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L’irresponsabilité en politique mériterait la sanction judiciaire

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L’impéritie scandaleuse de nos dirigeants, tant en matière sécuritaire qu’économique, donne envie à bien des citoyens de réclamer des comptes, observe notre chroniqueur.


L’Élysée haut perché est redescendu sur terre. Mardi, Emmanuel Macron a renoncé à la hausse de dotation de la présidence pour 2025. L’Assemblée nationale et le Sénat ont emboité le pas, en annulant leurs revalorisations budgétaires. La veille, sur RTL, Didier Migaud, Garde des Sceaux, avait jugé « démagogiques » les indignations face à la légèreté des trois institutions priant les Français de se serrer la ceinture sans donner l’exemple. Ce sursaut de bon sens, symbolique, dit l’amateurisme qui prévaut trop souvent dans les sphères du pouvoir. « Présumez toujours l’incompétence avant de rechercher un complot », avait prévenu Machiavel. En l’occurrence, l’irresponsabilité au sommet est telle que se pose la question de la mise en cause judiciaire des plus hautes autorités. Cet été, Mickaëlle Paty, la sœur de Samuel Paty, le professeur décapité le 16 octobre 2020 par un islamiste qui n’avait rien à faire en France, a saisi le tribunal administratif afin d’obtenir la condamnation de l’Etat pour ses manquements dans la protection élémentaire d’un enseignant clairement menacé depuis onze jours. L’État a déjà été condamné, après des recours intentés par des écologistes, pour inaction climatique. Il y aurait de multiples raisons de le condamner pour inaction sécuritaire, après les meurtres de tant d’innocents par des étrangers, souvent multirécidivistes ou fichés S, qui auraient dû être expulsés. Mais sa même désinvolture, appliquée en matière économique et budgétaire, devient elle aussi un possible sujet de plaintes devant la justice. Le trou de 100 milliards d’euros supplémentaires, découvert par Michel Barnier, pourrait ainsi relever pénalement de la forfaiture si une volonté de dissimulation en haut lieu devait apparaître. Bruno Le Maire assure avoir, en vain, alerté le président sur ces dérapages non avoués…

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L’ouverture de l’examen, ce mercredi, du projet de loi de finance 2025 par les députés pourrait être l’occasion de révéler, par une commission d’enquête spécifique, la mascarade de la gestion financière et budgétaire de la France par le chef de l’État et son ministre de l’Économie, qui s’est vanté à son départ d’avoir « sauvé l’économie française ». Le « Mozart de la finance », installé à l’Elysée sous le parrainage d’influents acteurs du monde économique, a en réalité conduit le pays, chéquier ouvert, dans une permanente fuite en avant. Au point d’avoir augmenté la dette de 1000 milliards d’euros (3250 milliards au total), ce qui représente, au titre du remboursement annuel du seul intérêt de la dette, 55 milliards d’euros (soit 800 euros par Français, enfants compris). Le déficit public, annoncé à 3,7% du PIB pour 2024 par Elisabeth Borne, est passé à 6,1%. Aucune économie dans le fonctionnement de l’État n’a été faite. Le nombre de fonctionnaires (près de 6 millions) n’a cessé d’augmenter. Le « quoi qu’il en coûte », présenté par les flagorneurs comme le trait de génie de la macronie, s’est révélé être ce qu’il était pour le jugement commun : une folle addiction à l’emprunt afin de feindre un progressisme à crédit sur le dos des contribuables. Le confinement sanitaire, décrété dans l’hystérie du Covid, a été une mesure irrationnelle dont la France aurait pu faire l’économie, à l’image de la Suède.

Bref, le monde politique, depuis des décennies, a multiplié les mesures les plus absurdes, les plus irréfléchies, les plus sottes. Il serait temps que les plus grands fautifs rendent des comptes, devant la justice administrative, mais aussi pénale.

Le NFP, dernière gauche immigrationniste d’Europe?

Du Danemark à l’Allemagne, en passant par la Grande-Bretagne et la Slovaquie, des partis de gauche sont rattrapés par le réel : ils défendent un strict contrôle des frontières pour enrayer l’immigration de masse. En France, la gauche qui continue de voir un électeur en chaque immigré ne change rien à sa doctrine.


Et si le grand tour de vis contre l’immigration venait, en Europe, de la gauche ? L’exemple danois attire depuis plusieurs années la curiosité de ses voisins. En mai 2023, Éric Ciotti, qui n’était pas encore démissionnaire de la présidence de LR ni allié du RN, se rendait à Copenhague, en quête de recettes nordiques. Pour comprendre le tête-à-queue danois sur les questions migratoires, il faut remonter à 2001, quand le Parti populaire, classé comme nationaliste, a soutenu une coalition de droite plus modérée, en échange d’un durcissement des règles migratoires. C’est ainsi que le camp conservateur a pu garder les commandes du pays pendant dix ans, de 2001 à 2011, puis de 2015 à 2019. Au prix de 135 modifications de la loi sur les étrangers, le pays de la Petite Sirène peut se vanter aujourd’hui d’avoir la politique d’accueil la plus ferme d’Europe occidentale. Lors de son premier retour aux affaires après 2011, la gauche danoise s’est certes efforcée d’assouplir les règles mises en place pendant la décennie 2000. Elle ne s’y aventure plus désormais et depuis sa victoire de 2019, elle assume l’héritage législatif de la droite. En janvier 2021, la Première ministre Mette Frederiksen tenait ainsi devant le Parlement le discours que toutes les droites populistes d’Europe rêvent d’entendre : « Nous devons nous assurer que peu de gens viennent dans notre pays, sinon notre cohésion sociale sera menacée. » En 2017, dans l’opposition, elle promettait déjà de déplacer les demandeurs d’asile dans des centres délocalisés en Afrique. Désormais, il y a consensus des principales formations politiques danoises pour estimer que, si le pays veut maintenir son modèle social, il doit drastiquement limiter l’accès à la nationalité et aux aides sociales. Le bloc de gauche est en train de récolter les fruits électoraux de sa stratégie : aux Européennes de 2024, les partis de la coalition de Mette Frederiksen rassemblaient 35 % des voix, tandis que le Parti populaire redescendait à un famélique score de 6,37 %. La formation de droite classique est pour sa part en plein déclin. Aux législatives de 2022, elle était même passé sous la barre des 3 %, très loin des 21 % réalisés en 2015. Deux paradoxes à observer : pour renaître politiquement, la gauche danoise a dû intégrer une bonne partie du programme de la droite nationale ; et celle-ci, pour avoir su imposer ses thèmes depuis vingt ans, est désormais renvoyée aux marges de la vie politique locale.

Un thé avec Meloni

Le modèle danois peut-il inspirer les gauches européennes ? Lors de la campagne des législatives britanniques de juillet 2024, le candidat travailliste Keir Starmer, rompant avec l’islamo-gauchisme des années Jeremy Corbyn, s’est engagé à réduire l’immigration. « Si vous m’accordez votre confiance, je vous fais cette promesse : je contrôlerai nos frontières et ferai en sorte que les entreprises britanniques soient aidées à embaucher en priorité des Britanniques », déclarait-il au Sun avant le scrutin. Il faut dire que, malgré le Brexit, le Royaume-Uni semble ne plus contrôler grand-chose à ses frontières. Ce sont désormais 1,2 million d’étrangers, extra-européens pour l’écrasante majorité, qui affluent chaque année dans le pays. Ménageant la chèvre et le chou, Keir Starmer annonçait dans le même temps qu’il renonçait au projet controversé de déplacement des demandeurs d’asile au Rwanda, cher au Premier ministre conservateur sortant Rishi Sunak et fort inspiré par le modèle danois – mais ce projet pourrait être redéployé en Albanie (voir le texte de Frédéric de Natal et Jeremy Stubbs). En septembre 2024, alors que le Royaume-Uni sortait d’un été marqué par des violences ethniques, le nouveau locataire du 10 Downing Street faisait sensation en s’affichant aux côtés de la Première ministre de droite italienne Giorgia Meloni et surtout en louant les résultats de cette dernière en matière de lutte contre l’immigration illégale. « Vous avez fait des progrès remarquables, en travaillant d’égal à égal avec les pays se trouvant sur les routes migratoires afin de traiter, à la source, les facteurs de la migration et de contrer les réseaux, et le résultat est que les arrivées illégales par la mer en Italie ont baissé de 60 % depuis 2022 », faisait-il remarquer à son hôtesse romaine. Une visite qui n’a pas plu à tout le monde au sein de la gauche britannique ; Kim Johnson, députée travailliste de Liverpool, a regretté que le nouveau Premier ministre « aille chercher des enseignements auprès d’un gouvernement néofasciste ». Malgré la survivance d’une aile gauche aux thèmes proches de notre LFI nationale, le Labour ne peut plus se permettre de se présenter devant les électeurs britanniques sans un minimum de fermeté sur ces sujets.

AfD et BSW, la tenaille identitaire

Outre-Rhin aussi, l’heure est au raidissement après l’annonce faite par le chancelier social-démocrate Olaf Scholtz du rétablissement des contrôles aux frontières pour une période minimale de six mois (voir l’article de Nicolas Pouvreau-Monti de l’Observatoire de l’Immigration et de la démographie dans notre magazine #127). La fin du mois d’août a été ensanglantée en Allemagne par l’attaque au couteau commise en plein « Festival de la Diversité » (ça ne s’invente pas…), à Solingen, coûtant la vie à trois personnes et faisant huit blessés. L’assaillant était un Syrien de 26 ans. En Allemagne, la droite de la droite a le vent en poupe – comme un peu partout en Europe. On l’a vu en Thuringe, en plein cœur de l’ancienne RDA, lors des dernières élections régionales, au cours desquelles l’AfD (qui a réussi à effrayer le Rassemblement national au point d’entraîner une rupture avec lui au Parlement européen) est arrivé nettement en tête, dépassant les 32 %. On l’a vu également aux Européennes de juin, où le parti a obtenu 15 sièges – malgré des dérapages de campagne qui nous ont rappelé les pires heures de Jean-Marie Le Pen.

Toutefois, l’AfD ne monopolise plus le créneau anti-immigrationniste. Un nouvel objet politique non identifié est apparu cette année en Allemagne : le BSW, c’est-à-dire « l’Alliance Sahra Wagenknecht – Pour la raison et la justice ». Issue d’une scission de Die Linke (l’extrême gauche germanique) et menée, comme son nom l’indique, par Sahra Wagenknecht, la nouvelle formation se réclame d’une « gauche conservatrice », à contre-courant du wokisme généralisé en Occident. À gauche toute en économie, le parti souhaite mettre un coup d’arrêt à l’immigration incontrôlée, à l’origine selon lui de l’explosion de la criminalité. Prorusse par ailleurs, le parti joue sur la corde « ostalgique » d’une partie des Est-Allemands. Aux régionales de Thuringe, il vient d’obtenir un score de 15,77 %, dépassant Die Linke. Aux Européennes, pour sa première participation à un scrutin national, le BSW a obtenu 6,2 % et six sièges. Sur le Stadtplatz, pris en tenaille entre une droite et une gauche « radicales » qui se rejoignent peu ou prou sur les questions migratoires, le chancelier de centre gauche n’a pas d’autre choix que de durcir le ton. Les mesures prises sur le contrôle des frontières ont toutes les chances de s’inscrire dans le temps. S’il ne s’agit pas d’une condamnation à mort de Schengen, c’est tout de même un coup de canif contre son esprit.

Ailleurs en Europe, une forme de national-populisme de gauche s’exprime en Slovaquie avec Robert Fico, Premier ministre grièvement blessé lors d’une tentative d’assassinat en mai 2024. Sorte de cousin « de gauche » de Viktor Orban, il avait accédé aux commandes de la République grâce à une alliance étonnante, en 2006, avec des partis de droite nationaliste et populiste. Il s’est signalé par des prises de position très hostiles à l’immigration et à l’apparition d’une hypothétique « communauté musulmane » en Slovaquie.

La gauche chauvine française existe, elle s’appelle Marine

Alors que la gauche du Nord de l’Europe, rattrapée par le réel, revient peu à peu de l’angélisme du sans-frontiérisme, la gauche française rame imperturbablement à contre-courant. Conçue sur la rive droite du PS du début des années 2010, la stratégie Terra Nova qui consistait à délaisser l’électorat ouvrier au profit des minorités a été pleinement récupérée par la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. Pour LFI, le calcul cynique est simple : la victoire électorale est possible, à condition que la vague migratoire continue. Pas question de barrer la route à de futurs électeurs. Sur le terrain, l’affaire du tractage au faciès révélée par François Ruffin dans son dernier livre montre à quel point la question ethnique est au cœur de la stratégie (et des obsessions) du parti d’extrême gauche. Mais alors, si LFI ne parle plus qu’à la gauche Vélib’ de l’Est parisien et aux « quartiers », qu’est-ce qui empêche l’émergence d’un BSW à la française ?

Sahra Wagenknecht, lors d’une conférence de presse de l’Alliance Sahra Wagenknecht (BSW), Reichstag, Berlin, 9 septembre 2024 snapshot/Future Image/ /Shutterstock/Sipa

On pourrait se demander si, effectivement, l’effondrement du secteur industriel en France, dont la part dans le PIB est passée à 17 % en 2022 (alors qu’il est encore de 30 % en Allemagne) ne rend pas saugrenue toute tentative de séduction d’une classe ouvrière old school, plus proche de l’habitus de Georges Marchais que de Mona Chollet. Il est vrai que les maigres tentatives à gauche n’ont guère été couronnées de succès. Georges Kuzmanovic, en rupture avec Mélenchon après 2017 et fondateur du parti République souveraine, a connu pour le moment des résultats électoraux plus proches de Jacques Cheminade que de Sahra Wagenknecht. En 2018, encore membre de LFI, il répondait à une interview au Nouvel Obs, dans laquelle il signalait déjà à l’époque sa sympathie pour la dirigeante allemande et sa volonté de convertir LFI à la lutte contre l’immigration massive. Il fut aussitôt diabolisé par le grand chef Mélenchon. Tous ceux qui se sont aventurés, à gauche, à exprimer un point de vue réaliste sur les questions migratoires n’ont pas tardé à être brocardés par leurs petits camarades. Fin 2021, alors que la campagne présidentielle s’annonçait, Arnaud Montebourg avait proposé de couper les flux de transferts d’argent privé (en gros, Western Union) pour les pays peu coopératifs quant au rapatriement de leurs propres ressortissants. Que n’avait-il pas dit là ? L’ancien député de Saône-et-Loire dut faire son mea culpa quelques heures plus tard, après une volée de bois vert et des tweets de Guillaume Meurice. Plus récemment, c’est François Ruffin qui a été comparé à Jacques Doriot, collaborationniste qui a porté l’uniforme allemand sur le front de l’Est. Doriot, Déat… La gauche rejoue à chaque fois les années 1930 et 1940 ; elle a dernièrement convoqué ses grands mythes en appelant « Nouveau Front populaire » son alliance de bric et de broc de juin dernier. En oubliant un peu vite qu’en avril 1937, Marx Dormoy, ministre de l’Intérieur du Front populaire, donnait instruction aux préfets de « refouler impitoyablement tout étranger qui cherchera à s’introduire sans passeport ou titre de voyage valable ».

