Nous ne lisons pas tous les jours la presse koweitienne. Difficile donc de faire comme si nous n’avions pas chipé sur le site du Courrier International l’info alarmante qui suit : des princes de la famille royale intrigueraient dans l’ombre (rare là-bas) pour supprimer les micro-libertés que la Constitution octroie à leurs féaux. Il semblerait même que les comploteurs ne soient pas plus attachés que ça à l’idée même de Constitution. Ce qui ne manque pas de m’inquiéter : les mêmes causes produisant les mêmes effets, en cas de disparitions des libertés au Koweit, le Monde Libre déclenchera automatiquement une nouvelle guerre pour les rétablir… Si mon raisonnement pêchait quelque part, n’hésitez pas à me le signaler.
Dieu.com
Sexe, légumes et vidéos : tout se consomme désormais sur le web. Pourquoi pas la religion ? Parlons Net reçoit cette semaine Jean-François Mayer, fondateur de l’institut Religioscopie et auteur d’une enquête édifiante : Internet et religions (éditions Infolio). Pour l’interroger, Bénédicte Charles de Marianne2.fr, Xavier Monnier de Bakchich.info et David Martin-Castelnau de Causeur.fr.
Peut-on procéder à un baptême en ligne ? Si oui, expédie-t-on l’eau bénite par courriel ? Jean-François Mayer explique comment l’utilisation d’Internet bouleverse la pratique religieuse de manière parfois saugrenue. La religion – ce qui relie, au sens étymologique – peut-elle survivre à « l’atomisation spirituelle » ? Mayer répond par l’affirmative : la pratique religieuse proprement dite (prière par mail, messe en podcast, etc.) ne ferait que pallier, à la marge, à l’isolement de certains fidèles. Pour l’essentiel, le web serait surtout utilisé à des fins de communication et de documentation.
Comment les religions exploitent-elles Internet ? A en croire Jean-François Mayer, le cybermonde ressemble assez au monde réel : le protestantisme évangélique, efficace et prosélyte, y progresse le plus rapidement. L’islam est y représenté à la fois par des savants soucieux d’échanges et des groupuscules de fanatiques. L’église catholique, plus figée, s’y adapte finalement. Des sites reliés au judaïsme y perpétuent la tradition et posent des questions à coller le caramel. Et surprise : l’hindouisme y serait particulièrement à l’aise… Quant aux minorités persécutées, des Alevis de Turquie aux Kabyles osant revenir au christianisme de leurs ancêtres, ils trouvent parfois refuge sur le net, y développant des « cyber catacombes ».
Pour finir, une question cruciale : revenant parmi nous, l’envoyé de l’Eternel s’annoncerait-il on line ? La réponse (à visionner) de l’auteur ne manque pas d’esprit. DMC
1ère partie
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2e partie
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3e partie
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Jeux dangereux
Durant les quinze dernières années, plus de quatre mille enfants chinois – dont 92 % de garçons – ont été prénommés Aoyun, c’est-à-dire « jeux olympiques ». Il n’est pas trop tard pour rappeler aux Chinoises enceintes que les Jeux Paralympiques 2008 se tiendront eux aussi à Pékin.
Aventures en vexillologie
Toujours à la recherche d’une activité futile, je me suis passionné hier soir pour une discussion lancée sur l’excellent site, disons joyeusement post-réactionnaire, I like your style. Pour aggraver mon cas, je préciserai qu’il s’agissait d’une digression dans le fil, lequel concernait au départ la photo d’un imposant fourneau de cuisine en fonte, les gens d’ILYS se passionnant hélas souvent pour des sujets moins dignes d’intérêt que la carrière de Laurence Ferrari ou le prix du gasoil à la pompe. Cette digression, donc, portait sur un détail de la photo où, à la droite de la cuisinière, on distinguait à l’évidence un drapeau américain, et caché derrière, à peine visible, le bout d’un autre oriflamme, beaucoup moins aisément identifiable. Il y avait néanmoins un indice, une étoile à sept branches (personne n’est parfait) sur fond rouge. Ces gens-là se passionnaient donc pour trouver d’où pouvait bien venir ce fichu morceau de tissu, jusqu’à ce qu’un internaute apparemment de race corse, répondant au pseudo de Sampieru suggère que le drapeau en question était le « Red Ensign » australien, autrefois emblème officiel du pays des kangourous et de Kylie Minogue, et désormais réservé à l’usage des seuls navires marchands, le drapeau officiel étant désormais le « Blue Ensign », c’est-à-dire le même, mais sur fond bleu.
