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Pitié pour le matador

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Ainsi donc, comme chaque été, on a pu voir ces jours-ci aux portes des arènes des cohortes de rombières vindicatives tenter d’empêcher les spectateurs d’assister aux corridas et même d’interdire, par voie légale, aux matadors de toréer. Et comme chaque année, bien que n’étant pas spécialement amateur de tauromachie, je me suis immédiatement senti solidaire des aficionados.

Tout d’abord, parce que les braillards qui condamnent la corrida sont de toute évidence des crétins infréquentables. Encore plus sûrs de leur bon droit que les propagandistes anti-tabac, encore plus hermétiques à la contradiction que les séides de Robert Ménard, ces professionnels de l’engagement zéro risque, nous indiquent à coup sûr quelles causes il ne faut pas défendre.

Et puis, la corrida a quand même inspiré Goya, Bizet et Picasso. Alors que la défense des animaux n’a légué à la civilisation que les discours pathétiques de Nicolas Hulot, les clichés de Yann Arthus-Bertrand et les canapés-lits en skaï.

Par ailleurs, et n’en déplaise aux abrutis qui font baptiser leur poisson rouge, on serait bien bête de ravaler l’homme au niveau de l’animal. Celui-ci est fait pour être domestiqué, mangé, ou éliminé par celui-là. D’ailleurs, on se pose moins de questions quand on use un insecticide contre les moustiques.

A ce tarif-là, on ne pourrait bientôt plus faire de feu de cheminée par respect envers le bois (qui « doit beaucoup souffrir » quand on le brûle) ni s’asseoir sur une chaise (qui « doit se sentir bafouée dans sa dignité quand on y pose ses fesses »).

De surcroît, il suffit de suivre cinq minutes une banda pour comprendre ce que la tauromachie a de miraculeux : dans une banda, derrière l’hélicon, la clarinette ou la grosse caisse, on retrouve côte à côte le gamin et l’octogénaire, la Marie-Hortense et le Mamadou, le DJ et l’agrégé. Aucun doute, la corrida a fait plus pour réduire la fracture sociale que de grandes marques célèbres de présidents de la République.

Et puis après tout, si le spectacle d’une corrida vous insupporte, c’est tellement facile de l’éviter. Contrairement à Marc Lévy, Laure Manaudou ou le Dalaï Lama.

Star Ac : gay unfriendly

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Endemol vient de l’annoncer : la future Star Ac’ se déroulera rue Charlot, dans le Marais, au grand dam des riverains qui craignent un afflux massif d’adolescentes poussant de petits cris aigus dans un quartier où cette pratique est strictement réservée aux hommes. Pour notre part, nous félicitons la société Endemol : il n’y avait pas de rue mieux nommée pour accueillir l’académie des futures ex-stars.

L’Europe mourra-t-elle à Tbilissi ?

Il flotte dans l’air du Caucase comme un parfum de Guerre froide. Sans doute a-t-on usé de cette réminiscence à force de la brandir. Reste que la guerre que se mènent la Russie et la Géorgie, protégée de l’Amérique, fait bien penser à ce temps où deux superpuissances s’affrontaient, en Afrique et en Asie, par l’intermédiaire des mouvements de libération, guérillas et autres sectes que l’une et l’autre parrainaient. Sauf que là, pour la première fois depuis 1979, la Russie elle-même est descendue dans l’arène.

On dira qu’entre les années 1960 et 2010, le monde a changé – c’est indéniable. Il y a pourtant une tendance de longue durée qui crève les yeux mais qu’on préfère ne pas voir : aujourd’hui, comme à l’époque, l’Europe est paralysée. Et, paradoxalement, peut-être l’est-elle encore plus aujourd’hui qu’hier, quand elle était amputée de sa partie orientale, placée sous la bonne garde des chars russes. Il est vrai que si l’Europe de l’Ouest était l’enjeu symbolique de l’affrontement est-ouest, on n’y tira pas un coup de feu. En tout cas, la bonne vieille CEE dont les membres surent jouer de leur position centrale entre Est et Ouest parvint souvent, malgré sa vassalisation militaire, à mener sa propre diplomatie – celle de la « Détente ». On ne saurait en dire autant de l’actuelle Union. Peut-être parce que, se proclamant – et se pensant – fondée sur les Droits de l’Homme, elle ne comprend plus grand-chose aux aspirations des peuples.

L’Europe libérée, l’Europe réunifiée, l’Europe retrouvée… oui mais l’Europe divisée, minée par les aspirations irrédentistes ravivées par la chute du Mur de Berlin. Elle fut incapable d’empêcher ou d’arrêter la guerre en Yougoslavie. Tout simplement parce que ses membres n’ont ni les mêmes rêves, ni les mêmes cauchemars, ni surtout les mêmes intérêts. La guerre entre la Russie et la Géorgie vient aujourd’hui cruellement rappeler cette réalité de fer. Bref, ce qui se joue dans ce lointain si proche n’est pas notre approvisionnement énergétique mais l’avenir même de l’Union. Et il n’est guère prometteur.

