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Violences sexistes et sexuelles: pas d’amalgame!

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Selon le député et président du Parti socialiste belge Paul Magnette, « tous les hommes contribuent à entretenir des comportements dont le viol est la forme extrème». Réagissant à l’affaire Pélicot dans Le Monde, cet infatigable défenseur de nos amies les femmes appelle à «épurer notre corpus de règles, notre langage et nos modes de pensée des biais de notre culture patriarcale»... Une compatriote lui répond.


DR.

Monsieur l’ex-Ministre-Président et ex-Bourgmestre, pas encore tout à fait remis du double échec du PS en Belgique, vous tartinez dans le quotidien Le Monde1, empoignant la tragédie de Gisèle Pélicot pour nous faire part de votre féminisme de salon. Seulement voilà, Paul Magnette, on s’en fiche de vos états d’âme de quinquagénaire en pleine crise existentielle ! Quoique vous en disiez, votre parti s’est « fracassé » sur la vague bleue à tous les niveaux de pouvoir. Et comme vos prédécesseurs de gauche, vous instrumentalisez les victimes et leurs souffrances pour racoler comme dans un bar. Qui sait, peut-être l’une ou l’autre électrice soucieuse de « déconstruire la virilité toxique » vous accordera-t-elle ses suffrages aux prochaines élections ?

Dédaignant votre habituel « Padamalgam ! », vous affirmez donc que tous les hommes sont des violeurs en puissance. Eh bien non, cent fois non ! Certes, il existe des hommes éduqués au suprémacisme mâle et des cultures qui réifient les femmes, mais ce n’est pas, ou pas encore, la norme sous nos cieux. Il y a des hommes, et il y en a même beaucoup, qui se régalent du jeu subtil et délicat de la séduction. Toutes les forteresses ne tombent pas forcément sous les coups de bélier ; il en existe qui abaissent spontanément le pont-levis et savourent le chevalier courtois pénétrant les douves. Ca dépend surtout du conquérant.

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Peu nous chaut votre égalitarisme ménager ou institutionnel. L’égalité ! La vertueuse ambition des revanchards ! Mais on s’en fout que vous passiez l’aspirateur ! On ne veut pas être votre égal et moins encore votre semblable. On ne veut pas d’un législateur qui impose la mixité dans toutes les institutions – excepté celle du mariage ! – et qui contrôle nos foyers pour savoir qui fait la vaisselle. Non, on veut simplement vivre et travailler comme des femmes, à notre rythme et selon notre humeur. On veut sortir en ville seule, sans chaperon et sans que des barbares nous tombent dessus. On veut baguenauder en mini-jupe et talons aiguille sans essuyer le regard courroucé de femmes voilées ou menaçant des barbus. On veut les abuseurs, les détraqués, les violeurs, les polygames et les pédophiles en tôle, sans que la mansuétude de votre magistrature les relâche dans le circuit pour un oui ou pour un non.

Mais n’est-ce pas votre bonne ville de Charleroi, où le PS est aux manettes depuis les années 70, qui est devenue un coupe-gorge où il ne fait pas bon être une femme, et moins encore une jeune fille ?2 N’est-ce pas votre parti qui propulse aux plus hautes fonctions des issus de la diversité qui sont peut-être des chances électorales mais rarement des chances pour les femmes ?

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Il ne vous restera bientôt plus que la solution de votre acolyte, socialiste depuis le biberon et bourgmestre de Molenbeek, Catherine Moureaux ; afin de préserver les femmes de sa charmante commune, elle se propose de créer des maisons de quartier réservées aux filles3.  En français, cela s’appelle un gynécée.

Est-ce de cette façon que le Parti socialiste que vous présidez défendra dorénavant la condition féminine qui semble vous tenir tant à cœur dans les pages du Monde ?

Le socialisme n’est pas l’allié des femmes. Il leur a longtemps refusé le droit de vote et se refuse aujourd’hui à assurer leur sécurité. Votre posture de mâle en questionnement, taraudé par un étrange remord au vu des turpitudes d’inconnus en Avignon, peine à masquer votre coupable désinvolture face à ce qui est le premier droit des femmes : vivre libre, en toute sécurité.


  1. https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/10/16/proces-des-viols-de-mazan-tous-les-hommes-d-une-maniere-ou-d-une-autre-contribuent-a-entretenir-des-comportements-dont-le-viol-est-la-forme-extreme_6353154_3232.html ↩︎
  2. https://www.moustique.be/actu/belgique/2023/04/08/charleroi-ville-la-plus-dangereuse-de-belgique-et-sixieme-deurope-vraiment-259842 ↩︎
  3. https://www.7sur7.be/belgique/une-video-de-catherine-moureaux-a-molenbeek-fait-polemique-les-jeunes-filles-n-ont-pas-envie-d-etre-avec-les-jeunes-garcons~ac2e77ca/ ↩︎

Le Maire s’en va-t-en Suisse

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Fugue helvétique. L’ancien ministre de l’Économie et des Finances entame une nouvelle vie de professeur sur les rives du lac Léman.


Bruno Le Maire, qui fut sept ans le très brillant argentier de France qu’on sait, a trouvé un nouveau job à la mesure de ses immenses talents. En Suisse. Là où la monnaie et l’économie n’ont pas encore eu à subir les affres de l’expertise lemairienne en ces domaines. Heureuse contrée. Il y dispensera deux jours par semaines des cours au sein du très réputé Center Enterprise for Society, une émanation de l’école polytechnique fédérale de Lausanne et de l’International Institute for Management developpement. C’est beaucoup d’intitulés en anglais. J’ignorais que cet idiome fût une des langues officielles de la Confédération, mais la mondialisation étant vraisemblablement au programme des études, mieux vaut montrer d’emblée les bons signes d’allégeance et de soumission. Ainsi, on ne sera pas surpris de constater la direction que prendront ces élites une fois sorties de tels moules.

Donc, notre Pic de la Mirandole des finances publiques passe en Suisse. Une fois encore force est de constater chez nos politiciens de haut rang, plutôt estampillés centre-droit ou centre-gauche – ceux-là mêmes que je me permets de qualifier de Têtes Molles – une tendance lourde à aller se faire voir ailleurs une fois qu’ils ont épuisé chez nous, au service de la France, leurs capacités diverses et variées, y compris celles de nuisance. M. De Villepin dispenserait ainsi sa science au Qatar et probablement en des territoires circonvoisins tout aussi démocratiques, alors que M. Raffarin, en ardent thuriféraire du « en même temps » macronien, donc du centre, du milieu, s’en est allé dispenser sa sagacité sans frontières dans l’Empire du Milieu, justement. 

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Tout se passe comme si, pour ces gens, la France – leur pays, leur patrie (mais connaissent-ils encore le sens de ce mot ?) n’était plus assez bien pour eux. Comme si la France et ses citoyens – qu’ils  considèrent probablement comme indécrottables, irrécupérables –  ne méritaient pas que leur prodigieuse intelligence s’attardât plus longtemps à leur service. La décence, la dignité, ne figurant pas davantage que le mot patrie dans leur abécédaire personnel, on aura compris qu’il serait vain d’en appeler à ces vertus pour espérer les entendre exprimer un soupçon de regret, de repentir.

J’ai d’abord cru que M. Le Maire s’expatriait en Helvétie pour éclairer de sa lanterne des étudiants en littérature. Qu’il allait là-bas animer des ateliers d’écriture érotique. On sait qu’au ministère, entre deux sales coups de génie à un pognon de dingue, il aimait à s’encanailler du côté de ce genre littéraire, ainsi qu’on a pu s’en rendre compte avec son récent roman Fugue américaine.

Vérification faite, il n’en est rien. Sa Sommité donnera des cours de géopolitique et de politique publique, cela en raison, justifient ses nouveaux employeurs « de son expertise liée à la décarbonisation et aux énergies propres ». Me voilà rassuré, moi qui – sans doute à tort – accorde plus un plus grand intérêt à l’art littéraire qu’à la décarbonisation. Quitte à ce qu’il fasse école là-bas, autant que ce soit dans ces domaines plutôt que dans la maîtrise du style. Les étudiants outre-alpins auront au moins échappé à cela.

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Kylian Mbappé file un mauvais coton

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Ces derniers mois, la popularité de Kylian Mbappé est en chute libre. Après des propos polémiques lors de la mort de Nahel Merzouk en 2023, son inélégance lors de son départ du PSG, le joueur se retrouve au centre d’une affaire de viol présumé en Suède. Le Parisien explique que Stockholm est devenu un lieu de fête privilégié pour les sportifs du monde entier, lesquels sont nombreux à fantasmer sur les grandes blondes… Mbappé était dans la capitale suédoise alors que l’Équipe de France affrontait Israël à Budapest. Si le crack défraie la chronique, c’est parce que c’est une star du foot, car Mbappé est surtout un homme de son temps…


On ne sait pas, à l’heure actuelle, ce qui s’est vraiment passé à Stockholm et le silence de la justice suédoise, conjugué avec celui de l’avocate de la plaignante et les déclarations un zeste convenues de l’une des avocates de Kylian Mbappé, ne permettent pas de tirer des conclusions univoques sur ce séjour et ses deux nuits festives.

Mais la prudence dont il convient de faire preuve à l’égard de ces péripéties n’interdit pas de considérer que depuis quelque temps Kylian Mbappé semblait, comme on dit, filer un mauvais coton. Que les explications soient sportives ou plus personnelles, il est clair que les derniers mois, qu’il a plus subis que vécus au PSG, la manière dont l’entraîneur espagnol l’a traité, son impatience de rejoindre le club de son cœur, le Real de Madrid, ses prestations moins bonnes aussi bien dans le championnat de France qu’en équipe de France dont il était le capitaine, l’immense émoi médiatique exagéré autour de ses faits et gestes, ses déclarations parfois ridicules, par exemple sur la mort de Nahel, une assurance qui pouvait être prise pour de l’arrogance, ont créé un climat défavorable à son épanouissement sportif et au maintien d’une relation de confiance et d’admiration avec ceux qui le portaient aux nues. D’abord à cause de son génie de footballeur caractérisé par une vitesse exceptionnelle qui, redoutée et entravée, n’avait plus le même impact ces derniers temps.

Une image dégradée

Son départ au Real, malgré le contentieux l’opposant au PSG qui lui devrait 55 millions d’euros, paraissait l’avoir rendu heureux, l’avoir stabilisé. L’équipe et l’entraîneur prestigieux qui l’accueillaient et attendaient beaucoup de lui paraissaient avoir fait preuve de très bonnes dispositions à son égard.

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Je ne veux pas me prêter une lucidité rétrospective mais au fil du temps, il m’a semblé voir se dégrader son image. Sa capacité longtemps durable à résister à la mousse narcissique déversée sur lui s’est un jour métamorphosée en une dérive imprégnée de vanité et de la certitude qu’il pouvait tout se permettre. N’incriminer que lui serait injuste.

Quand je compare Kylian Mbappé avec nos autres cracks, Antoine Dupont et Léon Marchand surtout, je perçois une différence capitale entre les entourages. Depuis que tout jeune il a commencé à attirer les convoitises, les parents séparés de Kylian Mbappé paraissent l’avoir fait baigner dans un climat où l’argent domine, à cause du capital qu’il représente, et où ses intérêts financiers sont défendus par des géniteurs négociateurs impitoyables. Quelle énorme différence avec les parents de Léon Marchand et la mère d’Antoine Dupont ! Pour eux, lors de l’éclosion de ces deux champions, le tiroir-caisse n’a pas relégué l’affection et le cœur. Le gratuit a toujours eu sa place. Cela explique les dissemblances entre ces trois jeunes destins, l’adhésion enthousiaste à deux d’entre eux et la réserve de plus en plus vive manifestée à l’égard de Kylian Mbappé et de son environnement.

Un peu de tenue !

Il serait profondément inéquitable de faire reposer l’absence d’une politique de la tenue en France, et dans beaucoup de domaines, sur les seules épaules de Kylian Mbappé dont l’équipée somptuaire à tous points de vue et la destination suédoise surprenante ont mobilisé l’attention médiatique.

En effet, au regard de ce que j’entends par « politique de la tenue », si Kylian Mbappé peut être classé comme une personnalité qui en a manqué, les exemples sont multiples qui montrent que l’exigence de la tenue, à rapprocher de l’obligation de décence, est en chute libre, aussi bien dans les registres de la quotidienneté banale, de la vie politique, que de l’univers médiatique et artistique…

C’est même sans doute, à y regarder de près, l’évolution de notre société sur le plan de la forme, définie comme une manière d’être au monde, de se comporter comme il convient, de parler, de dialoguer avec autrui, de respecter son prochain et de se fixer des limites précisément quand, privilégiés, on croit pouvoir s’en abstenir, qui constitue la dégradation fondamentale de notre communauté d’existence, de notre civilisation.

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Faut-il rappeler les transgressions graves de certains députés à l’Assemblée nationale, incapables de saluer leurs collègues d’un autre camp, de faire honneur à ceux qui les ont élus, de tenir des propos structurés sans haine ni outrance et de savoir écouter tranquillement par exemple le Premier ministre quand il s’adresse à tous ? Faut-il rappeler les grossièretés du langage qui, dans le débat démocratique, remplacent la contradiction et l’argumentation par des insultes parce que, faute de savoir répliquer aux idées, on s’efforce de tenir pour moins que rien ceux qui les ont proférées ? Faut-il rappeler la pauvreté de ces débats où la droite parle à la droite et la gauche à la gauche, avec pourtant l’invocation répétitive d’un pluralisme réduit à sa seule dimension partisane ? Faut-il rappeler ces gestes indélicats, choquants, agressifs donnant de la virilité une lamentable image et blessant des féminités qui heureusement ne se laissent plus faire ? Faut-il rappeler ces élèves frappant leur maître, leur professeur, le monde de l’éducation bouleversé dans ses bases ? Faut-il rappeler, dans l’existence de tous les jours, dans les transports, ces femmes enceintes parfois debout, ces personnes âgées contemplant une jeunesse fatiguée assise, cette immense indifférence à l’égard de ce que la politesse nous apprenait hier à respecter, l’âge et l’enfance ? Faut-il rappeler les rapports de force et de violence qui dans nos rues opposent les moyens de mobilité les uns aux autres et aboutissent parfois tragiquement à des crimes ? Faut-il rappeler ce passage au fil des années de l’illégalité à l’immoralité, comme par exemple récemment un établissement pour handicapés dévasté, sans la moindre vergogne, avec ses fauteuils spéciaux très coûteux volés ? Faut-il rappeler la gabegie ostentatoire de quelques-uns face aux conditions de vie difficiles de beaucoup ?

On pourrait me demander en quoi ces exemples que je pourrais multiplier sont à relier avec les épisodes concernant Kylian Mbappé. Parce qu’ils relèvent de ce qu’on devrait d’abord apprendre de ses parents puis à l’école ; et de la Justice s’ils sont transgressifs. Car ces abstentions, indélicatesses, négligences peuvent se traduire au plus haut niveau de gravité par des délits ou des crimes ; la justice n’étant pour moi que la prescription d’une forme suprême de savoir-vivre.

