Pendant vingt-cinq longues minutes, France Inter lui a déroulé le tapis, forcément rouge. Rouge, comme le logo et le micro de la station de radio publique. Rouge, comme le socialisme dont il est le fer de lance dans la partie francophone de la Belgique. Rouge, comme la couleur politique – et le bilan – de la Wallonie où toute expression contraire est réduite au silence, ou presque.
Sans être contredit un moment par l’intervieweuse du Grand Entretien, Marion L’Hour, qui a d’emblée indiqué trouver « passionnant » le dernier essai de son invité, le président du Parti socialiste wallon a enchaîné les attaques ciblant l’extrême droite. Comprenez : tout ce qui n’est pas de gauche. Pour Paul Magnette, fervent partisan de la politique du cordon sanitaire, elle serait « le cancer de l’Europe ». Et de passer quelques personnalités, partis et régions dans son tamis d’infréquentabilité : Marine Le Pen évidemment, Viktor Orban et la Flandre voisine de « sa » Wallonie. Emmanuel Macron, quant à lui, aurait « offert une victoire idéologique, politique et morale à l’extrême droite ». Pas un mot en revanche sur le Qatargate, affaire de corruption, qui a éclaboussé récemment son parti.
Belgique antifa
Paul Magnette est un courageux, un résistant, un pourfendeur de la bête immonde : Charleroi, la ville dont il est bourgmestre, s’est déclarée officiellement « antifasciste ». C’était sans doute la priorité des priorités alors que le taux de chômage y atteint les 15% et que les 20-64 ans sont à peine un peu plus de 50% à travailler. En réalité, cette motion lui permit de justifier l’interdiction de métingues de partis patriotes et de refuser tout à trac de répondre, en septembre dernier, aux journalistes de CNews. C’est que, ma bonne dame, chez les gens moralement supérieurs, « on ne discute pas avec l’extrême droite ». Magnette, c’est Saint-Just, sans la guillotine, Jean Moulin sans aucune prise de risques, Gracchus Baboeuf chez qui l’égo aurait remplacé les égaux.
Lorsqu’il était jeune professeur au sein de la très à gauche Université libre de Bruxelles, et moi un de ses étudiants, il fut l’auteur d’une contribution sur l’ « idéologie patricienne de la famille démocrate-chrétienne », encore dominante en Belgique. Devenu homme politique à la faveur d’une des nombreuses crises ayant ébranlé les socialistes francophones, il appliqua, mi-Machiavel, mi-Trissotin, la même recette : façonner toujours davantage la région wallonne à l’image de sa formation, pour faire dépendre l’une de l’autre, et inversement.
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C’est ainsi que la Wallonie ne put se défaire des maux inhérents au socialisme : répartition plus ou moins égale de la misère – pour paraphraser Winston Churchill – avec l’assistanat pour horizon, toute-puissance des syndicats agissant comme les bras armés de la gauche, hypertrophie et politisation de l’administration publique, clientélisme, communautarisme, immigrationnisme délirant, wokisme… Le reste de la classe politique, pour reprendre la maxime de Shakespeare tirée des Joyeuses Commères de Windsor, fut contrainte « d’étreindre, à défaut de pouvoir l’éviter », le PS. Certains poussent le zèle jusqu’à vouloir pousser la partie francophone de la Belgique plus à gauche encore : c’est le cas notamment d’Ecolo, et ses nombreux épigones de Sandrine Rousseau, ou du PTB, parti communiste post-staliniste. Quant aux médias, dont la RTBF, radio et télévision publique, elle ferait presque passer France Inter pour une bande de joyeux droitards.
Retourne dans ton pays !
Pressenti un moment pour mener la liste européenne du Parti socialiste… français, en manque de figures de proue, pour les élections du 9 juin, Paul Magnette a finalement décliné l’invitation. Son amour de l’Europe a ses limites. En réalité, la soupe est plus goûteuse – et plus coûteuse pour le contribuable-, du côté belge de la frontière. Nous aurions quelques réticences à dévoiler son salaire annuel – plus de 400 000 euros – si cet adorateur de Pasolini (qui aurait sans doute été renié par son maître) ne cessait de marteler sa détestation des riches, responsables, selon lui, de tous les maux de la Wallonie et de la planète en danger.
Ce ne sont pourtant ni les riches, ni l’extrême droite, ni Viktor Orban… ni les Flamands – ceux-ci ayant d’ailleurs permis à la Wallonie de se maintenir financièrement à flots -, qui sont aujourd’hui responsables de la situation réelle du sud de la Belgique, de son endettement abyssal et de l’insécurité de ses villes. Plutôt que de venir dispenser son savoir sur France Inter, Paul Magnette devrait peut-être (au choix) se retrousser les manches, relire ses manuels d’économie et faire ce pour quoi il est payé : travailler au service des Wallons.
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