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Patrice Leconte : cadreur supérieur

Propos recueillis par Patrick Mandon


Patrice Leconte : cadreur supérieur
Patrice Leconte. © HANNAH ASSOULINE

Le roi de la comédie populaire a su mettre en scène tout le monde, de l’équipe des Bronzés à Alain Delon en passant par Johnny. Même avec Jean Rochefort, il a fini par s’entendre. Mais pour lui, ses échecs sont plus intéressants que ses triomphes. Entretien. 


Il possède l’art de montrer des silhouettes extravagantes soumises à des métamorphoses qui nous laissent pantois et mélancoliques. La grande galerie des burlesques cinématographiques s’honore, par exemple, des portraits de Jean Rochefort, dans Le Mari de la coiffeuse (1990), dont la destination, au-delà du mot fin, ne saurait être que l’asile, et de Jean-Pierre Marielle dans Le Parfum d’Yvonne (1994).
Une partie de la critique française a éreinté Leconte sans nuance ; c’est le droit de la critique d’être sans nuance : il est arrivé à François Truffaut d’en manquer lorsqu’il fustigeait la « qualité française » dans « Une certaine tendance du cinéma français » (Cahiers du cinéma, janvier 1954). Il l’a reconnu.
Est-il donc si difficile d’admettre que Patrice Leconte a donné quelques chefs-d’œuvre ou, si l’on préfère, des bijoux d’observation, et que ses « caractères », portés par une fiction implacable et frôlés par les ailes d’un ange bouffon, sont bien propres à hanter nos mémoires ?

Causeur. Les vécés étaient fermés de l’intérieur est traversé par une loufoquerie d’époque. Malgré l’esprit du scénario, il paraît que Jean Rochefort vous a rendu la vie difficile.

Patrice Leconte. C’est très simple et très triste. Je rêve de faire du cinéma depuis l’enfance. Mon rêve se réalise. Me voilà sur un plateau de cinéma, je suis metteur en scène. Et c’est une catastrophe ! Jean Rochefort m’a pris pour un incapable. Par son attitude, il a cherché à le faire savoir pendant toute la durée du tournage. Je peux dire que j’ai connu l’enfer.

Jean Rochefort a-t-il été seulement irrité par un jeune maladroit ou a-t-il voulu « casser » un débutant ?

Il s’est mal comporté, certes, mais j’étais sans doute très maladroit. À cette époque, j’étais avant tout attentif à la technique, le cadre, un travelling, j’ai donc certainement négligé mes rapports avec les comédiens, chose que je ne ferais évidemment plus aujourd’hui. Quand on est réalisateur, il vaut mieux s’y connaître en technique, les objectifs, la lumière, le son, etc., mais cette technique n’est jamais une fin en soi.

Vous êtes le cadreur de vos films, n’est-ce pas ?

Cadrer, c’est montrer, c’est choisir. Réaliser moi-même les images qui me trottent en tête, sans déléguer, est une liberté magnifique.

Revenons à votre « premier Jean Rochefort ».

Après quelques jours, alors que je veux lui expliquer


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Novembre 2020 – Causeur #84

Article extrait du Magazine Causeur




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Né à Paris, il n’est pas pressé d’y mourir, mais se livre tout de même à des repérages dans les cimetières (sa préférence va à Charonne). Feint souvent de comprendre, mais n’en tire aucune conclusion. Par ailleurs éditeur-paquageur, traducteur, auteur, amateur, élémenteur.

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