Qu’on ne vienne pas soutenir que la tenue ne serait pas à apprendre à la jeunesse, comme si on pouvait tout lui passer. Puisqu’elle a tout l’avenir devant elle. C’est absolument le contraire. Si le socle est défaillant, tout se délitera. Il n’y a aucune raison de laisser croire que la jeunesse serait indigne de ce qui rend le fil des jours droit, moral et élégant.

Se tenir pour soi et pour une société, quelle splendide et nécessaire obligation !

Tripatouillages en Roumanie rurale


Le Danube n’est pas forcément beau et bleu. Singulièrement l’été, dans un patelin paumé qu’on n’atteint qu’en rafiot, et dont les ruelles pas même goudronnées s’achèvent en cul-de-sac sur le delta du fleuve. D’où le titre, Trois kilomètres jusqu’à la fin du monde, troisième long métrage de l’acteur et cinéaste Emanuel Pârvu, 45 ans. Le film était en compétition à Cannes.  

Adi, beau brun bouclé de 17 ans, vit chez ses parents dans une modeste maison du village. Le prologue nous suggère que le couple est endetté vis-à-vis d’un certain Zentov, dont on comprendra, au fil du récit, que le notable véreux du coin a des connexions haut placées à Tulcea, le chef-lieu portuaire de cette région septentrionale du pays, quasi frontalier avec l’Ukraine…

L’amorce du film nous montre Adi, cheminant la nuit de conserve avec un compagnon de son âge, venu de Bucarest en touriste : celui-ci lui lèche gentiment sa main, qu’une piqûre de ronce, semble-t-il, a fait saigner. Cut. La séquence suivante nous découvre le même Adi, mais cette fois le visage méchamment amoché, le corps tuméfié, en train de se voir examiné par le médecin du dispensaire local, en présence de ses parents et d’un officier de police en tenue. Pourquoi cette agression sauvage ? Quel en est le mobile ? Qui en sont les auteurs ? Adi a perdu connaissance; il n’a rien vu dans l’obscurité. Commence l’enquête, dans le microcosme de ces confins ruraux où tout se sait – et tout se dissimule.

Pas un film-dossier

C’est avec un sens consommé de l’ellipse et de la litote qu’Emanuel Pârvu assemble les pièces du drame, sans l’appoint de la moindre musique, avec cette sobriété, cette grande intelligence du rythme, du dialogue et de ses silences, toutes choses propres au nouveau cinéma roumain dont Cristian Mungiu (4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Au-delà des collines ; RMN… ) demeure le champion. Les conciliabules entre les protagonistes dévoilent de proche en proche les enjeux souterrains d’une société archaïque, minée par les préjugés, la corruption et la peur, sur fond de bêtise incommensurable – probables séquelles de la dictature communiste de Ceausescu qui tint durablement la Roumanie, comme l’on sait, dans un état d’arriération mentale sans exemple en Europe.   

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Esquivant avec adresse l’écueil du film-dossier sur la-répression-de-l’homosexualité en milieu rural attardé, Trois kilomètres avant la fin du monde pénètre au premier chef l’entrelac des égoïsmes, des petits intérêts, des collusions qui font qu’« on doit se serrer les coudes », comme le susurre Zentov au géniteur d’Adi pour empêcher que cette sordide affaire, où ses deux crétins de fils sont impliqués, ne remonte jusqu’à Bucarest et ne fasse des vagues. Quitte à alerter une relation, par un coup de fil passé à bon escient, en sorte que l’enquêtrice diligentée par la justice (laquelle, au fil des interrogatoires, a parfaitement identifié l’omerta) soit opportunément rappelée fissa en d’autres lieux : « si on apprend qu’il y a des pédales ici, imagine ce que ça va donner », lâche encore en aparté le veule argousin, craignant surtout pour son dossier de demande de retraite anticipée. Sollicité quant à lui par les pieux parents d’Adi, le prêtre orthodoxe de la paroisse s’est assuré de l’autorisation du Très–Haut (sa rhétorique imparable vaut d’ailleurs quelques fort savoureuses répliques) pour exorciser le mal qui ronge l’adolescent, fût-ce en l’entravant de force avec l’aide de papa et maman. D’où une scène hallucinante dont on vous réservera la primeur. Avec beaucoup de subtilité, les dialogues rendent compte des subterfuges et des atermoiements dans lesquels s’envasent les comparses pris au piège de leur funeste logique, mais aussi l’étau moral qui se resserre sur Adi, placé en holocauste face à la monstruosité de ses géniteurs, et qui ne gardera foi qu’en son amie de cœur, Ilica… Avant de prendre le large.

Pas moralisateur

Il est devenu rare, par les temps qui courent, de voir à l’écran des œuvres qui ne soient pas formatées pour la défense des bonnes causes (les femmes, les minorités, les diversités en tous genres). Avec une remarquable économie de moyens, Emanuel Pârvu tient un tout autre discours :  celui qui, fût-ce en affrontant la morale publique, revendique l’irrévocable singularité du corps désirant.


Trois kilomètres avant la fin du monde. Film d’Emanuel Pârvu. Avec Bogdan Dumitriache, Ciprian Chiujdea, Laura Vasiliu…  
Durée : 1h45. 
En salles le 23 octobre 2023

La laïcité résistera-t-elle aux nouveaux assauts du wokisme?

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Le désenchantement du destin français ouvre l’espace public aux revendications identitaires que le principe de laïcité peine à endiguer. Analyse.


Consacré par l’article 1er de la Constitution, le principe de laïcité est inscrit en filigrane à l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Il trouve ses premières expressions législatives en 1882 et 1886 sur l’enseignement primaire, et passe à la postérité avec la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat. Elle institue un régime de neutralité dont l’acception est offerte à la controverse alors même qu’elle consiste moins en la neutralité religieuse de l’Etat qu’à une neutralisation des religions dans la sphère publique (Ph. Raynaud, La Laïcité. Histoire d’une singularité française, Gallimard, 2019). L’enquête d’opinion sur « l’état des lieux de la laïcité en France » réalisée en 2020 par l’institut Viavoice, montre que la laïcité constitue pour les Français un principe républicain essentiel (70%) qui fait partie de l’identité de la France (78%). Cependant, les jeunes adultes adoptent dans leur majorité une conception favorable à l’expression publique des identités religieuses (sondage d’opinion réalisé du 14 au 16 juin 2023 par l’institut Kantar-Sofres), et 78% des musulmans considèrent que la laïcité française est islamophobe (sondage Ifop du 7 décembre 2023). Le principe de laïcité signe donc une singularité française, dont la fortune est en déclin malgré la réaffirmation périodique du principe. Il subit l’offensive multiculturaliste et ne peut, seul, résister au défi lancé à notre modèle civilisationnel.

L’offensive multiculturaliste

La crise de la transmission (Jean-Paul Brighelli, La fabrique du crétin. L’apocalypse scolaire, L’Archipel 2022) s’inscrit dans le contexte de l’envahissement de l’espace public par les dictats religieux qui ciblent particulièrement l’école. L’affaire bien connue des collégiennes de Creil en 1989 fait penser à cette fable de La Fontaine Conseil tenu par les rats : « Ne faut-il que délibérer, La Cour en conseillers foisonne, Est-il besoin d’exécuter, L’on ne rencontre plus personne »

Aux termes de leur manifeste : « Profs ne capitulons pas ! », Elisabeth Badinter, Régis Debray, Alain Finkielkraut, Elisabeth de Fontenay et Catherine Kintzler dénonçaient déjà un « Munich de l’école républicaine ». Ils identifient dans le voilement des femmes le signe de leur soumission et refusent la mise en balance du principe de laïcité avec la liberté d’expression des élèves. Pénétrer dans les établissements scolaires avec ses certitudes, croyances familiales en bandoulière, et insanités véhiculées par les réseaux sociaux oppose une fin de non-recevoir à la transmission des savoirs. La loi 15 mars 2004 interdit le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse, codifiée à l’article L141-5-1 du Code de l’éducation. Cette loi, qui anéantit la jurisprudence Kherouaa et la circulaire Jospin du 12 décembre 1989, est intervenue à la suite du rapport Obin, et des préconisations de la commission Stasi, dont les membres se sont convertis à la nécessité de l’interdiction au fil des auditions, à l’exception de Jean Baubérot. L’auteur des 7 laïcités françaises (Maison des sciences et de l’Homme, 2015) regrette le glissement de la neutralité de l’Etat vers la neutralité imposée à la société civile, au motif que la loi de 1905 n’établirait pas de distinction entre les espaces publics et privés. Prétendument importée de cultures dites d’origines, la « vêture » religieuse des laïques dans l’enceinte scolaire fait montre d’un art consommé de la provocation qui dégénère en violence et intimidation, au point qu’une élève du lycée Sévigné de Tourcoing, gifla le 7 octobre 2024, une professeure qui lui intimait l’ordre d’ôter son voile, et que le proviseur de lycée Maurice Ravel à Paris fut, quant à lui, menacé de mort (« Faut le brûler vif, ce chien »), pour le même motif.

Numéro 123 de « Causeur »

La question des accompagnateurs scolaires s’est à nouveau posée au moment de l’adoption de la loi confortant le respect des principes de la République du 24 août 2021 qui confirme, malgré la position du Sénat, le statu quo ante, défini par le Conseil d’Etat. Si les parents accompagnateurs sont des usagers, la loi de 2004, circonscrit l’interdiction aux seuls élèves, et ne s’applique donc pas aux parents.

La loi du 11 octobre 2010 dispose que « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ».

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Fille aînée de la liberté, la laïcité émancipe les esprits de l’endoctrinement ; sœur jumelle de l’égalité, elle affranchit le corps des femmes de l’embrigadement. Dorine contre Tartuffe en quelque sorte. Tartuffe : Couvrez ce sein que je ne saurais voir : Par de pareille objets les âmes sont blessées, Et cela fait venir de coupables pensées. Dorine : Vous êtes donc bien tendre à la tentation, Et la chair sur vos sens fait grande impression !

Ce féminisme qui défend le port du voile islamique

Les « écoféministes » luttent contre le « patriarcat blanc », défendent en France la liberté des femmes de porter le voile, et détournent le regard de l’oppression intracommunautaire. L’ambivalence de ce cénacle d’idéologues hybrides devant le courage des femmes iraniennes est consternante. Considèrent-ils l’interdiction d’ici et l’obligation de là-bas comme équivalentes, pour juger que les Françaises et les Iraniennes subissent la même oppression ?! Femmes de Paris, femmes de Téhéran ou de Kaboul, même combat ! Guerre des sexes et guerre des races contre l’universalisme, jusque et y compris, pour les plus radicaux, sur la question de l’excision assimilée à une circoncision féminine ! (Fatiha Agag-Boudjahlat, Le grand détournement, Lexio 2019). La propagande wokiste emporte tout dans un maelström d’impostures morales et de terrorisme intellectuel (Jean-François Braunstein, La religion woke, Grasset 2022). La recherche en sciences sociales et humaines est phagocytée par le militantisme académique (Nathalie Heinich, Ce que le militantisme fait à la recherche, Tracts Gallimard, n°29 mai 2021), autant que le « frérisme d’atmosphère » œuvre à rendre la société « charia compatible » (Florence Bergeaud-Blackler, Le frérisme et ses réseaux, l’enquête, Odile Jacob, 2023).

Statuant pour la première fois sur requête du nouveau déféré-laïcité, instauré par la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, le Conseil d’Etat a confirmé la suspension du règlement intérieur des piscines municipales de Grenoble autorisant le port du « burkini ». Il estime à juste titre que la dérogation très ciblée apportée, pour satisfaire une revendication religieuse, aux règles de droit commun de port de tenues de bain près du corps édictées pour un motif d’hygiène et de sécurité, est de nature à affecter le bon fonctionnement du service public et l’égalité de traitement des usagers dans des conditions portant atteinte au principe de neutralité des services publics (CE ord. 21 juin 2022). Mais, l’ordonnance doit également être lue comme la confirmation d’une jurisprudence favorable aux aménagements pour un motif religieux à condition qu’ils ne soient pas excessifs… De même, la haute juridiction, en rejetant le recours des « hijabeuses », a jugé que l’interdiction du « port de signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, religieuse ou syndicale » prévue par les statuts de la FFF, pouvait légalement être prise puisqu’elle est limitée aux temps et lieux des matchs de football et qu’elle apparaît nécessaire pour assurer leur bon déroulement en prévenant notamment les affrontements ou confrontations sans lien avec le sport. La mesure est donc adaptée et proportionnée (CE 29 juin 2023). Ces pressions revendicatrices interrogent sur le défi lancé à notre modèle civilisationnel.

Le défi civilisationnel

Au XVIIIème siècle, l’exécution du chevalier de la Barre et l’affaire Calas, ouvraient un front contre le fanatisme religieux. Voltaire rendait un réquisitoire contre les superstitions qui colonisent les religions (Traité sur la tolérance, 1763). Désormais, la diffusion du salafisme dans la société civile arme idéologiquement les bourreaux d’une nouvelle ère.

L’écrivain américain, né au Canada, prix Nobel de littérature en1976, Saul Bellow écrit : « Peu de choses sont plus agréables, plus civilisées qu’une terrasse tranquille au crépuscule ». Il baptisait Paris, « ville sainte de la laïcité ». C’est elle qui a été frappée par les attentats du 13 novembre ; le Paris des terrasses de café et des salles de concert. Le principe de laïcité est à un poste avancé. Son abaissement fragilise la liberté d’expression et l’égalité des sexes, et installe « l’insécurité culturelle » (Laurent Bouvet, L’insécurité culturelle. Sortir du malaise identitaire français, Fayard, 2015). Comme un système de vases communicants, à mesure que se réduit le champ de ces droits et principes, s’étend celui de l’intégrisme islamiste qui resserre son étreinte, tel un serpent autour de sa proie. Il impose ses dogmes : l’antisémitisme ; désigne ses cibles : la haine de l’Occident (judéo-chrétien) et de la République (laïque).

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Parce qu’ils étaient enseignants, Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie, Dominique Bernard, professeur de français, ont été assassinés. Ces attentats perpétrés pour le premier le 16 octobre 2020 devant le collège de Conflans-Sainte-Honorine, et pour le second dans l’enceinte du lycée Gambetta à Arras le 13 octobre 2023, rappellent la guerre asymétrique livrée contre la liberté d’expression qui, frappant les humanités en plein cœur, visent à réduire au silence et à anéantir le modèle culturel que l’école est censée transmettre.

Funérailles de Dominique Bernard, Arras, 19 octobre 2023 © FRANCOIS GREUEZ/SIPA

La laïcité témoigne d’un processus à l’œuvre qui travaille notre inconscient collectif. Cette singularité française est toutefois en péril, particulièrement à l’école devenue une cible, où la contestation se propage, jusqu’au contenu des enseignements, et par l’autocensure des professeurs confrontés la veulerie administrative du « pas de vague ». Face à la recrudescence des tenues islamiques avec l’apparition des abayas et l’incitation à la prière dans les établissements, le ministre de l’Education nationale Gabriel Attal, après les tergiversations de son prédécesseur, a par la note de service du 27 août 2023 interdit ce type de tenues vestimentaires dans les établissements scolaires publics. Le Conseil d’Etat a par deux ordonnances, rejeté les requêtes en référé liberté et en référé suspension en considérant pour la première, que l’interdiction ne porte pas atteinte à une liberté fondamentale (CE réf. 7 sept. 2023), et pour la seconde, en raison de l’absence de doute sérieux quant à sa légalité (CE réf. 25 sept. 2023). Statuant au fond par un seul et même arrêt, il confirme la légalité de l’interdiction de l’abaya dans ces enceintes (CE 27 sept. 2024).