Pour les anciens « pays frères » de l’Union soviétique, qu’ils soient aujourd’hui membres ou frontaliers de l’Union, la crise actuelle est la réalisation de leur pire cauchemar. Des Républiques baltes à la Bulgarie en passant par la Pologne, la Roumanie, mais aussi l’Ukraine, les regards se tournent alternativement Tbilissi, Paris et Bruxelles, Moscou et Washington. Comme s’ils se refusaient à croire ce qu’ils voient : l’Ours russe responsable de tant de leurs malheurs est en train de sortir de deux décennies d’hibernation ; il montre ses dents et ses griffes. La récré géopolitique est finie. On se dit que l’Histoire est de retour. À moins que ce ne soit la post-Histoire…

Laissons de côté les détails du conflit caucasien – imbroglio dont l’analyse exige mieux que l’information partielle et biaisée disponible pour l’instant. Le traitement réservé par le berger russe à la brebis géorgienne égarée est une question vitale pour la Pologne et les trois Républiques baltes. Il est significatif que, dans leur communiqué commun, ces pays se soient qualifiés « d’ex-nations captives de l’Urss ». Ce n’est pas une clause de style. En plein centre-ville de Riga, on peut visiter le musée « des occupations de la Lettonie 1940-1991 ». On ne comprend rien si on ne comprend pas que la longue expérience communiste a peu ou prou effacé dans la mémoire collective la féroce mais lointaine férule nazie. D’où ce daltonisme politique, si décrié par nos progressistes, qui rend les peuples de l’Est aveugles à la rassurante distinction entre rouge et brun. Non loin de Riga, à Vilnius, une stèle dressée devant le Parlement rappelle qu’en 2002 George Bush prit, au nom des Etats-Unis, l’engagement solennel de ne jamais abandonner la Lituanie. Sourd aux fantômes de ces petits peuples qui, sans doute, ne l’intéressaient pas plus que cela, Jacques Chirac se contenta, en 2004, de les engueuler vertement en les traitant en substance de caniches des Américains. Ce n’était pas une bonne idée.

Que cela plaise ou non, il faut admettre que chaque pays, et peut-être chaque peuple, est tributaire de son histoire et de sa géographie – et que de surcroît, peuples et pays ne coïncident pas, d’où la multiplication des foyers de tensions. Dans les anciens « pays satellites », la méfiance séculaire envers la puissance russe, nourrie par l’expérience communiste et attisée par une logique politicienne propre au jeu démocratique aboutissent à faire de la question des garanties militaires contre la Russie un enjeu disproportionné au regard de la réalité des intentions russes (le Caucase est une autre affaire). Légitime ou non, cela importe peu : à Riga, Vilnius et Varsovie on veut un protecteur sûr, qui ne tergiversera pas s’il faut user de la force pour ramener à la raison le voisin redouté. A l’évidence, l’Union européenne est incapable, et militairement, et politiquement, d’être ce puissant parrain. Restent les Etats-Unis et l’Otan que les nouveaux membres se sont d’ailleurs empressés d’intégrer dès qu’ils ont pu le faire.

L’ennui, c’est que les « anciens » ont de tout autres intérêts. La France, l’Allemagne et les autres veulent plutôt rassurer la Russie, la traiter avec plus d’égards, trop pensent certains, pour la convaincre que son intérêt à elle est d’avoir de bonnes relations avec l’Union. Politique raisonnable, au demeurant, dès lors que la Russie est en Europe – plus que l’Amérique en tout cas – et que le chaos russe ne profite jamais à personne.

Entre les uns et les autres, les petits nouveaux et les grands anciens, la tension est palpable, l’agacement réciproque perce derrière le langage diplomatique. Interrogé par un journaliste sur le communiqué des « quatre ex » qui appelle l’Otan et l’Union à « s’opposer à la propagation de la politique impérialiste et révisionniste dans l’Est de l’Europe », Bernard Kouchner n’a pas caché un mouvement d’humeur. « Il ne sert à rien d’insulter les gens », a lâché le chef de la diplomatie française à qui incombe la mission impossible de représenter les 27. Pour la France, pas question de montrer du doigt la Russie. « Ce ne sera pas la position de l’Europe », a affirmé Kouchner. Le plus probable est que l’Europe n’aura pas de position et donc, pas de politique. De même qu’elle n’en a pas eu lors de la déclaration d’indépendance du Kosovo, Etat que plusieurs membres de l’Union Européenne n’ont pas reconnu. Ce qui n’empêche pas les dirigeants de ce pays mal né, encouragés par les hordes de conseillers internationaux qui financent ainsi l’achat de leurs maisons de campagne, de promettre, en guise d’avenir radieux, l’adhésion à l’UE. Bien malin qui pourrait dire à quoi elle ressemblera, cette Europe Unie, dans cinq ou dix ans. Quoi qu’il en soit, hier dans les Balkans, aujourd’hui dans le Caucase, l’Europe politique est morte. A supposer que, depuis la Sainte Alliance, elle ait jamais existé.

Sarkozy traite le problème de l’immigration à la source

Les 3 et 4 novembre prochains, Nicolas Sarkozy a décidé d’organiser une conférence internationale à Vichy, dans la Région Auvergne chère à Hortefeux. Le choix de la ville d’eau est explicite : en finir avec la sinistre mémoire du régime éponyme. Le thème de la conférence, lui, est peut-être moins habile : l’immigration.

Pas de ça chez nous

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A priori, je suis bien sûr favorable au rattachement de la Wallonie à la France, prélude nécessaire à l’annexion intégrale de la Belgique, et, à terme, de la totalité de la rive gauche du Rhin. Mais, on the other hand, ai-je vraiment envie de me retrouver compatriote avec les abominables Frères Dardenne ?

