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Non, le commerce ne tire pas son épingle des Jeux

Des rues entières de Paris sont transformées en "no-go zone" pour la cérémonie d'ouverture : le petit commerce affecté


Non, le commerce ne tire pas son épingle des Jeux
Paris, 19 juillet 2024 © MICHEL SETBOUN/SIPA

Avant même le démarrage officiel des Jeux, la Mairie de Paris annonce la création d’une commission d’indemnisation pour les commerces mis en difficulté: un comble pour un événement annoncé comme une aubaine économique ! 


Je me souviens encore de ma réaction, il y a un an, à l’annonce des tarifs affichés par les hôtels parisiens pendant la période des Jeux Olympiques de Paris 2024. Pour un simple établissement deux étoiles, la nuit dépassait parfois le millier d’euros. Étant pourtant une fervente défenseuse du libéralisme, je n’ai pas pu m’empêcher d’avoir un peu honte de l’image que l’on allait renvoyer aux touristes. 

Des chiffres de réservations hôtelières décevants

Un an plus tard, Anne Hidalgo a fini par se jeter à l’eau mais les hôteliers, eux, attendent encore d’être noyés sous le flux de réservations qu’elle leur avait prédit. Pire, les taux d’occupation sont plus bas que les années précédentes et les tarifs actuels bien loin de ceux initialement fixés. Certes, plus de deux millions de touristes sont attendus ces prochains jours, mais c’est sans compter l’effet de substitution des touristes habituels français et étrangers qui ont préféré reporter ou annuler leur séjour à Paris. De la même manière, la plupart des entreprises franciliennes ont anticipé cet événement en annulant  les salons professionnels, réunions ou formations en présentiel.  

Après les hôteliers, ce fut au tour des restaurateurs et commerces situés aux alentours des quais de Seine – la fameuse « zone rouge » – de prendre une douche froide. Ce week-end, dans une vidéo déjà visionnée plus de 20 000 fois sur les réseaux sociaux, un restaurateur désabusé filme le grillage qui encadre son établissement depuis quelques jours, tout en déplorant les annulations en cascade qu’il enregistre et la perte de son chiffre d’affaires qu’il estime d’ores et déjà colossale. Que l’on compatisse ou non à son désarroi, la vision de ces rues parisiennes désertées nous rappelle inévitablement l’époque pas si lointaine de l’épidémie de Covid. Et pour cause, le même arsenal est de retour : attestations, QR code de circulation, et contrôles de police. De quoi créer un climat anxiogène et liberticide fort peu propice à la consommation ou aux moments conviviaux au restaurant ! Heureusement que le slogan des JO « Ouvrons grand les Jeux ! » a vite été relégué aux oubliettes car il n’en deviendrait que plus risible dans ces quartiers confinés. 

Et si les commerces de province tiraient, eux, leur épingle du jeu ?

À cette question essentielle de l’accessibilité des commerces s’ajoute une question plus idéologique. Début 2024, seuls 9% des commerçants indépendants considéraient que les Jeux Olympiques allaient avoir un effet positif sur leur activité. Autant dire que l’annonce des JO avait suscité plus de craintes que d’espoirs chez les commerçants. Malgré tout, les plus enthousiastes (ou naïfs) d’entre eux se voyaient déjà, dans une liesse populaire et nationale, décorer leur devanture aux couleurs des Jeux et arborer en vitrine les symboles de ceux-ci. Que nenni ! À moins de s’acquitter d’une coûteuse redevance, l’utilisation des anneaux olympiques, de la flamme ou même de la mascotte Phryge, mi-bonnet phrygien, mi-clitoris aux yeux bleus, leur est formellement interdite. Anne Hidalgo aura beau dénoncer un « bashing des jeux » et qualifier de « peine-à-jouir » ceux qui n’adhèrent pas à la ferveur populaire, il faut admettre que rien n’a été fait pour que les commerçants s’approprient cet événement. 

Cette ferveur populaire autour des Jeux se révèle d’ailleurs plutôt de l’ordre du fantasme élitiste, comme en témoigne l’exode actuel des Parisiens, qui n’est pas sans rappeler, là aussi, celui qui a précédé le premier confinement. Autant de clients en moins pour les commerces parisiens ! Peut-être que les commerces de province, où se sont massivement expatriés les Parisiens, seront finalement les seuls vrais gagnants de ces jeux…

Avant même le démarrage officiel des Jeux, la Mairie de Paris vient d’annoncer la création d’une commission d’indemnisation pour les commerces mis en difficulté durant cette période : un comble pour un événement annoncé comme une aubaine économique ! Gardons tout de même en mémoire que, pendant les Jeux Olympiques de Londres en 2012, le gouvernement britannique avait rétorqué aux commerçants londoniens déçus, qu’il fallait attendre 10 ans pour juger des retombées économiques. En 2022, force est de constater que si tel bilan a été fait, les Britanniques ne l’ont pas jugé digne d’être divulgué. « Du pain et des jeux ! » disait Juvénal. À défaut de gagner le premier, il reste donc aux commerçants à espérer ne pas sortir trop perdants des seconds. 



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Entrepreneure et gérante de TPE

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