La réaffirmation périodique du principe de laïcité n’aura pas l’effet escompté sans une maîtrise de l’immigration : « On peut intégrer des individus […] On n’intègre pas des peuples, avec leur passé, leurs traditions…» (Ch. de Gaulle, Propos rapportés par Alain Peyrefitte dans “C’était De Gaulle” éditions de Fallois, Fayard, 1994, tome 1 page 56). Attribut de la souveraineté, la politique migratoire doit être définie en fonction des capacités d’accueil (travail, logement…) et des facultés d’assimilation de la langue et du système de valeurs. Le Danemark et la Suède, pour les pays scandinaves rompus au consensualisme politique, ont su dresser le diagnostic et trouver leurs remèdes. La France serait bien inspirée, plutôt que de sombrer dans le palliatif, d’expérimenter sa propre méthode prophylactique et curative pour enfin offrir ce qu’elle a de meilleur à qui pourra en suivre le destin dans sa continuité historique. Le Général de Gaulle débute ces mémoires d’espoirs (Le renouveau 1958-1962) par cette formule restée célèbre « la France vient du fond des âges… Elle demeure elle-même le long du temps… Aussi l’Etat, qui répond de la France, est-il en charge, à la fois de son héritage d’hier, de ses intérêts d’aujourd’hui et de ses espoirs de demain ». Le principe de laïcité participe de ce mouvement que les chantres de la société inclusive abhorrent.

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Ni chagrin ni pitié

Dès le 8 octobre, les Français juifs ont été confrontés à la violence. Intimidations, harcèlements et agressions ont bouleversé le quotidien de nombre d’entre eux, dans la rue, à l’école ou jusqu’à leur domicile. Cela a suscité peu de condamnations politiques et aucune inter-religieuse. Comment vivre dans une telle indifférence?


Le 7 octobre a marqué une césure dans la vie des Juifs. Il y a un avant et un après. Le terme de « Juifs » ne doit pas être ici envisagé dans sa définition strictement religieuse. Quelques groupes ultra-orthodoxes non sionistes ont dû considérer ces massacres comme un épiphénomène dans le cheminement de l’attente messianique, voire même comme une punition de gens éloignés de la halakha. Peut-être même y avait-il des Juifs parmi les fanatiques qui se sont réjouis des massacres du 7 octobre : cela n’a pas d’autre intérêt que d’alimenter un musée des horreurs. D’autres en revanche, qui avaient gardé un sentiment de leur judéité « entre autres choses » ou même avaient enfoui, ou oublié ce sentiment, se sont sentis visés par les massacres du 7 octobre. Répliques de pogroms des anciens temps et des images de la Shoah, c’est l’allégorie du Juif persécuté parce que faible, refoulée dans le tréfonds de l’être et dont l’État d’Israël était censé éviter la sinistre réapparition qui a soudain giclé.

Autour d’eux, les Juifs font le compte de leurs connaissances et sont surpris. Certaines, parfois éloignés, leur envoient des messages de soutien. D’autres, plus proches, ne se manifestent pas. N’ont-ils pas fait le lien entre l’ami juif d’ici et l’Israélien inconnu de là-bas, car ils manquent d’imagination ou parce que la catégorie religieuse leur est étrangère ? Beaucoup rapportent avoir trouvé dès le 8 octobre, notamment en milieu scolaire ou hospitalier, des regards fermés et des conversations indifférentes. Pour ma part, j’ai été surpris par ces témoignages, peut-être parce que mon âge a raréfié mes relations professionnelles et que mon sionisme connu avait écrémé mes relations sociales. Mon expérience positive était biaisée.

Des chercheurs alertent sur l’idéologie des Frères musulmans depuis des années

Des relations se rompent et un sentiment d’étrangeté, dans tous les sens du terme, s’installe : comment vivre désormais avec des gens dont l’indifférence au sort des Juifs s’expose ainsi ? Pour ceux qui connaissaient des responsables musulmans et rêvaient de solidarité interreligieuse, les déceptions furent pénibles. Alors qu’ils espéraient que tel partisan fervent du dialogue exprimerait publiquement son dégoût, ils l’entendent disserter de généralités. Le 7 octobre, le recteur de la mosquée de Paris rencontrait des Frères musulmans, dont les collègues de Gaza se distinguaient alors de la façon que l’on sait. Son silence sur les massacres a été retentissant.

Dès le 8 octobre se multipliaient des actes antisémites commis par de jeunes musulmans. On manifeste pour protester ou pour fêter. Certains de ceux qui ont défilé contre le soi-disant génocide commis par les Israéliens à Gaza avaient fêté le massacre de Juifs par des habitants de Gaza.

Il y a des années que la lutte contre Israël a muté en haine contre les Juifs et que le slogan de libération de la Palestine est devenu le cache-sexe d’un islamisme dont même des musulmans marxistes ont repris le discours. Le FPLP, organisation au palmarès terroriste inégalé au nom de la lutte des peuples contre l’oppression américano-sioniste, dont Salah Hamouri est la figure la plus connue en France, est devenu à Gaza un supplétif de l’islamisme. Le président de l’OLP termine par des appels au djihad une carrière inaugurée par une thèse négationniste soutenue dans la très marxiste université de Moscou. Le sort réservé aux Juifs dans l’eschatologie islamiste est remis au goût du jour dans la charte du Hamas, dont l’article 7 retranscrit des déclarations attribuées à Mahomet par les plus respectés des auteurs de hadiths.

Il y a des années que des chercheurs alertent sur l’idéologie des Frères musulmans qui ont su, par leur stratégie des petits pas, leur patience et leur double langage bien rodé, évoluer dans tous les milieux et, avec l’aide de leurs parrains qatari et turc, prendre l’ascendant sur les autres expressions de l’islam. Le Hamas du cheikh Yacine, dont Yahia Sinwar est le proche disciple, c’est l’idéologie frériste qui a eu pignon sur rue dans notre pays, a gangrené la Belgique et a su se faire passer, pendant les années de Daech, comme une alternative modérée au djihadisme, au point que les autorités politiques et diplomatiques de l’Occident laïque l’ont soutenue discrètement. Sans « MeToo », Tariq Ramadan serait aujourd’hui le plus brillant des « contextualisateurs » du Hamas, ces négationnistes du 7 octobre.

Beaucoup de Français juifs envisagent dès lors le départ du pays où ils sont nés, le plus souvent pour Israël, un pays en guerre. L’antisémitisme des banlieues n’explique pas tout. Les Juifs ont eu à affronter l’antisémitisme des négationnistes et ils n’ont pas quitté la France pour autant. C’est que les responsables politiques, en dehors de Jean-Marie Le Pen, étaient sans équivoque, que la législation est devenue particulièrement protectrice et que de grands espoirs étaient mis dans l’enseignement de l’histoire de la Shoah. C’est aussi parce que le danger négationniste résidait dans la contamination idéologique, pas dans la violence. Des enfants juifs pouvaient entendre à l’école des remarques antisémites, ils n’y allaient pas la peur au ventre à cause du risque d’agression physique.

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La violence est devenue un mode d’expression idéologique. Ce changement a été amplifié par les réseaux sociaux et leurs capacités de harcèlement, et par la décomposition de territoires abandonnés à la loi des bandes. On ne tient pas assez compte du rôle de la peur. Les Juifs ont peur de se faire agresser à cause d’un signe de judéité, parfois seulement un nom. Cette peur de la violence islamiste envahit le monde intellectuel. On n’aime pas avouer qu’on a peur. Certains lui font la morale à cette peur, pour éviter le stigmate de l’islamophobie. La rhinocérite de Ionesco frappe une partie de l‘intelligentsia. Soljenitsyne n’aurait pas eu de Nobel si l’URSS avait encore été dirigée par Staline. Rushdie ne l’a pas reçu – la peur de représailles n’y est pas étrangère.

C’est par peur que les Juifs qui le pouvaient ont enlevé leurs enfants de l’école publique dans les quartiers « difficiles ». Cette réalité a été longtemps occultée et le silence qui a entouré la publication des Territoires perdus de la République et des rapports qui l’ont suivi, la cabale montée contre Georges Bensoussan quelques années plus tard jalonnent cette démission des élites intellectuelles. L’enseignement de l’histoire de la Shoah se heurte à des difficultés quotidiennes. La sous-notation des élèves de Yabné au grand oral du baccalauréat, niée par une rapide et peu crédible enquête administrative, a porté un dernier coup à ce qui restait de confiance des Juifs dans une Éducation nationale que leurs parents admiraient et où leurs enfants n’apparaissent pas les bienvenus…

Depuis vingt ans, l’engagement verbal des gouvernements contre l’antisémitisme est indiscutable. Mais rien n’est fait pour nommer ses causes et pallier les carences de notre système judiciaire et psychiatrique (procès de l’assassin de Sarah Halimi), pénitentiaire (les prisons, vivier de l’islamisme), éducatif. Beaucoup de Juifs ont été émus en entendant nos gouvernants proclamer que sans les Juifs la France ne serait plus la France, mais consternés quand les mêmes, après un attentat islamiste, prétendaient que « tout cela n’a rien à voir avec l’islam ». Pendant ce temps, le concept falsifié d’islamophobie se forgeait une place proéminente dans le discours, aussi incompatible fût-il avec une laïcité qui autorise par définition la critique des religions. Et le duo Dieudonné-Soral, en teintant d’humour l’antisémitisme, le rendait, quenelle aidant, tendance dans la génération Z.

Canari dans la mine

Les dénis, les paroles martiales sans suite et les accommodements pratiques ont ainsi lézardé la confiance dans la capacité de l’État à contrer les appels à la haine des Juifs. Cependant, alors que même l’extrême droite condamnait fermement l’antisémitisme, les appels du pied de la LFI aux islamistes pouvaient passer pour des initiatives irresponsables, mais sans influence.

Et puis est arrivé le 7 octobre. LFI a tué les victimes une seconde fois en refusant de qualifier de terroristes les actes du Hamas. Comment partager quoi que ce soit avec des hommes et des femmes capables de pareilles crapuleries verbales ? Le plus grave n’est pas que la secte mélenchoniste, son gourou et ses députés, dont certains font preuve d’une irréparable ignorance historique, aient assuré le service après-vente du Hamas auprès de leur électorat communautaire, c’est que leurs partenaires de la Nupes, puis du NFP n’aient pas trouvé là un motif de rupture suffisant.

Rassemblement hebdomadaire au Trocadéro pour demander la libération des otages retenus par le Hamas à Gaza, 5 avril 2024.Laurent CARON/ZEPPELIN/SIPA

Peu à peu, les images du 7 octobre ont été effacées par celles des destructions de Gaza. Une machine de propagande efficace a gravé dans l’imaginaire collectif des images de bombardements d’écoles et d’hôpitaux, agité le spectre d’une famine et imposé l’idée, dont on ne dira jamais assez combien elle est scandaleuse, d’un génocide perpétré par l’État juif. On ne peut pas parler sereinement avec un interlocuteur qui vous croit indifférent aux souffrances des civils, pense que vous approuvez un génocide et conclut qu’il suffirait d’un peu d’humanité de la part des Israéliens pour que la paix s’installe définitivement. Notre pays, dans ses profondeurs, a assez bien résisté à la déferlante anti-israélienne qui traverse les opinions publiques occidentales. La compréhension pour la cause israélienne perdure dans une grande partie du public. Cependant, l’aberrante OPA des lieux d’enseignement prestigieux par des activistes anti-israéliens, sans avoir atteint le même niveau qu’aux États-Unis, ne laisse pas d’inquiéter sur la sensibilité des futures élites. D’autant que le poids électoral de la minorité musulmane est appelé à augmenter.

La grande majorité des Juifs de France n’avaient jamais été victimes d’agression ou même de propos haineux. À la différence de leurs grands-parents, ils se disaient juifs sans complexes. Aujourd’hui, ils demandent à leurs enfants de se cacher. On pourrait se dire qu’après tout, les Français ont bien d’autres problèmes. Mais les Juifs sont le canari dans la mine, dont les gesticulations précèdent le coup de grisou. Si le processus en cours se poursuit, un jour les hommes et les femmes de toutes origines, de toutes croyances et de toutes sexualités subiront le totalitarisme islamiste. Certains pensent qu’il est déjà trop tard. Je veux croire pour ma part que la France, mon pays, peut encore être sauvée.

Retailleau contre l’immigration, ou la fin de règne des déracinés

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Emmanuel Macron recevait le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau à l’Élysée, ce matin à 10 heures. Le gouvernement entend proposer une nouvelle loi Immigration début 2025. Partout en Europe, on souhaite accélérer les « retours » des migrants indésirables.


Quand un enraciné parle d’immigration à un déraciné, le dialogue ne peut que tourner court. Tous deux ne vivent pas dans le même monde. Ce lundi matin, Bruno Retailleau a néanmoins rendez-vous avec Emmanuel Macron. L’homme des champs devrait tenter de convaincre l’homme des villes de la nécessité d’une nouvelle loi sur le sujet. La dernière avait été largement censurée le 25 janvier, à l’invitation tacite du président, par le Conseil constitutionnel.

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Le ministre de l’Intérieur plaidera probablement pour l’allongement des délais de rétention des expulsables, des restrictions au regroupement familial et au droit du sol, une remise en question de l’Aide médicale d’État (soins gratuits pour les clandestins), le rétablissement du délit de séjour irrégulier, etc. Le Vendéen, qui se sait porté par une opinion exaspérée par le conformisme bien-pensant, pourrait faire valoir un retour à la supériorité des lois françaises face à un « État de droit » dévoyé par l’Europe supranationale et ses juges non élus. Il pourrait réitérer sa demande de référendum sur « un des phénomènes qui a le plus bouleversé la société française depuis 50 ans sans que jamais les Français n’aient eu à se prononcer », comme il l’avait expliqué fin septembre, jugeant que « l’immigration n’est pas une chance ». Face à ce que la religion antiraciste voit comme un blasphème, Macron avait estimé que ces propos étaient « résolument en contradiction (…) avec la réalité ». « On peut décider qu’on aurait beaucoup mieux fait de la physique nucléaire sans la Polonaise Marie Curie (…), que l’on aurait pu danser beaucoup mieux sans Charles Aznavour, etc. », avait-il grincé. Pour lui, « Les binationaux sont des millions dans notre pays. Les Français issus de l’immigration au moins autant (..) Et c’est notre richesse. Et c’est une force ».