Emballé à l’idée de jouer les mouches du coche, je me suis donc intéressé dans mon coin au mystérieux drapeau derrière le Stars and Stripes (certains indigènes l’écrivent avec deux majuscules, d’autres non). A priori, la piste de l’ex-drapeau officiel australien me paraissait la bonne, les étoiles à sept branches étant un quasi-monopole de la terre d’asile de Simon Leys, mais allez savoir… La requête Google « seven points star » ne débouchant sur rien de très pertinent, j’ai recherché les sites faisant autorité en matière de « vexillologie » – avant même de commencer ma quête, j’avais déjà appris un nouveau mot, toujours ça que les Boches n’auront pas… Finalement j’arrêtai mon choix sur le site US Flags Of The World, qui me semblait au poil. Puis dans mon anglais pataud, mais bankable j’envoyais, à tout hasard, un petit mot à l’animateur dudit site, accompagné de la fameuse photo de cuisinière. Quelques heures après, je recevais la réponse suivante :
« Bonjour, mon ami, Excusez-moi pour mon pauvre francais… j’etude votre bel langue pour cinq ans (2 en l’universite), mais, je ne souviens pas beaucoup de mots… Ce drapeau – est-ce que un drapeau rouge, avec le « Union Jack » ? Australian ensign ? Ici. Thank you for being patient with my French. I used to know more, but it is sad that there are few French speakers in Southern California. By the way, my daughter was born on July 14 – Bastille Day! I fly your flag on her birthday ! Bon nuit ! Votre ami,
Edward »
Cette missive me semble appeler plusieurs commentaires.
Primo, les résultats de Southern California et de Northern Corsica sont identiques. A moins d’un sombre complot désinformateur américano-paoliste, la piste australienne semble donc être LA bonne.
Secundo, vous, je ne sais pas, mais moi, je suis ému par ce mec qui répond aussi prestement, gentiment et savamment à un casse-pieds inconnu ; les Américains ne seraient-ils donc pas tous des monstres égoïstes, Sean Penn excepté ?
Tertio, la cybervexillologie, c’est rigolo : grâce à Flags Of The World, je vais pouvoir imprimer en format A4 tous les drapeaux dont j’ai besoin. A cet effet, en ce matin du vendredi 13 juin, j’ai planté deux mâts (en vrai, des ci-devant manches à balai) dans mon jardin. Le premier me servira (peut-être) à arborer dès cet après-midi les couleurs irlandaises. Quant au second (quoi qu’il arrive) je vais y hisser tout de suite, en l’honneur du match France-Hollande, un beau drapeau bleu blanc rouge – rayures horizontales, cela va de soi !
Tout est relatif
Bachar El Assad, fils de son père et homme de libertés autant que lui, sera à Paris le 14 juillet. Une nouvelle diversement accueillie dans les rédactions : « Le dictateur syrien Bachar el-Assad invité officiel au défilé du 14 Juillet », annonce liberation.fr ; « Bachar al-Assad invité au défilé du 14 juillet », affirme, plus sobrement lefigaro.fr. Vérité au sud de la place de la République, mensonge au nord ?
Afro, afro, afro
El Païs nous l’apprend dans son édition d’aujourd’hui : le général Khadafi ne voit pas d’un très bon œil la candidature de Barak Obama à la Maison Blanche. Le leader libyen explique, en substance, qu’Obama fait « un complexe d’infériorité » parce qu’il est noir et qu’il se comporterait, en cas d’élection, « pire que les blancs » (comportarse peor que los blancos). Pire que les blancs, d’accord. Mais moins mal que Mouamar Khadafi quand même ?
Al Doura : le droit et les faits
Avocat, spécialiste du droit de la presse et scénariste de BD, Richard Malka décortique l’arrêt de la Cour d’Appel, dans l’affaire opposant France 2 et Charles Enderlin à Philippe Karsenty.
Causeur | Le 21 mai, infirmant le jugement de la XVIIe chambre correctionnelle, la Cour d’appel a débouté France 2 et Charles Enderlin dans le procès pour diffamation qu’ils avaient intenté à Philippe Karsenty. Pour les partisans d’Enderlin, en particulier les signataires de l’Appel publié par le site du Nouvel Observateur, en légitimant des propos qu’elle reconnaît comme diffamatoires, la Cour s’est livrée à une interprétation bien trop libérale, voire malencontreuse, de la liberté d’expression.
Richard Malka | La Cour devait se prononcer sur le caractère diffamatoire ou non des propos de Philippe Karsenty à l’encontre de Charles Enderlin. Autrement dit, il s’agissait de savoir si ces propos portaient atteinte à son honneur et à sa réputation. A cette question, la Cour d’appel a répondu par l’affirmative : ces propos sont diffamatoires. Mais la Cour ne s’en est pas tenue là. Elle s’est interrogée sur la véracité des propos diffamatoires, c’est-à-dire sur les « preuves » apportées par Karsenty à l’appui de ses propos. Or, aux termes de la loi du 29 juillet 1881, la preuve de la vérité des faits diffamatoires doit être « parfaite, complète et corrélative aux imputations diffamatoires dans leur matérialité et toute leur portée ». Ces conditions sont telles que la preuve est, de facto, impossible. Comme toujours dans les litiges de ce type, la Cour s’est donc posé une troisième et dernière question : en l’absence de preuve, Philippe Karsenty était-il ou non de bonne foi ? C’est essentiellement sur sa réponse affirmative à cette question que la Cour a fondé son arrêt.
Les pétitionnaires dénoncent un « permis de diffamer » qui menacerait les journalistes. On peut se demander si, d’habitude, ce ne sont pas eux qui l’exercent, dès lors que la loi de 1881 est avant tout une loi de protection des journalistes. Peut-on dire qu’il existe, non seulement dans ce cas mais dans tous les autres, un « droit de diffamer de bonne foi » ? L’arrêt de la Cour d’Appel est-il un arrêt d’exception ?
