabeth Schemla l’écrit explicitement dans son dernier livre : « Les associations LGBT et homoparentales, un lobby gay surtout parisien relayé par la gauche, savaient pertinemment ce qu’ils enclenchaient. S’ils n’avaient pas eu d’arrière-pensée concernant la légalisation de la PMA et de la GPA, ils n’auraient pas réclamé le mariage… ». C’est on ne peut plus explicite. Réécoutons sur You Tube  l’émission de LCP, en date du 21 décembre 2012 sur le Pacs. Jean-Luc Romero  y dit en rigolant combien ses amis et lui rigolaient justement qu’on se moquât de Boutin laquelle avait raison de dire que le Pacs était la porte ouverte au mariage. « Bien sûr qu’elle avait raison.. » dit-il mais, dit-il encore : « On va dire tout le contraire devant les médias… Bien sûr qu’on rigolait. »  On imagine ce que ça doit être maintenant.

Tout enfant a une mère

Le temps est donc venu de la démystification pour tous, en tout. Tout le monde le sait bien : personne n’a deux mères, deux pères, une maman 1 et une maman 2, un père biologique et un père d’intention, sauf métaphoriquement où tout est permis : même un père spirituel si vous le désirez. Un enfant né par GPA d’un père – fût-il très célèbre – a une mère : la femme qui l’a porté. Qu’on le veuille ou pas, qu’on le dise ou non. Car personne ne peut aller contre le principe de réalité. C’est se moquer que de faire croire à une autre filiation décrétée en l’an de grâce 2013. Comme ils doivent encore plus se marrer, en effet, de nos  états d’âme et de conscience et de nos procédures, ceux qui militent pour les lois sur la PMA et la GPA !  « Patriotes ! Faites des enfants ! » lisait-on en lettres noires, il n’y a pas longtemps, sur les murs des maisons et sur le bitume. Faites des enfants par la voie naturelle, efficace et rentable ! Le Grand Marché vous tient par la barbichette ! Ne vous laissez pas faire ! Ne nous cassons pas la tête ni la tirelire de l’Etat !

Allons voir chez les Grecs

Oedipe n’est pas l’homme du divan mais celui qui veut savoir son origine. Antigone, c’est celle qui, adepte de la ligne rouge, fait prévaloir, quoi qui lui en coûte, la loi de sa conscience, en enterrant son frère malgré le décret de Créon. Le philosophe Diogène, se promenant sur l’agora avec une lanterne, répondit à celui qui l’interrogeait : « Je cherche un homme » ( au sens 1 du Dictionnaire de l’Académie Française). Récemment, à la Bibliothèque Médicis, Eva Ionesco, présentant son livre, disait sa joie d’avoir retrouvé sa  filiation paternelle.

Tous les grands écrivains, parce que c’est l’honneur d’être un homme, se sont aussi posé la question : qui suis-je ? D’où suis-je venu ? Où vais-je ? Sans ces questions et des réponses dignes d’elles, on peut faire de l’homme, avec l’homme, tout ce qui  possible. Il y a pourtant des lignes rouges à ne pas franchir.

Chaque époque connaît la tentation d’une idéologie. Au lieu de croire que nous réinventons la machine à vapeur, débusquons dans cette idéologie de la filiation fictive une loi du marché ultralibéral, à l’œuvre, en ce moment, dans notre pays même. Ce serait étrange de parler des idéologies mortifères des siècles passés et de ne pas voir celle qui crève nos yeux ! On ne peut pas dénoncer l’ultralibéralisme là et l’accepter ici. Comme le dit très justement Virginie Tellenne alias Frigide Barjot : « La procréation, avec les technologies et les géants économiques qui en sont les maîtres, est devenue l’otage du marché mondial de l’ultralibéralisme. » Ces lois sociétales sont tout simplement des lois du marché que nous refusons de nommer parce qu’il faudrait nous tirer de notre aveuglement ou de notre confort.

Fils de personne

Faisons un rêve. Un jour, Zeus eut mal à la tête. Il demanda à Héphaïstos de le soulager. Héphaïstos lui donna un grand coup de hache sur la tête. Athéna, déesse de l’intelligence, en sortit toute casquée et lui dit : «  Seigneur Zeus, tout le monde est dingue ! L’ère de la PMA et de la GPA est dépassée. L’avenir est à l’artefact. Il faut faire des enfants par la tête ». Jupiter se réveilla, prit les drapeaux français et européen, s’en enveloppa et entonna l’hymne de Johnny Hallyday pour conjurer les démons ambiants : «  Y en a qui sont nés dans les plis du drapeau / Pas moi. Avec dans leur berceau les milliards de leur père / Pas moi. On leur apprend que tout peut s’acheter. / Pas moi.  Je suis fils de personne. »`

Jupiter leva les yeux sur Marlène, plantée devant lui, hors d’elle, qui lui demandait d’accélérer le mouvement législatif. « Keep quiet, Marylin ! »  lui dit-il. Le soir, il ouvrit le roman de Montherlant placé sur sa table de chevet par Brigitte : Fils de personne, où il lit qu’un enfant, c’était pas de la tarte – et le président s’endormit du sommeil du juste. C’est ainsi que Jupiter renonça à la PMA et à la GPA pour tous et qu’il laissa son nom dans l’histoire de France.

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Marie-Hélène Verdier est agrégée de Lettres classiques et a enseigné au lycée Louis-le-Grand, à Paris. Poète, écrivain et chroniqueuse, elle est l'auteur de l'essai "La guerre au français" publié au Cerf.

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