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Retailleau n’ébranlera pas le puéril angélisme présidentiel. Derrière la posture d’ouverture à l’autre, moralement avantageuse, le poids de l’aveuglement dogmatique reste un carcan intellectuel. Le refus de voir est à la source du pharisaïsme de Macron : il déplore l’insécurité généralisée, sans explorer ses causes. Simplet est l’argument qui avance les aspects positifs de l’immigration européenne (Curie et Aznavour en l’occurrence), que personne ne conteste, pour banaliser la submersion musulmane qui, d’évidence, ne s’intègre plus sous l’effet du nombre. Macron demeure le produit, élitiste et foutraque, d’un mondialisme déraciné qui a échoué dans ses utopies multiculturelles. Le chef de l’État ne se résout pas à admettre sa fin de règne. Elle est celle des apprentis-fossoyeurs des nations et des peuples indigènes. Ce sont ces derniers qui refusent à leur tour d’être colonisés et dépossédés de leur passé, par des envahisseurs, de plus en plus hostiles quand ils prônent la décolonisation occidentale des pays qu’ils ont quittés. Le rejet du monde universaliste et postnational se lit dans la réhabilitation de « populistes ». L’Italienne Giorgia Meloni, que Michel Barnier devrait rencontrer à Rome après s’être rendu vendredi à la frontière de Menton avec Retailleau et des ministres italiens, est citée en exemple pour sa politique migratoire. Le Hongrois Viktor Orban, épouvantail des belles âmes, est désigné par Israël comme un ami des juifs. Donald Trump, paria number one, pourrait sortir vainqueur des élections américaines du 5 novembre. En France, la gauche hurle à la « lepénisation des esprits ». Elle n’est que l’expression de la révolution en cours. Retailleau en est l’arme adamantine. Macron osera-t-il avouer qu’il s’est trompé ?


Elisabeth Lévy sur Sud Radio: « L’État de droit prétend désormais dicter aux peuples ce qui est bon pour eux… »

#Je Suis Paul: Anne Hidalgo à la récupération?

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La maire socialiste de Paris a décidé de renommer un lieu de la capitale en hommage à Paul Varry, tué par un automobiliste mardi.


Le meurtre du cycliste Paul Varry par un automobiliste à Paris continue de susciter beaucoup d’émotion. Un meurtre présumé, car l’enquête devra établir s’il y a bien eu intention homicide. L’émotion est légitime : une vie est fauchée, une famille est endeuillée, une autre détruite. Une mort si absurde. Faut-il pour autant donner son nom à un lieu parisien, comme veut le faire Anne Hidalgo, qui sait mettre du kitsch dans toutes les tragédies ? Cela signifierait que Paul Varry n’est pas la victime d’un crime odieux, mais le héros d’une cause plus grande que lui.

Un fait divers ?

Question inévitable : sommes-nous en présence d’un fait divers ou d’un fait de société ? Il y a des tragédies de droite et des tragédies de gauche. Mme Hidalgo ne proposerait évidemment pas de baptiser une rue Philippine. Pour la gauche, la mort de Paul Varry, quoiqu’exceptionnelle, n’est pas un événement isolé. D’où les rassemblements et revendications du week-end – que font les pouvoirs publics ? Le Monde dénonce le déni de la violence routière[1]. Pour tous ces gens, c’est une nouvelle occasion de prêcher la bonne parole: la voiture c’est mal, et le vélo c’est bien. La voiture tue ! Surtout les SUV… Il faut interdire les grosses voitures, clame le conseiller municipal communiste Ian Brossat. En plus, c’est macho. Ceux qui veulent que Mazan soit le procès de la masculinité sont les mêmes que ceux qui nous disent que la voiture tue et que ce sont évidemment les hommes qui les conduisent. En somme, interdisons les hommes et les voitures et tout ira bien.

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Je ne plaisante pas sur la mort d’un jeune homme. J’ai même beaucoup de compassion pour sa famille. Mais je me moque de ces raisonnements suscités par sa mort. Ce n’est pas un camion qui a tué à Nice le 14 juillet 2016. Ce n’est pas un SUV qui a tué Paul Varry. Ni une idéologie. C’est un homme. Cependant, je ne crois pas non plus que ce soit complètement un fait divers. Cela nous dit quelque chose sur notre société, et raconte une autre histoire que celle des gentils vélos contre les méchantes autos.

Cohabitation des « mobilités »

L’intolérance à la frustration semble manifeste dans cette affaire. Tout m’est dû, l’autre n’existe pas. Cela n’est pas propre à la voiture. Je frappe mon prof, j’insulte la police. Certes, ce phénomène est aggravé par le fait que chez certains, la voiture est un prolongement érotique. Si ça se trouve, le vélo aussi… La violence existe chez l’homme, même en vélo. La question qui se pose est celle de la répression des instincts, c’est-à-dire celle de la civilisation qui ne se porte pas très bien.

La cohabitation des «mobilités» (comme on dit dans la novlangue parisienne) est de plus en plus tendue. Parlez à un taxi ou à cycliste: vous entendrez des récits irréconciliables. La terreur des taxis ou des chauffeurs de bus, c’est de renverser un cycliste. Les vélos ne respectent pas les règles du Code de la route même si, à Paris, ça s’améliore un peu. Ce n’est pas leur faute. Le problème n’est pas qu’on demande aux automobilistes de partager la ville avec les vélos, mais qu’on a expliqué aux cyclistes qu’ils étaient moralement supérieurs. Et ces nigauds ont fini par le croire.


Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale


[1] https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/10/19/sortir-du-deni-de-la-violence-routiere_6355650_3232.html

Du côté des toubabs

Notre chroniqueur parle décidément une étrange langue — à moins qu’elle ne soit la langue de ces banlieues qu’il aime dénigrer, pour y avoir enseigné si longtemps — un sentiment que bien sûr personne ne partage à Causeur.


Loin de se limiter à la propagation du mysticisme païen et à la diffusion des éditoriaux de notre ami Alain de Benoist, la revue Eléments publie des enquêtes de fond. Par exemple ce mois-ci sur « le racisme antiblanc à l’école », « vérité interdite », s’il faut en croire François Bousquet qui a fouillé au corps ce non-dit de l’antiracisme.

« C’est un racisme qui n’existe pas, une légende urbaine colportée par l’extrême-droite et les suprémacistes blancs » — et pourtant, « s’il y a aujourd’hui un racisme aussi systémique que systématiquement nié, c’est celui-là ».

Tout part de la définition courante de la « race ». Voir l’usage extensif de la notion de « racisé », telle qu’on la trouve dans les organisations qui font de l’antiracisme leur fonds de commerce. Le racisé est celui qui porte sur sa peau la preuve d’une autre origine que la blanchitude — qui n’est pas une race, elle, plutôt le degré zéro à partir duquel les vrais êtres humains se catégorisent. Bronzé, très bronzé, noir. On croirait une réclame pour crème solaire.

Apartheid 2.0

De fait, nos croisés de l’antiracisme ont repris les critères de l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid, qui définissait une catégorie supérieure — les Blancs —, une catégorie intermédiaire, les métis, et un conglomérat de races noires inférieures, mêlant indistinctement des ethnies qui se détestaient franchement, et non admises à voter ni, a fortiori, à avoir des représentants au Parlement. On prend les mêmes, et on inverse : le Blanc est désormais tout en bas de l’échelle. L’antiracisme est parfois devenu un racisme à l’envers.

Nous retrouvons là la caractéristique centrale de notre monde orwellien, tel que j’ai eu maintes occasions de le décrire. L’ignorance, c’est la force, les professeurs non régénérés par le pédagogisme font encore l’apologie des « white dead males », comme on dit chez nos maîtres anglo-saxons, et seuls les hommes blancs doivent aspirer à se déconstruire, étant entendu que par destination sociale ils sont appelés à violer les femmes et à agresser les vieilles, ce qui n’arrive jamais aux racisés de toutes les couleurs.

Toutes ? N’exagérons pas. Les Asiatiques penchent du côté des Blancs, c’est bien connu, d’ailleurs eux aussi cultivent l’excellence scolaire, un piège blanc auquel nos racisés de frais ne se laissent pas prendre, ou rarement. Tout comme les Arabes, Palestiniens, Algériens ou autres, refusent de se laisser séduire par les sirènes du comité Nobel, une institution manifestement enjuivée puisqu’elle couronne un nombre infini d’enfants d’Abraham, en ignorant délibérément les enfants d’Ibrahim.

(« Mais ce sont les mêmes ! Tous sémites ! » « Eh bien, c’est la preuve qu’on ne naît pas crétin : on le devient ! » — comme aurait dit Simone de Beauvoir, féministe suspecte qui fréquentait des intellectuels blancs).

Syndrome de Stockholm

Le long article, très fouillé, de François Bousquet analyse en profondeur la façon dont, dans des écoles, collèges ou lycées où ils sont minoritaires, les jeunes Blancs sont sommés par leurs condisciples « racisés » de s’humilier, sous peine de passer pour racistes et islamophobes. De faire le ramadan même s’ils sont chrétiens. D’agiter des drapeaux palestiniens même s’ils sont juifs. De s’habiller comme la racaille dominante, dans un processus que Bousquet assimile avec justesse à un véritable syndrome de Stockholm.

Ce sont les mêmes que vous trouvez à Sciences-Po, stigmatisant les étudiants juifs et soupçonnant de sionisme rampant tous ceux qui qualifient les événements du 7 octobre 2023 de génocide, LFI de rassemblement pro-islamiste, et la mort des leaders meurtriers du Hamas — sur lui reconnaissance et bénédiction — de grande nouvelle, de nature à bien commencer l’année juive qui justement débute…

(Au passage, je suggère à Jean-Luc Mélenchon et à ses sbires de prendre un abonnement chez Interflora : au rythme auquel leurs amis se font éparpiller façon puzzle à Gaza ou au sud Liban, il sera plus économique de mensualiser ses envois de couronnes mortuaires).

Le Blanc est celui qui s’habille différemment, qui a de bons résultats scolaires (avez-vous réfléchi à ce que signifiait l’usage péjoratif en classe du mot « intellectuel ?), qui ne prie pas le même dieu. La Blanche est cette chair offerte aux frustrations des racisés auxquels on interdit de toucher leurs coreligionnaires hors mariage — allez voir sur le site porno blacksonblondes la façon dont ces charmants garçons traitent les jeunes « Gauloises ». Elle a d’ailleurs peu à peu intégré l’idée qu’elle doit s’offrir pour racheter les fautes de ses ancêtres esclavagistes — étant entendu que jamais Arabes ni Africains n’ont mis qui que ce soit en esclavage : ils ne risquent pas de le savoir, les enseignants hésitant fort à exposer des faits, et préférant propager des légendes.

Le comble, c’est que l’adolescent blanc est dominé dans les faits, quand il n’est pas tout simplement éliminé, alors qu’il est traité comme dominant dans les représentations médiatiques, souligne justement Bousquet. Inversion orwellienne, vous dis-je. Si je n’avais pas renoncé à écrire des essais, cela ferait un vrai sujet de livre : le monde occidental fonctionne désormais sur une boussole qui indique le sud.

À noter que les bobos — enseignants ou journalistes au premier chef — plaident pour une vraie mixité sociale à l’école, mais se gardent bien d’inscrire leurs enfants dans les établissements ghettoïsés et racisés auxquels la carte scolaire semblait les condamner. « Tu comprends, moi, c’est pas pareil », clament-ils. Libé en avait fait jadis le constat affligé. Le « Fais ce que je te dis » n’est pas à usage interne. Comme dit Bousquet, « le choix de l’établissement scolaire est un révélateur chimique des stratégies sociales. »

Il faudrait avoir le courage — mais j’ai expliqué dans mon dernier livre, l’Ecole sous emprise, que c’est ce qui manque le plus, avec la connaissance, aux enseignants d’aujourd’hui — de dire la vérité, sur l’esclavage, sur le racisme, sur Israël, et sur les manipulations auxquelles se livre la confrérie des Frères musulmans (à propos, où en est l’enquête diligentée par Darmanin pour établir la dangerosité de ces fondamentalistes exclus de la plupart des pays… musulmans ?). Mais cela suppose de sortir par le haut de ce monde orwellien, au lieu de s’humilier à baiser les pieds des racailles.

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Destroyer 666, le groupe de la discorde

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À La Mézière (35), le festival de métal Samaïn Fest annule la venue du groupe Deströyer 666


Le 12ème festival de musique « Samain Fest » se déroulera du 24 au 26 octobre dans le nord de Rennes devant cinq cent passionnés de rock et de musique métal. Ce festival soutient un réseau d’écoles privées bretonnantes, qui scolarise 4 000 élèves de Rennes à Quimper. Une langue bretonne défendue pendant le festival lui-même, puisque des cours sont proposés dans la programmation. 

Porté par son succès, le festival réalise l’exploit d’inviter des groupes plutôt habitués à la démesure du gigantesque Hellfest voisin ; cet automne, il a dû toutefois faire face à la première grosse polémique de son existence. Neuf jours avant l’évènement, Mediapart a déploré la venue du groupe Destroyer 666, qualifié de « raciste et misogyne » par le média d’Edwy Plenel. Aussitôt, le festival a annoncé la déprogrammation du groupe australien, qui devait être la tête d’affiche du 26 octobre. Destroyer 666 est un groupe de black-metal, un style où la violence, le satanisme et le paganisme cohabitent allègrement. Si l’œuvre du groupe (auteur de sept albums depuis 1997) se montre typique du folklore black-metal sans écueil notoire – ce qui lui permet de jouir d’une certaine notoriété – son chanteur (parfois bien chauffé par les molécules éthyliques dégustées en tournée) a montré à maintes reprises un comportement outrancier à l’encontre de l’extrême-gauche, de l’islam ou encore du mouvement #MeToo. À travers les propos de celui-ci, se pose ici la question de la distinction entre une œuvre et la personnalité de son artiste. L’émotion suscitée par la programmation de Destroyer 666 n’est-elle pas hypocrite, quelques semaines après l’omniprésence sur les écrans de Snoop Dogg, adepte de white face et de fumette, lors des derniers Jeux Olympiques ?

Une question qui divise la communauté métal : les uns accusent Mediapart de mener une chasse aux sorcières ; d’autres souhaitent carrément boycotter le festival, l’accusant de céder aux pressions de l’extrême-gauche et d’autres encore – plus inhabituel dans l’univers de la musique métal – ont applaudi cette déprogrammation. Cette ambiance délétère a poussé le festival à créer en toute urgence un stand de prévention où la dénonciation de tout comportement déplacé sera encouragée. Une polémique qui pourrait menacer l’avenir du festival, pour le plus grand malheur des écoles bretonnes.

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Violences sexistes et sexuelles: pas d’amalgame!

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Image d'illustration Unsplash

Selon le député et président du Parti socialiste belge Paul Magnette, « tous les hommes contribuent à entretenir des comportements dont le viol est la forme extrème». Réagissant à l’affaire Pélicot dans Le Monde, cet infatigable défenseur de nos amies les femmes appelle à «épurer notre corpus de règles, notre langage et nos modes de pensée des biais de notre culture patriarcale»... Une compatriote lui répond.


DR.

