Le dernier film de Paul Schrader, 75 ans, une des anciennes gloires du Nouvel Hollywood jadis flamboyant, est une magistrale leçon de cinéma au style épuré et vintage nous plongeant dans l’âme malade d’un pays aux multiples blessures identitaires et mémorielles.
Elevé dans une stricte obédience calviniste selon laquelle le cinéma, la télévision, les filles et les coquetteries vestimentaires représentaient le diable absolu, Paul Schrader ne vit son premier film qu’à l’âge de 18 ans ! Le choc fut si brutal qu’il décida de devenir scénariste puis réalisateur. Ses maitres s’appelaient alors Ozu, Dreyer et Bresson, ce qui l’amena à leur consacrer un très sophistiqué traité de réflexions quasi philosophiques (The Transcendental Style : Ozu, Bresson, Dreyer). Puis c’est la révélation mondiale avec l’élaboration du scénario de « Yakuza », formidable film de Sydney Pollack (1974) dans lequel un Américain passionné par le Japon et les arts martiaux (Robert Mitchum) décide d’aider un ami à retrouver sa fille enlevée par de terribles gangsters japonais. Du calvinisme au confucianisme et au shintoïsme, il n’y a qu’un pas que franchit allégrement Schrader dans la quête de la sagesse et de la rédemption.

Rédemption, justement, maitre-mot qui va ensuite irriguer toute sa filmographie avec l’écriture d’un autre scénario devenu depuis légendaire, « Taxi Driver », le film culte de Martin Scorsese (1976) qui voit déambuler dans les rues crasses de New York, un ancien militaire du Vietnam, Travis Bickle (formidable Robert de Niro) dont la réinsertion impossible dans la société et sa vie sociale et affective est élevée au rang d’œuvre d’art avec dynamitage des mythes fondateurs de l’Etat américain. Fort de ces succès critiques et populaires, Schrader décide de passer à la réalisation à la fin des années 70 en enchaînant
