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Pharmacies en grève et PME: même combat

Le billet de Sophie de Menthon


Pharmacies en grève et PME: même combat
Grenoble. DR.

Les officines se sont massivement mises en grève jeudi 30 mai (18 000 sur 20 000). La profession peste contre les pénuries persistantes de médicaments, une rémunération jugée insuffisante sur les nouvelles missions confiées, et la concurrence des grandes surfaces et d’Internet.


Le principe est « simple » : il consiste à charger au maximum les entreprises des missions que l’État n’arrive plus à effectuer, qu’il s’agisse de simples commerces, de pharmacies ou de PME… C’est ainsi que les pharmacies peuvent aujourd’hui vacciner, prescrire des antibiotiques, faire des diagnostics à distance, réconforter. Bref, pallier de plus en plus au déficit de médecins dans les déserts médicaux, le tout gratuitement ou pour des queues de cerises. 

Il n’est pas étonnant que les préparateurs et les employés souhaitent une augmentation de leurs rémunérations puisqu’on leur a imposé l’élargissement de leurs missions, et que les pharmaciens aspirent à plus de reconnaissance et de bénéfices. Le Covid est un parfait exemple : les tests, le temps nécessaire aux prélèvements et à l’analyse et le poids d’une telle activité sur la disponibilité des pharmaciens assistants, a contribué à augmenter les salaires alors que les charges et les loyers, sans parler du prix de l’électricité, explosent, et que les médicaments rapportent de moins en moins ! Comment s’y retrouver ? Cela explique cette exceptionnelle grève des pharmaciens. Avec les difficultés qu’ils affrontent, il est inadmissible à leurs yeux que l’État favorise une concurrence déloyale en autorisant la vente des médicaments en grande surface (Doliprane inclus !). Et cela, alors que dans le même temps des officines ferment un peu partout en France, déstabilisées par la vente en ligne des produits cosmétiques ou de parapharmacie… 

Signalons au passage que lorsque vous demandez de l’aspirine ou du Doliprane au restaurant, on vous le refuse car le restaurateur court un risque : vous pourriez vous retourner contre lui en cas d’intolérance… C’est pareil dans les écoles, où les institutrices ne peuvent administrer un médicament aux enfants, leur responsabilité étant engagée en cas d’incident. Et l’État autoriserait une vente en grande surface ? Sans commentaires…

Alors, pourquoi un tel changement ? Peut-être bien parce qu’acheter ses médicaments chez Carrefour ou Leclerc évitera que la Sécurité sociale ait à les rembourser, ou pour éviter que les « consommateurs »  ne demandent le renouvellement de leur « shopping list » aux médecins. « Shopping list » que les médecins remplissent avec une immense bienveillance : « qu’est-ce que je vous mets ? »

En même temps que cette libéralisation de la vente de médicaments voulue par l’État, les pharmaciens alertent à juste titre sur les pénuries de médicaments, en particulier les antibiotiques. Pourquoi cette pénurie de médicaments ? D’abord parce que nous n’avons pas été capables de maintenir notre industrie en France. Les raisons ? toujours les mêmes : c’est polluant, avoir une usine près de chez soi est dérangeant, et bien sûr, c’est moins cher en Chine… La délocalisation de la production a abouti à une perte de souveraineté et à ces pénuries. Les laboratoires ne sont pas exempts non plus de responsabilités puisqu’ils vendent leurs produits aux plus offrants et en grande quantité. Logique normale pour une entreprise. Et nous portons donc tous une part de responsabilité dans cette histoire, puisque même dans les officines des beaux quartiers, quand on fait payer deux euros au client, il se plaint ! Nous sommes tous habitués à une gratuité malsaine. Gratuité qui d’ailleurs nous pousse à être les plus gros consommateurs au monde de médicaments ! Un véritable virus contre lequel aucun remède n’agit. Il faudrait une vraie radioscopie… qui aboutirait à la réforme de l’État. 

En attendant, soutenons nos pharmaciens. Ils sont ceux qui sont à l’écoute de nos inquiétudes. Remercions-les de nous empêcher de nous automédicamenter en nous avertissant des dangers. Soyons reconnaissants envers ceux qui nous signalent lorsqu’une ordonnance leur paraît problématique… Et surtout, félicitons ceux qui ont écrit jeudi sur leurs vitrines : « pharmacie en grève, mais restée ouverte ». 

Le mouvement ETHIC retrouve dans cette diversité de problèmes exactement le schéma dont sont victimes les PME qu’elle représente : de plus en plus de responsabilités, de plus en plus de missions transversales (hygiène, sécurité, etc.). On étouffe.

À ce vilain tableau s’ajoute l’absolution totale du corps médical, lequel est quand même responsable des 30% d’arrêts de travail prescrits en plus depuis le Covid, ce qui amène aujourd’hui le gouvernement à réfléchir au non-remboursement des arrêts de travail inférieurs à huit jours.

Un pays dont tous les secteurs se mettent en grève les uns après les autres est un pays insatisfait parce que mal géré. Il est plus qu’urgent de laisser les entrepreneurs et leurs salariés décider entre eux, de ce qui est logique et de bon sens, alors et après seulement, le gouvernement prendra des décisions.

La France sens dessus dessous !

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Chef d'entreprise, présidente du mouvement ETHIC.

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