Monsieur l’ex-Ministre-Président et ex-Bourgmestre, pas encore tout à fait remis du double échec du PS en Belgique, vous tartinez dans le quotidien Le Monde1, empoignant la tragédie de Gisèle Pélicot pour nous faire part de votre féminisme de salon. Seulement voilà, Paul Magnette, on s’en fiche de vos états d’âme de quinquagénaire en pleine crise existentielle ! Quoique vous en disiez, votre parti s’est « fracassé » sur la vague bleue à tous les niveaux de pouvoir. Et comme vos prédécesseurs de gauche, vous instrumentalisez les victimes et leurs souffrances pour racoler comme dans un bar. Qui sait, peut-être l’une ou l’autre électrice soucieuse de « déconstruire la virilité toxique » vous accordera-t-elle ses suffrages aux prochaines élections ?

Dédaignant votre habituel « Padamalgam ! », vous affirmez donc que tous les hommes sont des violeurs en puissance. Eh bien non, cent fois non ! Certes, il existe des hommes éduqués au suprémacisme mâle et des cultures qui réifient les femmes, mais ce n’est pas, ou pas encore, la norme sous nos cieux. Il y a des hommes, et il y en a même beaucoup, qui se régalent du jeu subtil et délicat de la séduction. Toutes les forteresses ne tombent pas forcément sous les coups de bélier ; il en existe qui abaissent spontanément le pont-levis et savourent le chevalier courtois pénétrant les douves. Ca dépend surtout du conquérant.

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Peu nous chaut votre égalitarisme ménager ou institutionnel. L’égalité ! La vertueuse ambition des revanchards ! Mais on s’en fout que vous passiez l’aspirateur ! On ne veut pas être votre égal et moins encore votre semblable. On ne veut pas d’un législateur qui impose la mixité dans toutes les institutions – excepté celle du mariage ! – et qui contrôle nos foyers pour savoir qui fait la vaisselle. Non, on veut simplement vivre et travailler comme des femmes, à notre rythme et selon notre humeur. On veut sortir en ville seule, sans chaperon et sans que des barbares nous tombent dessus. On veut baguenauder en mini-jupe et talons aiguille sans essuyer le regard courroucé de femmes voilées ou menaçant des barbus. On veut les abuseurs, les détraqués, les violeurs, les polygames et les pédophiles en tôle, sans que la mansuétude de votre magistrature les relâche dans le circuit pour un oui ou pour un non.

Mais n’est-ce pas votre bonne ville de Charleroi, où le PS est aux manettes depuis les années 70, qui est devenue un coupe-gorge où il ne fait pas bon être une femme, et moins encore une jeune fille ?2 N’est-ce pas votre parti qui propulse aux plus hautes fonctions des issus de la diversité qui sont peut-être des chances électorales mais rarement des chances pour les femmes ?

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Il ne vous restera bientôt plus que la solution de votre acolyte, socialiste depuis le biberon et bourgmestre de Molenbeek, Catherine Moureaux ; afin de préserver les femmes de sa charmante commune, elle se propose de créer des maisons de quartier réservées aux filles3.  En français, cela s’appelle un gynécée.

Est-ce de cette façon que le Parti socialiste que vous présidez défendra dorénavant la condition féminine qui semble vous tenir tant à cœur dans les pages du Monde ?

Le socialisme n’est pas l’allié des femmes. Il leur a longtemps refusé le droit de vote et se refuse aujourd’hui à assurer leur sécurité. Votre posture de mâle en questionnement, taraudé par un étrange remord au vu des turpitudes d’inconnus en Avignon, peine à masquer votre coupable désinvolture face à ce qui est le premier droit des femmes : vivre libre, en toute sécurité.


  1. https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/10/16/proces-des-viols-de-mazan-tous-les-hommes-d-une-maniere-ou-d-une-autre-contribuent-a-entretenir-des-comportements-dont-le-viol-est-la-forme-extreme_6353154_3232.html ↩︎
  2. https://www.moustique.be/actu/belgique/2023/04/08/charleroi-ville-la-plus-dangereuse-de-belgique-et-sixieme-deurope-vraiment-259842 ↩︎
  3. https://www.7sur7.be/belgique/une-video-de-catherine-moureaux-a-molenbeek-fait-polemique-les-jeunes-filles-n-ont-pas-envie-d-etre-avec-les-jeunes-garcons~ac2e77ca/ ↩︎

Le Maire s’en va-t-en Suisse

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Lausanne, Suisse. DR.

Fugue helvétique. L’ancien ministre de l’Économie et des Finances entame une nouvelle vie de professeur sur les rives du lac Léman.


Bruno Le Maire, qui fut sept ans le très brillant argentier de France qu’on sait, a trouvé un nouveau job à la mesure de ses immenses talents. En Suisse. Là où la monnaie et l’économie n’ont pas encore eu à subir les affres de l’expertise lemairienne en ces domaines. Heureuse contrée. Il y dispensera deux jours par semaines des cours au sein du très réputé Center Enterprise for Society, une émanation de l’école polytechnique fédérale de Lausanne et de l’International Institute for Management developpement. C’est beaucoup d’intitulés en anglais. J’ignorais que cet idiome fût une des langues officielles de la Confédération, mais la mondialisation étant vraisemblablement au programme des études, mieux vaut montrer d’emblée les bons signes d’allégeance et de soumission. Ainsi, on ne sera pas surpris de constater la direction que prendront ces élites une fois sorties de tels moules.

Donc, notre Pic de la Mirandole des finances publiques passe en Suisse. Une fois encore force est de constater chez nos politiciens de haut rang, plutôt estampillés centre-droit ou centre-gauche – ceux-là mêmes que je me permets de qualifier de Têtes Molles – une tendance lourde à aller se faire voir ailleurs une fois qu’ils ont épuisé chez nous, au service de la France, leurs capacités diverses et variées, y compris celles de nuisance. M. De Villepin dispenserait ainsi sa science au Qatar et probablement en des territoires circonvoisins tout aussi démocratiques, alors que M. Raffarin, en ardent thuriféraire du « en même temps » macronien, donc du centre, du milieu, s’en est allé dispenser sa sagacité sans frontières dans l’Empire du Milieu, justement. 

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Tout se passe comme si, pour ces gens, la France – leur pays, leur patrie (mais connaissent-ils encore le sens de ce mot ?) n’était plus assez bien pour eux. Comme si la France et ses citoyens – qu’ils  considèrent probablement comme indécrottables, irrécupérables –  ne méritaient pas que leur prodigieuse intelligence s’attardât plus longtemps à leur service. La décence, la dignité, ne figurant pas davantage que le mot patrie dans leur abécédaire personnel, on aura compris qu’il serait vain d’en appeler à ces vertus pour espérer les entendre exprimer un soupçon de regret, de repentir.

J’ai d’abord cru que M. Le Maire s’expatriait en Helvétie pour éclairer de sa lanterne des étudiants en littérature. Qu’il allait là-bas animer des ateliers d’écriture érotique. On sait qu’au ministère, entre deux sales coups de génie à un pognon de dingue, il aimait à s’encanailler du côté de ce genre littéraire, ainsi qu’on a pu s’en rendre compte avec son récent roman Fugue américaine.

Vérification faite, il n’en est rien. Sa Sommité donnera des cours de géopolitique et de politique publique, cela en raison, justifient ses nouveaux employeurs « de son expertise liée à la décarbonisation et aux énergies propres ». Me voilà rassuré, moi qui – sans doute à tort – accorde plus un plus grand intérêt à l’art littéraire qu’à la décarbonisation. Quitte à ce qu’il fasse école là-bas, autant que ce soit dans ces domaines plutôt que dans la maîtrise du style. Les étudiants outre-alpins auront au moins échappé à cela.

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Kylian Mbappé file un mauvais coton

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Vigo, Espagne, 19 octobre 2024 © Lalo R. Villar/AP/SIPA

Ces derniers mois, la popularité de Kylian Mbappé est en chute libre. Après des propos polémiques lors de la mort de Nahel Merzouk en 2023, son inélégance lors de son départ du PSG, le joueur se retrouve au centre d’une affaire de viol présumé en Suède. Le Parisien explique que Stockholm est devenu un lieu de fête privilégié pour les sportifs du monde entier, lesquels sont nombreux à fantasmer sur les grandes blondes… Mbappé était dans la capitale suédoise alors que l’Équipe de France affrontait Israël à Budapest. Si le crack défraie la chronique, c’est parce que c’est une star du foot, car Mbappé est surtout un homme de son temps…


On ne sait pas, à l’heure actuelle, ce qui s’est vraiment passé à Stockholm et le silence de la justice suédoise, conjugué avec celui de l’avocate de la plaignante et les déclarations un zeste convenues de l’une des avocates de Kylian Mbappé, ne permettent pas de tirer des conclusions univoques sur ce séjour et ses deux nuits festives.

Mais la prudence dont il convient de faire preuve à l’égard de ces péripéties n’interdit pas de considérer que depuis quelque temps Kylian Mbappé semblait, comme on dit, filer un mauvais coton. Que les explications soient sportives ou plus personnelles, il est clair que les derniers mois, qu’il a plus subis que vécus au PSG, la manière dont l’entraîneur espagnol l’a traité, son impatience de rejoindre le club de son cœur, le Real de Madrid, ses prestations moins bonnes aussi bien dans le championnat de France qu’en équipe de France dont il était le capitaine, l’immense émoi médiatique exagéré autour de ses faits et gestes, ses déclarations parfois ridicules, par exemple sur la mort de Nahel, une assurance qui pouvait être prise pour de l’arrogance, ont créé un climat défavorable à son épanouissement sportif et au maintien d’une relation de confiance et d’admiration avec ceux qui le portaient aux nues. D’abord à cause de son génie de footballeur caractérisé par une vitesse exceptionnelle qui, redoutée et entravée, n’avait plus le même impact ces derniers temps.

Une image dégradée

Son départ au Real, malgré le contentieux l’opposant au PSG qui lui devrait 55 millions d’euros, paraissait l’avoir rendu heureux, l’avoir stabilisé. L’équipe et l’entraîneur prestigieux qui l’accueillaient et attendaient beaucoup de lui paraissaient avoir fait preuve de très bonnes dispositions à son égard.

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Je ne veux pas me prêter une lucidité rétrospective mais au fil du temps, il m’a semblé voir se dégrader son image. Sa capacité longtemps durable à résister à la mousse narcissique déversée sur lui s’est un jour métamorphosée en une dérive imprégnée de vanité et de la certitude qu’il pouvait tout se permettre. N’incriminer que lui serait injuste.

Quand je compare Kylian Mbappé avec nos autres cracks, Antoine Dupont et Léon Marchand surtout, je perçois une différence capitale entre les entourages. Depuis que tout jeune il a commencé à attirer les convoitises, les parents séparés de Kylian Mbappé paraissent l’avoir fait baigner dans un climat où l’argent domine, à cause du capital qu’il représente, et où ses intérêts financiers sont défendus par des géniteurs négociateurs impitoyables. Quelle énorme différence avec les parents de Léon Marchand et la mère d’Antoine Dupont ! Pour eux, lors de l’éclosion de ces deux champions, le tiroir-caisse n’a pas relégué l’affection et le cœur. Le gratuit a toujours eu sa place. Cela explique les dissemblances entre ces trois jeunes destins, l’adhésion enthousiaste à deux d’entre eux et la réserve de plus en plus vive manifestée à l’égard de Kylian Mbappé et de son environnement.

Un peu de tenue !

Il serait profondément inéquitable de faire reposer l’absence d’une politique de la tenue en France, et dans beaucoup de domaines, sur les seules épaules de Kylian Mbappé dont l’équipée somptuaire à tous points de vue et la destination suédoise surprenante ont mobilisé l’attention médiatique.

En effet, au regard de ce que j’entends par « politique de la tenue », si Kylian Mbappé peut être classé comme une personnalité qui en a manqué, les exemples sont multiples qui montrent que l’exigence de la tenue, à rapprocher de l’obligation de décence, est en chute libre, aussi bien dans les registres de la quotidienneté banale, de la vie politique, que de l’univers médiatique et artistique…

C’est même sans doute, à y regarder de près, l’évolution de notre société sur le plan de la forme, définie comme une manière d’être au monde, de se comporter comme il convient, de parler, de dialoguer avec autrui, de respecter son prochain et de se fixer des limites précisément quand, privilégiés, on croit pouvoir s’en abstenir, qui constitue la dégradation fondamentale de notre communauté d’existence, de notre civilisation.

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Faut-il rappeler les transgressions graves de certains députés à l’Assemblée nationale, incapables de saluer leurs collègues d’un autre camp, de faire honneur à ceux qui les ont élus, de tenir des propos structurés sans haine ni outrance et de savoir écouter tranquillement par exemple le Premier ministre quand il s’adresse à tous ? Faut-il rappeler les grossièretés du langage qui, dans le débat démocratique, remplacent la contradiction et l’argumentation par des insultes parce que, faute de savoir répliquer aux idées, on s’efforce de tenir pour moins que rien ceux qui les ont proférées ? Faut-il rappeler la pauvreté de ces débats où la droite parle à la droite et la gauche à la gauche, avec pourtant l’invocation répétitive d’un pluralisme réduit à sa seule dimension partisane ? Faut-il rappeler ces gestes indélicats, choquants, agressifs donnant de la virilité une lamentable image et blessant des féminités qui heureusement ne se laissent plus faire ? Faut-il rappeler ces élèves frappant leur maître, leur professeur, le monde de l’éducation bouleversé dans ses bases ? Faut-il rappeler, dans l’existence de tous les jours, dans les transports, ces femmes enceintes parfois debout, ces personnes âgées contemplant une jeunesse fatiguée assise, cette immense indifférence à l’égard de ce que la politesse nous apprenait hier à respecter, l’âge et l’enfance ? Faut-il rappeler les rapports de force et de violence qui dans nos rues opposent les moyens de mobilité les uns aux autres et aboutissent parfois tragiquement à des crimes ? Faut-il rappeler ce passage au fil des années de l’illégalité à l’immoralité, comme par exemple récemment un établissement pour handicapés dévasté, sans la moindre vergogne, avec ses fauteuils spéciaux très coûteux volés ? Faut-il rappeler la gabegie ostentatoire de quelques-uns face aux conditions de vie difficiles de beaucoup ?

On pourrait me demander en quoi ces exemples que je pourrais multiplier sont à relier avec les épisodes concernant Kylian Mbappé. Parce qu’ils relèvent de ce qu’on devrait d’abord apprendre de ses parents puis à l’école ; et de la Justice s’ils sont transgressifs. Car ces abstentions, indélicatesses, négligences peuvent se traduire au plus haut niveau de gravité par des délits ou des crimes ; la justice n’étant pour moi que la prescription d’une forme suprême de savoir-vivre.

Qu’on ne vienne pas soutenir que la tenue ne serait pas à apprendre à la jeunesse, comme si on pouvait tout lui passer. Puisqu’elle a tout l’avenir devant elle. C’est absolument le contraire. Si le socle est défaillant, tout se délitera. Il n’y a aucune raison de laisser croire que la jeunesse serait indigne de ce qui rend le fil des jours droit, moral et élégant.