Albert III, roi des Belges

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Assez représentatif de l’école néo-flamande, ce portrait d’Albert III, roi des Belges, est l’oeuvre de Jan van Verendael. Tenu pour un faux grossier par les historiens wallons de l’art (qui prétendent que les Ray Ban n’existaient pas au temps d’Albert III), le tableau reste néanmoins la pièce maîtresse du musée des Arts et traditions populaires wallones d’Antwerpen.

Jan van Verendael, Portrait de SM Albert III, roi des Belges. Huile sur toile conservée au musée des Arts et traditions populaires wallones, Antwerpen.

Insipides dating

Jour 1. Pas à tortiller : en amour, il faut raquer. Pour un mois : 29,99 euros. Pour six mois : 16,95 € mensuels (petite indélicatesse : il n’est pas clairement expliqué que, sans dénonciation explicite du contrat d’abonnement, il sera reconduit automatiquement). La romance commence donc par un arbitrage financier. Et continue par l’établissement d’une fiche digne des RG : âge, ethnie, taille, poids, photos, situation sociale, revenus, religion, etc. Sans omettre votre lettre de motivation (« annonce »). Magie à l’état pur.

Jour 2
Mon acolyte pour ce reportage : Dovra. Un collectionneur. Il passe en revue les fiches que j’ai sélectionnées la veille : « Les pas connectées depuis plus d’un mois, tu oublies. Pour les autres : un flash et un courriel type. » Pour attrapper l’âme sœur, en général, on se résigne à l’hameçon des petites astuces, mais là, c’est la pêche au filet dérivant. Dovra, lui, pianote en fredonnant du Bryan Ferry : « Jump up ! Bubble up ! What’s in store ? Love is the drug and I need to score… »

Jour 3
Café Marly, samedi après-midi, premier rendez-vous. Les premières entrevues se ressembleront toutes : elle flippe, habitué à filer rencard à Brad Pitt et à voir débarquer Michel Blanc. Sa panique se double du syndrome Price Minister : être retournée comme un colis décevant.

Jour 4
Moteur de recherche épatant : on peut trier selon ce qu’elles estiment le « plus attirant » chez elles. Les sophistiquées choisissent « le regard » ou « la nuque », les téméraires « les fesses », et les facétieuses optent pour « les pieds ». Les options « esprit » ou « humour » ne sont pas proposées. Au jeu du maquignon, et selon mes critères, je trouve : « Avocat » (229), « Fleuriste » (71), « Agriculteur » (8), « Chauffeur routier » (5), « Hôtesse de l’air » (215), « Médecin légiste » (kidding !). Et aussi des minis (moins de 1,49 m : 286), des girafes (plus de 1,98 m : 17) – dont Sala89 (1m99 pour 84kg), chasseuse de têtes dans le civil, qui dit parler kazakh et se définit comme « tenace ». Miam ! Bienvenue dans la cour des Meeracles.

Jour 5
Café de Flore, avec Blue_Shyn, jolie maman de trente-trois ans. Inscrite depuis deux ans – « une seule aventure » – et désabusée : « Je suis comme une DRH qui enchaîne les auditions de tocards… »

Jour 6
Une dizaine de messages chaque jour, des centaines de « nouveaux profils ». L’impression d’un cheptel. Il suffit d’entrer. De choisir. Meetic, le fantasme du backroom à portée des hétéros ?

Jour 7
Chez Fuxia avec Klara_Ma : premier blind date (pas de photo). Beaucoup de filles protègent ainsi leur anonymat, afin de ne pas être repérées par une connaissance. Dovra ricane : « Savoir si une nana est inscrite, même incognito ? Fastoche… » Lorsqu’on a oublié son mot de passe, le système propose de vous renvoyer vos « identifiants » par courriel. Un petit malin (ou votre femme…) peut donc aisément interroger le site en testant votre e-mail. De retour chez moi, j’essaye le courriel d’une insoupçonnable[1. Il ne s’agit pas d’Elisabeth L.]… Surprise !

Jour 8
D’origine malgache, Orinka88 se la joue « entretien d’embauche » lors de nos échanges. Bonne pâte, je tolère. Mais quand je retrouve cette créature habituée du Flore[2. Il ne s’agit pas de Marc C.] et qu’elle me décoche : « Un bon point pour toi, tu es ponctuel », je prends la mesure du romantisme à l’œuvre – sélectionné sur CV pour un entretien de débauche… En rentrant, un énième message de Calou4Ever, clone de Claire Chazal. Elle m’invite sur MSN, branche sa webcam, se met à poil (façon de parler : elle est 100 % épilée). Quelque part, Cupidon s’ouvre les veines.

Jour 9
Accoster un canon on line ? Mission impossible. A peine inscrite, elle reçoit un tombereau de mails. Ecœurée ou casée, la bombe ne connaît sur Meetic qu’une durée de vie éphémère. Deux hameçons possibles : un titre de mail qui se distingue des « Coucou ! » et autres « Slt ! » ou l’attente au coin du bois. Car, si dans la vie vraie, on les attend à la sortie (de la fac, puis du bureau…), ici, tout marche à l’envers : il faut les attendre à l’entrée. Catégorie : « nouveaux membres ».

Pas bienvenus chez les ch’tis !