Au début des années 2010, Régis Debray, ancien compagnon de Che Guevara, écrit un Éloge des frontières. Mais, cette année-là, c’est Stéphane Hessel et son navrant Indignez-vous qui émoustillent la jeunesse de la place de la République. Sur le terrain des idées et des ventes de livres, le « frontiérisme » de gauche avait perdu la première manche. Dans le socle idéologique de base du militant progressiste de 2024, la mystique des damnés de la terre est puissante ; impossible d’imaginer une remise en cause des flux humains, effet de la mondialisation au même titre que les flux de capitaux et de marchandises. En Allemagne, Thilo Sarrazin a pu écrire en 2010 un livre tout à fait hostile à l’immigration musulmane, et participer à des meetings de l’AfD, sans se faire virer du SPD pour autant. Quid d’un petit plaisantin, encarté au PS français, qui s’amuserait à en faire autant ? Alors, l’apparition d’une gauche à la BSW est-elle définitivement impossible de ce côté du Rhin ? En réalité, cette formation existe depuis cinquante ans. Dès les années 1980, bien avant les efforts de Marine Le Pen et de Florian Philippot, le Front national avait commencé à rafler la mise au sein de la classe ouvrière, sur fond de slogan « Trois millions de chômeurs = trois millions d’immigrés ». La gauche chauvine française existe, elle s’appelle Marine.

Prêt à tout?

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Et si le film « The Apprentice », que le candidat Trump qualifie de diffamatoire, boostait finalement sa fin de campagne?


À quelques jours de l’élection présidentielle américaine, plus serrée que jamais, vient de sortir au cinéma le biopic tant attendu sur la fulgurante et irrésistible ascension du jeune Donald J. Trump, portée par les conseils avisés et cyniques d’un célèbre avocat new-yorkais dont les plaidoiries et les méthodes de travail, au-delà de toute éthique, sentaient le soufre. Loin de la satire un peu lourdingue annoncée, le film dépeint au contraire la formidable trajectoire initiatique d’un fonceur ambitieux et intelligent, du début des années 70 au milieu des eighties reaganiennes, complètement en phase avec les attentes et les codes de la société de son temps…

Pourquoi l’inénarrable chef du fameux « MAGA Movement » pourrait-il gagner la prochaine élection présidentielle américaine du 5 novembre? Pour le savoir, il faut courir voir l’excellent film de l’Américano-dano-iranien Ali Abbasi (déjà auteur des très réussis Border et Les Nuits de Mashhad) qui, parait-il, était censé être une « satire » anti-Trump… What ? Pardon ? On ne doit pas avoir la même définition de la satire alors, tant ce biopic nous dépeint un homme ambitieux, intelligent, acharné, persévérant, téméraire, stratège, efficace, « hard-worker » (« Dormir est une perte de temps car on ne peut pas signer de contrats ! »)… Le jeune Trump est prêt à tout pour réussir et devenir le meilleur dans tous les domaines, en dépit de sérieux handicaps de départ. En ce sens, il épouse parfaitement l’idéologie profonde capitaliste et individualiste américaine et paraît complètement en phase avec les attentes de la fameuse « majorité silencieuse » du pays, celle qui a fait gagner en son temps les Nixon et Reagan (le véritable inventeur du slogan « Make America Great Again », au passage), abondamment cités et montrés dans le film, à travers les postes de télévision, les ondes radios, les portraits ou affiches publicitaires.

Le sens des affaires

« L’Amérique est mon meilleur client. Nous sommes les derniers remparts du monde libre face à l’enfer totalitaire », lui inculque son mentor et éminence grise, le très méphistophélique avocat new-yorkais Roy Cohn (parfaitement incarné à l’écran par Jeremy Strong, véritable co-star du film). Un Victor Frankenstein, en somme, qui va rapidement être vampirisé et croqué par son étonnante et insolite créature (incarnée par Sebastian Stan)… Laquelle ne va pas rechigner à passer plusieurs fois sur le billard, endurant, plus que de raison, les coups de scalpels pour des liposuccions et reconstructions capillaires… Hollywood est allé chercher le très inspiré et finalement relativement méconnu acteur roumano-américain pour incarner un Trump plus vrai que nature.

Sebastian Stan incarne le jeune Donald Trump. Metropolitan Films

Un acteur qui accède à la célébrité internationale, après avoir endossé des rôles de super-héros dans les univers Marvel comme celui de James « Bucky » Barnes dans la trilogie des Captain America.

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Trump, super-héros d’une Amérique en crise ? C’est en tout cas ce que l’on ressent dans sa farouche et indéfectible volonté de remettre de l’ordre et de la propreté dans les quartiers les plus glauques et mal famés de Big Apple et Atlantic City, à travers son ambitieux programme immobilier et ludique (l’empire Trump, c’est aussi les casinos). Même s’il connaît évidemment des échecs, il faut lui reconnaître une certaine prescience lorsqu’il comprend avant tout le monde que la rénovation de Grand Central et de Manhattan permettra d’attirer de nombreux touristes, venant du monde entier… transformant ainsi le plomb en or !

« Ce qui compte, c’est gagner ! »

Alors, certes, tous les coups sont permis (même les plus bas) pour écraser la concurrence, s’asseoir sur une certaine déontologie (« La réalité et la vérité ne sont que construction et abstraction ») et se hisser au sommet des fameuses Trump Towers, les plus hautes du pays avec celles du World Trade Center (beaucoup y voient un simple délire phallique). Mais il ne faut pas voir ce film à travers un prisme français déformant ou nos œillères européennes… Et encore moins écouter les critiques professionnels de la profession démolir ce métrage en raison de sa trop grande glamourisation de l’irrésistible ascension trumpienne. Le film dépeint au contraire une authentique success story à l’américaine en montrant comment ce jeune homme « aux cheveux d’or », sous le joug d’un père autoritaire, endetté et peu stratège, s’est progressivement affranchi de cette tutelle nuisible en se faisant un point d’honneur à réhabiliter une ville… puis un pays en déliquescence. Jusqu’à devenir milliardaire, avoir forcément les chevilles qui gonflent un peu, lâcher son mentor (qui plus est, atteint du virus du Sida, la « maladie des gays », véritable spectre hantant la moitié du métrage) ou maltraiter sa première femme d’origine tchèque Ivana (le film présente une terrible scène de viol conjugal – dans les faits, Ivana a retiré sa plainte)… et céder aux sirènes des joutes politiques (« Tous des losers au gouvernement ! ») en assénant cet aphorisme définitif : « Tout le monde rêve de devenir riche et de se faire sucer dans Air Force One ! »

Trump va jusqu’à comparer son art de la négociation à une œuvre d’art, à l’instar d’un Leonard de Vinci imaginant et réalisant La Joconde ! D’où la co-écriture avec le journaliste Tony Schwarz du best-seller (évoqué dans le film) L’art de la négociation (The Art of Deal) qui s’est vendu à plusieurs millions d’exemplaires dans le monde entier.

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« The Apprentice » est un film fort et intense qui se regarde comme un thriller tourné dans le New York des années 70, captivant et sans temps mort. La pellicule est volontairement jaunie et vintage, et le montage hyper rapide comme dans un vidéo-clip. Le tout au rythme des grands tubes disco/new wave/rock de l’époque, et ancré dans ce contexte explosif de propagation du Sida et de la révélation d’une nouvelle icône politique nommée Reagan faisant de la réduction des impôts et des taxes fédérales l’un de ses grands chevaux de bataille dans un pays alors écrasé par la concurrence internationale, notamment japonaise.

Terminons avec l’énoncé des trois fameuses règles intemporelles pour réussir dans la vie :

1) Face à l’adversité, toujours attaquer, attaquer, attaquer ;
2) Face aux attaques, toujours nier et ne jamais rien avouer ;
3) Même dans une défaite, toujours prétendre avoir remporté le combat et avoir gagné !

Pour spectateurs non-moutonniers seulement. Merci, M. Abbasi !

2 heures. En salles depuis le 9 octobre.

Trump: The Art of the Deal

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Marine Le Pen tient bon la barre

C’est la liberté parlementaire qui est traînée devant la justice, assure Madame Le Pen au tribunal.


Marine Le Pen comparaissait lundi pour trois jours d’audience devant la 11è chambre du Tribunal correctionnel de Paris, dans l’affaire des assistants parlementaires des eurodéputés FN/RN. L’enjeu est de taille. La triple candidate à la présidentielle risque jusqu’à dix ans d’emprisonnement, un million d’euros d’amende, et de cinq à dix ans d’inéligibilité. Une peine qui, prononcée avec exécution provisoire, lui barrerait la voie de l’élection présidentielle de 2027 pour laquelle la présidente du premier groupe à l’Assemblée nationale est donnée en tête dans tous les sondages.

« Les deux, mon capitaine ! »

L’ancienne avocate est sur le pont à chaque audience, prête à batailler et démontrer sa bonne foi. Elle le répète en aparté : « Il n’y a à aucun moment accusation d’enrichissement personnel ou d’emploi fictif. La question fondamentale est la liberté parlementaire dans l’exercice du mandat de député. » Face à la vision bureaucratique du Parlement européen, l’ancienne eurodéputée oppose une défense toute politique. Pour Marine Le Pen, cette affaire révèle une méconnaissance de la vie politique qui confond engagement militant et salariat. Or le titre de chef de cabinet de Catherine Griset dans l’organigramme du parti n’est que la mise en valeur politique de son travail d’assistante parlementaire de Marine Le Pen. La magistrate interroge justement la relation entre les deux femmes. Comment se sont-elles connues ? Catherine Griset est devenue l’assistante de Marine Le Pen lorsque celle-ci était avocate. L’assistante l’a ensuite suivie quand l’ancienne avocate a créé le service juridique du Front national, lors de la scission avec Bruno Mégret et les batailles juridiques autour du nom du parti. Et, « c’est tout naturellement » que Catherine Griset devient son assistante parlementaire lorsque Marine Le Pen est élue eurodéputée. La chef de l’opposition souligne « le travail indispensable » de son assistante qui a la main haute sur toutes ses boîtes mails. « Je ne touche pas à ma boîte (mail) au Parlement européen, ni à ma boîte officielle, la seule que j’utilise c’est ma boîte personnelle. Elle s’occupe de mon agenda -ce qui n’est pas une mince affaire- elle s’occupe d’être en contact avec les autres assistants parlementaires, avec les autres députés, elle organise mes déplacements, réserve mes hôtels quand je vais au Parlement européen… Elle est la destinataire des informations, elle archive les mails… » Marine Le Pen assure que « tout le monde sait que Catherine Griset est (son) assistante parlementaire. Il n’y a pas de volonté de dissimulation. » La présence de Catherine Griset sur les organigrammes du parti politique se justifie comme un outil de communication. Tous les titres de l’organigramme sont des fonctions non rémunérées, comme dans toute association loi 1901, souligne l’élue. Et, comme Catherine Griset était son assistante parlementaire, il était « naturel qu’elle devienne (sa) chef de cabinet, elle a la haute main sur mon agenda parlementaire. » Me Maisonneuve, avocat de la partie civile, renvoie l’ancienne eurodéputée à l’une de ses déclarations lors de l’instruction où elle indiquait que « lorsque les assistants parlementaires ne sont pas strictement occupés à des tâches parlementaires, ils peuvent faire des tâches pour le parti ». Face au tribunal, Marine Le Pen souhaite affiner ce propos. Il faut entendre dans cette phrase le mot “parti” en tant que mouvement politique. « Je considère que les députés travaillent au bénéfice de leurs idées. Et qui portent leurs idées ? Le mouvement politique, ou le parti. Le député ne travaille pas à son propre bénéfice », explicite-t-elle.

Alors, Catherine Griset a-t-elle travaillé pour Marine Le Pen, eurodéputée, ou pour Marine Le Pen, femme politique et présidente du Front national ? « Les deux, mon capitaine !» répond vaillamment l’élue du Pas-de-Calais. Comment peut-on distinguer la femme politique de l’élue ? Quand Marine Le Pen est eurodéputée, son assistante parlementaire est chargée de prioriser à son agenda toutes les questions européennes. Et quand, à partir de 2009, la législation européenne oblige les assistants parlementaires accrédités à être domiciliés en Belgique, l’assistante parlementaire accréditée se domicilie chez l’assistant parlementaire belge Charles Van Houtte, dans une chambre d’amie qu’elle occupe lorsqu’elle se rend dans la capitale européenne, en attendant de trouver un appartement. Fallait-il vivre à Bruxelles ? Rien ne l’indiquait. Comme l’explique M. Klethi, directeur financier du Parlement européen, cette décision a été prise pour que les assistants accrédités paient leurs impôts en Belgique et non dans leurs pays, car sinon cela représentait un manque à gagner pour le Trésor belge. La réglementation stipule aussi que l’assistant accrédité doit travailler au Parlement européen. Mais la badgeuse du Parlement européen ne confirme la présence de l’assistante accréditée qu’environ douze heures entre octobre 2014 et août 2015. Marine Le Pen recontextualise cette période précise durant laquelle son assistante souhaitait redevenir assistante locale pour des raisons personnelles. L’ancienne eurodéputée rappelle l’écrasement des autres données par le Parlement européen, lesquelles montreraient le contraire sur d’autres périodes. On met la loupe sur un élément, sans regarder tout le reste, dénonce-t-elle. Par ailleurs, la présidente de groupe ajoute qu’en entrant en voiture dans le parking du Parlement européen, seul le véhicule était badgé et non tous ces occupants. M. Klethi, de son côté, affirme que « tout le monde doit badger, que c’est même un ennui pour les fonctionnaires en poste depuis plusieurs années. Seuls les députés n’ont pas besoin de badger. » Me Bosselut, le conseil de Marine Le Pen, lit un constat d’huissier qui démontre le contraire, tout du moins dans l’enceinte de Strasbourg. Si cela est possible à Strasbourg, pourquoi cela ne le serait-il pas à Bruxelles ?

Tiens bon la vague, tiens bon le vent…

Debout à la barre pendant plus de six heures, Marine Le Pen garde son cap. « Il y a des députés qui participent à l’animation du mouvement, et parfois il y a des profils d’experts qui sont très peu intéressés par le mouvement. Il y a également des assistants parlementaires qui ont des goûts, des appétences, des différences », explicite-t-elle pour justifier les nominations d’untel à telle ou telle fonction dans l’organigramme, « fonctions toutes bénévoles », répète-t-elle. Les changements de contrats sont parfois liés à la vie privée. Certains assistants peuvent préférer, selon les aléas de leur vie personnelle ou de leurs motivations, être à telle période plutôt assistant accrédité à Bruxelles, et à d’autres moments plutôt assistant local. Mais qu’ils soient « APA » (assistant parlementaire accrédité) ou « aloc » (assistant local), ils sont assistants parlementaires du député qui donne les tâches à effectuer. Et Catherine Griset est indispensable à son activité de parlementaire, où qu’elle soit. L’ancienne eurodéputée tient bon la barre et défend bec et ongle le travail de son assistante. Marine Le Pen relève d’ailleurs les incohérences de l’accusation concernant ce contrat. Elle cite en exemple le contrat d’assistant parlementaire de M. De Danne qui ne pose lui aucun problème au Parlement européen bien que celui-ci figure aussi dans l’organigramme du parti comme conseiller aux affaires européennes. Alors, la parlementaire s’interroge. Pourquoi cela serait-il autorisé dans un cas, et pas dans un autre qui est pourtant similaire ? Est-ce le fait que Catherine Griset soit l’assistante de Marine Le Pen qui pose problème ?