Non c’est une interprétation parfaitement courante de la loi. Si on exigeait des journalistes qu’ils ne fassent état que de vérités prouvées, il n’y aurait plus de débat possible. Il faut rappeler que ces textes sont d’abord une protection pour les journalistes. Ce que l’on exige d’eux est qu’ils soient de bonne foi.
Le premier critère d’appréciation du juge est donc la « bonne foi » et non la véracité. N’est-ce pas un peu vague ?
La jurisprudence a au contraire établi une définition précise de la « bonne foi » qui repose sur quatre paramètres. Le premier est l’absence d’animosité personnelle : sur ce point, la Cour constate très clairement que Philippe Karsenty était dans son rôle de critique des médias, et qu’il n’était pas animé par des arrière-pensées personnelles. Deuxième paramètre : les propos diffamatoires visent-ils une légitime information du public, autrement dit contribuent-ils utilement au débat ? Là, encore, la Cour a répondu positivement. Le troisième critère est « la prudence dans l’expression ». Sur ce terrain, l’appréciation du juge dépend de l’intensité du débat et de l’importance des enjeux. Plus le débat fait rage, plus on admet une grande liberté de ton.
Pensez-vous que le juge a une interprétation trop libérale de la liberté d’expression ? Si cet arrêt fait grincer des dents, c’est peut-être parce que la liberté d’expression dont il est question ici n’est pas celle des journalistes mais celle qui peut éventuellement s’exercer à leurs dépens ?
De fait, la Cour note que les propos de Philippe Karsenty sont souvent proches d’un jugement de valeur, d’une opinion, domaine dans lequel la liberté d’expression doit être très large. Et elle doit l’être encore plus s’agissant de la critique d’un pouvoir, les médias. « Charles Enderlin peut d’autant moins se soustraire à la critique qu’elle le vise en tant que professionnel de l’information, correspondant en Israël et dans les territoires palestiniens pour les journaux de France 2 diffusés aux heures de grande audience, et, qu’à ce titre, il s’expose inévitablement et consciemment à un contrôle des plus attentifs de ses faits et gestes de la part de ses concitoyens comme de ses confrères. » En bref, il est normal qu’un journaliste de l’importance de Charles Enderlin soit soumis à la critique, y compris virulente.
Cela signifie-t-il que, dès lors qu’on critique les médias, on a le droit d’écrire n’importe quoi pour peu qu’on soit sincère et qu’il n’y ait rien de personnel ?
En aucun cas, car le quatrième critère de la bonne foi, l’existence d’une « enquête sérieuse », est le plus important. Une très grande partie des attendus de l’arrêt porte sur cette question. La Cour a réalisé une analyse fine, approfondie et sérieuse des éléments présentés par les deux côtés. A la lecture de l’arrêt, on sent que le visionnage des rushes a été déterminant. Les choses sont dites sans la moindre ambiguïté : « L’examen, en cause d’appel, des 18 minutes de rushes de Tala Abu Rahma communiquées par France 2 ne permet pas d’écarter les avis des professionnels entendus au cours de la procédure… » Et aussi : « Les attestations produites par les soins du cameraman en pouvant pas, en revanche, au vu de leur présentation comme de leur contenu, être tenues pour parfaitement crédibles. »
Si on pousse votre raisonnement à son terme, la Cour s’est prononcée, au-delà de l’affaire Enderlin-Karsenty, sur l’affaire Al Doura. Peut-on déduire de leur arrêt que les juges admettent que le reportage filmé par Talal Abu Rahma, édité et commenté par Charles Enderlin et diffusé par France 2 le 30 septembre 2000 suscite de gros doutes ?
Il est certain que la décision ne porte pas seulement sur le périmètre de la tolérance dont doit bénéficier la liberté d’expression. D’un point de vue exclusivement juridique, on doit constater que la Cour s’est livrée à une analyse très minutieuse, étalée sur plusieurs pages, des documents qui lui avaient été présentés ainsi que de l’attitude et des propos des différents protagonistes depuis huit ans. La relaxe de Philippe Karsenty n’est pas seulement fondée sur les grands principes, elle l’est aussi sur l’examen sérieux des pièces. En clair, le fond de l’affaire n’est pas étranger à la décision de la Cour.
France 2 et Charles Enderlin ont décidé de se pourvoir en cassation. Quel est le périmètre du débat devant cette instance ? Peut-elle se saisir du fond ou doit-elle s’en tenir à la technique juridique ?
En théorie, la Cour de Cassation ne juge qu’en droit et non pas en fait. Cette règle souffre une exception qui est précisément le droit de la presse. Dans cette matière, elle étend son analyse à tous les aspects des litiges, y compris aux faits. En conséquence, aucun élément de la décision de la Cour d’appel ne peut être tenu pour acquis. Le jeu reste ouvert.
Propos recueillis par Gil Mihaely.
Richard Malka a notamment publié : L’ordre de Cicéron, TI et TII (Glénat), Section Financière TI et TII (Vents d’Ouest), La face karchée de Sarkozy (Fayard/Vents d’Ouest), Sarko Ier (Fayard/vents d’Ouest), Rien à branler (Charlie Hebdo).
