Fair-play financier : le foot fait machine arrière


Fair-play financier : le foot fait machine arrière

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La toute-puissante Union des associations européennes de football (UEFA), qui organise les compétitions européennes de clubs, dont la prestigieuse Ligue des Champions, prépare depuis plusieurs mois une réforme d’envergure nommée « fair-play financier UEFA ». Concrètement, Michel Platini -son président -s’est mis en tête de sanctionner les clubs « qui vivent au-dessus de leurs moyens ». Derrière ces formulations empreintes de bon sens, se cache une réalité qui semble quelque peu anachronique vingt ans après l’adoption de l’arrêt Bosman.

Pour rappel, l’arrêt délivré par la CJCE en 1995 créait une jurisprudence permettant la libre-circulations des sportifs professionnels en Europe, en vertu des accords de Schengen. Un virage libéral subi par le football. Les clubs européens étaient précédemment soumis à une limite de 3 joueurs étrangers par équipe, ce qui permettait aux championnats nationaux de conserver dans leur giron les grandes stars du cru.

Depuis lors, et sans pouvoir en prêter (ou imputer) à cet arrêt toutes les causes, les revenus du sport le plus populaire de la planète ont explosé. Pour faire bref, une élite européenne s’est constituée, creusant un écart insurmontable pour les clubs formateurs qui ne peuvent plus retenir leurs jeunes talents, pressés de se vendre aux plus offrants. Ensuite, vint l’augmentation des droits télés pour ces championnats plein de stars où la notion de spectacle, sans tomber dans la caricature, se substituait peu à peu aux vertus traditionnelles du sport.

Michel Platini, depuis son accession à la tête de l’UEFA, a cherché diverses solutions pour contrecarrer les effets négatifs de cet arrêt Bosman. Un temps, il appela même de ses vœux la mise en place d’une « exception sportive » qui devait instaurer ce qu’il appelait le « 6+5 » soit l’obligation pour les équipes d’aligner 6 joueurs nationaux minimum. Un projet pour lequel Platini était allé jusqu’à convaincre le président Sarkozy et le premier ministre Gordon Brown mais s’était heurté à une telle levée de boucliers que ce 6+5 fut enterré, en grandes pompes, lors du sommet de Biarritz en 2008 (réunissant les 27 ministres des sports européens) sans que personne ne s’en émeuve vraiment.

Si l’arrêt Bosman était une conséquence de Schengen, ce fair-play financier poursuit un dessein qui ne se dit probablement pas. L’UEFA, inquiète des dérives de clubs devenus exsangues financièrement veut stopper cette tendance à l’endettement. Ainsi on pouvait s’attendre à ce que les clubs espagnols, qui ont contracté des dettes record (Atletico Madrid et ses 500 millions d’euros de créance par exemple) soient inquiétés. Ce qui aurait été le cas dans le championnat de France, où la DNCG (direction nationale du contrôle de gestion) sanctionne l’endettement. Pourtant, la finale de la Ligue des Champions opposait cette année l’ « Atleti » à son voisin madrilène, le mythique Real Madrid, qui sur ce terrain aussi triomphe de son voisin avec ses 540 millions d’euros de dette. Et l’UEFA n’y trouve rien à redire.

Car plutôt que d’attaquer de front un problème vieux de dix ans, l’UEFA décide de se concentrer exclusivement sur d’hypothétiques futurs endettements. Un leurre car l’association ne se contente pas d’interdire la possibilité de s’endetter désormais mais prohibe en plus le mécénat des propriétaires de clubs.
Ainsi, le PSG, récemment auréolé de son deuxième titre consécutif de champion de France, attend fébrilement des sanctions (qu’il continue de négocier) qui seront officialisés dans les prochains jours. Il n’est pas reproché au club de la capitale une quelconque dette (n’est-ce pas l’intention de départ pourtant ?) mais le fait de dépenser de l’argent qu’il ne génère pas.

Le PSG bénéficierait en effet, selon l’instance, de largesses immorales de son actionnaire, le prince du Qatar. Coupable d’avoir investi de sa poche plus que la nouvelle limite ne l’y autorise (fixée à 60 millions d’euros par an), il est reproché au club d’avoir contrevenu à l’équité du sport. Plutôt cocasse quand on sait que ces directives sont avalisées (si ce n’est pilotées) par quelques clubs parmi les plus endettés de la planète – on peut en effet rajouter aux clubs susmentionnés le FC Barcelone ou bien encore des clubs anglais comme Manchester United (450 millions d’euros environ) ou Liverpool (100 millions) -. Ceux-là sont jaloux de leur place de nantis du football et se frottent les mains devant le zèle de l’UEFA qui semblent vouloir figer les positions en bloquant l’investissement. Une politique interventionniste qui rapproche le football professionnel des Etats-Unis en instaurant officieusement une ligue fermée continentale semblable à la NBA.

Photo: BEBERT BRUNO/SIPA. 00676852_000010.



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