L’ancienne présidente du Rassemblement national rappelle par ailleurs que les députés européens sont élus lors de scrutins de liste. Chaque député doit son élection à tous les militants du mouvement politique, « tous ceux qui ont fait campagne, qui ont collé des affiches, sous la pluie, la neige, qui se sont fait agresser…» Aussi, un député qui, une fois élu, stopperait son engagement politique, en n’allant plus rendre compte de son activité dans les médias, lors des réunions publiques ou à la rencontre des militants et des électeurs, ne serait tout simplement pas réinvesti par le mouvement. Car « le mandat, c’est aussi l’activité politique, revendique haut et fort la chef de l’opposition qui trouve « qu’il est regrettable de ne pas faire un comparatif de la vision du mandat entre l’administration du parlement national et la vision du mandat du Parlement européen ; car l’Assemblée nationale est, elle, extrêmement claire : elle considère que l’activité politique du député fait partie intégrante de son mandat. » Pour conclure, l’ancienne avocate conteste avec force la lecture rétrospective que fait le Parlement européen de réglementations qui n’étaient pas alors applicables. Enfin, Marine Le Pen clame sa bonne foi et soutient qu’elle n’a jamais eu conscience de commettre une quelconque irrégularité, car « tout était clair, connu de tous et déclaré au Parlement européen. Rien n’était caché. »

Cette première et très longue journée d’audition de Marine Le Pen n’a pas permis au tribunal, faute de temps, d’entendre Catherine Griset, mise en cause pour ses contrats d’assistant parlementaire accrédité. Son audition est donc renvoyée au lendemain. Ironie du sort, Catherine Griset, qui est elle-même aujourd’hui eurodéputée, ne pourra donc se rendre au Parlement européen comme elle l’avait prévu…

ACAB! All Cops Are Bastards!

Auriez-vous déjà oublié l’attaque du commissariat de Cavaillon, il y a huit jours ? Notre chroniqueur, qui vit dans une ville soumise au narco-trafic — rappelez-vous Bac Nord —, et base arrière de l’islamisme militant, a des idées un peu trop radicales pour enrayer l’épidémie de règlements de comptes, dont la police est désormais aussi la cible…


Apprenez donc à être un politicien. Les forces de police, dont vous êtes le ministre, ont été attaquées, et c’est par miracle qu’aucun d’entre eux n’est mort brûlé vif. Alors, vous prenez votre plus belle plume, et vous écrivez, solennellement :

« Je voudrais tout d’abord saluer le courage de nos forces de l’ordre confrontées à une violence devenue ordinaire.
« L’Etat ne se laissera pas intimider et nous allons intensifier notre lutte contre le narco-banditisme. Je placerai la lutte contre le crime organisé au centre de mes préoccupations parce qu’il constitue une attaque contre nos institutions.
« Dès ce soir la CRS 81 sera envoyée à Cavaillon et j’ai demandé au ministre délégué auprès de moi de se rendre sur place dans la journée. »

Puis vous prenez la pose pour la photo.

Est-ce bien de telles déclarations creuses dont la police a besoin ? Demandez autour de vous : tous s’étonnent que les policiers, assiégés par des voyous parce qu’ils prétendaient enrayer le trafic de drogue, à Cavaillon, n’aient pas fait usage de leurs armes, et étendu pour le compte les racailles qui les attaquaient.
Oui, mais voilà. En imaginant qu’ils l’aient fait, ils seraient à cette heure incarcérés, inculpés d’usage abusif de la force — voire de meurtres au premier degré. En France, la riposte doit être proportionnelle à l’attaque. Et les juges ont tendance à voler au secours des voyous avant de s’intéresser aux forces de l’ordre, censées faire preuve de sang-froid. On emprisonne bien plus facilement un policier qu’un multi-récidiviste. Pour peu, les magistrats n’admettraient même pas que les flics ripostent à leurs agresseurs / incendaires…

Jusqu’à quand les ministres, qui se suivent et qui se ressemblent, dans le sens d’une démission systématique et d’une fuite devant leurs responsabilités, abuseront-ils de notre patience ?
Jusqu’à quand le ministre en fonction, qui ne connaît manifestement rien à son métier, à, part la gestion des mouvements de menton, laissera-t-il les forces de l’ordre être la cible des racailles ?

Il s’agissait, rappelons-le, de représailles après une opération anti-drogue. Rappelons aussi que les deux individus arrêtés pour ces brûlantes exactions étaient « connus des services de police »1, comme on dit pour désigner des truands que la justice a décidé de laisser vaquer à leurs occupations, et qu’ils avaient été interpellés en septembre pour violation de domicile et détention de stupéfiants. Broutilles, donc. La justice en France est cette institution véritable État dans l’État, qui libère des détraqués sexuels sous OQTF afin qu’ils perpètrent au plus vite un nouveau meurtre.

Sur les murs des villes fleurissent depuis quelques années le même acronyme tagué par des mineurs délégués là par leurs aînés : « ACAB » — All Cops are Bastards ». C’est faire des policiers des cibles humaines : feu à volonté !
Rappelons que New York, où sévissait une délinquance proche des records mondiaux, a été débarrassée de ses délinquants en quelques années par la volonté de Rudolph Giuliani : tolérance zéro, et assurance, pour les policiers dont le nombre avait été substantivement augmenté, d’être couverts en cas d’usage de la force.  ACAB est une menace de mort, dans le contexte de narco-trafic, augmenté d’un islamisme bien installé, de bien des villes en France. Pas seulement Marseille ou sa région, mais aussi bien Grenoble, Dijon, Nantes, Lyon, Besançon ou Amiens : le cancer a métastasé, il faut le combattre avec des chimiothérapies puissantes — et des Sig Sauer SP 2022. Tu me menaces ? J’ouvre le feu. Tu ne me menaceras plus.

Alors, au lieu d’amuser les médias sur des projets de loi sur l’Immigration, que les ministres concernés pondent un décret autorisant la police à faire usage de ses armes lorsqu’une menace est caractérisée. Ou à expliquer de façon musclée aux délinquants arrêtés qu’ils devraient réfléchir avant de se risquer à une nouvelle confrontation dans les commissariats. Les voyous ne connaissent et ne craignent que la force. Retournons sur eux la violence dont ils font leur ordinaire.

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  1. https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/10/14/a-cavaillon-deux-suspects-ecroues-pour-l-incendie-de-quatre-vehicules-de-police_6351629_3224.html ↩︎

Les chaloupes à la mer!

En quasi faillite, estimant qu’il faut prendre l’argent « là où il est », l’État demande encore aux entreprises de passer à la caisse. Mais, il ne demande jamais son avis aux entrepreneurs, lesquels pourraient pourtant être de bon conseil quant aux économies à réaliser d’urgence! Une tribune de Sophie de Menthon, dont le syndicat Ethic organise demain sa 22e fête des entreprises (« J’aime ma boîte), et de Loïk Le Floch-Prigent.


Il est désormais clair pour tout le pays que les seules entités qui tiennent debout dans la tempête, ce sont les entreprises – industrie, agriculture, services. On remarque par ailleurs les dysfonctionnements majeurs de la fonction publique, des services publics, etc… ce sont désormais les responsables des dérives financières qui nous expliquent la nécessité de redresser la barre : endettement, déficit commercial, déficit budgétaire… et on jette les chaloupes à la mer (nos entreprises !) pour sauver tout le monde, y compris ceux qui les coulent.

La chasse au profit

La préservation de ce qui marche encore, devrait donc logiquement être la priorité à la fois du gouvernement et des parlementaires. On a vu que l’affaiblissement de l’industrie à seulement 10% du PIB était le facteur explicatif essentiel de la crise, dans tous les discours ou les communications écrites officielles. « La France doit continuer à réindustrialiser, continuer à innover, continuer à créer des emplois et à inciter à la création d’emplois, c’est ça la priorité du pays » vient de déclarer le président Macron au Salon de l’automobile.

Eh bien non, puisque des entreprises fonctionnent encore, on va punir – pardon ! faire contribuer à l’effort national – celles qui restent debout et qui ont de beaux résultats, les autres aussi, sous d’autres formes. On va arriver à réduire leur compétitivité déjà médiocre sous prétexte d’égalité : ce qui génère des bénéfices doit être taxé au plus vite, en vertu du principe politiquement partagé qu’ « il faut prendre l’argent là où il est ».

M. Le Floch Prigent et Sophie de Menthon

Que ce soit l’attaque en règle contre les crédits d’impôt recherche et innovation, les nouvelles idées pour combattre notre industrie du plastique, notre application à étouffer notre industrie automobile, à renchérir le coût de l’énergie, à nous demander d’être le relais pour renflouer la Sécurité sociale, notre manque de volonté pour équilibrer nos secteurs du bâtiment et de l’agriculture : tout est fait pour affaiblir l’industrie et les entreprises au bénéfice d’un État qui ne veut pas se réformer et jette le profit en pâture à l’opinion publique. Les « riches » et les « nantis » d’abord, puis les retraités « aisés », en épargnant soi-disant les « classes moyennes » (?).

A lire aussi: L’énergie éolienne au pays du Roi Ubu

Pourtant il faut REFORMER d’abord. Il y a des choses à revoir structurellement pour couper dans les dépenses de l’État : les doublons du mille-feuille administratif, les doublons du millier d’agences « indépendantes », le CESE. Il faut vendre certaines participations inutiles (à condition de les affecter à un projet précis), cesser les subventions aux éoliennes dont notre pays n’a aucun besoin, et qui ravagent nos paysages terrestres et marins, alors que nous sommes parmi les leaders de l’électricité décarbonée – on va même augmenter cette électricité, la faute aux Allemands. Les Agences « indépendantes », inutiles pour la plupart, représentent 93 milliards ; les raccordements d’éoliennes, les transformations du réseau pour accueillir prioritairement leur électricité intermittente et aléatoire, c’est de l’ordre de 20 milliards par an sur dix ans… et ainsi de suite.

Tous dans le même bateau

Gouvernants : vous avez besoin des entreprises. Nous avons besoin d’une politique de liberté et non de contraintes et de sanctions. L’imagination des Français doit aussi être entendue ; ils ont rédigé des cahiers de doléances et des propositions d’économies, en particulier au sein de leurs entreprises qui ont encore la tête hors de l’eau malgré les grandes marées de bureaucraties qui se plaisent à les éroder. Quand va-t-on réfléchir sérieusement aux retraites par capitalisation, lesquelles peuvent fournir des fonds propres aux entreprises ? Les faillites s’accélèrent et les délocalisations aussi. On ne devrait plus jamais prendre une seule décision fiscale concernant les entreprises sans avoir réalisé, au préalable, une véritable simulation avec leur concours.

C’est en laissant prospérer nos entreprises et développer nos compétences que le pays va se redresser. Il ne faut pas prendre des mesures contre elles mais avec elles, elles y sont préparées et peuvent également être force de proposition quant aux économies qui peuvent être faites dans la fonction publique. Et les Français sont d’accord : ils n’ont confiance qu’en leurs entreprises. Le sondage effectué parmi les salariés par Opinionway pour la 22e fête des entreprises (J’aime ma boite) qui a lieu le jeudi 17 octobre le confirme ; ils déclarent avoir deux fois plus confiance dans leurs entreprises que dans leur gouvernement… À méditer. Fêtez donc vos entreprises avec une gravité inhabituelle, en ayant conscience qu’elles sont la véritable colonne vertébrale de la France.

Dois-je me plier à « une éthique du silence »?

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Dans notre monde médiatique bavard, qu’on dit affecté par la « brutalisation » du débat, c’est parfois le silence qui est le plus éloquent. Qu’en pense notre chroniqueur, à la tête de l’Institut de la parole ?


Dans le livre de Jean Birnbaum Le Courage de la nuance, il est écrit que « parfois une éthique de la mesure est une éthique du silence ».

J’aime la pensée et l’écriture d’autres, qui vous obligent, quand soi-même on est prêt à les accueillir, à remettre en cause ce qu’on a toujours cru, ce qui vous est apparu tellement naturel que jamais vous ne l’avez discuté. Je me suis demandé, saisi par l’interrogation que cet ouvrage m’a inspirée, si je n’avais pas trop dérogé à cette « éthique du silence » dont je comprenais l’exigence mais que je n’avais guère cultivée.

Zone sensible

Pourtant j’ai admiré et je continue à admirer les personnalités qui opposent un refus ferme aux sollicitations médiatiques nombreuses qui leur sont adressées. Je songe par exemple à Jean-Jacques Goldman, à Mylène Farmer, à Catherine Deneuve ou au si regretté Michel Blanc et, à l’étranger, à Adele, Bradley Cooper ou Bill Murray. Il y a également des intellectuels qui évitent de venir sur les plateaux de télévision parce qu’ils considèrent que cette implication rendrait impossible l’expression de la moindre complexité.

En même temps, et à rebours, tous les jours j’éprouve comme un malaise devant la surabondance médiatique d’autres, qui résulte de la constance des médias – de droite ou de gauche – à inviter les mêmes pour être à l’abri de la moindre imprévisibilité. Et, sur certains sujets, il n’y a pas la moindre surprise. Malgré l’inventivité et la volatilité de l’actualité, il y a en quelque sorte des titulaires…

Oscillant entre ces deux extrémismes, je m’en suis tenu à ce qui me paraissait une évidence : quand on s’efforce de penser, d’écrire et d’user le plus correctement possible de l’oralité, on n’a aucune raison de fuir l’affirmation de soi. Non pas pour extérioriser une quelconque volonté de pouvoir mais, tout simplement, par souci de justifier son existence et par passion du débat d’idées. Il n’y a pas une once de narcissisme dans cette obligation même si on confond souvent ce besoin humain de prendre sa part dans le débat pluriel d’une société et des médias avec une posture vaniteuse.

A lire aussi: Fan de cette nana-là!

Aussi, longtemps, n’ai-je jamais eu l’impression de sortir de ce que ma nature, mes envies, mes idées me dictaient. Cela me semblait être le comportement banal de quelqu’un qui, sans surestimer ce qu’il offrait, se sentait cependant légitime pour le proférer ou l’écrire. Il y avait, derrière cette normalité, à bien y réfléchir, sans doute l’espoir qu’on était attendu, que ce qu’on avait à dire, sans être forcément fulgurant, méritait au moins d’être lu ou entendu.

Pourtant cette « éthique du silence », correspondant à « une éthique de la mesure », m’a questionné, comme si elle touchait en moi une zone sensible et qu’elle représentait une aspiration secrète, un désir jamais assouvi, un regret de n’avoir su déserter l’expression publique ou médiatique au bénéfice d’un silence infiniment porteur de sens.

Mais pourquoi la mesure, une pratique de la nuance devraient-elles conduire au silence, à partir du moment où on s’imagine n’avoir pas à les répudier quand on s’exprime ? Pourtant je perçois clairement des séquences où, sur les réseaux sociaux, oralement ou par écrit, en peu de signes ou plus longuement, j’aurais peut-être dû arbitrer en faveur de l’abstention.

