La France connaît son « moment Gauguin » : une rétrospective au Grand Palais, une biographie fouillée chez Fayard, et même un biopic plein de vahinés avec Vincent Cassel.
L’exposition du Grand Palais, « Gauguin l’alchimiste », possède au moins un grand mérite : elle démontre la puissance et l’obstination créatrices de Gauguin (1848-1903), la diversité de ses talents, son acharnement à ouvrir des voies artistiques qu’allait emprunter l’art moderne. Elle présente des œuvres que leur éloignement rendait invisibles, par exemple Les Aïeux de Teha’amana » (Art Institute, Chicago), Eh quoi ! Tu es jalouse ? (musée Pouchkine, Moscou), et encore Dans les vagues (Museum of Art, Cleveland), d’une extraordinaire conception qu’on pourrait croire manquée alors qu’elle traduit supérieurement la progression d’un corps féminin dans l’eau, les petits assauts des vagues contre la chair, le rythme d’un exercice très sensuel de nage et de danse mêlées. Ce que nous révèle aussi l’exposition, c’est l’œuvre du sculpteur Gauguin, en particulier ses « bois ». Ses contemporains ont cru discerner dans sa manière un « art de matelot », mais nous voyons mieux aujourd’hui quelle mutation artistique, quel détournement de forme signalent ces sculptures. Il n’y aura pas avant longtemps une telle occasion de considérer l’ampleur d’un artiste aussi radical, aussi influent.
Détournement de mineur sous les tropiques
Vincent Cassel incarne le peintre dans Gauguin – Voyage de Tahiti. Ce n’est pas le lieu de livrer une critique de ce « biopic vahiné », que nous n’avons pas l’intention de visionner dans l’immédiat. En revanche, il est intéressant de noter qu’il a provoqué une ulcération de la conscience chez quelques-uns : « Un film qui gomme la réalité coloniale », titrait Le Monde. Sur