Lex and the City
La décision du Tribunal de Grande Instance de Lille, qui annulé un mariage au prétexte que l’épousée n’était pas vierge comme elle l’avait prétendu, n’en finit plus de faire jaser. Pour les uns, c’est une atteinte aux droits des femmes et à l’égalité des sexes – une fatwa, nous dit Fadela Amara. Pour les autres, c’est tout juste une dahka[1. Dahka : une bonne rigolade comme l’on disait, jadis, à La Goulette.], une bourde assez grotesque de la justice française, que l’appel du Parquet bientôt viendra réparer. En fait, l’affaire peut-être considérée comme étant un tantinet plus grave que cela, qui révèle une dérive – circonscrite ? – de la jurisprudence.
La décision du Tribunal de Grande Instance a été motivée par un fait précis : la mariée aurait menti sur une « qualité essentielle » la définissant – sa virginité – et aurait par conséquent abusé son futur époux, dont le consentement reposait sur cette promesse. Aux termes de l’article 180 du Code Civil, en effet, une telle « tromperie sur la qualité essentielle de la personne » peut justifier l’annulation pure et simple d’un mariage civil. Avec une majorité d’esprits simples, je pose donc la question : où se procure-t-on la liste des « qualités essentielles » ? Auprès de la mairie ? D’un gynécologue ? A l’église, à la mosquée, dans un sex-shop ? Face au silence de la loi, laquelle n’hésite pourtant pas à dresser la liste exhaustive des infraction au Code de la route ou à celui des impôts, chacun pourra – et devra… – dresser sa propre liste. De quoi affoler Prévert, mais qu’importe : ainsi va la modernité.
Glissement du droit positif au droit subjectif ? C’est très précisément la direction indiquée par le Tribunal lillois, en estimant que la tromperie était avérée dans la mesure où l’absence de pucelage avait été… « perçue comme déterminante » par le plaignant. On aura beau lire et relire les attendus de la décision, la bouche en reste bée : « perçue comme » ! Devant la justice française, c’est donc le demandeur qui définit désormais l’infraction ou le délit. Pour bien comprendre ce qui est en jeu, imaginons que le jugement de Lille ne soit pas cassé et fasse jurisprudence. Traitera-t-on d’autoritaire son patron « blanc » ? Libre à lui d’y « percevoir » un écho de « nazi ». Diffamation. Procès. Traitera-t-on de feignant un Arabe, de radin un Juif ou de cruel un Chinois ? Rien ne les empêchera d’y « percevoir » des injures racistes, constituant un délit : procès ! Une tape sur l’épaule d’un collègue ? Et si ce dernier, mal luné, décidait de « percevoir » dans ce geste bourru mais inoffensif des « coups et blessures » ? Procès, vous dis-je !
Ignorant cette dérive potentielle, certains ont choisi de soutenir la décision du TGI de Lille en invoquant le « dol », c’est-à-dire la nullité du contrat de mariage, aux motifs que « les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté » (a.1116, Code Civil). Neutre, froid, juridique : leur argument a porté. Il nécessite pourtant un double rappel : primo, la jurisprudence pour « séduction dolosive » est tombée en désuétude – et, en France, la loi ne retient plus même l’adultère comme une faute dans la procédure de divorce ! Secundo, le mariage entre deux amoureux (ou même entre « non-amoureux ») n’est pas encore, du moins pas aux dernières nouvelles, un contrat comparable à celui qui nous lie à Darty ou à SFR. Quant à ceux qui s’acharnent sur l’aspect « communautaire » de cette décision, ils font montre, me semble-t-il, d’une même myopie. Oui, les époux étaient musulmans. Oui, la promise a « menti » sous la pression culturelle (ou religieuse), et « avoué » son mensonge pour la même raison. Oui, c’était à la justice, c’était au droit, de dire que, sous nos cieux, ce genre de folklore n’a pas droit de city. Mais demain, aussi bien, des époux chrétiens, bouddhistes ou végétariens, devront, eux aussi, être ramenés à la loi. Et à rien d’autre. Une bonne fois pour toute : la loi interdit-elle expressément en France de mentir sur son passé sentimental, dans la mesure où ni l’intégrité physique ni l’intérêt patrimonial de l’autre partie n’est menacée ? Non. Alors, fermez les bans !
Les Inrocks montent le volume
Les Inrocks font fort : le meilleur magazine français (après Télérama et Notre Temps) s’apprête à lancer Volume, un nouveau mensuel consacré à la musique. Il fallait y penser. On attend avec impatience que Rustica sorte un mensuel consacré au jardinage et que le Chasseur français se décide enfin à lancer un mensuel sur la chasse.
Géopolitique des imbéciles
Georges W. Bush est actuellement en Europe pour « une tournée d’adieux ». Son message ? L’Iran est la menace n°1. Il n’en faut pas davantage aux « forumistes » d’extrême droite et d’extrême gauche réunis pour dégainer : le grand Satan défend les intérêt d’Israël jusqu’au bout ! Contresens complet : ce sont en réalité les émirs saoudiens, gardiens sunnites de la Mecque et alliés de la famille Bush, qui ont une peur bleue d’un Iran nucléarisé et font pression afin que Washington neutralise Téhéran. Avec, il est vrai, la bénédiction d’Israël… mais aussi du Koweït, des Emirats Arabes Unis, de la Turquie et de l’Egypte.
