Le socialiste, ancien commissaire européen et ancien ministre de l’Économie de Hollande, prend la suite de Didier Migaud. Il aura tout loisir de critiquer ses petits camarades qui lui succèdent aux destinées économiques de l’hexagone. Une promotion méritée.
En ce dimanche de Pentecôte, alors que des familles innocentes se retrouvaient pour la première fois depuis des mois devant un barbecue, les portables se sont mis à vibrer entre la merguez et la côtelette. Une alerte – de l’appli du Figaro, s’agissant de votre serviteur – leur apprenait la nouvell : Emmanuel Macron proposait à Pierre Moscovici de prendre la tête de la prestigieuse Cour des Comptes.
Le peuple n’attendait que ça
On imagine les vivats dans tous les foyers ayant reçu la nouvelle. Bravant la distanciation physique, et toutes les mesures barrière, des chenilles ont été improvisées autour des tables. En Corse, des concerts polyphoniques ont résonné pour rendre hommage à Moscovici qui a épousé l’une des enfants de l’Ile de Beauté. Dans le pays de Montbéliard, sa terre d’élection, un embouteillage géant de Peugeot bigarrées a bloqué toute l’agglomération. Parfois des hommes faisaient hurler des cornes de brume, assis sur le toit de leur véhicule. On a même vu des femmes tomber le soutien-gorge du côté du Parc des miches. L’une d’elle avait écrit « Love Mosco » au rouge à lèvres sur sa poitrine généreuse. Rue Cambon, là où siège la Cour des comptes, créée par l’Empereur en 1807, de jeunes énarques fraichement émoulues ont fait le déplacement dominical afin de décrocher le portrait de Philippe Séguin dont elles avaient orné leur bureau, pour le remplacer par celui du nouveau guide spirituel. Partout en France, et même à Bruxelles et à Athènes, des petites gens sont venues se rassembler sur les places de leurs villes, de leurs villages, afin de communier autour de cette bonne nouvelle.
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Le lecteur l’aura compris. Le paragraphe qui précède est une fiction. Toute ressemblance avec des événements, existants ou ayant existé etc. En fait, Pierre Moscovici n’a jamais vraiment passionné les foules. Il se dit même que les foules répriment un bâillement lorsqu’il passe à la télévision. Les moins indifférents soulignent sa ressemblance avec Alain Juppé, dont il partage la calvitie et la sûreté d’être supérieur à son prochain. En beaucoup moins travailleur, certes – rendons justice à l’ancien maire de Bordeaux sur ce plan. Comme Juppé, il n’a pas un gramme d’humour sur lui. L’an dernier, nous avions osé une blague sur le réseau Twitter. La rumeur publique faisait état de sa volonté de mener la liste socialiste aux européennes. Nous avions alors évoqué l’idée qu’il était ainsi missionné par la Commission européenne pour faire passer le PS dans la limite des 3%. Il n’a pas aimé et a cru bon de manifester auprès de moi sa profonde désapprobation.
Pas toujours là pour soutenir Sochaux
En nommant Pierre Moscovici à la Cour des comptes, Emmanuel Macron a-t-il souhaité montrer le peu de considération qu’il avait à la fois pour la Cour et pour l’ancien commissaire européen ? On peut légitimement se poser la question. Quelle trace laisse en effet l’ancien ministre de l’Économie de François Hollande dans l’histoire politique française ? Il n’a jamais roulé qu’à l’arrière de véhicules conduits par un chauffeur. Retournons un instant du côté de Montbéliard dont il a cherché, en vain et à deux reprises, de prendre la mairie. S’il a pu diriger la communauté d’agglomération, c’est en se cachant à la troisième place d’une liste à Valentigney, comptant ainsi sur le basculement à gauche de la cité montbéliardaise, obtenue par un camarade qui avait réussi là où il s’était cassé les dents. Quant à ses performances aux législatives, elles n’épatent pas davantage. Dans une circonscription taillée sur mesure pour la gauche, celle de Huguette Bouchardeau, il a réussi à perdre à deux reprises (1993, 2002) la gagnant trois fois (1997, 2007, 2012).
Il aurait bien voulu aussi prendre la Franche-Comté aux régionales. Il n’y est jamais parvenu. Que Dieu en soit remercié ici. Cette Franche-Comté qu’il a laissé tomber comme une vieille chaussette lorsqu’il se décida à guigner le poste ô combien rémunérateur de commissaire à Bruxelles. Cet été 2014, alors que les élus socialistes du Pas-de-Calais exerçaient une pression amicale sur François Hollande afin qu’il favorise le RC Lens, que les instances financières du football jugeaient inaptes à la Ligue 1, on aurait souhaité que son ancien ministre et directeur de campagne exerce la même pression en faveur du FC Sochaux. Il fut aux abonnés absents.
Mon dernier billet
Pierre Moscovici va donc présider la Cour des comptes. Il aura son moment de gloire chaque année en critiquant vertement ses successeurs à Bercy, dispensant ses leçons, lui qui a tant réussi au poste de ministre de l’Économie. Il faut quand même une certaine dose de cynisme et le cœur bien accroché pour nommer un tel oiseau à ce poste. Après cette nomination, Emmanuel Macron devrait avoir interdiction d’employer une seule fois le mot « méritocratie ».
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Pierre Moscovici fut aussi un anti-héros parfait de mon premier roman. Être un héros romanesque – même anti – une seule fois dans sa vie, fut un titre de gloire inespéré dont il ne manifesta pourtant pas la moindre reconnaissance. Le hasard veut également qu’il soit l’objet de mon dernier papier dans les colonnes de Causeur.fr. Je ne les quitterai pas sans remercier tous les fidèles lecteurs qui m’ont lu pendant plus de onze années. Je ne les quitterai pas sans remercier les rédacteurs en chef web à qui je soumettais mes papiers : Daoud, Pascal, Gérald, Kévin et Martin. Je ne les quitterai pas sans remercier celui qui m’avait proposé d’y entrer, François Miclo. Sans remercier, last but not least, Gil Mihaely et Elisabeth Lévy.
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