Se tenir pour soi et pour une société, quelle splendide et nécessaire obligation !

Tripatouillages en Roumanie rurale

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© Memento Distribution

Le Danube n’est pas forcément beau et bleu. Singulièrement l’été, dans un patelin paumé qu’on n’atteint qu’en rafiot, et dont les ruelles pas même goudronnées s’achèvent en cul-de-sac sur le delta du fleuve. D’où le titre, Trois kilomètres jusqu’à la fin du monde, troisième long métrage de l’acteur et cinéaste Emanuel Pârvu, 45 ans. Le film était en compétition à Cannes.  

Adi, beau brun bouclé de 17 ans, vit chez ses parents dans une modeste maison du village. Le prologue nous suggère que le couple est endetté vis-à-vis d’un certain Zentov, dont on comprendra, au fil du récit, que le notable véreux du coin a des connexions haut placées à Tulcea, le chef-lieu portuaire de cette région septentrionale du pays, quasi frontalier avec l’Ukraine…

L’amorce du film nous montre Adi, cheminant la nuit de conserve avec un compagnon de son âge, venu de Bucarest en touriste : celui-ci lui lèche gentiment sa main, qu’une piqûre de ronce, semble-t-il, a fait saigner. Cut. La séquence suivante nous découvre le même Adi, mais cette fois le visage méchamment amoché, le corps tuméfié, en train de se voir examiné par le médecin du dispensaire local, en présence de ses parents et d’un officier de police en tenue. Pourquoi cette agression sauvage ? Quel en est le mobile ? Qui en sont les auteurs ? Adi a perdu connaissance; il n’a rien vu dans l’obscurité. Commence l’enquête, dans le microcosme de ces confins ruraux où tout se sait – et tout se dissimule.

Pas un film-dossier

C’est avec un sens consommé de l’ellipse et de la litote qu’Emanuel Pârvu assemble les pièces du drame, sans l’appoint de la moindre musique, avec cette sobriété, cette grande intelligence du rythme, du dialogue et de ses silences, toutes choses propres au nouveau cinéma roumain dont Cristian Mungiu (4 mois, 3 semaines, 2 jours ; Au-delà des collines ; RMN… ) demeure le champion. Les conciliabules entre les protagonistes dévoilent de proche en proche les enjeux souterrains d’une société archaïque, minée par les préjugés, la corruption et la peur, sur fond de bêtise incommensurable – probables séquelles de la dictature communiste de Ceausescu qui tint durablement la Roumanie, comme l’on sait, dans un état d’arriération mentale sans exemple en Europe.   

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Esquivant avec adresse l’écueil du film-dossier sur la-répression-de-l’homosexualité en milieu rural attardé, Trois kilomètres avant la fin du monde pénètre au premier chef l’entrelac des égoïsmes, des petits intérêts, des collusions qui font qu’« on doit se serrer les coudes », comme le susurre Zentov au géniteur d’Adi pour empêcher que cette sordide affaire, où ses deux crétins de fils sont impliqués, ne remonte jusqu’à Bucarest et ne fasse des vagues. Quitte à alerter une relation, par un coup de fil passé à bon escient, en sorte que l’enquêtrice diligentée par la justice (laquelle, au fil des interrogatoires, a parfaitement identifié l’omerta) soit opportunément rappelée fissa en d’autres lieux : « si on apprend qu’il y a des pédales ici, imagine ce que ça va donner », lâche encore en aparté le veule argousin, craignant surtout pour son dossier de demande de retraite anticipée. Sollicité quant à lui par les pieux parents d’Adi, le prêtre orthodoxe de la paroisse s’est assuré de l’autorisation du Très–Haut (sa rhétorique imparable vaut d’ailleurs quelques fort savoureuses répliques) pour exorciser le mal qui ronge l’adolescent, fût-ce en l’entravant de force avec l’aide de papa et maman. D’où une scène hallucinante dont on vous réservera la primeur. Avec beaucoup de subtilité, les dialogues rendent compte des subterfuges et des atermoiements dans lesquels s’envasent les comparses pris au piège de leur funeste logique, mais aussi l’étau moral qui se resserre sur Adi, placé en holocauste face à la monstruosité de ses géniteurs, et qui ne gardera foi qu’en son amie de cœur, Ilica… Avant de prendre le large.

Pas moralisateur

Il est devenu rare, par les temps qui courent, de voir à l’écran des œuvres qui ne soient pas formatées pour la défense des bonnes causes (les femmes, les minorités, les diversités en tous genres). Avec une remarquable économie de moyens, Emanuel Pârvu tient un tout autre discours :  celui qui, fût-ce en affrontant la morale publique, revendique l’irrévocable singularité du corps désirant.


Trois kilomètres avant la fin du monde. Film d’Emanuel Pârvu. Avec Bogdan Dumitriache, Ciprian Chiujdea, Laura Vasiliu…  
Durée : 1h45. 
En salles le 23 octobre 2023

La laïcité résistera-t-elle aux nouveaux assauts du wokisme?

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Le chef de l'établissement parisien Maurice Ravel a annoncé quitter ses fonctions par sécurité pour lui et pour le lycée, l'État va porter plainte contre l'éleve pour dénonciation calomnieuse... 28 / 03 / 2024 © lionel urman/SIPA

Le désenchantement du destin français ouvre l’espace public aux revendications identitaires que le principe de laïcité peine à endiguer. Analyse.


Consacré par l’article 1er de la Constitution, le principe de laïcité est inscrit en filigrane à l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Il trouve ses premières expressions législatives en 1882 et 1886 sur l’enseignement primaire, et passe à la postérité avec la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat. Elle institue un régime de neutralité dont l’acception est offerte à la controverse alors même qu’elle consiste moins en la neutralité religieuse de l’Etat qu’à une neutralisation des religions dans la sphère publique (Ph. Raynaud, La Laïcité. Histoire d’une singularité française, Gallimard, 2019). L’enquête d’opinion sur « l’état des lieux de la laïcité en France » réalisée en 2020 par l’institut Viavoice, montre que la laïcité constitue pour les Français un principe républicain essentiel (70%) qui fait partie de l’identité de la France (78%). Cependant, les jeunes adultes adoptent dans leur majorité une conception favorable à l’expression publique des identités religieuses (sondage d’opinion réalisé du 14 au 16 juin 2023 par l’institut Kantar-Sofres), et 78% des musulmans considèrent que la laïcité française est islamophobe (sondage Ifop du 7 décembre 2023). Le principe de laïcité signe donc une singularité française, dont la fortune est en déclin malgré la réaffirmation périodique du principe. Il subit l’offensive multiculturaliste et ne peut, seul, résister au défi lancé à notre modèle civilisationnel.

L’offensive multiculturaliste

La crise de la transmission (Jean-Paul Brighelli, La fabrique du crétin. L’apocalypse scolaire, L’Archipel 2022) s’inscrit dans le contexte de l’envahissement de l’espace public par les dictats religieux qui ciblent particulièrement l’école. L’affaire bien connue des collégiennes de Creil en 1989 fait penser à cette fable de La Fontaine Conseil tenu par les rats : « Ne faut-il que délibérer, La Cour en conseillers foisonne, Est-il besoin d’exécuter, L’on ne rencontre plus personne »

Aux termes de leur manifeste : « Profs ne capitulons pas ! », Elisabeth Badinter, Régis Debray, Alain Finkielkraut, Elisabeth de Fontenay et Catherine Kintzler dénonçaient déjà un « Munich de l’école républicaine ». Ils identifient dans le voilement des femmes le signe de leur soumission et refusent la mise en balance du principe de laïcité avec la liberté d’expression des élèves. Pénétrer dans les établissements scolaires avec ses certitudes, croyances familiales en bandoulière, et insanités véhiculées par les réseaux sociaux oppose une fin de non-recevoir à la transmission des savoirs. La loi 15 mars 2004 interdit le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse, codifiée à l’article L141-5-1 du Code de l’éducation. Cette loi, qui anéantit la jurisprudence Kherouaa et la circulaire Jospin du 12 décembre 1989, est intervenue à la suite du rapport Obin, et des préconisations de la commission Stasi, dont les membres se sont convertis à la nécessité de l’interdiction au fil des auditions, à l’exception de Jean Baubérot. L’auteur des 7 laïcités françaises (Maison des sciences et de l’Homme, 2015) regrette le glissement de la neutralité de l’Etat vers la neutralité imposée à la société civile, au motif que la loi de 1905 n’établirait pas de distinction entre les espaces publics et privés. Prétendument importée de cultures dites d’origines, la « vêture » religieuse des laïques dans l’enceinte scolaire fait montre d’un art consommé de la provocation qui dégénère en violence et intimidation, au point qu’une élève du lycée Sévigné de Tourcoing, gifla le 7 octobre 2024, une professeure qui lui intimait l’ordre d’ôter son voile, et que le proviseur de lycée Maurice Ravel à Paris fut, quant à lui, menacé de mort (« Faut le brûler vif, ce chien »), pour le même motif.

Numéro 123 de « Causeur »

La question des accompagnateurs scolaires s’est à nouveau posée au moment de l’adoption de la loi confortant le respect des principes de la République du 24 août 2021 qui confirme, malgré la position du Sénat, le statu quo ante, défini par le Conseil d’Etat. Si les parents accompagnateurs sont des usagers, la loi de 2004, circonscrit l’interdiction aux seuls élèves, et ne s’applique donc pas aux parents.

La loi du 11 octobre 2010 dispose que « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ».

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Fille aînée de la liberté, la laïcité émancipe les esprits de l’endoctrinement ; sœur jumelle de l’égalité, elle affranchit le corps des femmes de l’embrigadement. Dorine contre Tartuffe en quelque sorte. Tartuffe : Couvrez ce sein que je ne saurais voir : Par de pareille objets les âmes sont blessées, Et cela fait venir de coupables pensées. Dorine : Vous êtes donc bien tendre à la tentation, Et la chair sur vos sens fait grande impression !

Ce féminisme qui défend le port du voile islamique

Les « écoféministes » luttent contre le « patriarcat blanc », défendent en France la liberté des femmes de porter le voile, et détournent le regard de l’oppression intracommunautaire. L’ambivalence de ce cénacle d’idéologues hybrides devant le courage des femmes iraniennes est consternante. Considèrent-ils l’interdiction d’ici et l’obligation de là-bas comme équivalentes, pour juger que les Françaises et les Iraniennes subissent la même oppression ?! Femmes de Paris, femmes de Téhéran ou de Kaboul, même combat ! Guerre des sexes et guerre des races contre l’universalisme, jusque et y compris, pour les plus radicaux, sur la question de l’excision assimilée à une circoncision féminine ! (Fatiha Agag-Boudjahlat, Le grand détournement, Lexio 2019). La propagande wokiste emporte tout dans un maelström d’impostures morales et de terrorisme intellectuel (Jean-François Braunstein, La religion woke, Grasset 2022). La recherche en sciences sociales et humaines est phagocytée par le militantisme académique (Nathalie Heinich, Ce que le militantisme fait à la recherche, Tracts Gallimard, n°29 mai 2021), autant que le « frérisme d’atmosphère » œuvre à rendre la société « charia compatible » (Florence Bergeaud-Blackler, Le frérisme et ses réseaux, l’enquête, Odile Jacob, 2023).

Statuant pour la première fois sur requête du nouveau déféré-laïcité, instauré par la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, le Conseil d’Etat a confirmé la suspension du règlement intérieur des piscines municipales de Grenoble autorisant le port du « burkini ». Il estime à juste titre que la dérogation très ciblée apportée, pour satisfaire une revendication religieuse, aux règles de droit commun de port de tenues de bain près du corps édictées pour un motif d’hygiène et de sécurité, est de nature à affecter le bon fonctionnement du service public et l’égalité de traitement des usagers dans des conditions portant atteinte au principe de neutralité des services publics (CE ord. 21 juin 2022). Mais, l’ordonnance doit également être lue comme la confirmation d’une jurisprudence favorable aux aménagements pour un motif religieux à condition qu’ils ne soient pas excessifs… De même, la haute juridiction, en rejetant le recours des « hijabeuses », a jugé que l’interdiction du « port de signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, religieuse ou syndicale » prévue par les statuts de la FFF, pouvait légalement être prise puisqu’elle est limitée aux temps et lieux des matchs de football et qu’elle apparaît nécessaire pour assurer leur bon déroulement en prévenant notamment les affrontements ou confrontations sans lien avec le sport. La mesure est donc adaptée et proportionnée (CE 29 juin 2023). Ces pressions revendicatrices interrogent sur le défi lancé à notre modèle civilisationnel.

Le défi civilisationnel

Au XVIIIème siècle, l’exécution du chevalier de la Barre et l’affaire Calas, ouvraient un front contre le fanatisme religieux. Voltaire rendait un réquisitoire contre les superstitions qui colonisent les religions (Traité sur la tolérance, 1763). Désormais, la diffusion du salafisme dans la société civile arme idéologiquement les bourreaux d’une nouvelle ère.

L’écrivain américain, né au Canada, prix Nobel de littérature en1976, Saul Bellow écrit : « Peu de choses sont plus agréables, plus civilisées qu’une terrasse tranquille au crépuscule ». Il baptisait Paris, « ville sainte de la laïcité ». C’est elle qui a été frappée par les attentats du 13 novembre ; le Paris des terrasses de café et des salles de concert. Le principe de laïcité est à un poste avancé. Son abaissement fragilise la liberté d’expression et l’égalité des sexes, et installe « l’insécurité culturelle » (Laurent Bouvet, L’insécurité culturelle. Sortir du malaise identitaire français, Fayard, 2015). Comme un système de vases communicants, à mesure que se réduit le champ de ces droits et principes, s’étend celui de l’intégrisme islamiste qui resserre son étreinte, tel un serpent autour de sa proie. Il impose ses dogmes : l’antisémitisme ; désigne ses cibles : la haine de l’Occident (judéo-chrétien) et de la République (laïque).

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Parce qu’ils étaient enseignants, Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie, Dominique Bernard, professeur de français, ont été assassinés. Ces attentats perpétrés pour le premier le 16 octobre 2020 devant le collège de Conflans-Sainte-Honorine, et pour le second dans l’enceinte du lycée Gambetta à Arras le 13 octobre 2023, rappellent la guerre asymétrique livrée contre la liberté d’expression qui, frappant les humanités en plein cœur, visent à réduire au silence et à anéantir le modèle culturel que l’école est censée transmettre.

Funérailles de Dominique Bernard, Arras, 19 octobre 2023 © FRANCOIS GREUEZ/SIPA

La laïcité témoigne d’un processus à l’œuvre qui travaille notre inconscient collectif. Cette singularité française est toutefois en péril, particulièrement à l’école devenue une cible, où la contestation se propage, jusqu’au contenu des enseignements, et par l’autocensure des professeurs confrontés la veulerie administrative du « pas de vague ». Face à la recrudescence des tenues islamiques avec l’apparition des abayas et l’incitation à la prière dans les établissements, le ministre de l’Education nationale Gabriel Attal, après les tergiversations de son prédécesseur, a par la note de service du 27 août 2023 interdit ce type de tenues vestimentaires dans les établissements scolaires publics. Le Conseil d’Etat a par deux ordonnances, rejeté les requêtes en référé liberté et en référé suspension en considérant pour la première, que l’interdiction ne porte pas atteinte à une liberté fondamentale (CE réf. 7 sept. 2023), et pour la seconde, en raison de l’absence de doute sérieux quant à sa légalité (CE réf. 25 sept. 2023). Statuant au fond par un seul et même arrêt, il confirme la légalité de l’interdiction de l’abaya dans ces enceintes (CE 27 sept. 2024).