Avis de non-tempête dans le désert
Nous ne lisons pas tous les jours la presse koweitienne. Difficile donc de faire comme si nous n’avions pas chipé sur le site du Courrier International l’info alarmante qui suit : des princes de la famille royale intrigueraient dans l’ombre (rare là-bas) pour supprimer les micro-libertés que la Constitution octroie à leurs féaux. Il semblerait même que les comploteurs ne soient pas plus attachés que ça à l’idée même de Constitution. Ce qui ne manque pas de m’inquiéter : les mêmes causes produisant les mêmes effets, en cas de disparitions des libertés au Koweit, le Monde Libre déclenchera automatiquement une nouvelle guerre pour les rétablir… Si mon raisonnement pêchait quelque part, n’hésitez pas à me le signaler.
Dieu.com
Sexe, légumes et vidéos : tout se consomme désormais sur le web. Pourquoi pas la religion ? Parlons Net reçoit cette semaine Jean-François Mayer, fondateur de l’institut Religioscopie et auteur d’une enquête édifiante : Internet et religions (éditions Infolio). Pour l’interroger, Bénédicte Charles de Marianne2.fr, Xavier Monnier de Bakchich.info et David Martin-Castelnau de Causeur.fr.
Peut-on procéder à un baptême en ligne ? Si oui, expédie-t-on l’eau bénite par courriel ? Jean-François Mayer explique comment l’utilisation d’Internet bouleverse la pratique religieuse de manière parfois saugrenue. La religion – ce qui relie, au sens étymologique – peut-elle survivre à « l’atomisation spirituelle » ? Mayer répond par l’affirmative : la pratique religieuse proprement dite (prière par mail, messe en podcast, etc.) ne ferait que pallier, à la marge, à l’isolement de certains fidèles. Pour l’essentiel, le web serait surtout utilisé à des fins de communication et de documentation.
Comment les religions exploitent-elles Internet ? A en croire Jean-François Mayer, le cybermonde ressemble assez au monde réel : le protestantisme évangélique, efficace et prosélyte, y progresse le plus rapidement. L’islam est y représenté à la fois par des savants soucieux d’échanges et des groupuscules de fanatiques. L’église catholique, plus figée, s’y adapte finalement. Des sites reliés au judaïsme y perpétuent la tradition et posent des questions à coller le caramel. Et surprise : l’hindouisme y serait particulièrement à l’aise… Quant aux minorités persécutées, des Alevis de Turquie aux Kabyles osant revenir au christianisme de leurs ancêtres, ils trouvent parfois refuge sur le net, y développant des « cyber catacombes ».
Pour finir, une question cruciale : revenant parmi nous, l’envoyé de l’Eternel s’annoncerait-il on line ? La réponse (à visionner) de l’auteur ne manque pas d’esprit. DMC
1ère partie
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2e partie
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3e partie
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Jeux dangereux
Durant les quinze dernières années, plus de quatre mille enfants chinois – dont 92 % de garçons – ont été prénommés Aoyun, c’est-à-dire « jeux olympiques ». Il n’est pas trop tard pour rappeler aux Chinoises enceintes que les Jeux Paralympiques 2008 se tiendront eux aussi à Pékin.
Aventures en vexillologie
Toujours à la recherche d’une activité futile, je me suis passionné hier soir pour une discussion lancée sur l’excellent site, disons joyeusement post-réactionnaire, I like your style. Pour aggraver mon cas, je préciserai qu’il s’agissait d’une digression dans le fil, lequel concernait au départ la photo d’un imposant fourneau de cuisine en fonte, les gens d’ILYS se passionnant hélas souvent pour des sujets moins dignes d’intérêt que la carrière de Laurence Ferrari ou le prix du gasoil à la pompe. Cette digression, donc, portait sur un détail de la photo où, à la droite de la cuisinière, on distinguait à l’évidence un drapeau américain, et caché derrière, à peine visible, le bout d’un autre oriflamme, beaucoup moins aisément identifiable. Il y avait néanmoins un indice, une étoile à sept branches (personne n’est parfait) sur fond rouge. Ces gens-là se passionnaient donc pour trouver d’où pouvait bien venir ce fichu morceau de tissu, jusqu’à ce qu’un internaute apparemment de race corse, répondant au pseudo de Sampieru suggère que le drapeau en question était le « Red Ensign » australien, autrefois emblème officiel du pays des kangourous et de Kylie Minogue, et désormais réservé à l’usage des seuls navires marchands, le drapeau officiel étant désormais le « Blue Ensign », c’est-à-dire le même, mais sur fond bleu.