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Député apparenté UMP de Tourcoing, Christian Vanneste a été interrogé par le journal Le Soir, suite au sondage indiquant que 49 % des Wallons et 60 % des Français étaient favorables au rattachement de la Wallonie à la France : « Cela ferait gagner 5 millions d’habitants à la France, ce qui renforcerait son poids en Europe face à l’Allemagne… Mais, la Wallonie est à majorité socialiste, un socialisme pire que chez nous. » A l’évidence, Christian Vanneste n’a pas du tout suivi les législatives belges de 2007, qui ont vu le Mouvement réformateur de Didier Reynders distancer le PS. Encore un coup du lobby homosexuel !

Digital farm

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Non, Orwell n’est pas mort : il blogue encore. C’est ce que nous apprend le Figaro : dès le 9 août son journal, écrit du 9 août 1938 jusqu’en 1942, sera publié en ligne et dévoilé ainsi pour la première fois dans son intégralité sur le site créé par le Prix Orwell. Chaque jour, nous aurons le loisir de lire un orwellien billet du jour, avec un léger différé de 70 ans. « Les meilleurs livres, écrivait l’auteur de 1984, sont ceux qui racontent ce que l’on sait déjà. » Les blogs aussi, peut-être.

Pékin respecte enfin les Droits des Journalistes

On a eu chaud. Un peu plus et les journalistes envoyés à Pékin pour les Jeux allaient devoir bosser. Imaginez la tête des malheureux, dans leur chambre d’hôtel, privés de leur principale source d’information. Lâchés dans un monde hostile, sans la présence familière de Google obligés d’errer dans une ville où, en plus d’absorber en quinze jours la dose d’oxyde de carbone que leur coach leur concède pour l’année, ils auraient dû se contenter de parler aux autochtones. Lesquels ne sont pas toujours coopératifs : figurez-vous qu’ils sont contents, fiers même, de ces Jeux de la Honte. Faut croire qu’ils sont tous sur écoute. Sinon, c’est sûr, il y aurait un portrait géant de Bob Ménard place Tien An Men.

A la longue, ces manifestations du patriotisme chinois pourraient casser le moral des troupes qui, à Paris, luttent héroïquement contre la dictature. Sevré d’Internet, le reporter dépêché à Pékin pour mettre le spectateur en appétit avant que commencent les « choses sérieuses » et qu’affluent des recettes publicitaires non moins sérieuses n’a guère d’autre solution que de nous infliger des « papiers couleurs ». Et il ne s’en prive pas. Exemple entendu au hasard des ondes : le marché « spécial touriste olympique », juste ce qu’il faut d’exotisme, un chaos digne des Ming et des hôtesses qui jonglent impeccablement avec une bonne dizaine de phrases dans pas mal de langues étrangères. Un entraîneur italien et un athlète américain se fendent de quelques commentaires attendus. Tout le monde est ravi. Ainsi va la Chine nouvelle. Accommodé à cette sauce, tout devient vite kitsch, jusqu’au paysan renvoyé dans son village avec aussi peu de ménagements qu’il en avait été arraché pour contribuer à la construction du grand cirque. Mais je m’égare.

Internet, c’est le cordon ombilical qui relie le reporter au monde, et tout particulièrement à l’ensemble de ses confrères. Pompons-nous les uns les autres. Avec Internet, vous avez l’assurance de ne jamais commettre d’écart par rapport à la doxa : vous savez en temps réel où souffle le vent. Sans ce précieux auxiliaire, on court toujours le risque de dire du bien de ceux qui ont été désignés comme les méchants pendant qu’on était à la piscine. Grâce aux dieux du wifi, l’envoyé spécial sait à la fois ce qui se passe en Chine et ce qu’il convient d’en penser, le tout sans quitter sa chambre d’hôtel. C’est dire si, pour un journaliste, la vie sans web est épuisante.

On ne s’étonnera donc pas que la presse ait unanimement salué la victoire remportée sur le régime chinois après quarante-huit heures d’un d’insoutenable bras de fer. Tout allait bien. Bob Ménard était en vacances. Ingrid Bétancourt aussi. On pouvait même espérer que Siné allait finir par la boucler (sa valise). Voilà que le mercredi 31 juillet, un porte-parole chinois confirme ce que quelques confrères avaient constaté la veille : certains sites ne sont pas accessibles aux journalistes étrangers. En prime, il fait le malin : « On vous avait promis l’accès à Internet, pas à tout Internet ! » Branle-bas de combat dans les rédactions. Pas contents, les confrères : impossible, de Pékin, d’aller sur certains sites que l’on dira donc « sensibles ». Terrorisme ? Pédophilie ? Non, apparemment, ce qui fait peur au régime chinois, c’est l’alliance des grands médias et des grandes boutiques de droits de l’Homme. Dans la première catégorie, bizarrement, tout le monde cite la BBC et la Deutsche Welle (seraient-ils les seuls censurés ? ou les seuls qui manquent réellement ? – dans les deux cas, ce serait vexant pour les autres) ; par ailleurs, on redoute la perspective de Jeux sans Amnesty International et, surtout, sans Reporters Sans Frontières, l’agence d’événementiel humanitaire chargée de leur fournir un supplément d’âme. Interdits de voyage, Ménard et ses troupes ont promis une cyber-manifestation d’enfer. Les malheureux reporters confinés à Pékin veulent en être.

