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Phryge et la femme olympique

«Citius, Altius, Fortius, Utérus»


Phryge et la femme olympique
Présentation des mascottes à la conférence de presse du 14 novembre 2022 / PHOTO : Gabrielle CEZARD / SIPA/SIPA / 01094203_000018

Toujours à l’avant-garde des sans-culottes, combats féministes, corps libérés, Libération s’enthousiasme pour la mascotte des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 : une joyeuse Phryge, rouge tomate, en forme de bonnet phrygien. Identification d’une flamme.


On ne la fait pas à Quentin Girard, Sextus Emplirictus Wokus, qui touche au but du premier coup. Il a lu Freud, connait les rhizomes, s’est fendu d’un édito encomiastique et désirant, le 14 novembre. En français dans le sexe, la desfesses de la pensée : « JO 2024 : vive les Phryges, les mascottes clitoris qui en mettent plein la vulve ». « Si les mascottes officielles des Jeux de Paris évoquent le bonnet phrygien porté par Marianne, nous sommes nombreux à y avoir vu autre chose : un clitoris. Et c’est une bonne nouvelle. […] Tout rouge et tout mignon. D’un point de vue anatomique il semblerait que, collectivement, on ait enfin compris à quoi cela ressemble… L’assurance de jeux plus joyeux. D’un point de vue politique, il n’est ainsi pas désagréable que Paris se détache de sa sempiternelle tour Eiffel phallique. Mettons enfin de côté son bout piquant, pour une représentation de la capitale à la fois révolutionnaire, féministe et sensiblement plus collective… ». La bonne nouvelle et les jeux joyeux ravissent la Mère Duchesne, Madame Sans-Gêne, Olympe de Gouges, Marie-Antoinette, le comte de Fersen et Alfred Kinsey.

Les statistiques de Brassens, – vieux célibataire non déconstruit, sensible aux charmes des Dames du temps jadis, des belles passantes entrevues, de Jeanne et Fernande – invitent à la modestie: « La femme qui possède tout en elle ; Pour donner le goût des fêtes charnelles ; La femme qui suscite en nous tant de passion brutale ; La femme est avant tout sentimentale ; Main dans la main les longues promenades ; Les fleurs, les billets doux, les sérénades ; Les crimes, les folies que pour ses beaux yeux l’on commet ; La transportent, mais… Quatre-vingt-quinze fois sur cent, La femme s’emmerde en baisant ; Qu’elle le taise ou le confesse ; C’est pas tous les jours qu’on lui déride les fesses… ».

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Les misandres macastratristes, Érinyes, spécieuses ridicules, poussent le bouchon plus loin. Alice Coffin court deux lèvres à la fois, célèbre le génie lesbien descendu et aimerait que Phryge nous délivre du porc de l’angoisse, du mâle. Attention – Mes filles, ma bataille – à ne pas mélanger les organes sans corps, les Corps sans Organes (chers à Deleuze et Artaud) et les Cons sans Orgasmes. Les déclics, les extases, épectases, transverbérations, le Château intérieur, se nichent aussi dans la tête, dans le cœur d’Angèle de Foligno, Catherine de Sienne, Thérèse d’Avila, chapelle Cornaro de Santa Maria della Vittoria, à Rome.

Les Latins ne pensent qu’à cela et les Françaises ont une réputation à défendre. Après Brigitte, célébrée au faîte de sa gloire il y a soixante ans par Dario Moreno, en 2024 : « Phrygide Bardot, Bardot… ». Le désir s’accroît quand l’effet se recule. Les Monologues du vagin sont célèbres, Ramón Gómez De La Serna honore les Seins, mais l’organe féminin triomphateur, aujourd’hui, c’est le clitoris. Pas un jour sans une nouvelle grande enquête approfondie de Marie-Claire, la Revanche du clitoris, son Histoire politique, une cartographie de l’intime dans Maxi, Modes et Travaux, moult analyses spectrographiques en 5 dimensions des milliers de capteurs sensoriels du petit magicien, très innervé et vascularisé : ses ramifications s’étendent du lobe de l’oreille aux doigts de pieds, pour le plus grand plaisir de Phryge, ses copines, les vaincus de son cœur, les Dieux du stade O, A, G.

La première mascotte olympique – non officielle – c’était le skieur Schuss, aux JO de Grenoble, en 1968. Depuis cinquante ans, Misha, Bing Dwen Dwen, Phevos et Athena, Haakon et Kristin, une farandole de Marsupilamis improbables, ratons laveurs iroquois, pandas bienveillants, castors sympas, grizzlis végétariens, transmettent les valeurs de l’esprit olympique : l’excellence, l’amitié, le respect, le fairplay, d’Athènes à Chamonix, en passant par Berlin, Moscou et Pékin. L’essentiel, c’est de participer.

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On doit la célèbre devise olympique Citius, Altius, Fortius au prêtre dominicain, Henri Didon. Le patronyme oblige. Reprise par le baron de Coubertin en 1894, elle a été complétée l’an dernier : « Plus vite, plus haut, plus fort ensemble ». L’école des flammes : 10/10 et médailles d’or pour tous aux Jeux olympiques divers.

Après l’effort, le réconfort. En apothéose de la cérémonie de clôture de 2024, java inclusive, tango fusionnel, explosif, entre Phryge l’allumeuse et le flambeau olympique. La forme phalloïde de ce dernier n’aura échappé à personne. Est-ce une bonne nouvelle ? Cœurs lourds, corps sourds, doigts gourds, les fillettes et les hommes s’abusent. Ils ont pâle mine. L’érogène est fatigué, les mâles en panne n’ont plus la forme olympique. La concentration moyenne de gamètes dans le sperme a diminué de moitié depuis cinquante ans. Moins vite, moins haut, moins fort… « Tout s’en va, les plaisirs et les mœurs d’un autre âge ; Les rois, les Dieux vaincus, le hasard triomphant, Rosafinde et Suzon qui me trouvent trop sage… » (Musset). Il faut entretenir la flamme du compromis historique, allumer le feu, un rien, un geste, un mot d’amour…

– Mary (Slim) « If you want me, just whistle. You know how to whistle, don’t you, Steve ? You just put your lips together and blow » (To have and have not, Bacall, Bogard, Hawks).



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