Emballé à l’idée de jouer les mouches du coche, je me suis donc intéressé dans mon coin au mystérieux drapeau derrière le Stars and Stripes (certains indigènes l’écrivent avec deux majuscules, d’autres non). A priori, la piste de l’ex-drapeau officiel australien me paraissait la bonne, les étoiles à sept branches étant un quasi-monopole de la terre d’asile de Simon Leys, mais allez savoir… La requête Google « seven points star » ne débouchant sur rien de très pertinent, j’ai recherché les sites faisant autorité en matière de « vexillologie » – avant même de commencer ma quête, j’avais déjà appris un nouveau mot, toujours ça que les Boches n’auront pas… Finalement j’arrêtai mon choix sur le site US Flags Of The World, qui me semblait au poil. Puis dans mon anglais pataud, mais bankable j’envoyais, à tout hasard, un petit mot à l’animateur dudit site, accompagné de la fameuse photo de cuisinière. Quelques heures après, je recevais la réponse suivante :
« Bonjour, mon ami, Excusez-moi pour mon pauvre francais… j’etude votre bel langue pour cinq ans (2 en l’universite), mais, je ne souviens pas beaucoup de mots… Ce drapeau – est-ce que un drapeau rouge, avec le « Union Jack » ? Australian ensign ? Ici. Thank you for being patient with my French. I used to know more, but it is sad that there are few French speakers in Southern California. By the way, my daughter was born on July 14 – Bastille Day! I fly your flag on her birthday ! Bon nuit ! Votre ami,
Edward »
Cette missive me semble appeler plusieurs commentaires.
Primo, les résultats de Southern California et de Northern Corsica sont identiques. A moins d’un sombre complot désinformateur américano-paoliste, la piste australienne semble donc être LA bonne.
Secundo, vous, je ne sais pas, mais moi, je suis ému par ce mec qui répond aussi prestement, gentiment et savamment à un casse-pieds inconnu ; les Américains ne seraient-ils donc pas tous des monstres égoïstes, Sean Penn excepté ?
Tertio, la cybervexillologie, c’est rigolo : grâce à Flags Of The World, je vais pouvoir imprimer en format A4 tous les drapeaux dont j’ai besoin. A cet effet, en ce matin du vendredi 13 juin, j’ai planté deux mâts (en vrai, des ci-devant manches à balai) dans mon jardin. Le premier me servira (peut-être) à arborer dès cet après-midi les couleurs irlandaises. Quant au second (quoi qu’il arrive) je vais y hisser tout de suite, en l’honneur du match France-Hollande, un beau drapeau bleu blanc rouge – rayures horizontales, cela va de soi !
Tout est relatif
Bachar El Assad, fils de son père et homme de libertés autant que lui, sera à Paris le 14 juillet. Une nouvelle diversement accueillie dans les rédactions : « Le dictateur syrien Bachar el-Assad invité officiel au défilé du 14 Juillet », annonce liberation.fr ; « Bachar al-Assad invité au défilé du 14 juillet », affirme, plus sobrement lefigaro.fr. Vérité au sud de la place de la République, mensonge au nord ?
Afro, afro, afro
El Païs nous l’apprend dans son édition d’aujourd’hui : le général Khadafi ne voit pas d’un très bon œil la candidature de Barak Obama à la Maison Blanche. Le leader libyen explique, en substance, qu’Obama fait « un complexe d’infériorité » parce qu’il est noir et qu’il se comporterait, en cas d’élection, « pire que les blancs » (comportarse peor que los blancos). Pire que les blancs, d’accord. Mais moins mal que Mouamar Khadafi quand même ?
Al Doura : le droit et les faits
Avocat, spécialiste du droit de la presse et scénariste de BD, Richard Malka décortique l’arrêt de la Cour d’Appel, dans l’affaire opposant France 2 et Charles Enderlin à Philippe Karsenty.
Causeur | Le 21 mai, infirmant le jugement de la XVIIe chambre correctionnelle, la Cour d’appel a débouté France 2 et Charles Enderlin dans le procès pour diffamation qu’ils avaient intenté à Philippe Karsenty. Pour les partisans d’Enderlin, en particulier les signataires de l’Appel publié par le site du Nouvel Observateur, en légitimant des propos qu’elle reconnaît comme diffamatoires, la Cour s’est livrée à une interprétation bien trop libérale, voire malencontreuse, de la liberté d’expression.
Richard Malka | La Cour devait se prononcer sur le caractère diffamatoire ou non des propos de Philippe Karsenty à l’encontre de Charles Enderlin. Autrement dit, il s’agissait de savoir si ces propos portaient atteinte à son honneur et à sa réputation. A cette question, la Cour d’appel a répondu par l’affirmative : ces propos sont diffamatoires. Mais la Cour ne s’en est pas tenue là. Elle s’est interrogée sur la véracité des propos diffamatoires, c’est-à-dire sur les « preuves » apportées par Karsenty à l’appui de ses propos. Or, aux termes de la loi du 29 juillet 1881, la preuve de la vérité des faits diffamatoires doit être « parfaite, complète et corrélative aux imputations diffamatoires dans leur matérialité et toute leur portée ». Ces conditions sont telles que la preuve est, de facto, impossible. Comme toujours dans les litiges de ce type, la Cour s’est donc posé une troisième et dernière question : en l’absence de preuve, Philippe Karsenty était-il ou non de bonne foi ? C’est essentiellement sur sa réponse affirmative à cette question que la Cour a fondé son arrêt.
Les pétitionnaires dénoncent un « permis de diffamer » qui menacerait les journalistes. On peut se demander si, d’habitude, ce ne sont pas eux qui l’exercent, dès lors que la loi de 1881 est avant tout une loi de protection des journalistes. Peut-on dire qu’il existe, non seulement dans ce cas mais dans tous les autres, un « droit de diffamer de bonne foi » ? L’arrêt de la Cour d’Appel est-il un arrêt d’exception ?