La réaffirmation périodique du principe de laïcité n’aura pas l’effet escompté sans une maîtrise de l’immigration : « On peut intégrer des individus […] On n’intègre pas des peuples, avec leur passé, leurs traditions…» (Ch. de Gaulle, Propos rapportés par Alain Peyrefitte dans “C’était De Gaulle” éditions de Fallois, Fayard, 1994, tome 1 page 56). Attribut de la souveraineté, la politique migratoire doit être définie en fonction des capacités d’accueil (travail, logement…) et des facultés d’assimilation de la langue et du système de valeurs. Le Danemark et la Suède, pour les pays scandinaves rompus au consensualisme politique, ont su dresser le diagnostic et trouver leurs remèdes. La France serait bien inspirée, plutôt que de sombrer dans le palliatif, d’expérimenter sa propre méthode prophylactique et curative pour enfin offrir ce qu’elle a de meilleur à qui pourra en suivre le destin dans sa continuité historique. Le Général de Gaulle débute ces mémoires d’espoirs (Le renouveau 1958-1962) par cette formule restée célèbre « la France vient du fond des âges… Elle demeure elle-même le long du temps… Aussi l’Etat, qui répond de la France, est-il en charge, à la fois de son héritage d’hier, de ses intérêts d’aujourd’hui et de ses espoirs de demain ». Le principe de laïcité participe de ce mouvement que les chantres de la société inclusive abhorrent.

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Ni chagrin ni pitié

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Libération de deux femmes israéliennes prises en otage lors des attaques du 7-Octobre, grâce à une médiation égyptienne et qatarie, 24 octobre 2023. DR.

Dès le 8 octobre, les Français juifs ont été confrontés à la violence. Intimidations, harcèlements et agressions ont bouleversé le quotidien de nombre d’entre eux, dans la rue, à l’école ou jusqu’à leur domicile. Cela a suscité peu de condamnations politiques et aucune inter-religieuse. Comment vivre dans une telle indifférence?


Le 7 octobre a marqué une césure dans la vie des Juifs. Il y a un avant et un après. Le terme de « Juifs » ne doit pas être ici envisagé dans sa définition strictement religieuse. Quelques groupes ultra-orthodoxes non sionistes ont dû considérer ces massacres comme un épiphénomène dans le cheminement de l’attente messianique, voire même comme une punition de gens éloignés de la halakha. Peut-être même y avait-il des Juifs parmi les fanatiques qui se sont réjouis des massacres du 7 octobre : cela n’a pas d’autre intérêt que d’alimenter un musée des horreurs. D’autres en revanche, qui avaient gardé un sentiment de leur judéité « entre autres choses » ou même avaient enfoui, ou oublié ce sentiment, se sont sentis visés par les massacres du 7 octobre. Répliques de pogroms des anciens temps et des images de la Shoah, c’est l’allégorie du Juif persécuté parce que faible, refoulée dans le tréfonds de l’être et dont l’État d’Israël était censé éviter la sinistre réapparition qui a soudain giclé.

Autour d’eux, les Juifs font le compte de leurs connaissances et sont surpris. Certaines, parfois éloignés, leur envoient des messages de soutien. D’autres, plus proches, ne se manifestent pas. N’ont-ils pas fait le lien entre l’ami juif d’ici et l’Israélien inconnu de là-bas, car ils manquent d’imagination ou parce que la catégorie religieuse leur est étrangère ? Beaucoup rapportent avoir trouvé dès le 8 octobre, notamment en milieu scolaire ou hospitalier, des regards fermés et des conversations indifférentes. Pour ma part, j’ai été surpris par ces témoignages, peut-être parce que mon âge a raréfié mes relations professionnelles et que mon sionisme connu avait écrémé mes relations sociales. Mon expérience positive était biaisée.

Des chercheurs alertent sur l’idéologie des Frères musulmans depuis des années

Des relations se rompent et un sentiment d’étrangeté, dans tous les sens du terme, s’installe : comment vivre désormais avec des gens dont l’indifférence au sort des Juifs s’expose ainsi ? Pour ceux qui connaissaient des responsables musulmans et rêvaient de solidarité interreligieuse, les déceptions furent pénibles. Alors qu’ils espéraient que tel partisan fervent du dialogue exprimerait publiquement son dégoût, ils l’entendent disserter de généralités. Le 7 octobre, le recteur de la mosquée de Paris rencontrait des Frères musulmans, dont les collègues de Gaza se distinguaient alors de la façon que l’on sait. Son silence sur les massacres a été retentissant.

Dès le 8 octobre se multipliaient des actes antisémites commis par de jeunes musulmans. On manifeste pour protester ou pour fêter. Certains de ceux qui ont défilé contre le soi-disant génocide commis par les Israéliens à Gaza avaient fêté le massacre de Juifs par des habitants de Gaza.

Il y a des années que la lutte contre Israël a muté en haine contre les Juifs et que le slogan de libération de la Palestine est devenu le cache-sexe d’un islamisme dont même des musulmans marxistes ont repris le discours. Le FPLP, organisation au palmarès terroriste inégalé au nom de la lutte des peuples contre l’oppression américano-sioniste, dont Salah Hamouri est la figure la plus connue en France, est devenu à Gaza un supplétif de l’islamisme. Le président de l’OLP termine par des appels au djihad une carrière inaugurée par une thèse négationniste soutenue dans la très marxiste université de Moscou. Le sort réservé aux Juifs dans l’eschatologie islamiste est remis au goût du jour dans la charte du Hamas, dont l’article 7 retranscrit des déclarations attribuées à Mahomet par les plus respectés des auteurs de hadiths.

Il y a des années que des chercheurs alertent sur l’idéologie des Frères musulmans qui ont su, par leur stratégie des petits pas, leur patience et leur double langage bien rodé, évoluer dans tous les milieux et, avec l’aide de leurs parrains qatari et turc, prendre l’ascendant sur les autres expressions de l’islam. Le Hamas du cheikh Yacine, dont Yahia Sinwar est le proche disciple, c’est l’idéologie frériste qui a eu pignon sur rue dans notre pays, a gangrené la Belgique et a su se faire passer, pendant les années de Daech, comme une alternative modérée au djihadisme, au point que les autorités politiques et diplomatiques de l’Occident laïque l’ont soutenue discrètement. Sans « MeToo », Tariq Ramadan serait aujourd’hui le plus brillant des « contextualisateurs » du Hamas, ces négationnistes du 7 octobre.

Beaucoup de Français juifs envisagent dès lors le départ du pays où ils sont nés, le plus souvent pour Israël, un pays en guerre. L’antisémitisme des banlieues n’explique pas tout. Les Juifs ont eu à affronter l’antisémitisme des négationnistes et ils n’ont pas quitté la France pour autant. C’est que les responsables politiques, en dehors de Jean-Marie Le Pen, étaient sans équivoque, que la législation est devenue particulièrement protectrice et que de grands espoirs étaient mis dans l’enseignement de l’histoire de la Shoah. C’est aussi parce que le danger négationniste résidait dans la contamination idéologique, pas dans la violence. Des enfants juifs pouvaient entendre à l’école des remarques antisémites, ils n’y allaient pas la peur au ventre à cause du risque d’agression physique.

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La violence est devenue un mode d’expression idéologique. Ce changement a été amplifié par les réseaux sociaux et leurs capacités de harcèlement, et par la décomposition de territoires abandonnés à la loi des bandes. On ne tient pas assez compte du rôle de la peur. Les Juifs ont peur de se faire agresser à cause d’un signe de judéité, parfois seulement un nom. Cette peur de la violence islamiste envahit le monde intellectuel. On n’aime pas avouer qu’on a peur. Certains lui font la morale à cette peur, pour éviter le stigmate de l’islamophobie. La rhinocérite de Ionesco frappe une partie de l‘intelligentsia. Soljenitsyne n’aurait pas eu de Nobel si l’URSS avait encore été dirigée par Staline. Rushdie ne l’a pas reçu – la peur de représailles n’y est pas étrangère.

C’est par peur que les Juifs qui le pouvaient ont enlevé leurs enfants de l’école publique dans les quartiers « difficiles ». Cette réalité a été longtemps occultée et le silence qui a entouré la publication des Territoires perdus de la République et des rapports qui l’ont suivi, la cabale montée contre Georges Bensoussan quelques années plus tard jalonnent cette démission des élites intellectuelles. L’enseignement de l’histoire de la Shoah se heurte à des difficultés quotidiennes. La sous-notation des élèves de Yabné au grand oral du baccalauréat, niée par une rapide et peu crédible enquête administrative, a porté un dernier coup à ce qui restait de confiance des Juifs dans une Éducation nationale que leurs parents admiraient et où leurs enfants n’apparaissent pas les bienvenus…

Depuis vingt ans, l’engagement verbal des gouvernements contre l’antisémitisme est indiscutable. Mais rien n’est fait pour nommer ses causes et pallier les carences de notre système judiciaire et psychiatrique (procès de l’assassin de Sarah Halimi), pénitentiaire (les prisons, vivier de l’islamisme), éducatif. Beaucoup de Juifs ont été émus en entendant nos gouvernants proclamer que sans les Juifs la France ne serait plus la France, mais consternés quand les mêmes, après un attentat islamiste, prétendaient que « tout cela n’a rien à voir avec l’islam ». Pendant ce temps, le concept falsifié d’islamophobie se forgeait une place proéminente dans le discours, aussi incompatible fût-il avec une laïcité qui autorise par définition la critique des religions. Et le duo Dieudonné-Soral, en teintant d’humour l’antisémitisme, le rendait, quenelle aidant, tendance dans la génération Z.

Canari dans la mine

Les dénis, les paroles martiales sans suite et les accommodements pratiques ont ainsi lézardé la confiance dans la capacité de l’État à contrer les appels à la haine des Juifs. Cependant, alors que même l’extrême droite condamnait fermement l’antisémitisme, les appels du pied de la LFI aux islamistes pouvaient passer pour des initiatives irresponsables, mais sans influence.

Et puis est arrivé le 7 octobre. LFI a tué les victimes une seconde fois en refusant de qualifier de terroristes les actes du Hamas. Comment partager quoi que ce soit avec des hommes et des femmes capables de pareilles crapuleries verbales ? Le plus grave n’est pas que la secte mélenchoniste, son gourou et ses députés, dont certains font preuve d’une irréparable ignorance historique, aient assuré le service après-vente du Hamas auprès de leur électorat communautaire, c’est que leurs partenaires de la Nupes, puis du NFP n’aient pas trouvé là un motif de rupture suffisant.

Rassemblement hebdomadaire au Trocadéro pour demander la libération des otages retenus par le Hamas à Gaza, 5 avril 2024.Laurent CARON/ZEPPELIN/SIPA

Peu à peu, les images du 7 octobre ont été effacées par celles des destructions de Gaza. Une machine de propagande efficace a gravé dans l’imaginaire collectif des images de bombardements d’écoles et d’hôpitaux, agité le spectre d’une famine et imposé l’idée, dont on ne dira jamais assez combien elle est scandaleuse, d’un génocide perpétré par l’État juif. On ne peut pas parler sereinement avec un interlocuteur qui vous croit indifférent aux souffrances des civils, pense que vous approuvez un génocide et conclut qu’il suffirait d’un peu d’humanité de la part des Israéliens pour que la paix s’installe définitivement. Notre pays, dans ses profondeurs, a assez bien résisté à la déferlante anti-israélienne qui traverse les opinions publiques occidentales. La compréhension pour la cause israélienne perdure dans une grande partie du public. Cependant, l’aberrante OPA des lieux d’enseignement prestigieux par des activistes anti-israéliens, sans avoir atteint le même niveau qu’aux États-Unis, ne laisse pas d’inquiéter sur la sensibilité des futures élites. D’autant que le poids électoral de la minorité musulmane est appelé à augmenter.

La grande majorité des Juifs de France n’avaient jamais été victimes d’agression ou même de propos haineux. À la différence de leurs grands-parents, ils se disaient juifs sans complexes. Aujourd’hui, ils demandent à leurs enfants de se cacher. On pourrait se dire qu’après tout, les Français ont bien d’autres problèmes. Mais les Juifs sont le canari dans la mine, dont les gesticulations précèdent le coup de grisou. Si le processus en cours se poursuit, un jour les hommes et les femmes de toutes origines, de toutes croyances et de toutes sexualités subiront le totalitarisme islamiste. Certains pensent qu’il est déjà trop tard. Je veux croire pour ma part que la France, mon pays, peut encore être sauvée.

Retailleau contre l’immigration, ou la fin de règne des déracinés

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Le Premier ministre et le ministre de l'Intérieur visitent le poste-frontière de Menthon (06), 18 août 2024 © SYSPEO/SIPA

Emmanuel Macron recevait le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau à l’Élysée, ce matin à 10 heures. Le gouvernement entend proposer une nouvelle loi Immigration début 2025. Partout en Europe, on souhaite accélérer les « retours » des migrants indésirables.


Quand un enraciné parle d’immigration à un déraciné, le dialogue ne peut que tourner court. Tous deux ne vivent pas dans le même monde. Ce lundi matin, Bruno Retailleau a néanmoins rendez-vous avec Emmanuel Macron. L’homme des champs devrait tenter de convaincre l’homme des villes de la nécessité d’une nouvelle loi sur le sujet. La dernière avait été largement censurée le 25 janvier, à l’invitation tacite du président, par le Conseil constitutionnel.

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Le ministre de l’Intérieur plaidera probablement pour l’allongement des délais de rétention des expulsables, des restrictions au regroupement familial et au droit du sol, une remise en question de l’Aide médicale d’État (soins gratuits pour les clandestins), le rétablissement du délit de séjour irrégulier, etc. Le Vendéen, qui se sait porté par une opinion exaspérée par le conformisme bien-pensant, pourrait faire valoir un retour à la supériorité des lois françaises face à un « État de droit » dévoyé par l’Europe supranationale et ses juges non élus. Il pourrait réitérer sa demande de référendum sur « un des phénomènes qui a le plus bouleversé la société française depuis 50 ans sans que jamais les Français n’aient eu à se prononcer », comme il l’avait expliqué fin septembre, jugeant que « l’immigration n’est pas une chance ». Face à ce que la religion antiraciste voit comme un blasphème, Macron avait estimé que ces propos étaient « résolument en contradiction (…) avec la réalité ». « On peut décider qu’on aurait beaucoup mieux fait de la physique nucléaire sans la Polonaise Marie Curie (…), que l’on aurait pu danser beaucoup mieux sans Charles Aznavour, etc. », avait-il grincé. Pour lui, « Les binationaux sont des millions dans notre pays. Les Français issus de l’immigration au moins autant (..) Et c’est notre richesse. Et c’est une force ».