Exister c’est insister

Parce qu’on n’en savait pas assez. Parce que trop s’étaient déjà prononcés. Parce qu’on n’aurait rien ajouté d’essentiel à la masse déjà profuse. Parce qu’à aucun moment on n’était motivé par ce prurit irrésistible de l’adhésion ou de la contradiction, par l’enthousiasme ou l’indignation, par cette légère touche de conscience de soi vous faisant croire à une obligation impérieuse d’ajouter votre pierre. Parce que, surtout, j’avais un tempérament totalement étranger à l’allure d’un silence durable, à la politique du retrait et de l’effacement.

Parce que, pour moi, exister c’est insister et que si, au contraire, on a une vision aussi réduite de son rôle sur Terre et dans la vie, une si piètre conception de son utilité, on serait bien en peine de se juger nécessaire à soi et aux autres. Il faudrait alors se supprimer d’une manière ou d’une autre…

Je vais dorénavant m’attacher davantage, non pas à la mesure (qui n’est ni tiédeur ni faiblesse mais victoire contre l’outrance) mais à son éventuelle conséquence éthique : le silence. Il y a une morale qui prône la liberté d’expression, la volonté d’être soi.

Pourquoi pas une morale du silence éloquent ?

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Dans l’enfer ultraprogressiste

À l’image du libéralisme, le progressisme a lui aussi ses « ultras ». Animés d’intentions louables en apparence, ils cachent mal leurs passions tristes: hypocrisie, vengeance, ingratitude, racisme, antisémitisme, bêtise crasse et mauvaise foi.


La mutation du concept de progrès en idéologie progressiste portait déjà en elle le ver du fanatisme. Non, toute nouveauté ne peut être sanctifiée, ni tout ce qui est ancien, bon à jeter aux orties ou à « déconstruire ». Il en va aujourd’hui du progressisme comme du libéralisme économique : parfois, trop, c’est trop. Obliger ainsi EDF à vendre à perte son électricité à des « concurrents » qui ne produisaient rien relevait du dogmatisme. Cet ultralibéralisme a désormais son pendant sociétal : l’ultraprogressisme. Ses sectateurs hurlent à l’énoncé suivant – « Tous les musulmans ne sont pas terroristes ; mais tous les terroristes sont musulmans » – mais applaudissent, émus, à cette affirmation : « Tous les violeurs sont des hommes donc tous les hommes sont des violeurs potentiels. » Les mêmes se battent contre l’expulsion de terroristes présumés, au nom d’un État de droit détourné de son objet. Défendre un seul individu, quitte à sacrifier l’intérêt de millions d’autres, constitue l’essence fanatique de l’ultraprogressisme – à l’instar « du monde rempli d’idées chrétiennes devenues folles », décrit par Chesterton.

Trouple infernal

Nos nouveaux gardes rouges intersectionnels font régner la terreur grâce à quelques tours de passe-passe simples et redoutables. Ils ont ainsi élargi le concept aussi généreux que dangereux du « Femme, je te crois » à toutes les communautés sexuelles ou raciales : « Membre d’une minorité, je te crois » est devenu leur credo. Écouter est une chose ; croire sur parole en est une autre. C’est pourtant bien une nouvelle Loi des suspects dont ils ont établi le principe, puisque la contrepartie de cet axiome s’écrit « Membre de la majorité (sexuelle, raciale), tu mens. » Un dogme totalitaire qui crève les yeux, une tyrannie bienveillante au nom d’un humanisme dévoyé. Désormais, « Émeutier issu de la diversité, ta rage est légitime » ; tandis qu’« Émeutier blanc anti-immigration, tu mérites la prison ».

Tout membre de la majorité se voit, au demeurant, sommé d’observer chaque mantra progressiste, sans exception. L’adhésion des minorités aux injonctions LGBT, féministes, écologiques, antiracistes ou animalistes se fera, en revanche, « à la carte ». L’antisémitisme des cités ? Silence gêné. L’homophobie des « quartiers » ? Un (petit) ange passe. Le voile ou l’abaya ? Une liberté de femme pudique. L’excision ? Vous pouvez répéter la question ? Les souffrances animales de l’abattage rituel ? Toute critique relèverait de l’islamophobie. Ces millions de moutons égorgés ne sont rien en comparaison… des quelques centaines de taureaux sacrifiés dans les arènes par des Blancs réactionnaires. La corrida devient, à les écouter, un ignoble génocide alors que l’Aïd figurerait un aimable enrichissement diversitaire. L’ultraprogressisme ressemble à un trouple infernal entre Tartuffe, Ubu et Orwell.

La soif de justice affichée par ses (gentils) thuriféraires désireux de défendre chaque victime du racisme ou du (méchant) patriarcat, n’a de limites que l’origine ethnique du coupable. Les contorsions auxquelles se livrent les néoféministes pour relativiser le sort des Israéliennes violées ou celui des Iraniennes voilées portent un nom : l’hypocrisie. La traite de jeunes blanches à Telford par des Pakistanais, les viols de Cologne ou le harcèlement de rue à La Chapelle ne les avaient pas plus intéressés. Prompte à dénoncer de fantasmatiques micro-agressions nécessitant l’abri d’un « safe space », vigilante face au moindre « mégenrage », ulcérée par la mention de « mademoiselle » dans un formulaire, la nébuleuse ultraprogressiste ne voit rien, n’entend rien dès que les agresseurs ne sont pas de type caucasien. Leur « justice » a le goût de la revanche et l’odeur peu ragoûtante de la vengeance. Vengeance contre l’Occident. Vengeance contre le mâle. Vengeance contre l’hétérosexuel. Vengeance contre le Blanc. Vengeance contre le juif. Les autres, les « racisés » ne peuvent être coupables de rien, tandis que, symétriquement, la majorité « non racisée » ne peut jamais être totalement innocente. La théorie délirante du racisme systémique prend sa source dans ce raisonnement et le prétendu privilège blanc, c’est désormais celui d’être l’éternel criminel, a minima « the usual suspect ». Avoir systématiquement tort en fonction de sa pigmentation, n’est-ce pas la définition même du racisme et l’instauration d’une hiérarchie raciale dont le progressisme devait à jamais nous débarrasser ?

Escroquerie à l’émotion

Notre protection sociale, nos lois, nos droits de l’homme (pardon nos droits humains) se voient méthodiquement détournés contre l’intérêt général. Non, en Méditerranée, les ONG ne secourent pas des marins victimes d’une fortune de mer mais des naufragés volontaires, abusant d’une solidarité ancestrale. Mettez le feu à votre maison et essayez de vous faire indemniser par votre assureur. Il vous expliquera la différence entre un accident et une fraude. L’ultraprogressisme pratique l’escroquerie à l’émotion, une technique bien définie, dans un autre contexte, par le fisc et durement sanctionnée : l’abus de droit. Mais attention : le cadavre du petit Aylan, c’était de l’émotion légitime ; le meurtre de la petite Lola, une ignoble récupération.

Le vocabulaire qu’impose le progressisme dans la sphère médiatique construit méthodiquement une prison mentale de laquelle on ne s’échappe qu’au prix du sceau infamant de l’extrême droite. Il en va ainsi du concept désormais admis d’islamophobie. La résistance des Français aux oukases religieux de l’Islam (voile, mixité, etc.) n’est pas une haine de l’Islam, mais une simple exigence d’intégration de la part de la majorité. En quoi ce souhait de respect des us et coutumes d’un des pays les plus accueillants de la planète pourrait-il être assimilable à de la haine ? Ingratitude et passions tristes font ainsi le miel de l’ultraprogressisme qui marche main dans la main avec le communautarisme. Conséquence de ce travail de sape, l’intérêt général disparaît au profit unique des droits individuels et des communautés. L’État-providence n’y survivra pas.

Cette dérive fanatique du progressisme signe en effet, et la fin de l’égalité des citoyens, et celle de la solidarité nationale (la Nation, quel mot horrible !). Bref, la fin du progressisme en son nom.

Lepénisation de Mélenchon, acte 2

Après avoir joué pendant des années la carte de l’intransigeance vis-à-vis du pouvoir, le leader des Insoumis se vante désormais d’exercer, en matière économique, une certaine influence sur le gouvernement. Exactement comme le RN en matière migratoire.


Pour lui, c’est carrément « l’agonie d’une époque ». Dans un texte mis en ligne hier sur son blog personnel, Jean-Luc Mélenchon a salué le projet du gouvernement d’augmenter les impôts des contribuables disposant des plus hauts revenus et des entreprises les plus prospères.

« Victoire idéologique »

« Le budget Barnier reconnaît notre victoire idéologique, pour nous antilibéraux, se réjouit-il dans ce texte incroyablement apaisé. L’impôt sur les riches est réhabilité et celui sur les superprofits des entreprises aussi. (…) Peu importe les montants : c’est le raisonnement qui compte. (…) Michel Barnier a enterré les interdits et les tabous du libéralisme des gouvernements macronistes. » N’en jetez plus !

Ainsi donc, le général Tapioca continue de se lepéniser. Mais cette fois-ci, ce n’est plus à Jean-Marie qu’il emprunte ses méthodes. Finis les provocations éruptives et les sous-entendus essentialisants. Désormais c’est à Marine Le Pen que Jean-Luc Mélenchon essaie de ressembler. La patronne du RN ne s’était-elle pas elle aussi réjouie d’une “victoire idéologique” lors du vote de la loi Immigration l’hiver dernier ?

A lire aussi, Stéphane Germain: Dans l’enfer ultraprogressiste

Le leader des Insoumis vient en réalité de rentrer dans une nouvelle séquence. La motion de censure du Nouveau Front populaire ayant été rejetée, il ne peut plus hurler – au mépris du bon sens le plus élémentaire : « On nous a volé l’élection ! »  Le processus de destitution du président ayant été abandonné la semaine dernière, il ne peut davantage promettre – contre toute évidence : « On va virer Macron ! » Dès lors, le voilà qui se résout à faire de la politique de façon plus classique. Comme Marine Le Pen et ses députés cravatés, ses paroles sont à présent celles d’un opposant qui instaure un rapport de force rationnel et civilisé avec le pouvoir.

Barnier Sanders : tax the rich !

Quelles sont les armes – enfin loyales – dont il dispose pour infléchir les décisions de Michel Barnier ? Ici s’arrête l’analogie avec le RN. Car Marine Le Pen brandit l’épouvantail de la censure au parlement pour se faire entendre, obtenant notamment que le ministre de l’Intérieur remette sur l’ouvrage une loi Immigration, Mélenchon, lui, agite plutôt la menace du mouvement social et du blocage du pays. Et cela paye ! Effrayé à l’idée de vivre l’enfer d’Alain Juppé en 1995, le Premier ministre a donné quelques gages à la gauche dans sa proposition de budget.

A lire aussi, du même auteur: Elon Musk: Mais pourquoi est-il si méchant?

Et les Français dans tout cela ? Malgré ce que prétendent la plupart des commentateurs de la grande presse, on peut se demander s’ils n’ont pas obtenu en somme ce qu’ils voulaient : un gouvernement centriste, présentable et policé, sachant toutefois écouter les demandes de redistribution de la gauche et les demandes de contrôle aux frontières de la droite. Michel Barnier fait en somme penser à ces couples bourgeois qui doivent se résoudre, en gardant leurs bonnes manières, à une certaine infidélité, pourvu que celle-ci ne soit pas trop exposée.

Responsables, mais plus coupables

Tourcoing / voile: l’incident survenu il y a une semaine démontre que les élèves musulmans sont de plus en plus nombreux à «tester» l’institution scolaire.


Le 7 octobre dernier, dans un lycée de Tourcoing, une élève a giflé une enseignante qui lui demandait de retirer son voile. Cette élève venait de se changer et s’apprêtait à quitter l’établissement. Elle a essayé de traverser le lycée voilée, jouant avec les limites, tentant de grignoter petit à petit le cadre de la laïcité. Il s’agit d’ailleurs là d’une transgression qui se répand dans les établissements scolaires.

L’enseignante aurait pu par lassitude, par renoncement, par peur, passer outre: ce n’était pas son élève, elle allait de toute façon remettre son voile dans la rue quelques minutes plus tard, elle n’était pas la seule à agir de la sorte.

Mais ce professeur a fait preuve de courage, de professionnalisme et surtout du sens de la responsabilité dont le manque dramatique provoque l’effondrement de l’autorité à l’école. Elle s’est montrée responsable de notre École. Responsable et respectueuse, non pas de passe-droits associés à une communauté particulière, mais de l’humanité des élèves, de leur intelligence et de leur capacité à être, devenir ou rester des enfants de la République.

A lire aussi, Céline Pina: Enseignant à Tourcoing: un métier à rixe

L’offensive islamiste gagne du terrain dans notre pays. Les professeurs se censurent par crainte des incidents ou des agressions. Mais aussi par un étrange sentiment de culpabilité, ils redoublent de précautions et de bienveillance. Nous nous sommes tous demandé à un moment ou un autre si nous n’allions pas heurter la sensibilité de nos élèves musulmans. Le sort tragique de Samuel Paty, dont nous commémorons pour la quatrième fois la mort en est l’illustration. Craignant d’offenser, il a proposé aux élèves qui pensaient être choqués de détourner le regard lors de sa séance sur la liberté d’expression. Le propos est revenu aux oreilles de l’élève absente qui a senti là une faiblesse et s’est engouffrée dans la faille. Elle a menti et, sanctionnée à ce moment-là par le collège, s’est servie de l’anecdote pour se dédouaner de ses propres agissements, inversant et transformant l’intention bienveillante en acte discriminatoire. On connaît la mécanique infernale qui a suivi.

Il n’y a pas de sensibilité particulière liée à une religion. Il n’y a que la colère de ceux qui constatent qu’on ne les craint pas assez, ou sentent qu’on veut les préserver comme une catégorie à part. Ils manipulent ainsi cyniquement la culpabilité fondamentale de bien des enseignants qui, se pensant privilégiés, pensent aussi que l’islam est intrinsèquement la religion de l’opprimé.

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Les foules écumant de rage qui demandent la tête de Salman Rushdie ne sont pas composées de pauvres âmes sensibles blessées, mais de fanatiques qui n’ont qu’un but : répandre et imposer la charia à tous et à chacun.

La logique des élèves qui se prétendent offensés est la même. Ils ne sont pas blessés, mais instrumentalisés par une idéologie totalitaire et mortifère.

La réponse doit évidemment être globale et politique.

Mais nous, professeurs, devons avoir à l’esprit la conduite exemplaire de notre collègue de Tourcoing et le souvenir lancinant de Samuel Paty, pour nous sentir responsables, mais plus coupables.

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L’irresponsabilité en politique mériterait la sanction judiciaire

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Mickaëlle Paty, sœur de Samuel Paty enseignant assassiné par un terroriste islamiste, auditionnée par les sénateurs à Paris, 17 octobre 2023 © SEVGI/SIPA

L’impéritie scandaleuse de nos dirigeants, tant en matière sécuritaire qu’économique, donne envie à bien des citoyens de réclamer des comptes, observe notre chroniqueur.


