Accueil Édition Abonné Décembre 2024 Parigots : têtes de veau et vaches à lait

Parigots : têtes de veau et vaches à lait

On constate une augmentation du nombre d’« encadrants » et une diminution d’« agents d’exécution ».


Parigots : têtes de veau et vaches à lait
Anne Hidalgo - Firas Abdullah-Pool/SIPA

La Mairie de Paris est tellement généreuse avec l’argent des Parisiens, qu’elle ignore le nombre exact de fonctionnaires qu’elle entretient, et continue, chaque année, d’embaucher de nouvelles légions.


« La Ville de Paris a plus de fonctionnaires que toutes les institutions de l’Union européenne dans tous les États de l’Union réunis. On jette l’argent par la fenêtre et on s’étonne que nos services publics manquent de moyens », lançait à l’Assemblée Philippe Juvin, député LR de Courbevoie, le 21 octobre. Les jours suivants, des démonstrations spécieuses fusaient dans la presse pour tenter de prouver le contraire. Or, l’Union européenne, toutes institutions et agences confondues, emploie bien 56 000 personnes pour quelque 500 millions de citoyens ; quand notre Hôtel de Ville totalise 51 578 fonctionnaires pour à peine plus de 2 millions d’habitants – et encore, sans compter les agents qui travaillent pour les innombrables satellites de la Ville, dont le centre d’action sociale, qui dénombrait à lui seul 5 952 salariés en 2020[1]. C’est pourquoi on évoque un bataillon de 51 578 individus, ou 52 000, 55 000, voire plus encore. Tous ces chiffres officiels prouvent que personne ne sait exactement combien de fonctionnaires la Ville de Paris entretient ! La chambre régionale des comptes (CRC), qui a le mauvais goût de vouloir compter juste, estime qu’entre 2014 et 2020, les effectifs sont passés de 47 970 à 51 437. Depuis, il a fallu embaucher du personnel de crèches, des agents en pagaille, des responsables de bidules écolos… et voilà comment la Mairie de Paris justifie la création de 1 031 postes en 2024 : 359 sont dédiés à la police municipale, 322 à la « résorption de l’emploi précaire » (mais encore ?) ; 104 aux « enjeux de développement durable, des mobilités douces » (ben voyons !) ; 63 « pour soutenir la politique de construction du logement social » (pour 100 % de HLM ?), etc., et 11 postes pour les Jeux olympiques (c’est passé, non ?). La Ville prévient déjà que le nombre d’employés nécessaires à « la propreté et à la qualité de l’espace public » (prière de ne pas rire) augmentera encore l’année prochaine. Et il n’est nullement question de remettre en cause les 395 génies qui suent au service communication.

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L’Hôtel de Ville étant peuplé de gens bien élevés, on ne parle jamais d’argent, mais cette générosité coûtera cette année aux Parisiens plus de 2,8 milliards d’euros de salaires, soit le deuxième poste de dépenses. Rapport après rapport, on constate aussi une augmentation du nombre d’« encadrants » et une diminution d’« agents d’exécution », jusqu’à arriver à des situations dignes de Boulgakov. Le rapport social 2021 de la Mairie fait état de 34 directeurs en 2018 et de 36 en 2021 pour gérer… 22 directions.

Serait-ce un problème d’organisation ? Le Land de Berlin, qui emploie 120 000 personnes pour plus de 3,4 millions d’habitants, s’est lancé à la chasse aux postes inutiles depuis des années (déjà 20 000 fonctionnaires recasés), et la Ville de Londres est à la diète avec 74 000 employés pour plus de 8,9 millions d’âmes. Ces travailleurs doivent sûrement travailler car, en plus, à Paris, le taux d’absentéisme cette année est en moyenne de 39,6 jours. Il est de 9,7 dans la fonction publique à l’échelle nationale et de 6,7 dans le privé.

Finalement, le plus faible contingent sur lequel peut compter Anne Hidalgo est celui des Parisiens qui ont voté pour elle à la dernière élection présidentielle : moins de 23 000.


[1]. Le Parisien, 12 décembre 2022.

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Décembre 2024 - Causeur #129

Article extrait du Magazine Causeur




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Journaliste. Dernière publication "Vivre en ville" (Les éditions du Cerf, 2023)

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