Etranglements indignés, cris d’orfraie et mines d’enterrement. D’un bout à l’autre de cette malheureuse planète, on découvre que les Chinois censurent l’Internet. Un scoop mondial ! Ô temps, ô mœurs, sans compter le reste. « Pékin a roulé le CIO dans la farine. Il faut que les journalistes étrangers puissent travailler correctement », tonne Ménard. Et, divine surprise, les Chinois cèdent. Comme quoi il suffisait de hausser le ton. Congratulations générales et assomption de Robert Ménard. C’est la victoire du courage sur la lâcheté, de la liberté sur l’oppression – le triomphe des droits de l’Homme et du Journaliste.

Si vous aviez mauvais esprit, vous diriez que le dissident chinois, il s’en tamponne que l’envoyé spécial du Bien public ait accès au site de la BBC. Et que le rapport d’Amnesty, pour lui, c’est la vraie vie. Ce ne serait pas faux. Mais ce délicieux épisode révèle autre chose. Visiblement, les dirigeants chinois ont compris que les médias sont le dernier attribut de la puissance de l’Occident. Ils savent qu’on ne peut pas les envoyer paître comme un quelconque gouvernement européen. Il faut les nourrir et leur donner l’illusion qu’ils ont gagné, en un mot les rouler dans la farine. De ce point de vue, l’opération « Censure sur Internet » est parfaite. Premier temps : on serre la vis sur un terrain dépourvu de tout enjeu réel ; deuxième temps : on laisse la contestation enfler ; troisième temps : on revient à sa position initiale en ayant l’air d’avoir fait une concession majeure. En clair, les dirigeants de Pékin lâchent sur ce qu’ils ne peuvent pas contrôler et dont, au demeurant, ils se fichent : ce qu’on dit d’eux en Occident. Peu leur importe que les envoyés spéciaux se donnent des émotions avec la littérature subversive, ce qui compte c’est que les Chinois soient contents. Et pour que les Chinois soient contents, il faut les protéger des propagateurs de mauvaises nouvelles et autres ennemis du libéral-communisme. Les râleurs au trou, les journalistes au centre de presse et les vaches seront bien gardées.

D’accord, cette grande victoire n’a pas changé le sort d’un prisonnier politique chinois ni accru d’un iota la liberté de la presse chinoise. Que ne donnerait-on pas pour améliorer les conditions de travail de ceux qui sacrifient leurs vacances pour nous informer ?

En attendant, tout ça l’a énervé, notre Bobby national. Faut dire qu’il y a de quoi. Auréolé de la défaite infligée à Hu Jintao, il ne doutait pas que, dans la foulée, Nicolas Sarkozy allait se rendre à ses exigences – et pas à la cérémonie d’ouverture. Macache. Non seulement le Dalaï Lama devra se contenter de Carla, mais le président lui, se fadera l’aller-retour pour Pékin. Avec Roselyne Bachelot qui est du genre à parler tout le temps, tu parles d’une partie de plaisir. Il est colère, le Ménard. Le premier à ramasser a été le président du CIO, Jacques Rogge : « un Ponce Pilate, un lâche et un salopard ». Nicolas Sarkozy, désigné comme la tête pensante d’une « coalition de lâches », n’a pas eu droit à beaucoup plus de manières. « Nous ne pouvons que constater la lâcheté du CIO et des dirigeants politiques. Ceux qui ont un minimum de respect pour eux-mêmes n’assisteront pas à la cérémonie d’ouverture. Mais certains en sont réduits à toutes les bassesses avec, en tête, Nicolas Sarkozy. » Prends ça dans les dents. On suppose que RSF ne supportera pas un jour de plus de devoir quoi que ce soit à un gouvernement cumulant lâcheté et bassesse et se fera un point d’honneur de reverser au budget de l’Etat la subvention de 525 000 € qui lui a été allouée, au titre de l’exercice 2007, par le ministère des Affaires étrangères.

Ne parlons pas d’argent. Ménard pense qu’il n’est pas convenable de faire passer l’économie avant les droits de l’Homme. Il a raison. Mais alors, qu’il trouve le moyen de faire taire tous ces gens vulgaires qui ne cessent de réclamer plus de pouvoir d’achat. Si le Pain passe avant les Jeux, où va-t-on ?

Pitié pour le matador

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Ainsi donc, comme chaque été, on a pu voir ces jours-ci aux portes des arènes des cohortes de rombières vindicatives tenter d’empêcher les spectateurs d’assister aux corridas et même d’interdire, par voie légale, aux matadors de toréer. Et comme chaque année, bien que n’étant pas spécialement amateur de tauromachie, je me suis immédiatement senti solidaire des aficionados.

Tout d’abord, parce que les braillards qui condamnent la corrida sont de toute évidence des crétins infréquentables. Encore plus sûrs de leur bon droit que les propagandistes anti-tabac, encore plus hermétiques à la contradiction que les séides de Robert Ménard, ces professionnels de l’engagement zéro risque, nous indiquent à coup sûr quelles causes il ne faut pas défendre.

Et puis, la corrida a quand même inspiré Goya, Bizet et Picasso. Alors que la défense des animaux n’a légué à la civilisation que les discours pathétiques de Nicolas Hulot, les clichés de Yann Arthus-Bertrand et les canapés-lits en skaï.

Par ailleurs, et n’en déplaise aux abrutis qui font baptiser leur poisson rouge, on serait bien bête de ravaler l’homme au niveau de l’animal. Celui-ci est fait pour être domestiqué, mangé, ou éliminé par celui-là. D’ailleurs, on se pose moins de questions quand on use un insecticide contre les moustiques.