Non c’est une interprétation parfaitement courante de la loi. Si on exigeait des journalistes qu’ils ne fassent état que de vérités prouvées, il n’y aurait plus de débat possible. Il faut rappeler que ces textes sont d’abord une protection pour les journalistes. Ce que l’on exige d’eux est qu’ils soient de bonne foi.
Le premier critère d’appréciation du juge est donc la « bonne foi » et non la véracité. N’est-ce pas un peu vague ?
La jurisprudence a au contraire établi une définition précise de la « bonne foi » qui repose sur quatre paramètres. Le premier est l’absence d’animosité personnelle : sur ce point, la Cour constate très clairement que Philippe Karsenty était dans son rôle de critique des médias, et qu’il n’était pas animé par des arrière-pensées personnelles. Deuxième paramètre : les propos diffamatoires visent-ils une légitime information du public, autrement dit contribuent-ils utilement au débat ? Là, encore, la Cour a répondu positivement. Le troisième critère est « la prudence dans l’expression ». Sur ce terrain, l’appréciation du juge dépend de l’intensité du débat et de l’importance des enjeux. Plus le débat fait rage, plus on admet une grande liberté de ton.
Pensez-vous que le juge a une interprétation trop libérale de la liberté d’expression ? Si cet arrêt fait grincer des dents, c’est peut-être parce que la liberté d’expression dont il est question ici n’est pas celle des journalistes mais celle qui peut éventuellement s’exercer à leurs dépens ?
De fait, la Cour note que les propos de Philippe Karsenty sont souvent proches d’un jugement de valeur, d’une opinion, domaine dans lequel la liberté d’expression doit être très large. Et elle doit l’être encore plus s’agissant de la critique d’un pouvoir, les médias. « Charles Enderlin peut d’autant moins se soustraire à la critique qu’elle le vise en tant que professionnel de l’information, correspondant en Israël et dans les territoires palestiniens pour les journaux de France 2 diffusés aux heures de grande audience, et, qu’à ce titre, il s’expose inévitablement et consciemment à un contrôle des plus attentifs de ses faits et gestes de la part de ses concitoyens comme de ses confrères. » En bref, il est normal qu’un journaliste de l’importance de Charles Enderlin soit soumis à la critique, y compris virulente.
Cela signifie-t-il que, dès lors qu’on critique les médias, on a le droit d’écrire n’importe quoi pour peu qu’on soit sincère et qu’il n’y ait rien de personnel ?
En aucun cas, car le quatrième critère de la bonne foi, l’existence d’une « enquête sérieuse », est le plus important. Une très grande partie des attendus de l’arrêt porte sur cette question. La Cour a réalisé une analyse fine, approfondie et sérieuse des éléments présentés par les deux côtés. A la lecture de l’arrêt, on sent que le visionnage des rushes a été déterminant. Les choses sont dites sans la moindre ambiguïté : « L’examen, en cause d’appel, des 18 minutes de rushes de Tala Abu Rahma communiquées par France 2 ne permet pas d’écarter les avis des professionnels entendus au cours de la procédure… » Et aussi : « Les attestations produites par les soins du cameraman en pouvant pas, en revanche, au vu de leur présentation comme de leur contenu, être tenues pour parfaitement crédibles. »
Si on pousse votre raisonnement à son terme, la Cour s’est prononcée, au-delà de l’affaire Enderlin-Karsenty, sur l’affaire Al Doura. Peut-on déduire de leur arrêt que les juges admettent que le reportage filmé par Talal Abu Rahma, édité et commenté par Charles Enderlin et diffusé par France 2 le 30 septembre 2000 suscite de gros doutes ?
Il est certain que la décision ne porte pas seulement sur le périmètre de la tolérance dont doit bénéficier la liberté d’expression. D’un point de vue exclusivement juridique, on doit constater que la Cour s’est livrée à une analyse très minutieuse, étalée sur plusieurs pages, des documents qui lui avaient été présentés ainsi que de l’attitude et des propos des différents protagonistes depuis huit ans. La relaxe de Philippe Karsenty n’est pas seulement fondée sur les grands principes, elle l’est aussi sur l’examen sérieux des pièces. En clair, le fond de l’affaire n’est pas étranger à la décision de la Cour.
France 2 et Charles Enderlin ont décidé de se pourvoir en cassation. Quel est le périmètre du débat devant cette instance ? Peut-elle se saisir du fond ou doit-elle s’en tenir à la technique juridique ?
En théorie, la Cour de Cassation ne juge qu’en droit et non pas en fait. Cette règle souffre une exception qui est précisément le droit de la presse. Dans cette matière, elle étend son analyse à tous les aspects des litiges, y compris aux faits. En conséquence, aucun élément de la décision de la Cour d’appel ne peut être tenu pour acquis. Le jeu reste ouvert.
Propos recueillis par Gil Mihaely.
Richard Malka a notamment publié : L’ordre de Cicéron, TI et TII (Glénat), Section Financière TI et TII (Vents d’Ouest), La face karchée de Sarkozy (Fayard/Vents d’Ouest), Sarko Ier (Fayard/vents d’Ouest), Rien à branler (Charlie Hebdo).