L’Élysée haut perché est redescendu sur terre. Mardi, Emmanuel Macron a renoncé à la hausse de dotation de la présidence pour 2025. L’Assemblée nationale et le Sénat ont emboité le pas, en annulant leurs revalorisations budgétaires. La veille, sur RTL, Didier Migaud, Garde des Sceaux, avait jugé « démagogiques » les indignations face à la légèreté des trois institutions priant les Français de se serrer la ceinture sans donner l’exemple. Ce sursaut de bon sens, symbolique, dit l’amateurisme qui prévaut trop souvent dans les sphères du pouvoir. « Présumez toujours l’incompétence avant de rechercher un complot », avait prévenu Machiavel. En l’occurrence, l’irresponsabilité au sommet est telle que se pose la question de la mise en cause judiciaire des plus hautes autorités. Cet été, Mickaëlle Paty, la sœur de Samuel Paty, le professeur décapité le 16 octobre 2020 par un islamiste qui n’avait rien à faire en France, a saisi le tribunal administratif afin d’obtenir la condamnation de l’Etat pour ses manquements dans la protection élémentaire d’un enseignant clairement menacé depuis onze jours. L’État a déjà été condamné, après des recours intentés par des écologistes, pour inaction climatique. Il y aurait de multiples raisons de le condamner pour inaction sécuritaire, après les meurtres de tant d’innocents par des étrangers, souvent multirécidivistes ou fichés S, qui auraient dû être expulsés. Mais sa même désinvolture, appliquée en matière économique et budgétaire, devient elle aussi un possible sujet de plaintes devant la justice. Le trou de 100 milliards d’euros supplémentaires, découvert par Michel Barnier, pourrait ainsi relever pénalement de la forfaiture si une volonté de dissimulation en haut lieu devait apparaître. Bruno Le Maire assure avoir, en vain, alerté le président sur ces dérapages non avoués…

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L’ouverture de l’examen, ce mercredi, du projet de loi de finance 2025 par les députés pourrait être l’occasion de révéler, par une commission d’enquête spécifique, la mascarade de la gestion financière et budgétaire de la France par le chef de l’État et son ministre de l’Économie, qui s’est vanté à son départ d’avoir « sauvé l’économie française ». Le « Mozart de la finance », installé à l’Elysée sous le parrainage d’influents acteurs du monde économique, a en réalité conduit le pays, chéquier ouvert, dans une permanente fuite en avant. Au point d’avoir augmenté la dette de 1000 milliards d’euros (3250 milliards au total), ce qui représente, au titre du remboursement annuel du seul intérêt de la dette, 55 milliards d’euros (soit 800 euros par Français, enfants compris). Le déficit public, annoncé à 3,7% du PIB pour 2024 par Elisabeth Borne, est passé à 6,1%. Aucune économie dans le fonctionnement de l’État n’a été faite. Le nombre de fonctionnaires (près de 6 millions) n’a cessé d’augmenter. Le « quoi qu’il en coûte », présenté par les flagorneurs comme le trait de génie de la macronie, s’est révélé être ce qu’il était pour le jugement commun : une folle addiction à l’emprunt afin de feindre un progressisme à crédit sur le dos des contribuables. Le confinement sanitaire, décrété dans l’hystérie du Covid, a été une mesure irrationnelle dont la France aurait pu faire l’économie, à l’image de la Suède.

Bref, le monde politique, depuis des décennies, a multiplié les mesures les plus absurdes, les plus irréfléchies, les plus sottes. Il serait temps que les plus grands fautifs rendent des comptes, devant la justice administrative, mais aussi pénale.

Le NFP, dernière gauche immigrationniste d’Europe?

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La Première ministre italienne Giorgia Meloni rencontre son homologue britannique Keir Starmer à Rome, 16 septembre 2024 © CHINE NOUVELLE/SIPA

Du Danemark à l’Allemagne, en passant par la Grande-Bretagne et la Slovaquie, des partis de gauche sont rattrapés par le réel : ils défendent un strict contrôle des frontières pour enrayer l’immigration de masse. En France, la gauche qui continue de voir un électeur en chaque immigré ne change rien à sa doctrine.


Et si le grand tour de vis contre l’immigration venait, en Europe, de la gauche ? L’exemple danois attire depuis plusieurs années la curiosité de ses voisins. En mai 2023, Éric Ciotti, qui n’était pas encore démissionnaire de la présidence de LR ni allié du RN, se rendait à Copenhague, en quête de recettes nordiques. Pour comprendre le tête-à-queue danois sur les questions migratoires, il faut remonter à 2001, quand le Parti populaire, classé comme nationaliste, a soutenu une coalition de droite plus modérée, en échange d’un durcissement des règles migratoires. C’est ainsi que le camp conservateur a pu garder les commandes du pays pendant dix ans, de 2001 à 2011, puis de 2015 à 2019. Au prix de 135 modifications de la loi sur les étrangers, le pays de la Petite Sirène peut se vanter aujourd’hui d’avoir la politique d’accueil la plus ferme d’Europe occidentale. Lors de son premier retour aux affaires après 2011, la gauche danoise s’est certes efforcée d’assouplir les règles mises en place pendant la décennie 2000. Elle ne s’y aventure plus désormais et depuis sa victoire de 2019, elle assume l’héritage législatif de la droite. En janvier 2021, la Première ministre Mette Frederiksen tenait ainsi devant le Parlement le discours que toutes les droites populistes d’Europe rêvent d’entendre : « Nous devons nous assurer que peu de gens viennent dans notre pays, sinon notre cohésion sociale sera menacée. » En 2017, dans l’opposition, elle promettait déjà de déplacer les demandeurs d’asile dans des centres délocalisés en Afrique. Désormais, il y a consensus des principales formations politiques danoises pour estimer que, si le pays veut maintenir son modèle social, il doit drastiquement limiter l’accès à la nationalité et aux aides sociales. Le bloc de gauche est en train de récolter les fruits électoraux de sa stratégie : aux Européennes de 2024, les partis de la coalition de Mette Frederiksen rassemblaient 35 % des voix, tandis que le Parti populaire redescendait à un famélique score de 6,37 %. La formation de droite classique est pour sa part en plein déclin. Aux législatives de 2022, elle était même passé sous la barre des 3 %, très loin des 21 % réalisés en 2015. Deux paradoxes à observer : pour renaître politiquement, la gauche danoise a dû intégrer une bonne partie du programme de la droite nationale ; et celle-ci, pour avoir su imposer ses thèmes depuis vingt ans, est désormais renvoyée aux marges de la vie politique locale.

Un thé avec Meloni

Le modèle danois peut-il inspirer les gauches européennes ? Lors de la campagne des législatives britanniques de juillet 2024, le candidat travailliste Keir Starmer, rompant avec l’islamo-gauchisme des années Jeremy Corbyn, s’est engagé à réduire l’immigration. « Si vous m’accordez votre confiance, je vous fais cette promesse : je contrôlerai nos frontières et ferai en sorte que les entreprises britanniques soient aidées à embaucher en priorité des Britanniques », déclarait-il au Sun avant le scrutin. Il faut dire que, malgré le Brexit, le Royaume-Uni semble ne plus contrôler grand-chose à ses frontières. Ce sont désormais 1,2 million d’étrangers, extra-européens pour l’écrasante majorité, qui affluent chaque année dans le pays. Ménageant la chèvre et le chou, Keir Starmer annonçait dans le même temps qu’il renonçait au projet controversé de déplacement des demandeurs d’asile au Rwanda, cher au Premier ministre conservateur sortant Rishi Sunak et fort inspiré par le modèle danois – mais ce projet pourrait être redéployé en Albanie (voir le texte de Frédéric de Natal et Jeremy Stubbs). En septembre 2024, alors que le Royaume-Uni sortait d’un été marqué par des violences ethniques, le nouveau locataire du 10 Downing Street faisait sensation en s’affichant aux côtés de la Première ministre de droite italienne Giorgia Meloni et surtout en louant les résultats de cette dernière en matière de lutte contre l’immigration illégale. « Vous avez fait des progrès remarquables, en travaillant d’égal à égal avec les pays se trouvant sur les routes migratoires afin de traiter, à la source, les facteurs de la migration et de contrer les réseaux, et le résultat est que les arrivées illégales par la mer en Italie ont baissé de 60 % depuis 2022 », faisait-il remarquer à son hôtesse romaine. Une visite qui n’a pas plu à tout le monde au sein de la gauche britannique ; Kim Johnson, députée travailliste de Liverpool, a regretté que le nouveau Premier ministre « aille chercher des enseignements auprès d’un gouvernement néofasciste ». Malgré la survivance d’une aile gauche aux thèmes proches de notre LFI nationale, le Labour ne peut plus se permettre de se présenter devant les électeurs britanniques sans un minimum de fermeté sur ces sujets.

AfD et BSW, la tenaille identitaire

Outre-Rhin aussi, l’heure est au raidissement après l’annonce faite par le chancelier social-démocrate Olaf Scholtz du rétablissement des contrôles aux frontières pour une période minimale de six mois (voir l’article de Nicolas Pouvreau-Monti de l’Observatoire de l’Immigration et de la démographie dans notre magazine #127). La fin du mois d’août a été ensanglantée en Allemagne par l’attaque au couteau commise en plein « Festival de la Diversité » (ça ne s’invente pas…), à Solingen, coûtant la vie à trois personnes et faisant huit blessés. L’assaillant était un Syrien de 26 ans. En Allemagne, la droite de la droite a le vent en poupe – comme un peu partout en Europe. On l’a vu en Thuringe, en plein cœur de l’ancienne RDA, lors des dernières élections régionales, au cours desquelles l’AfD (qui a réussi à effrayer le Rassemblement national au point d’entraîner une rupture avec lui au Parlement européen) est arrivé nettement en tête, dépassant les 32 %. On l’a vu également aux Européennes de juin, où le parti a obtenu 15 sièges – malgré des dérapages de campagne qui nous ont rappelé les pires heures de Jean-Marie Le Pen.

Toutefois, l’AfD ne monopolise plus le créneau anti-immigrationniste. Un nouvel objet politique non identifié est apparu cette année en Allemagne : le BSW, c’est-à-dire « l’Alliance Sahra Wagenknecht – Pour la raison et la justice ». Issue d’une scission de Die Linke (l’extrême gauche germanique) et menée, comme son nom l’indique, par Sahra Wagenknecht, la nouvelle formation se réclame d’une « gauche conservatrice », à contre-courant du wokisme généralisé en Occident. À gauche toute en économie, le parti souhaite mettre un coup d’arrêt à l’immigration incontrôlée, à l’origine selon lui de l’explosion de la criminalité. Prorusse par ailleurs, le parti joue sur la corde « ostalgique » d’une partie des Est-Allemands. Aux régionales de Thuringe, il vient d’obtenir un score de 15,77 %, dépassant Die Linke. Aux Européennes, pour sa première participation à un scrutin national, le BSW a obtenu 6,2 % et six sièges. Sur le Stadtplatz, pris en tenaille entre une droite et une gauche « radicales » qui se rejoignent peu ou prou sur les questions migratoires, le chancelier de centre gauche n’a pas d’autre choix que de durcir le ton. Les mesures prises sur le contrôle des frontières ont toutes les chances de s’inscrire dans le temps. S’il ne s’agit pas d’une condamnation à mort de Schengen, c’est tout de même un coup de canif contre son esprit.

Ailleurs en Europe, une forme de national-populisme de gauche s’exprime en Slovaquie avec Robert Fico, Premier ministre grièvement blessé lors d’une tentative d’assassinat en mai 2024. Sorte de cousin « de gauche » de Viktor Orban, il avait accédé aux commandes de la République grâce à une alliance étonnante, en 2006, avec des partis de droite nationaliste et populiste. Il s’est signalé par des prises de position très hostiles à l’immigration et à l’apparition d’une hypothétique « communauté musulmane » en Slovaquie.

La gauche chauvine française existe, elle s’appelle Marine

Alors que la gauche du Nord de l’Europe, rattrapée par le réel, revient peu à peu de l’angélisme du sans-frontiérisme, la gauche française rame imperturbablement à contre-courant. Conçue sur la rive droite du PS du début des années 2010, la stratégie Terra Nova qui consistait à délaisser l’électorat ouvrier au profit des minorités a été pleinement récupérée par la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. Pour LFI, le calcul cynique est simple : la victoire électorale est possible, à condition que la vague migratoire continue. Pas question de barrer la route à de futurs électeurs. Sur le terrain, l’affaire du tractage au faciès révélée par François Ruffin dans son dernier livre montre à quel point la question ethnique est au cœur de la stratégie (et des obsessions) du parti d’extrême gauche. Mais alors, si LFI ne parle plus qu’à la gauche Vélib’ de l’Est parisien et aux « quartiers », qu’est-ce qui empêche l’émergence d’un BSW à la française ?

Sahra Wagenknecht, lors d’une conférence de presse de l’Alliance Sahra Wagenknecht (BSW), Reichstag, Berlin, 9 septembre 2024 snapshot/Future Image/ /Shutterstock/Sipa

On pourrait se demander si, effectivement, l’effondrement du secteur industriel en France, dont la part dans le PIB est passée à 17 % en 2022 (alors qu’il est encore de 30 % en Allemagne) ne rend pas saugrenue toute tentative de séduction d’une classe ouvrière old school, plus proche de l’habitus de Georges Marchais que de Mona Chollet. Il est vrai que les maigres tentatives à gauche n’ont guère été couronnées de succès. Georges Kuzmanovic, en rupture avec Mélenchon après 2017 et fondateur du parti République souveraine, a connu pour le moment des résultats électoraux plus proches de Jacques Cheminade que de Sahra Wagenknecht. En 2018, encore membre de LFI, il répondait à une interview au Nouvel Obs, dans laquelle il signalait déjà à l’époque sa sympathie pour la dirigeante allemande et sa volonté de convertir LFI à la lutte contre l’immigration massive. Il fut aussitôt diabolisé par le grand chef Mélenchon. Tous ceux qui se sont aventurés, à gauche, à exprimer un point de vue réaliste sur les questions migratoires n’ont pas tardé à être brocardés par leurs petits camarades. Fin 2021, alors que la campagne présidentielle s’annonçait, Arnaud Montebourg avait proposé de couper les flux de transferts d’argent privé (en gros, Western Union) pour les pays peu coopératifs quant au rapatriement de leurs propres ressortissants. Que n’avait-il pas dit là ? L’ancien député de Saône-et-Loire dut faire son mea culpa quelques heures plus tard, après une volée de bois vert et des tweets de Guillaume Meurice. Plus récemment, c’est François Ruffin qui a été comparé à Jacques Doriot, collaborationniste qui a porté l’uniforme allemand sur le front de l’Est. Doriot, Déat… La gauche rejoue à chaque fois les années 1930 et 1940 ; elle a dernièrement convoqué ses grands mythes en appelant « Nouveau Front populaire » son alliance de bric et de broc de juin dernier. En oubliant un peu vite qu’en avril 1937, Marx Dormoy, ministre de l’Intérieur du Front populaire, donnait instruction aux préfets de « refouler impitoyablement tout étranger qui cherchera à s’introduire sans passeport ou titre de voyage valable ».