A ce tarif-là, on ne pourrait bientôt plus faire de feu de cheminée par respect envers le bois (qui « doit beaucoup souffrir » quand on le brûle) ni s’asseoir sur une chaise (qui « doit se sentir bafouée dans sa dignité quand on y pose ses fesses »).

De surcroît, il suffit de suivre cinq minutes une banda pour comprendre ce que la tauromachie a de miraculeux : dans une banda, derrière l’hélicon, la clarinette ou la grosse caisse, on retrouve côte à côte le gamin et l’octogénaire, la Marie-Hortense et le Mamadou, le DJ et l’agrégé. Aucun doute, la corrida a fait plus pour réduire la fracture sociale que de grandes marques célèbres de présidents de la République.

Et puis après tout, si le spectacle d’une corrida vous insupporte, c’est tellement facile de l’éviter. Contrairement à Marc Lévy, Laure Manaudou ou le Dalaï Lama.

Star Ac : gay unfriendly

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Endemol vient de l’annoncer : la future Star Ac’ se déroulera rue Charlot, dans le Marais, au grand dam des riverains qui craignent un afflux massif d’adolescentes poussant de petits cris aigus dans un quartier où cette pratique est strictement réservée aux hommes. Pour notre part, nous félicitons la société Endemol : il n’y avait pas de rue mieux nommée pour accueillir l’académie des futures ex-stars.

L’Europe mourra-t-elle à Tbilissi ?

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Il flotte dans l’air du Caucase comme un parfum de Guerre froide. Sans doute a-t-on usé de cette réminiscence à force de la brandir. Reste que la guerre que se mènent la Russie et la Géorgie, protégée de l’Amérique, fait bien penser à ce temps où deux superpuissances s’affrontaient, en Afrique et en Asie, par l’intermédiaire des mouvements de libération, guérillas et autres sectes que l’une et l’autre parrainaient. Sauf que là, pour la première fois depuis 1979, la Russie elle-même est descendue dans l’arène.

On dira qu’entre les années 1960 et 2010, le monde a changé – c’est indéniable. Il y a pourtant une tendance de longue durée qui crève les yeux mais qu’on préfère ne pas voir : aujourd’hui, comme à l’époque, l’Europe est paralysée. Et, paradoxalement, peut-être l’est-elle encore plus aujourd’hui qu’hier, quand elle était amputée de sa partie orientale, placée sous la bonne garde des chars russes. Il est vrai que si l’Europe de l’Ouest était l’enjeu symbolique de l’affrontement est-ouest, on n’y tira pas un coup de feu. En tout cas, la bonne vieille CEE dont les membres surent jouer de leur position centrale entre Est et Ouest parvint souvent, malgré sa vassalisation militaire, à mener sa propre diplomatie – celle de la « Détente ». On ne saurait en dire autant de l’actuelle Union. Peut-être parce que, se proclamant – et se pensant – fondée sur les Droits de l’Homme, elle ne comprend plus grand-chose aux aspirations des peuples.

L’Europe libérée, l’Europe réunifiée, l’Europe retrouvée… oui mais l’Europe divisée, minée par les aspirations irrédentistes ravivées par la chute du Mur de Berlin. Elle fut incapable d’empêcher ou d’arrêter la guerre en Yougoslavie. Tout simplement parce que ses membres n’ont ni les mêmes rêves, ni les mêmes cauchemars, ni surtout les mêmes intérêts. La guerre entre la Russie et la Géorgie vient aujourd’hui cruellement rappeler cette réalité de fer. Bref, ce qui se joue dans ce lointain si proche n’est pas notre approvisionnement énergétique mais l’avenir même de l’Union. Et il n’est guère prometteur.

Pour les anciens « pays frères » de l’Union soviétique, qu’ils soient aujourd’hui membres ou frontaliers de l’Union, la crise actuelle est la réalisation de leur pire cauchemar. Des Républiques baltes à la Bulgarie en passant par la Pologne, la Roumanie, mais aussi l’Ukraine, les regards se tournent alternativement Tbilissi, Paris et Bruxelles, Moscou et Washington. Comme s’ils se refusaient à croire ce qu’ils voient : l’Ours russe responsable de tant de leurs malheurs est en train de sortir de deux décennies d’hibernation ; il montre ses dents et ses griffes. La récré géopolitique est finie. On se dit que l’Histoire est de retour. À moins que ce ne soit la post-Histoire…

Laissons de côté les détails du conflit caucasien – imbroglio dont l’analyse exige mieux que l’information partielle et biaisée disponible pour l’instant. Le traitement réservé par le berger russe à la brebis géorgienne égarée est une question vitale pour la Pologne et les trois Républiques baltes. Il est significatif que, dans leur communiqué commun, ces pays se soient qualifiés « d’ex-nations captives de l’Urss ». Ce n’est pas une clause de style. En plein centre-ville de Riga, on peut visiter le musée « des occupations de la Lettonie 1940-1991 ». On ne comprend rien si on ne comprend pas que la longue expérience communiste a peu ou prou effacé dans la mémoire collective la féroce mais lointaine férule nazie. D’où ce daltonisme politique, si décrié par nos progressistes, qui rend les peuples de l’Est aveugles à la rassurante distinction entre rouge et brun. Non loin de Riga, à Vilnius, une stèle dressée devant le Parlement rappelle qu’en 2002 George Bush prit, au nom des Etats-Unis, l’engagement solennel de ne jamais abandonner la Lituanie. Sourd aux fantômes de ces petits peuples qui, sans doute, ne l’intéressaient pas plus que cela, Jacques Chirac se contenta, en 2004, de les engueuler vertement en les traitant en substance de caniches des Américains. Ce n’était pas une bonne idée.

