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Vous avez commandé une campagne électorale lamentable… ne quittez pas!

Philippe Bilger écœuré !


Vous avez commandé une campagne électorale lamentable… ne quittez pas!
Au QG de Marine Le Pen, un écran montre les résultats du premier tour de l'élection présidentielle et donc les deux candidats qualifiés pour le second tour, Marine Le Pen et Emmanuel Macron, le 10 avril 2022 © Francois Mori/AP/SIPA

Notre chroniqueur Philippe Bilger se désole de la médiocrité de la campagne présidentielle à laquelle nous assistons. Il constate des invariants, des éléments qui réapparaissent à chaque présidentielle: Les Républicains sont toujours des castors, l’extrême gauche est toujours violente et antirépublicaine, et les médias stigmatisent ce qu’ils appellent «l’extrême droite»…


Écœuré.
Parce que déjà la dénonciation morale s’est substituée à l’analyse politique et qu’on serait bien en peine d’expliquer ce que recouvre le terme globalisant et paresseux « d’extrême droite » et ce qu’aurait de raciste le concept de préférence nationale. Parce que le relatif effacement démocratique de la campagne, la posture tutélaire et la frilosité judiciaire ont apporté au candidat Macron des avantages indéniables. Parce que l’extrême gauche violente a sévi à Rennes et à Lyon durant la nuit du 10 au 11 avril pour protester contre les résultats du premier tour et la « dynastie Le Pen » mais que c’est le RN qui est stigmatisé comme antirépublicain !

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Disparition ou renaissance pour Les Républicains?

Parce qu’à la suite d’une campagne durablement médiocre – contrairement à celle de Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen – LR est menacé de dislocation et que des conséquences tragiques en résultent, notamment financières. L’alternative est simple. Ce parti meurt ou il s’efface pour laisser la place à des responsables nouveaux et à une vision intelligemment et authentiquement de droite, qui n’aurait rien à voir avec le macronisme, ce que malheureusement Valérie Pécresse n’est pas parvenue à démontrer.

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Parce que la position personnelle de cette dernière est aberrante, ce qui va la conduire à voter en faveur d’Emmanuel Macron alors qu’elle n’a pas cessé de critiquer le bilan de celui-ci en le jugeant néfaste pour la France. Cette attitude est contraire à toute morale politique alors qu’une solution de synthèse était possible, conciliant l’éthique publique et la lucidité civique : un « ni ni » récusant les deux candidats du second tour, au lieu de laisser croire qu’Emmanuel Macron serait un moindre mal. Que Rachida Dati et Xavier Bertrand, exemplaire par sa loyauté, soutiennent le choix de Valérie Pécresse est dramatique : au lieu de résister à la confusion, c’est l’encourager. Que la gauche et l’extrême gauche, qu’un gouffre sépare du RN, appellent à voter contre ce dernier, est logique mais que LR, même hostile à une possible union des droites, ne perçoive pas la familiarité intellectuelle et politique qui existe entre eux et le RN pour certaines problématiques, par exemple de sécurité, de justice et d’immigration, est invraisemblable.

LR, tout comme LFI, consolident le système en favorisant la réélection de Macron

Les Républicains, sans imagination, ont décidé de ne pas apporter une seule voix à Marine Le Pen : exactement comme Jean-Luc Mélenchon ! Je ne suis pas persuadé que le renouveau est en marche ! Parce qu’entendre le discours d’Emmanuel Macron, tout empli d’une démagogie bienveillante à l’égard de tous les candidats sauf une évidemment, ne me rassure pas pour la suite. Il a annoncé avec un ton tribunitien assez réussi un volontarisme et des mesures dont on a le droit de penser qu’ils seront aussi vains que les promesses non tenues des cinq années précédentes.

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Parce qu’est invoqué, tel un mantra, le barrage contre Marine Le Pen et que pour ma part, par cohérence, j’aurais préféré que le RN soit interdit si on l’estimait contraire à la République au lieu de le voir traiter, dans le jeu démocratique, comme s’il l’était effectivement. On le combat politiquement ou non : c’est la question.

Le barrage républicain va-t-il encore tenir ?

Parce qu’entre les deux tours, on va abreuver les citoyens d’injonctions à penser juste, à bien voter, à se garder du fascisme à nos portes et de l’apocalypse sur nos destins, avec ce paradoxe du journal Le Monde se satisfaisant de Philippe Poutou et Nathalie Arthaud mais mettant seulement en garde contre Marine Le Pen et Eric Zemmour. Parce que notre démocratie est biaisée, immature, haineuse, violente et qu’elle fait craindre le pire pour demain. Parce que les cadres et les retraités ont fait confiance à Emmanuel Macron, que les élites urbaines l’ont placé en tête mais que le peuple, lui, continuera à être abandonné, laissé dans son immense pré carré, sans la moindre espérance.

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Parce que le 24 avril, si Emmanuel Macron est réélu, je suis lassé par avance d’entendre durant cinq ans une autoglorification vantant le monde de la raison, de la mesure, du consensus obligatoire, de la détestation des populismes (surtout quand les peuples les auront légitimés). Et de devoir ressasser que le régalien, l’autorité de l’Etat, le deux poids deux mesures, le snobisme sociétal, les contradictions successives et permanentes continueront à manquer ou à nous offenser.

Parce qu’il y a trop d’abstentionnistes, qu’il y a trop d’extrême gauche, trop d’envie de droite autoritaire et sans cœur, trop de citoyens explicitement ou implicitement en dissidence, en rupture. Écœuré parce que la France est trop précieuse pour être ainsi reléguée à cause d’une République confisquée par les uns et déniée aux autres.

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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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