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Retailleau n’ébranlera pas le puéril angélisme présidentiel. Derrière la posture d’ouverture à l’autre, moralement avantageuse, le poids de l’aveuglement dogmatique reste un carcan intellectuel. Le refus de voir est à la source du pharisaïsme de Macron : il déplore l’insécurité généralisée, sans explorer ses causes. Simplet est l’argument qui avance les aspects positifs de l’immigration européenne (Curie et Aznavour en l’occurrence), que personne ne conteste, pour banaliser la submersion musulmane qui, d’évidence, ne s’intègre plus sous l’effet du nombre. Macron demeure le produit, élitiste et foutraque, d’un mondialisme déraciné qui a échoué dans ses utopies multiculturelles. Le chef de l’État ne se résout pas à admettre sa fin de règne. Elle est celle des apprentis-fossoyeurs des nations et des peuples indigènes. Ce sont ces derniers qui refusent à leur tour d’être colonisés et dépossédés de leur passé, par des envahisseurs, de plus en plus hostiles quand ils prônent la décolonisation occidentale des pays qu’ils ont quittés. Le rejet du monde universaliste et postnational se lit dans la réhabilitation de « populistes ». L’Italienne Giorgia Meloni, que Michel Barnier devrait rencontrer à Rome après s’être rendu vendredi à la frontière de Menton avec Retailleau et des ministres italiens, est citée en exemple pour sa politique migratoire. Le Hongrois Viktor Orban, épouvantail des belles âmes, est désigné par Israël comme un ami des juifs. Donald Trump, paria number one, pourrait sortir vainqueur des élections américaines du 5 novembre. En France, la gauche hurle à la « lepénisation des esprits ». Elle n’est que l’expression de la révolution en cours. Retailleau en est l’arme adamantine. Macron osera-t-il avouer qu’il s’est trompé ?


Elisabeth Lévy sur Sud Radio: « L’État de droit prétend désormais dicter aux peuples ce qui est bon pour eux… »

#Je Suis Paul: Anne Hidalgo à la récupération?

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Rassemblement en hommage au cycliste tué Paul Varry, Paris, 19 octobre 2024 © Alfonso Jimenez/Shutterstock/SIPA

La maire socialiste de Paris a décidé de renommer un lieu de la capitale en hommage à Paul Varry, tué par un automobiliste mardi.


Le meurtre du cycliste Paul Varry par un automobiliste à Paris continue de susciter beaucoup d’émotion. Un meurtre présumé, car l’enquête devra établir s’il y a bien eu intention homicide. L’émotion est légitime : une vie est fauchée, une famille est endeuillée, une autre détruite. Une mort si absurde. Faut-il pour autant donner son nom à un lieu parisien, comme veut le faire Anne Hidalgo, qui sait mettre du kitsch dans toutes les tragédies ? Cela signifierait que Paul Varry n’est pas la victime d’un crime odieux, mais le héros d’une cause plus grande que lui.

Un fait divers ?

Question inévitable : sommes-nous en présence d’un fait divers ou d’un fait de société ? Il y a des tragédies de droite et des tragédies de gauche. Mme Hidalgo ne proposerait évidemment pas de baptiser une rue Philippine. Pour la gauche, la mort de Paul Varry, quoiqu’exceptionnelle, n’est pas un événement isolé. D’où les rassemblements et revendications du week-end – que font les pouvoirs publics ? Le Monde dénonce le déni de la violence routière[1]. Pour tous ces gens, c’est une nouvelle occasion de prêcher la bonne parole: la voiture c’est mal, et le vélo c’est bien. La voiture tue ! Surtout les SUV… Il faut interdire les grosses voitures, clame le conseiller municipal communiste Ian Brossat. En plus, c’est macho. Ceux qui veulent que Mazan soit le procès de la masculinité sont les mêmes que ceux qui nous disent que la voiture tue et que ce sont évidemment les hommes qui les conduisent. En somme, interdisons les hommes et les voitures et tout ira bien.

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Je ne plaisante pas sur la mort d’un jeune homme. J’ai même beaucoup de compassion pour sa famille. Mais je me moque de ces raisonnements suscités par sa mort. Ce n’est pas un camion qui a tué à Nice le 14 juillet 2016. Ce n’est pas un SUV qui a tué Paul Varry. Ni une idéologie. C’est un homme. Cependant, je ne crois pas non plus que ce soit complètement un fait divers. Cela nous dit quelque chose sur notre société, et raconte une autre histoire que celle des gentils vélos contre les méchantes autos.

Cohabitation des « mobilités »

L’intolérance à la frustration semble manifeste dans cette affaire. Tout m’est dû, l’autre n’existe pas. Cela n’est pas propre à la voiture. Je frappe mon prof, j’insulte la police. Certes, ce phénomène est aggravé par le fait que chez certains, la voiture est un prolongement érotique. Si ça se trouve, le vélo aussi… La violence existe chez l’homme, même en vélo. La question qui se pose est celle de la répression des instincts, c’est-à-dire celle de la civilisation qui ne se porte pas très bien.

La cohabitation des «mobilités» (comme on dit dans la novlangue parisienne) est de plus en plus tendue. Parlez à un taxi ou à cycliste: vous entendrez des récits irréconciliables. La terreur des taxis ou des chauffeurs de bus, c’est de renverser un cycliste. Les vélos ne respectent pas les règles du Code de la route même si, à Paris, ça s’améliore un peu. Ce n’est pas leur faute. Le problème n’est pas qu’on demande aux automobilistes de partager la ville avec les vélos, mais qu’on a expliqué aux cyclistes qu’ils étaient moralement supérieurs. Et ces nigauds ont fini par le croire.


Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale


[1] https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/10/19/sortir-du-deni-de-la-violence-routiere_6355650_3232.html

Du côté des toubabs

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Deux personnes prennent la pose entre deux feux à Bordeaux, émeutes après la mort de Nahel, 29 juin 2023 © Stephane Duprat/SIPA

Notre chroniqueur parle décidément une étrange langue — à moins qu’elle ne soit la langue de ces banlieues qu’il aime dénigrer, pour y avoir enseigné si longtemps — un sentiment que bien sûr personne ne partage à Causeur.


Loin de se limiter à la propagation du mysticisme païen et à la diffusion des éditoriaux de notre ami Alain de Benoist, la revue Eléments publie des enquêtes de fond. Par exemple ce mois-ci sur « le racisme antiblanc à l’école », « vérité interdite », s’il faut en croire François Bousquet qui a fouillé au corps ce non-dit de l’antiracisme.

« C’est un racisme qui n’existe pas, une légende urbaine colportée par l’extrême-droite et les suprémacistes blancs » — et pourtant, « s’il y a aujourd’hui un racisme aussi systémique que systématiquement nié, c’est celui-là ».

Tout part de la définition courante de la « race ». Voir l’usage extensif de la notion de « racisé », telle qu’on la trouve dans les organisations qui font de l’antiracisme leur fonds de commerce. Le racisé est celui qui porte sur sa peau la preuve d’une autre origine que la blanchitude — qui n’est pas une race, elle, plutôt le degré zéro à partir duquel les vrais êtres humains se catégorisent. Bronzé, très bronzé, noir. On croirait une réclame pour crème solaire.

Apartheid 2.0

De fait, nos croisés de l’antiracisme ont repris les critères de l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid, qui définissait une catégorie supérieure — les Blancs —, une catégorie intermédiaire, les métis, et un conglomérat de races noires inférieures, mêlant indistinctement des ethnies qui se détestaient franchement, et non admises à voter ni, a fortiori, à avoir des représentants au Parlement. On prend les mêmes, et on inverse : le Blanc est désormais tout en bas de l’échelle. L’antiracisme est parfois devenu un racisme à l’envers.

Nous retrouvons là la caractéristique centrale de notre monde orwellien, tel que j’ai eu maintes occasions de le décrire. L’ignorance, c’est la force, les professeurs non régénérés par le pédagogisme font encore l’apologie des « white dead males », comme on dit chez nos maîtres anglo-saxons, et seuls les hommes blancs doivent aspirer à se déconstruire, étant entendu que par destination sociale ils sont appelés à violer les femmes et à agresser les vieilles, ce qui n’arrive jamais aux racisés de toutes les couleurs.

Toutes ? N’exagérons pas. Les Asiatiques penchent du côté des Blancs, c’est bien connu, d’ailleurs eux aussi cultivent l’excellence scolaire, un piège blanc auquel nos racisés de frais ne se laissent pas prendre, ou rarement. Tout comme les Arabes, Palestiniens, Algériens ou autres, refusent de se laisser séduire par les sirènes du comité Nobel, une institution manifestement enjuivée puisqu’elle couronne un nombre infini d’enfants d’Abraham, en ignorant délibérément les enfants d’Ibrahim.

(« Mais ce sont les mêmes ! Tous sémites ! » « Eh bien, c’est la preuve qu’on ne naît pas crétin : on le devient ! » — comme aurait dit Simone de Beauvoir, féministe suspecte qui fréquentait des intellectuels blancs).

Syndrome de Stockholm

Le long article, très fouillé, de François Bousquet analyse en profondeur la façon dont, dans des écoles, collèges ou lycées où ils sont minoritaires, les jeunes Blancs sont sommés par leurs condisciples « racisés » de s’humilier, sous peine de passer pour racistes et islamophobes. De faire le ramadan même s’ils sont chrétiens. D’agiter des drapeaux palestiniens même s’ils sont juifs. De s’habiller comme la racaille dominante, dans un processus que Bousquet assimile avec justesse à un véritable syndrome de Stockholm.

Ce sont les mêmes que vous trouvez à Sciences-Po, stigmatisant les étudiants juifs et soupçonnant de sionisme rampant tous ceux qui qualifient les événements du 7 octobre 2023 de génocide, LFI de rassemblement pro-islamiste, et la mort des leaders meurtriers du Hamas — sur lui reconnaissance et bénédiction — de grande nouvelle, de nature à bien commencer l’année juive qui justement débute…

(Au passage, je suggère à Jean-Luc Mélenchon et à ses sbires de prendre un abonnement chez Interflora : au rythme auquel leurs amis se font éparpiller façon puzzle à Gaza ou au sud Liban, il sera plus économique de mensualiser ses envois de couronnes mortuaires).

Le Blanc est celui qui s’habille différemment, qui a de bons résultats scolaires (avez-vous réfléchi à ce que signifiait l’usage péjoratif en classe du mot « intellectuel ?), qui ne prie pas le même dieu. La Blanche est cette chair offerte aux frustrations des racisés auxquels on interdit de toucher leurs coreligionnaires hors mariage — allez voir sur le site porno blacksonblondes la façon dont ces charmants garçons traitent les jeunes « Gauloises ». Elle a d’ailleurs peu à peu intégré l’idée qu’elle doit s’offrir pour racheter les fautes de ses ancêtres esclavagistes — étant entendu que jamais Arabes ni Africains n’ont mis qui que ce soit en esclavage : ils ne risquent pas de le savoir, les enseignants hésitant fort à exposer des faits, et préférant propager des légendes.

Le comble, c’est que l’adolescent blanc est dominé dans les faits, quand il n’est pas tout simplement éliminé, alors qu’il est traité comme dominant dans les représentations médiatiques, souligne justement Bousquet. Inversion orwellienne, vous dis-je. Si je n’avais pas renoncé à écrire des essais, cela ferait un vrai sujet de livre : le monde occidental fonctionne désormais sur une boussole qui indique le sud.

À noter que les bobos — enseignants ou journalistes au premier chef — plaident pour une vraie mixité sociale à l’école, mais se gardent bien d’inscrire leurs enfants dans les établissements ghettoïsés et racisés auxquels la carte scolaire semblait les condamner. « Tu comprends, moi, c’est pas pareil », clament-ils. Libé en avait fait jadis le constat affligé. Le « Fais ce que je te dis » n’est pas à usage interne. Comme dit Bousquet, « le choix de l’établissement scolaire est un révélateur chimique des stratégies sociales. »

Il faudrait avoir le courage — mais j’ai expliqué dans mon dernier livre, l’Ecole sous emprise, que c’est ce qui manque le plus, avec la connaissance, aux enseignants d’aujourd’hui — de dire la vérité, sur l’esclavage, sur le racisme, sur Israël, et sur les manipulations auxquelles se livre la confrérie des Frères musulmans (à propos, où en est l’enquête diligentée par Darmanin pour établir la dangerosité de ces fondamentalistes exclus de la plupart des pays… musulmans ?). Mais cela suppose de sortir par le haut de ce monde orwellien, au lieu de s’humilier à baiser les pieds des racailles.

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Destroyer 666, le groupe de la discorde

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Le groupe australien de metal Destroyer 666. DR.

À La Mézière (35), le festival de métal Samaïn Fest annule la venue du groupe Deströyer 666


Le 12ème festival de musique « Samain Fest » se déroulera du 24 au 26 octobre dans le nord de Rennes devant cinq cent passionnés de rock et de musique métal. Ce festival soutient un réseau d’écoles privées bretonnantes, qui scolarise 4 000 élèves de Rennes à Quimper. Une langue bretonne défendue pendant le festival lui-même, puisque des cours sont proposés dans la programmation. 

Porté par son succès, le festival réalise l’exploit d’inviter des groupes plutôt habitués à la démesure du gigantesque Hellfest voisin ; cet automne, il a dû toutefois faire face à la première grosse polémique de son existence. Neuf jours avant l’évènement, Mediapart a déploré la venue du groupe Destroyer 666, qualifié de « raciste et misogyne » par le média d’Edwy Plenel. Aussitôt, le festival a annoncé la déprogrammation du groupe australien, qui devait être la tête d’affiche du 26 octobre. Destroyer 666 est un groupe de black-metal, un style où la violence, le satanisme et le paganisme cohabitent allègrement. Si l’œuvre du groupe (auteur de sept albums depuis 1997) se montre typique du folklore black-metal sans écueil notoire – ce qui lui permet de jouir d’une certaine notoriété – son chanteur (parfois bien chauffé par les molécules éthyliques dégustées en tournée) a montré à maintes reprises un comportement outrancier à l’encontre de l’extrême-gauche, de l’islam ou encore du mouvement #MeToo. À travers les propos de celui-ci, se pose ici la question de la distinction entre une œuvre et la personnalité de son artiste. L’émotion suscitée par la programmation de Destroyer 666 n’est-elle pas hypocrite, quelques semaines après l’omniprésence sur les écrans de Snoop Dogg, adepte de white face et de fumette, lors des derniers Jeux Olympiques ?

Une question qui divise la communauté métal : les uns accusent Mediapart de mener une chasse aux sorcières ; d’autres souhaitent carrément boycotter le festival, l’accusant de céder aux pressions de l’extrême-gauche et d’autres encore – plus inhabituel dans l’univers de la musique métal – ont applaudi cette déprogrammation. Cette ambiance délétère a poussé le festival à créer en toute urgence un stand de prévention où la dénonciation de tout comportement déplacé sera encouragée. Une polémique qui pourrait menacer l’avenir du festival, pour le plus grand malheur des écoles bretonnes.

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