Que cela plaise ou non, il faut admettre que chaque pays, et peut-être chaque peuple, est tributaire de son histoire et de sa géographie – et que de surcroît, peuples et pays ne coïncident pas, d’où la multiplication des foyers de tensions. Dans les anciens « pays satellites », la méfiance séculaire envers la puissance russe, nourrie par l’expérience communiste et attisée par une logique politicienne propre au jeu démocratique aboutissent à faire de la question des garanties militaires contre la Russie un enjeu disproportionné au regard de la réalité des intentions russes (le Caucase est une autre affaire). Légitime ou non, cela importe peu : à Riga, Vilnius et Varsovie on veut un protecteur sûr, qui ne tergiversera pas s’il faut user de la force pour ramener à la raison le voisin redouté. A l’évidence, l’Union européenne est incapable, et militairement, et politiquement, d’être ce puissant parrain. Restent les Etats-Unis et l’Otan que les nouveaux membres se sont d’ailleurs empressés d’intégrer dès qu’ils ont pu le faire.

L’ennui, c’est que les « anciens » ont de tout autres intérêts. La France, l’Allemagne et les autres veulent plutôt rassurer la Russie, la traiter avec plus d’égards, trop pensent certains, pour la convaincre que son intérêt à elle est d’avoir de bonnes relations avec l’Union. Politique raisonnable, au demeurant, dès lors que la Russie est en Europe – plus que l’Amérique en tout cas – et que le chaos russe ne profite jamais à personne.

Entre les uns et les autres, les petits nouveaux et les grands anciens, la tension est palpable, l’agacement réciproque perce derrière le langage diplomatique. Interrogé par un journaliste sur le communiqué des « quatre ex » qui appelle l’Otan et l’Union à « s’opposer à la propagation de la politique impérialiste et révisionniste dans l’Est de l’Europe », Bernard Kouchner n’a pas caché un mouvement d’humeur. « Il ne sert à rien d’insulter les gens », a lâché le chef de la diplomatie française à qui incombe la mission impossible de représenter les 27. Pour la France, pas question de montrer du doigt la Russie. « Ce ne sera pas la position de l’Europe », a affirmé Kouchner. Le plus probable est que l’Europe n’aura pas de position et donc, pas de politique. De même qu’elle n’en a pas eu lors de la déclaration d’indépendance du Kosovo, Etat que plusieurs membres de l’Union Européenne n’ont pas reconnu. Ce qui n’empêche pas les dirigeants de ce pays mal né, encouragés par les hordes de conseillers internationaux qui financent ainsi l’achat de leurs maisons de campagne, de promettre, en guise d’avenir radieux, l’adhésion à l’UE. Bien malin qui pourrait dire à quoi elle ressemblera, cette Europe Unie, dans cinq ou dix ans. Quoi qu’il en soit, hier dans les Balkans, aujourd’hui dans le Caucase, l’Europe politique est morte. A supposer que, depuis la Sainte Alliance, elle ait jamais existé.

Sarkozy traite le problème de l’immigration à la source

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Les 3 et 4 novembre prochains, Nicolas Sarkozy a décidé d’organiser une conférence internationale à Vichy, dans la Région Auvergne chère à Hortefeux. Le choix de la ville d’eau est explicite : en finir avec la sinistre mémoire du régime éponyme. Le thème de la conférence, lui, est peut-être moins habile : l’immigration.

Pas de ça chez nous

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A priori, je suis bien sûr favorable au rattachement de la Wallonie à la France, prélude nécessaire à l’annexion intégrale de la Belgique, et, à terme, de la totalité de la rive gauche du Rhin. Mais, on the other hand, ai-je vraiment envie de me retrouver compatriote avec les abominables Frères Dardenne ?

Albert III, roi des Belges

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Assez représentatif de l’école néo-flamande, ce portrait d’Albert III, roi des Belges, est l’oeuvre de Jan van Verendael. Tenu pour un faux grossier par les historiens wallons de l’art (qui prétendent que les Ray Ban n’existaient pas au temps d’Albert III), le tableau reste néanmoins la pièce maîtresse du musée des Arts et traditions populaires wallones d’Antwerpen.

Jan van Verendael, Portrait de SM Albert III, roi des Belges. Huile sur toile conservée au musée des Arts et traditions populaires wallones, Antwerpen.

Insipides dating

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Jour 1. Pas à tortiller : en amour, il faut raquer. Pour un mois : 29,99 euros. Pour six mois : 16,95 € mensuels (petite indélicatesse : il n’est pas clairement expliqué que, sans dénonciation explicite du contrat d’abonnement, il sera reconduit automatiquement). La romance commence donc par un arbitrage financier. Et continue par l’établissement d’une fiche digne des RG : âge, ethnie, taille, poids, photos, situation sociale, revenus, religion, etc. Sans omettre votre lettre de motivation (« annonce »). Magie à l’état pur.