Lex and the City
La décision du Tribunal de Grande Instance de Lille, qui annulé un mariage au prétexte que l’épousée n’était pas vierge comme elle l’avait prétendu, n’en finit plus de faire jaser. Pour les uns, c’est une atteinte aux droits des femmes et à l’égalité des sexes – une fatwa, nous dit Fadela Amara. Pour les autres, c’est tout juste une dahka[1. Dahka : une bonne rigolade comme l’on disait, jadis, à La Goulette.], une bourde assez grotesque de la justice française, que l’appel du Parquet bientôt viendra réparer. En fait, l’affaire peut-être considérée comme étant un tantinet plus grave que cela, qui révèle une dérive – circonscrite ? – de la jurisprudence.
La décision du Tribunal de Grande Instance a été motivée par un fait précis : la mariée aurait menti sur une « qualité essentielle » la définissant – sa virginité – et aurait par conséquent abusé son futur époux, dont le consentement reposait sur cette promesse. Aux termes de l’article 180 du Code Civil, en effet, une telle « tromperie sur la qualité essentielle de la personne » peut justifier l’annulation pure et simple d’un mariage civil. Avec une majorité d’esprits simples, je pose donc la question : où se procure-t-on la liste des « qualités essentielles » ? Auprès de la mairie ? D’un gynécologue ? A l’église, à la mosquée, dans un sex-shop ? Face au silence de la loi, laquelle n’hésite pourtant pas à dresser la liste exhaustive des infraction au Code de la route ou à celui des impôts, chacun pourra – et devra… – dresser sa propre liste. De quoi affoler Prévert, mais qu’importe : ainsi va la modernité.
Glissement du droit positif au droit subjectif ? C’est très précisément la direction indiquée par le Tribunal lillois, en estimant que la tromperie était avérée dans la mesure où l’absence de pucelage avait été… « perçue comme déterminante » par le plaignant. On aura beau lire et relire les attendus de la décision, la bouche en reste bée : « perçue comme » ! Devant la justice française, c’est donc le demandeur qui définit désormais l’infraction ou le délit. Pour bien comprendre ce qui est en jeu, imaginons que le jugement de Lille ne soit pas cassé et fasse jurisprudence. Traitera-t-on d’autoritaire son patron « blanc » ? Libre à lui d’y « percevoir » un écho de « nazi ». Diffamation. Procès. Traitera-t-on de feignant un Arabe, de radin un Juif ou de cruel un Chinois ? Rien ne les empêchera d’y « percevoir » des injures racistes, constituant un délit : procès ! Une tape sur l’épaule d’un collègue ? Et si ce dernier, mal luné, décidait de « percevoir » dans ce geste bourru mais inoffensif des « coups et blessures » ? Procès, vous dis-je !
Ignorant cette dérive potentielle, certains ont choisi de soutenir la décision du TGI de Lille en invoquant le « dol », c’est-à-dire la nullité du contrat de mariage, aux motifs que « les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté » (a.1116, Code Civil). Neutre, froid, juridique : leur argument a porté. Il nécessite pourtant un double rappel : primo, la jurisprudence pour « séduction dolosive » est tombée en désuétude – et, en France, la loi ne retient plus même l’adultère comme une faute dans la procédure de divorce ! Secundo, le mariage entre deux amoureux (ou même entre « non-amoureux ») n’est pas encore, du moins pas aux dernières nouvelles, un contrat comparable à celui qui nous lie à Darty ou à SFR. Quant à ceux qui s’acharnent sur l’aspect « communautaire » de cette décision, ils font montre, me semble-t-il, d’une même myopie. Oui, les époux étaient musulmans. Oui, la promise a « menti » sous la pression culturelle (ou religieuse), et « avoué » son mensonge pour la même raison. Oui, c’était à la justice, c’était au droit, de dire que, sous nos cieux, ce genre de folklore n’a pas droit de city. Mais demain, aussi bien, des époux chrétiens, bouddhistes ou végétariens, devront, eux aussi, être ramenés à la loi. Et à rien d’autre. Une bonne fois pour toute : la loi interdit-elle expressément en France de mentir sur son passé sentimental, dans la mesure où ni l’intégrité physique ni l’intérêt patrimonial de l’autre partie n’est menacée ? Non. Alors, fermez les bans !
Les Inrocks montent le volume
Les Inrocks font fort : le meilleur magazine français (après Télérama et Notre Temps) s’apprête à lancer Volume, un nouveau mensuel consacré à la musique. Il fallait y penser. On attend avec impatience que Rustica sorte un mensuel consacré au jardinage et que le Chasseur français se décide enfin à lancer un mensuel sur la chasse.
Géopolitique des imbéciles
Georges W. Bush est actuellement en Europe pour « une tournée d’adieux ». Son message ? L’Iran est la menace n°1. Il n’en faut pas davantage aux « forumistes » d’extrême droite et d’extrême gauche réunis pour dégainer : le grand Satan défend les intérêt d’Israël jusqu’au bout ! Contresens complet : ce sont en réalité les émirs saoudiens, gardiens sunnites de la Mecque et alliés de la famille Bush, qui ont une peur bleue d’un Iran nucléarisé et font pression afin que Washington neutralise Téhéran. Avec, il est vrai, la bénédiction d’Israël… mais aussi du Koweït, des Emirats Arabes Unis, de la Turquie et de l’Egypte.