Au début des années 2010, Régis Debray, ancien compagnon de Che Guevara, écrit un Éloge des frontières. Mais, cette année-là, c’est Stéphane Hessel et son navrant Indignez-vous qui émoustillent la jeunesse de la place de la République. Sur le terrain des idées et des ventes de livres, le « frontiérisme » de gauche avait perdu la première manche. Dans le socle idéologique de base du militant progressiste de 2024, la mystique des damnés de la terre est puissante ; impossible d’imaginer une remise en cause des flux humains, effet de la mondialisation au même titre que les flux de capitaux et de marchandises. En Allemagne, Thilo Sarrazin a pu écrire en 2010 un livre tout à fait hostile à l’immigration musulmane, et participer à des meetings de l’AfD, sans se faire virer du SPD pour autant. Quid d’un petit plaisantin, encarté au PS français, qui s’amuserait à en faire autant ? Alors, l’apparition d’une gauche à la BSW est-elle définitivement impossible de ce côté du Rhin ? En réalité, cette formation existe depuis cinquante ans. Dès les années 1980, bien avant les efforts de Marine Le Pen et de Florian Philippot, le Front national avait commencé à rafler la mise au sein de la classe ouvrière, sur fond de slogan « Trois millions de chômeurs = trois millions d’immigrés ». La gauche chauvine française existe, elle s’appelle Marine.

Prêt à tout?

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"The Apprentice" (2024) de Ali Abbasi © Metropolitan films

Et si le film « The Apprentice », que le candidat Trump qualifie de diffamatoire, boostait finalement sa fin de campagne?


À quelques jours de l’élection présidentielle américaine, plus serrée que jamais, vient de sortir au cinéma le biopic tant attendu sur la fulgurante et irrésistible ascension du jeune Donald J. Trump, portée par les conseils avisés et cyniques d’un célèbre avocat new-yorkais dont les plaidoiries et les méthodes de travail, au-delà de toute éthique, sentaient le soufre. Loin de la satire un peu lourdingue annoncée, le film dépeint au contraire la formidable trajectoire initiatique d’un fonceur ambitieux et intelligent, du début des années 70 au milieu des eighties reaganiennes, complètement en phase avec les attentes et les codes de la société de son temps…

Pourquoi l’inénarrable chef du fameux « MAGA Movement » pourrait-il gagner la prochaine élection présidentielle américaine du 5 novembre? Pour le savoir, il faut courir voir l’excellent film de l’Américano-dano-iranien Ali Abbasi (déjà auteur des très réussis Border et Les Nuits de Mashhad) qui, parait-il, était censé être une « satire » anti-Trump… What ? Pardon ? On ne doit pas avoir la même définition de la satire alors, tant ce biopic nous dépeint un homme ambitieux, intelligent, acharné, persévérant, téméraire, stratège, efficace, « hard-worker » (« Dormir est une perte de temps car on ne peut pas signer de contrats ! »)… Le jeune Trump est prêt à tout pour réussir et devenir le meilleur dans tous les domaines, en dépit de sérieux handicaps de départ. En ce sens, il épouse parfaitement l’idéologie profonde capitaliste et individualiste américaine et paraît complètement en phase avec les attentes de la fameuse « majorité silencieuse » du pays, celle qui a fait gagner en son temps les Nixon et Reagan (le véritable inventeur du slogan « Make America Great Again », au passage), abondamment cités et montrés dans le film, à travers les postes de télévision, les ondes radios, les portraits ou affiches publicitaires.

Le sens des affaires

« L’Amérique est mon meilleur client. Nous sommes les derniers remparts du monde libre face à l’enfer totalitaire », lui inculque son mentor et éminence grise, le très méphistophélique avocat new-yorkais Roy Cohn (parfaitement incarné à l’écran par Jeremy Strong, véritable co-star du film). Un Victor Frankenstein, en somme, qui va rapidement être vampirisé et croqué par son étonnante et insolite créature (incarnée par Sebastian Stan)… Laquelle ne va pas rechigner à passer plusieurs fois sur le billard, endurant, plus que de raison, les coups de scalpels pour des liposuccions et reconstructions capillaires… Hollywood est allé chercher le très inspiré et finalement relativement méconnu acteur roumano-américain pour incarner un Trump plus vrai que nature.

Sebastian Stan incarne le jeune Donald Trump. Metropolitan Films

Un acteur qui accède à la célébrité internationale, après avoir endossé des rôles de super-héros dans les univers Marvel comme celui de James « Bucky » Barnes dans la trilogie des Captain America.

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Trump, super-héros d’une Amérique en crise ? C’est en tout cas ce que l’on ressent dans sa farouche et indéfectible volonté de remettre de l’ordre et de la propreté dans les quartiers les plus glauques et mal famés de Big Apple et Atlantic City, à travers son ambitieux programme immobilier et ludique (l’empire Trump, c’est aussi les casinos). Même s’il connaît évidemment des échecs, il faut lui reconnaître une certaine prescience lorsqu’il comprend avant tout le monde que la rénovation de Grand Central et de Manhattan permettra d’attirer de nombreux touristes, venant du monde entier… transformant ainsi le plomb en or !

« Ce qui compte, c’est gagner ! »

Alors, certes, tous les coups sont permis (même les plus bas) pour écraser la concurrence, s’asseoir sur une certaine déontologie (« La réalité et la vérité ne sont que construction et abstraction ») et se hisser au sommet des fameuses Trump Towers, les plus hautes du pays avec celles du World Trade Center (beaucoup y voient un simple délire phallique). Mais il ne faut pas voir ce film à travers un prisme français déformant ou nos œillères européennes… Et encore moins écouter les critiques professionnels de la profession démolir ce métrage en raison de sa trop grande glamourisation de l’irrésistible ascension trumpienne. Le film dépeint au contraire une authentique success story à l’américaine en montrant comment ce jeune homme « aux cheveux d’or », sous le joug d’un père autoritaire, endetté et peu stratège, s’est progressivement affranchi de cette tutelle nuisible en se faisant un point d’honneur à réhabiliter une ville… puis un pays en déliquescence. Jusqu’à devenir milliardaire, avoir forcément les chevilles qui gonflent un peu, lâcher son mentor (qui plus est, atteint du virus du Sida, la « maladie des gays », véritable spectre hantant la moitié du métrage) ou maltraiter sa première femme d’origine tchèque Ivana (le film présente une terrible scène de viol conjugal – dans les faits, Ivana a retiré sa plainte)… et céder aux sirènes des joutes politiques (« Tous des losers au gouvernement ! ») en assénant cet aphorisme définitif : « Tout le monde rêve de devenir riche et de se faire sucer dans Air Force One ! »

Trump va jusqu’à comparer son art de la négociation à une œuvre d’art, à l’instar d’un Leonard de Vinci imaginant et réalisant La Joconde ! D’où la co-écriture avec le journaliste Tony Schwarz du best-seller (évoqué dans le film) L’art de la négociation (The Art of Deal) qui s’est vendu à plusieurs millions d’exemplaires dans le monde entier.

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« The Apprentice » est un film fort et intense qui se regarde comme un thriller tourné dans le New York des années 70, captivant et sans temps mort. La pellicule est volontairement jaunie et vintage, et le montage hyper rapide comme dans un vidéo-clip. Le tout au rythme des grands tubes disco/new wave/rock de l’époque, et ancré dans ce contexte explosif de propagation du Sida et de la révélation d’une nouvelle icône politique nommée Reagan faisant de la réduction des impôts et des taxes fédérales l’un de ses grands chevaux de bataille dans un pays alors écrasé par la concurrence internationale, notamment japonaise.

Terminons avec l’énoncé des trois fameuses règles intemporelles pour réussir dans la vie :

1) Face à l’adversité, toujours attaquer, attaquer, attaquer ;
2) Face aux attaques, toujours nier et ne jamais rien avouer ;
3) Même dans une défaite, toujours prétendre avoir remporté le combat et avoir gagné !

Pour spectateurs non-moutonniers seulement. Merci, M. Abbasi !

2 heures. En salles depuis le 9 octobre.

Trump: The Art of the Deal

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Marine Le Pen tient bon la barre

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Mesdames Le Pen et Griset arrivent au tribunal, Paris, 30 septembre 2024 © Louise Delmotte/AP/SIPA

C’est la liberté parlementaire qui est traînée devant la justice, assure Madame Le Pen au tribunal.


Marine Le Pen comparaissait lundi pour trois jours d’audience devant la 11è chambre du Tribunal correctionnel de Paris, dans l’affaire des assistants parlementaires des eurodéputés FN/RN. L’enjeu est de taille. La triple candidate à la présidentielle risque jusqu’à dix ans d’emprisonnement, un million d’euros d’amende, et de cinq à dix ans d’inéligibilité. Une peine qui, prononcée avec exécution provisoire, lui barrerait la voie de l’élection présidentielle de 2027 pour laquelle la présidente du premier groupe à l’Assemblée nationale est donnée en tête dans tous les sondages.

« Les deux, mon capitaine ! »

L’ancienne avocate est sur le pont à chaque audience, prête à batailler et démontrer sa bonne foi. Elle le répète en aparté : « Il n’y a à aucun moment accusation d’enrichissement personnel ou d’emploi fictif. La question fondamentale est la liberté parlementaire dans l’exercice du mandat de député. » Face à la vision bureaucratique du Parlement européen, l’ancienne eurodéputée oppose une défense toute politique. Pour Marine Le Pen, cette affaire révèle une méconnaissance de la vie politique qui confond engagement militant et salariat. Or le titre de chef de cabinet de Catherine Griset dans l’organigramme du parti n’est que la mise en valeur politique de son travail d’assistante parlementaire de Marine Le Pen. La magistrate interroge justement la relation entre les deux femmes. Comment se sont-elles connues ? Catherine Griset est devenue l’assistante de Marine Le Pen lorsque celle-ci était avocate. L’assistante l’a ensuite suivie quand l’ancienne avocate a créé le service juridique du Front national, lors de la scission avec Bruno Mégret et les batailles juridiques autour du nom du parti. Et, « c’est tout naturellement » que Catherine Griset devient son assistante parlementaire lorsque Marine Le Pen est élue eurodéputée. La chef de l’opposition souligne « le travail indispensable » de son assistante qui a la main haute sur toutes ses boîtes mails. « Je ne touche pas à ma boîte (mail) au Parlement européen, ni à ma boîte officielle, la seule que j’utilise c’est ma boîte personnelle. Elle s’occupe de mon agenda -ce qui n’est pas une mince affaire- elle s’occupe d’être en contact avec les autres assistants parlementaires, avec les autres députés, elle organise mes déplacements, réserve mes hôtels quand je vais au Parlement européen… Elle est la destinataire des informations, elle archive les mails… » Marine Le Pen assure que « tout le monde sait que Catherine Griset est (son) assistante parlementaire. Il n’y a pas de volonté de dissimulation. » La présence de Catherine Griset sur les organigrammes du parti politique se justifie comme un outil de communication. Tous les titres de l’organigramme sont des fonctions non rémunérées, comme dans toute association loi 1901, souligne l’élue. Et, comme Catherine Griset était son assistante parlementaire, il était « naturel qu’elle devienne (sa) chef de cabinet, elle a la haute main sur mon agenda parlementaire. » Me Maisonneuve, avocat de la partie civile, renvoie l’ancienne eurodéputée à l’une de ses déclarations lors de l’instruction où elle indiquait que « lorsque les assistants parlementaires ne sont pas strictement occupés à des tâches parlementaires, ils peuvent faire des tâches pour le parti ». Face au tribunal, Marine Le Pen souhaite affiner ce propos. Il faut entendre dans cette phrase le mot “parti” en tant que mouvement politique. « Je considère que les députés travaillent au bénéfice de leurs idées. Et qui portent leurs idées ? Le mouvement politique, ou le parti. Le député ne travaille pas à son propre bénéfice », explicite-t-elle.

Alors, Catherine Griset a-t-elle travaillé pour Marine Le Pen, eurodéputée, ou pour Marine Le Pen, femme politique et présidente du Front national ? « Les deux, mon capitaine !» répond vaillamment l’élue du Pas-de-Calais. Comment peut-on distinguer la femme politique de l’élue ? Quand Marine Le Pen est eurodéputée, son assistante parlementaire est chargée de prioriser à son agenda toutes les questions européennes. Et quand, à partir de 2009, la législation européenne oblige les assistants parlementaires accrédités à être domiciliés en Belgique, l’assistante parlementaire accréditée se domicilie chez l’assistant parlementaire belge Charles Van Houtte, dans une chambre d’amie qu’elle occupe lorsqu’elle se rend dans la capitale européenne, en attendant de trouver un appartement. Fallait-il vivre à Bruxelles ? Rien ne l’indiquait. Comme l’explique M. Klethi, directeur financier du Parlement européen, cette décision a été prise pour que les assistants accrédités paient leurs impôts en Belgique et non dans leurs pays, car sinon cela représentait un manque à gagner pour le Trésor belge. La réglementation stipule aussi que l’assistant accrédité doit travailler au Parlement européen. Mais la badgeuse du Parlement européen ne confirme la présence de l’assistante accréditée qu’environ douze heures entre octobre 2014 et août 2015. Marine Le Pen recontextualise cette période précise durant laquelle son assistante souhaitait redevenir assistante locale pour des raisons personnelles. L’ancienne eurodéputée rappelle l’écrasement des autres données par le Parlement européen, lesquelles montreraient le contraire sur d’autres périodes. On met la loupe sur un élément, sans regarder tout le reste, dénonce-t-elle. Par ailleurs, la présidente de groupe ajoute qu’en entrant en voiture dans le parking du Parlement européen, seul le véhicule était badgé et non tous ces occupants. M. Klethi, de son côté, affirme que « tout le monde doit badger, que c’est même un ennui pour les fonctionnaires en poste depuis plusieurs années. Seuls les députés n’ont pas besoin de badger. » Me Bosselut, le conseil de Marine Le Pen, lit un constat d’huissier qui démontre le contraire, tout du moins dans l’enceinte de Strasbourg. Si cela est possible à Strasbourg, pourquoi cela ne le serait-il pas à Bruxelles ?

Tiens bon la vague, tiens bon le vent…

Debout à la barre pendant plus de six heures, Marine Le Pen garde son cap. « Il y a des députés qui participent à l’animation du mouvement, et parfois il y a des profils d’experts qui sont très peu intéressés par le mouvement. Il y a également des assistants parlementaires qui ont des goûts, des appétences, des différences », explicite-t-elle pour justifier les nominations d’untel à telle ou telle fonction dans l’organigramme, « fonctions toutes bénévoles », répète-t-elle. Les changements de contrats sont parfois liés à la vie privée. Certains assistants peuvent préférer, selon les aléas de leur vie personnelle ou de leurs motivations, être à telle période plutôt assistant accrédité à Bruxelles, et à d’autres moments plutôt assistant local. Mais qu’ils soient « APA » (assistant parlementaire accrédité) ou « aloc » (assistant local), ils sont assistants parlementaires du député qui donne les tâches à effectuer. Et Catherine Griset est indispensable à son activité de parlementaire, où qu’elle soit. L’ancienne eurodéputée tient bon la barre et défend bec et ongle le travail de son assistante. Marine Le Pen relève d’ailleurs les incohérences de l’accusation concernant ce contrat. Elle cite en exemple le contrat d’assistant parlementaire de M. De Danne qui ne pose lui aucun problème au Parlement européen bien que celui-ci figure aussi dans l’organigramme du parti comme conseiller aux affaires européennes. Alors, la parlementaire s’interroge. Pourquoi cela serait-il autorisé dans un cas, et pas dans un autre qui est pourtant similaire ? Est-ce le fait que Catherine Griset soit l’assistante de Marine Le Pen qui pose problème ?

L’ancienne présidente du Rassemblement national rappelle par ailleurs que les députés européens sont élus lors de scrutins de liste. Chaque député doit son élection à tous les militants du mouvement politique, « tous ceux qui ont fait campagne, qui ont collé des affiches, sous la pluie, la neige, qui se sont fait agresser…» Aussi, un député qui, une fois élu, stopperait son engagement politique, en n’allant plus rendre compte de son activité dans les médias, lors des réunions publiques ou à la rencontre des militants et des électeurs, ne serait tout simplement pas réinvesti par le mouvement. Car « le mandat, c’est aussi l’activité politique, revendique haut et fort la chef de l’opposition qui trouve « qu’il est regrettable de ne pas faire un comparatif de la vision du mandat entre l’administration du parlement national et la vision du mandat du Parlement européen ; car l’Assemblée nationale est, elle, extrêmement claire : elle considère que l’activité politique du député fait partie intégrante de son mandat. » Pour conclure, l’ancienne avocate conteste avec force la lecture rétrospective que fait le Parlement européen de réglementations qui n’étaient pas alors applicables. Enfin, Marine Le Pen clame sa bonne foi et soutient qu’elle n’a jamais eu conscience de commettre une quelconque irrégularité, car « tout était clair, connu de tous et déclaré au Parlement européen. Rien n’était caché. »

Cette première et très longue journée d’audition de Marine Le Pen n’a pas permis au tribunal, faute de temps, d’entendre Catherine Griset, mise en cause pour ses contrats d’assistant parlementaire accrédité. Son audition est donc renvoyée au lendemain. Ironie du sort, Catherine Griset, qui est elle-même aujourd’hui eurodéputée, ne pourra donc se rendre au Parlement européen comme elle l’avait prévu…

ACAB! All Cops Are Bastards!

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Représailles contre la police à Cavaillon (84), 8 octobre 2024. Image : Twitter Police nationale.

Auriez-vous déjà oublié l’attaque du commissariat de Cavaillon, il y a huit jours ? Notre chroniqueur, qui vit dans une ville soumise au narco-trafic — rappelez-vous Bac Nord —, et base arrière de l’islamisme militant, a des idées un peu trop radicales pour enrayer l’épidémie de règlements de comptes, dont la police est désormais aussi la cible…


Apprenez donc à être un politicien. Les forces de police, dont vous êtes le ministre, ont été attaquées, et c’est par miracle qu’aucun d’entre eux n’est mort brûlé vif. Alors, vous prenez votre plus belle plume, et vous écrivez, solennellement :

« Je voudrais tout d’abord saluer le courage de nos forces de l’ordre confrontées à une violence devenue ordinaire.
« L’Etat ne se laissera pas intimider et nous allons intensifier notre lutte contre le narco-banditisme. Je placerai la lutte contre le crime organisé au centre de mes préoccupations parce qu’il constitue une attaque contre nos institutions.
« Dès ce soir la CRS 81 sera envoyée à Cavaillon et j’ai demandé au ministre délégué auprès de moi de se rendre sur place dans la journée. »

Puis vous prenez la pose pour la photo.

Est-ce bien de telles déclarations creuses dont la police a besoin ? Demandez autour de vous : tous s’étonnent que les policiers, assiégés par des voyous parce qu’ils prétendaient enrayer le trafic de drogue, à Cavaillon, n’aient pas fait usage de leurs armes, et étendu pour le compte les racailles qui les attaquaient.
Oui, mais voilà. En imaginant qu’ils l’aient fait, ils seraient à cette heure incarcérés, inculpés d’usage abusif de la force — voire de meurtres au premier degré. En France, la riposte doit être proportionnelle à l’attaque. Et les juges ont tendance à voler au secours des voyous avant de s’intéresser aux forces de l’ordre, censées faire preuve de sang-froid. On emprisonne bien plus facilement un policier qu’un multi-récidiviste. Pour peu, les magistrats n’admettraient même pas que les flics ripostent à leurs agresseurs / incendaires…

Jusqu’à quand les ministres, qui se suivent et qui se ressemblent, dans le sens d’une démission systématique et d’une fuite devant leurs responsabilités, abuseront-ils de notre patience ?
Jusqu’à quand le ministre en fonction, qui ne connaît manifestement rien à son métier, à, part la gestion des mouvements de menton, laissera-t-il les forces de l’ordre être la cible des racailles ?

Il s’agissait, rappelons-le, de représailles après une opération anti-drogue. Rappelons aussi que les deux individus arrêtés pour ces brûlantes exactions étaient « connus des services de police »1, comme on dit pour désigner des truands que la justice a décidé de laisser vaquer à leurs occupations, et qu’ils avaient été interpellés en septembre pour violation de domicile et détention de stupéfiants. Broutilles, donc. La justice en France est cette institution véritable État dans l’État, qui libère des détraqués sexuels sous OQTF afin qu’ils perpètrent au plus vite un nouveau meurtre.

Sur les murs des villes fleurissent depuis quelques années le même acronyme tagué par des mineurs délégués là par leurs aînés : « ACAB » — All Cops are Bastards ». C’est faire des policiers des cibles humaines : feu à volonté !
Rappelons que New York, où sévissait une délinquance proche des records mondiaux, a été débarrassée de ses délinquants en quelques années par la volonté de Rudolph Giuliani : tolérance zéro, et assurance, pour les policiers dont le nombre avait été substantivement augmenté, d’être couverts en cas d’usage de la force.  ACAB est une menace de mort, dans le contexte de narco-trafic, augmenté d’un islamisme bien installé, de bien des villes en France. Pas seulement Marseille ou sa région, mais aussi bien Grenoble, Dijon, Nantes, Lyon, Besançon ou Amiens : le cancer a métastasé, il faut le combattre avec des chimiothérapies puissantes — et des Sig Sauer SP 2022. Tu me menaces ? J’ouvre le feu. Tu ne me menaceras plus.

Alors, au lieu d’amuser les médias sur des projets de loi sur l’Immigration, que les ministres concernés pondent un décret autorisant la police à faire usage de ses armes lorsqu’une menace est caractérisée. Ou à expliquer de façon musclée aux délinquants arrêtés qu’ils devraient réfléchir avant de se risquer à une nouvelle confrontation dans les commissariats. Les voyous ne connaissent et ne craignent que la force. Retournons sur eux la violence dont ils font leur ordinaire.

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  1. https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/10/14/a-cavaillon-deux-suspects-ecroues-pour-l-incendie-de-quatre-vehicules-de-police_6351629_3224.html ↩︎

Les chaloupes à la mer!

Sophie de Menthon arbore un t-shirt "J'aime ma boîte". DR.

En quasi faillite, estimant qu’il faut prendre l’argent « là où il est », l’État demande encore aux entreprises de passer à la caisse. Mais, il ne demande jamais son avis aux entrepreneurs, lesquels pourraient pourtant être de bon conseil quant aux économies à réaliser d’urgence! Une tribune de Sophie de Menthon, dont le syndicat Ethic organise demain sa 22e fête des entreprises (« J’aime ma boîte), et de Loïk Le Floch-Prigent.


Il est désormais clair pour tout le pays que les seules entités qui tiennent debout dans la tempête, ce sont les entreprises – industrie, agriculture, services. On remarque par ailleurs les dysfonctionnements majeurs de la fonction publique, des services publics, etc… ce sont désormais les responsables des dérives financières qui nous expliquent la nécessité de redresser la barre : endettement, déficit commercial, déficit budgétaire… et on jette les chaloupes à la mer (nos entreprises !) pour sauver tout le monde, y compris ceux qui les coulent.

La chasse au profit

La préservation de ce qui marche encore, devrait donc logiquement être la priorité à la fois du gouvernement et des parlementaires. On a vu que l’affaiblissement de l’industrie à seulement 10% du PIB était le facteur explicatif essentiel de la crise, dans tous les discours ou les communications écrites officielles. « La France doit continuer à réindustrialiser, continuer à innover, continuer à créer des emplois et à inciter à la création d’emplois, c’est ça la priorité du pays » vient de déclarer le président Macron au Salon de l’automobile.

Eh bien non, puisque des entreprises fonctionnent encore, on va punir – pardon ! faire contribuer à l’effort national – celles qui restent debout et qui ont de beaux résultats, les autres aussi, sous d’autres formes. On va arriver à réduire leur compétitivité déjà médiocre sous prétexte d’égalité : ce qui génère des bénéfices doit être taxé au plus vite, en vertu du principe politiquement partagé qu’ « il faut prendre l’argent là où il est ».

M. Le Floch Prigent et Sophie de Menthon

Que ce soit l’attaque en règle contre les crédits d’impôt recherche et innovation, les nouvelles idées pour combattre notre industrie du plastique, notre application à étouffer notre industrie automobile, à renchérir le coût de l’énergie, à nous demander d’être le relais pour renflouer la Sécurité sociale, notre manque de volonté pour équilibrer nos secteurs du bâtiment et de l’agriculture : tout est fait pour affaiblir l’industrie et les entreprises au bénéfice d’un État qui ne veut pas se réformer et jette le profit en pâture à l’opinion publique. Les « riches » et les « nantis » d’abord, puis les retraités « aisés », en épargnant soi-disant les « classes moyennes » (?).

A lire aussi: L’énergie éolienne au pays du Roi Ubu

Pourtant il faut REFORMER d’abord. Il y a des choses à revoir structurellement pour couper dans les dépenses de l’État : les doublons du mille-feuille administratif, les doublons du millier d’agences « indépendantes », le CESE. Il faut vendre certaines participations inutiles (à condition de les affecter à un projet précis), cesser les subventions aux éoliennes dont notre pays n’a aucun besoin, et qui ravagent nos paysages terrestres et marins, alors que nous sommes parmi les leaders de l’électricité décarbonée – on va même augmenter cette électricité, la faute aux Allemands. Les Agences « indépendantes », inutiles pour la plupart, représentent 93 milliards ; les raccordements d’éoliennes, les transformations du réseau pour accueillir prioritairement leur électricité intermittente et aléatoire, c’est de l’ordre de 20 milliards par an sur dix ans… et ainsi de suite.

Tous dans le même bateau

Gouvernants : vous avez besoin des entreprises. Nous avons besoin d’une politique de liberté et non de contraintes et de sanctions. L’imagination des Français doit aussi être entendue ; ils ont rédigé des cahiers de doléances et des propositions d’économies, en particulier au sein de leurs entreprises qui ont encore la tête hors de l’eau malgré les grandes marées de bureaucraties qui se plaisent à les éroder. Quand va-t-on réfléchir sérieusement aux retraites par capitalisation, lesquelles peuvent fournir des fonds propres aux entreprises ? Les faillites s’accélèrent et les délocalisations aussi. On ne devrait plus jamais prendre une seule décision fiscale concernant les entreprises sans avoir réalisé, au préalable, une véritable simulation avec leur concours.

C’est en laissant prospérer nos entreprises et développer nos compétences que le pays va se redresser. Il ne faut pas prendre des mesures contre elles mais avec elles, elles y sont préparées et peuvent également être force de proposition quant aux économies qui peuvent être faites dans la fonction publique. Et les Français sont d’accord : ils n’ont confiance qu’en leurs entreprises. Le sondage effectué parmi les salariés par Opinionway pour la 22e fête des entreprises (J’aime ma boite) qui a lieu le jeudi 17 octobre le confirme ; ils déclarent avoir deux fois plus confiance dans leurs entreprises que dans leur gouvernement… À méditer. Fêtez donc vos entreprises avec une gravité inhabituelle, en ayant conscience qu’elles sont la véritable colonne vertébrale de la France.

Dois-je me plier à « une éthique du silence »?

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DR

Dans notre monde médiatique bavard, qu’on dit affecté par la « brutalisation » du débat, c’est parfois le silence qui est le plus éloquent. Qu’en pense notre chroniqueur, à la tête de l’Institut de la parole ?


Dans le livre de Jean Birnbaum Le Courage de la nuance, il est écrit que « parfois une éthique de la mesure est une éthique du silence ».

J’aime la pensée et l’écriture d’autres, qui vous obligent, quand soi-même on est prêt à les accueillir, à remettre en cause ce qu’on a toujours cru, ce qui vous est apparu tellement naturel que jamais vous ne l’avez discuté. Je me suis demandé, saisi par l’interrogation que cet ouvrage m’a inspirée, si je n’avais pas trop dérogé à cette « éthique du silence » dont je comprenais l’exigence mais que je n’avais guère cultivée.

Zone sensible

Pourtant j’ai admiré et je continue à admirer les personnalités qui opposent un refus ferme aux sollicitations médiatiques nombreuses qui leur sont adressées. Je songe par exemple à Jean-Jacques Goldman, à Mylène Farmer, à Catherine Deneuve ou au si regretté Michel Blanc et, à l’étranger, à Adele, Bradley Cooper ou Bill Murray. Il y a également des intellectuels qui évitent de venir sur les plateaux de télévision parce qu’ils considèrent que cette implication rendrait impossible l’expression de la moindre complexité.

En même temps, et à rebours, tous les jours j’éprouve comme un malaise devant la surabondance médiatique d’autres, qui résulte de la constance des médias – de droite ou de gauche – à inviter les mêmes pour être à l’abri de la moindre imprévisibilité. Et, sur certains sujets, il n’y a pas la moindre surprise. Malgré l’inventivité et la volatilité de l’actualité, il y a en quelque sorte des titulaires…

Oscillant entre ces deux extrémismes, je m’en suis tenu à ce qui me paraissait une évidence : quand on s’efforce de penser, d’écrire et d’user le plus correctement possible de l’oralité, on n’a aucune raison de fuir l’affirmation de soi. Non pas pour extérioriser une quelconque volonté de pouvoir mais, tout simplement, par souci de justifier son existence et par passion du débat d’idées. Il n’y a pas une once de narcissisme dans cette obligation même si on confond souvent ce besoin humain de prendre sa part dans le débat pluriel d’une société et des médias avec une posture vaniteuse.

A lire aussi: Fan de cette nana-là!

Aussi, longtemps, n’ai-je jamais eu l’impression de sortir de ce que ma nature, mes envies, mes idées me dictaient. Cela me semblait être le comportement banal de quelqu’un qui, sans surestimer ce qu’il offrait, se sentait cependant légitime pour le proférer ou l’écrire. Il y avait, derrière cette normalité, à bien y réfléchir, sans doute l’espoir qu’on était attendu, que ce qu’on avait à dire, sans être forcément fulgurant, méritait au moins d’être lu ou entendu.

Pourtant cette « éthique du silence », correspondant à « une éthique de la mesure », m’a questionné, comme si elle touchait en moi une zone sensible et qu’elle représentait une aspiration secrète, un désir jamais assouvi, un regret de n’avoir su déserter l’expression publique ou médiatique au bénéfice d’un silence infiniment porteur de sens.

Mais pourquoi la mesure, une pratique de la nuance devraient-elles conduire au silence, à partir du moment où on s’imagine n’avoir pas à les répudier quand on s’exprime ? Pourtant je perçois clairement des séquences où, sur les réseaux sociaux, oralement ou par écrit, en peu de signes ou plus longuement, j’aurais peut-être dû arbitrer en faveur de l’abstention.

Exister c’est insister

Parce qu’on n’en savait pas assez. Parce que trop s’étaient déjà prononcés. Parce qu’on n’aurait rien ajouté d’essentiel à la masse déjà profuse. Parce qu’à aucun moment on n’était motivé par ce prurit irrésistible de l’adhésion ou de la contradiction, par l’enthousiasme ou l’indignation, par cette légère touche de conscience de soi vous faisant croire à une obligation impérieuse d’ajouter votre pierre. Parce que, surtout, j’avais un tempérament totalement étranger à l’allure d’un silence durable, à la politique du retrait et de l’effacement.

Parce que, pour moi, exister c’est insister et que si, au contraire, on a une vision aussi réduite de son rôle sur Terre et dans la vie, une si piètre conception de son utilité, on serait bien en peine de se juger nécessaire à soi et aux autres. Il faudrait alors se supprimer d’une manière ou d’une autre…

Je vais dorénavant m’attacher davantage, non pas à la mesure (qui n’est ni tiédeur ni faiblesse mais victoire contre l’outrance) mais à son éventuelle conséquence éthique : le silence. Il y a une morale qui prône la liberté d’expression, la volonté d’être soi.

Pourquoi pas une morale du silence éloquent ?

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Dans l’enfer ultraprogressiste

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Manifestation contre les violences sexistes et sexuelles, Bordeaux, 25 novembre 2023 © UGO AMEZ/SIPA

À l’image du libéralisme, le progressisme a lui aussi ses « ultras ». Animés d’intentions louables en apparence, ils cachent mal leurs passions tristes: hypocrisie, vengeance, ingratitude, racisme, antisémitisme, bêtise crasse et mauvaise foi.


La mutation du concept de progrès en idéologie progressiste portait déjà en elle le ver du fanatisme. Non, toute nouveauté ne peut être sanctifiée, ni tout ce qui est ancien, bon à jeter aux orties ou à « déconstruire ». Il en va aujourd’hui du progressisme comme du libéralisme économique : parfois, trop, c’est trop. Obliger ainsi EDF à vendre à perte son électricité à des « concurrents » qui ne produisaient rien relevait du dogmatisme. Cet ultralibéralisme a désormais son pendant sociétal : l’ultraprogressisme. Ses sectateurs hurlent à l’énoncé suivant – « Tous les musulmans ne sont pas terroristes ; mais tous les terroristes sont musulmans » – mais applaudissent, émus, à cette affirmation : « Tous les violeurs sont des hommes donc tous les hommes sont des violeurs potentiels. » Les mêmes se battent contre l’expulsion de terroristes présumés, au nom d’un État de droit détourné de son objet. Défendre un seul individu, quitte à sacrifier l’intérêt de millions d’autres, constitue l’essence fanatique de l’ultraprogressisme – à l’instar « du monde rempli d’idées chrétiennes devenues folles », décrit par Chesterton.

Trouple infernal

Nos nouveaux gardes rouges intersectionnels font régner la terreur grâce à quelques tours de passe-passe simples et redoutables. Ils ont ainsi élargi le concept aussi généreux que dangereux du « Femme, je te crois » à toutes les communautés sexuelles ou raciales : « Membre d’une minorité, je te crois » est devenu leur credo. Écouter est une chose ; croire sur parole en est une autre. C’est pourtant bien une nouvelle Loi des suspects dont ils ont établi le principe, puisque la contrepartie de cet axiome s’écrit « Membre de la majorité (sexuelle, raciale), tu mens. » Un dogme totalitaire qui crève les yeux, une tyrannie bienveillante au nom d’un humanisme dévoyé. Désormais, « Émeutier issu de la diversité, ta rage est légitime » ; tandis qu’« Émeutier blanc anti-immigration, tu mérites la prison ».

Tout membre de la majorité se voit, au demeurant, sommé d’observer chaque mantra progressiste, sans exception. L’adhésion des minorités aux injonctions LGBT, féministes, écologiques, antiracistes ou animalistes se fera, en revanche, « à la carte ». L’antisémitisme des cités ? Silence gêné. L’homophobie des « quartiers » ? Un (petit) ange passe. Le voile ou l’abaya ? Une liberté de femme pudique. L’excision ? Vous pouvez répéter la question ? Les souffrances animales de l’abattage rituel ? Toute critique relèverait de l’islamophobie. Ces millions de moutons égorgés ne sont rien en comparaison… des quelques centaines de taureaux sacrifiés dans les arènes par des Blancs réactionnaires. La corrida devient, à les écouter, un ignoble génocide alors que l’Aïd figurerait un aimable enrichissement diversitaire. L’ultraprogressisme ressemble à un trouple infernal entre Tartuffe, Ubu et Orwell.

La soif de justice affichée par ses (gentils) thuriféraires désireux de défendre chaque victime du racisme ou du (méchant) patriarcat, n’a de limites que l’origine ethnique du coupable. Les contorsions auxquelles se livrent les néoféministes pour relativiser le sort des Israéliennes violées ou celui des Iraniennes voilées portent un nom : l’hypocrisie. La traite de jeunes blanches à Telford par des Pakistanais, les viols de Cologne ou le harcèlement de rue à La Chapelle ne les avaient pas plus intéressés. Prompte à dénoncer de fantasmatiques micro-agressions nécessitant l’abri d’un « safe space », vigilante face au moindre « mégenrage », ulcérée par la mention de « mademoiselle » dans un formulaire, la nébuleuse ultraprogressiste ne voit rien, n’entend rien dès que les agresseurs ne sont pas de type caucasien. Leur « justice » a le goût de la revanche et l’odeur peu ragoûtante de la vengeance. Vengeance contre l’Occident. Vengeance contre le mâle. Vengeance contre l’hétérosexuel. Vengeance contre le Blanc. Vengeance contre le juif. Les autres, les « racisés » ne peuvent être coupables de rien, tandis que, symétriquement, la majorité « non racisée » ne peut jamais être totalement innocente. La théorie délirante du racisme systémique prend sa source dans ce raisonnement et le prétendu privilège blanc, c’est désormais celui d’être l’éternel criminel, a minima « the usual suspect ». Avoir systématiquement tort en fonction de sa pigmentation, n’est-ce pas la définition même du racisme et l’instauration d’une hiérarchie raciale dont le progressisme devait à jamais nous débarrasser ?

Escroquerie à l’émotion

Notre protection sociale, nos lois, nos droits de l’homme (pardon nos droits humains) se voient méthodiquement détournés contre l’intérêt général. Non, en Méditerranée, les ONG ne secourent pas des marins victimes d’une fortune de mer mais des naufragés volontaires, abusant d’une solidarité ancestrale. Mettez le feu à votre maison et essayez de vous faire indemniser par votre assureur. Il vous expliquera la différence entre un accident et une fraude. L’ultraprogressisme pratique l’escroquerie à l’émotion, une technique bien définie, dans un autre contexte, par le fisc et durement sanctionnée : l’abus de droit. Mais attention : le cadavre du petit Aylan, c’était de l’émotion légitime ; le meurtre de la petite Lola, une ignoble récupération.

Le vocabulaire qu’impose le progressisme dans la sphère médiatique construit méthodiquement une prison mentale de laquelle on ne s’échappe qu’au prix du sceau infamant de l’extrême droite. Il en va ainsi du concept désormais admis d’islamophobie. La résistance des Français aux oukases religieux de l’Islam (voile, mixité, etc.) n’est pas une haine de l’Islam, mais une simple exigence d’intégration de la part de la majorité. En quoi ce souhait de respect des us et coutumes d’un des pays les plus accueillants de la planète pourrait-il être assimilable à de la haine ? Ingratitude et passions tristes font ainsi le miel de l’ultraprogressisme qui marche main dans la main avec le communautarisme. Conséquence de ce travail de sape, l’intérêt général disparaît au profit unique des droits individuels et des communautés. L’État-providence n’y survivra pas.

Cette dérive fanatique du progressisme signe en effet, et la fin de l’égalité des citoyens, et celle de la solidarité nationale (la Nation, quel mot horrible !). Bref, la fin du progressisme en son nom.

Lepénisation de Mélenchon, acte 2

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Marseille, 21 septembre 2024 © Alain ROBERT/SIPA

Après avoir joué pendant des années la carte de l’intransigeance vis-à-vis du pouvoir, le leader des Insoumis se vante désormais d’exercer, en matière économique, une certaine influence sur le gouvernement. Exactement comme le RN en matière migratoire.


Pour lui, c’est carrément « l’agonie d’une époque ». Dans un texte mis en ligne hier sur son blog personnel, Jean-Luc Mélenchon a salué le projet du gouvernement d’augmenter les impôts des contribuables disposant des plus hauts revenus et des entreprises les plus prospères.

« Victoire idéologique »

« Le budget Barnier reconnaît notre victoire idéologique, pour nous antilibéraux, se réjouit-il dans ce texte incroyablement apaisé. L’impôt sur les riches est réhabilité et celui sur les superprofits des entreprises aussi. (…) Peu importe les montants : c’est le raisonnement qui compte. (…) Michel Barnier a enterré les interdits et les tabous du libéralisme des gouvernements macronistes. » N’en jetez plus !

Ainsi donc, le général Tapioca continue de se lepéniser. Mais cette fois-ci, ce n’est plus à Jean-Marie qu’il emprunte ses méthodes. Finis les provocations éruptives et les sous-entendus essentialisants. Désormais c’est à Marine Le Pen que Jean-Luc Mélenchon essaie de ressembler. La patronne du RN ne s’était-elle pas elle aussi réjouie d’une “victoire idéologique” lors du vote de la loi Immigration l’hiver dernier ?

A lire aussi, Stéphane Germain: Dans l’enfer ultraprogressiste

Le leader des Insoumis vient en réalité de rentrer dans une nouvelle séquence. La motion de censure du Nouveau Front populaire ayant été rejetée, il ne peut plus hurler – au mépris du bon sens le plus élémentaire : « On nous a volé l’élection ! »  Le processus de destitution du président ayant été abandonné la semaine dernière, il ne peut davantage promettre – contre toute évidence : « On va virer Macron ! » Dès lors, le voilà qui se résout à faire de la politique de façon plus classique. Comme Marine Le Pen et ses députés cravatés, ses paroles sont à présent celles d’un opposant qui instaure un rapport de force rationnel et civilisé avec le pouvoir.

Barnier Sanders : tax the rich !

Quelles sont les armes – enfin loyales – dont il dispose pour infléchir les décisions de Michel Barnier ? Ici s’arrête l’analogie avec le RN. Car Marine Le Pen brandit l’épouvantail de la censure au parlement pour se faire entendre, obtenant notamment que le ministre de l’Intérieur remette sur l’ouvrage une loi Immigration, Mélenchon, lui, agite plutôt la menace du mouvement social et du blocage du pays. Et cela paye ! Effrayé à l’idée de vivre l’enfer d’Alain Juppé en 1995, le Premier ministre a donné quelques gages à la gauche dans sa proposition de budget.

A lire aussi, du même auteur: Elon Musk: Mais pourquoi est-il si méchant?

Et les Français dans tout cela ? Malgré ce que prétendent la plupart des commentateurs de la grande presse, on peut se demander s’ils n’ont pas obtenu en somme ce qu’ils voulaient : un gouvernement centriste, présentable et policé, sachant toutefois écouter les demandes de redistribution de la gauche et les demandes de contrôle aux frontières de la droite. Michel Barnier fait en somme penser à ces couples bourgeois qui doivent se résoudre, en gardant leurs bonnes manières, à une certaine infidélité, pourvu que celle-ci ne soit pas trop exposée.

Responsables, mais plus coupables

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La ministre de l'Éducation nationale Anne Genetet en déplacement à Tourcoing, où une enseignante a été agressée par une élève islamisée au lycée Sévigné, 10 octobre 2024 © Christophe Forestier/SIPA

Tourcoing / voile: l’incident survenu il y a une semaine démontre que les élèves musulmans sont de plus en plus nombreux à «tester» l’institution scolaire.


Le 7 octobre dernier, dans un lycée de Tourcoing, une élève a giflé une enseignante qui lui demandait de retirer son voile. Cette élève venait de se changer et s’apprêtait à quitter l’établissement. Elle a essayé de traverser le lycée voilée, jouant avec les limites, tentant de grignoter petit à petit le cadre de la laïcité. Il s’agit d’ailleurs là d’une transgression qui se répand dans les établissements scolaires.

L’enseignante aurait pu par lassitude, par renoncement, par peur, passer outre: ce n’était pas son élève, elle allait de toute façon remettre son voile dans la rue quelques minutes plus tard, elle n’était pas la seule à agir de la sorte.

Mais ce professeur a fait preuve de courage, de professionnalisme et surtout du sens de la responsabilité dont le manque dramatique provoque l’effondrement de l’autorité à l’école. Elle s’est montrée responsable de notre École. Responsable et respectueuse, non pas de passe-droits associés à une communauté particulière, mais de l’humanité des élèves, de leur intelligence et de leur capacité à être, devenir ou rester des enfants de la République.

A lire aussi, Céline Pina: Enseignant à Tourcoing: un métier à rixe

L’offensive islamiste gagne du terrain dans notre pays. Les professeurs se censurent par crainte des incidents ou des agressions. Mais aussi par un étrange sentiment de culpabilité, ils redoublent de précautions et de bienveillance. Nous nous sommes tous demandé à un moment ou un autre si nous n’allions pas heurter la sensibilité de nos élèves musulmans. Le sort tragique de Samuel Paty, dont nous commémorons pour la quatrième fois la mort en est l’illustration. Craignant d’offenser, il a proposé aux élèves qui pensaient être choqués de détourner le regard lors de sa séance sur la liberté d’expression. Le propos est revenu aux oreilles de l’élève absente qui a senti là une faiblesse et s’est engouffrée dans la faille. Elle a menti et, sanctionnée à ce moment-là par le collège, s’est servie de l’anecdote pour se dédouaner de ses propres agissements, inversant et transformant l’intention bienveillante en acte discriminatoire. On connaît la mécanique infernale qui a suivi.

Il n’y a pas de sensibilité particulière liée à une religion. Il n’y a que la colère de ceux qui constatent qu’on ne les craint pas assez, ou sentent qu’on veut les préserver comme une catégorie à part. Ils manipulent ainsi cyniquement la culpabilité fondamentale de bien des enseignants qui, se pensant privilégiés, pensent aussi que l’islam est intrinsèquement la religion de l’opprimé.

A lire aussi, Elisabeth Lévy: De la guimauve pour Dominique Bernard

Les foules écumant de rage qui demandent la tête de Salman Rushdie ne sont pas composées de pauvres âmes sensibles blessées, mais de fanatiques qui n’ont qu’un but : répandre et imposer la charia à tous et à chacun.

La logique des élèves qui se prétendent offensés est la même. Ils ne sont pas blessés, mais instrumentalisés par une idéologie totalitaire et mortifère.

La réponse doit évidemment être globale et politique.

Mais nous, professeurs, devons avoir à l’esprit la conduite exemplaire de notre collègue de Tourcoing et le souvenir lancinant de Samuel Paty, pour nous sentir responsables, mais plus coupables.

Lettre d'un hussard de la République

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J'ai exécuté un chien de l'enfer

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