Jour 2
Mon acolyte pour ce reportage : Dovra. Un collectionneur. Il passe en revue les fiches que j’ai sélectionnées la veille : « Les pas connectées depuis plus d’un mois, tu oublies. Pour les autres : un flash et un courriel type. » Pour attrapper l’âme sœur, en général, on se résigne à l’hameçon des petites astuces, mais là, c’est la pêche au filet dérivant. Dovra, lui, pianote en fredonnant du Bryan Ferry : « Jump up ! Bubble up ! What’s in store ? Love is the drug and I need to score… »

Jour 3
Café Marly, samedi après-midi, premier rendez-vous. Les premières entrevues se ressembleront toutes : elle flippe, habitué à filer rencard à Brad Pitt et à voir débarquer Michel Blanc. Sa panique se double du syndrome Price Minister : être retournée comme un colis décevant.

Jour 4
Moteur de recherche épatant : on peut trier selon ce qu’elles estiment le « plus attirant » chez elles. Les sophistiquées choisissent « le regard » ou « la nuque », les téméraires « les fesses », et les facétieuses optent pour « les pieds ». Les options « esprit » ou « humour » ne sont pas proposées. Au jeu du maquignon, et selon mes critères, je trouve : « Avocat » (229), « Fleuriste » (71), « Agriculteur » (8), « Chauffeur routier » (5), « Hôtesse de l’air » (215), « Médecin légiste » (kidding !). Et aussi des minis (moins de 1,49 m : 286), des girafes (plus de 1,98 m : 17) – dont Sala89 (1m99 pour 84kg), chasseuse de têtes dans le civil, qui dit parler kazakh et se définit comme « tenace ». Miam ! Bienvenue dans la cour des Meeracles.

Jour 5
Café de Flore, avec Blue_Shyn, jolie maman de trente-trois ans. Inscrite depuis deux ans – « une seule aventure » – et désabusée : « Je suis comme une DRH qui enchaîne les auditions de tocards… »

Jour 6
Une dizaine de messages chaque jour, des centaines de « nouveaux profils ». L’impression d’un cheptel. Il suffit d’entrer. De choisir. Meetic, le fantasme du backroom à portée des hétéros ?

Jour 7
Chez Fuxia avec Klara_Ma : premier blind date (pas de photo). Beaucoup de filles protègent ainsi leur anonymat, afin de ne pas être repérées par une connaissance. Dovra ricane : « Savoir si une nana est inscrite, même incognito ? Fastoche… » Lorsqu’on a oublié son mot de passe, le système propose de vous renvoyer vos « identifiants » par courriel. Un petit malin (ou votre femme…) peut donc aisément interroger le site en testant votre e-mail. De retour chez moi, j’essaye le courriel d’une insoupçonnable[1. Il ne s’agit pas d’Elisabeth L.]… Surprise !

Jour 8
D’origine malgache, Orinka88 se la joue « entretien d’embauche » lors de nos échanges. Bonne pâte, je tolère. Mais quand je retrouve cette créature habituée du Flore[2. Il ne s’agit pas de Marc C.] et qu’elle me décoche : « Un bon point pour toi, tu es ponctuel », je prends la mesure du romantisme à l’œuvre – sélectionné sur CV pour un entretien de débauche… En rentrant, un énième message de Calou4Ever, clone de Claire Chazal. Elle m’invite sur MSN, branche sa webcam, se met à poil (façon de parler : elle est 100 % épilée). Quelque part, Cupidon s’ouvre les veines.

Jour 9
Accoster un canon on line ? Mission impossible. A peine inscrite, elle reçoit un tombereau de mails. Ecœurée ou casée, la bombe ne connaît sur Meetic qu’une durée de vie éphémère. Deux hameçons possibles : un titre de mail qui se distingue des « Coucou ! » et autres « Slt ! » ou l’attente au coin du bois. Car, si dans la vie vraie, on les attend à la sortie (de la fac, puis du bureau…), ici, tout marche à l’envers : il faut les attendre à l’entrée. Catégorie : « nouveaux membres ».

Pas bienvenus chez les ch’tis !

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Député apparenté UMP de Tourcoing, Christian Vanneste a été interrogé par le journal Le Soir, suite au sondage indiquant que 49 % des Wallons et 60 % des Français étaient favorables au rattachement de la Wallonie à la France : « Cela ferait gagner 5 millions d’habitants à la France, ce qui renforcerait son poids en Europe face à l’Allemagne… Mais, la Wallonie est à majorité socialiste, un socialisme pire que chez nous. » A l’évidence, Christian Vanneste n’a pas du tout suivi les législatives belges de 2007, qui ont vu le Mouvement réformateur de Didier Reynders distancer le PS. Encore un coup du lobby homosexuel !

Digital farm

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Non, Orwell n’est pas mort : il blogue encore. C’est ce que nous apprend le Figaro : dès le 9 août son journal, écrit du 9 août 1938 jusqu’en 1942, sera publié en ligne et dévoilé ainsi pour la première fois dans son intégralité sur le site créé par le Prix Orwell. Chaque jour, nous aurons le loisir de lire un orwellien billet du jour, avec un léger différé de 70 ans. « Les meilleurs livres, écrivait l’auteur de 1984, sont ceux qui racontent ce que l’on sait déjà. » Les blogs aussi, peut-être.

Pékin respecte enfin les Droits des Journalistes

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On a eu chaud. Un peu plus et les journalistes envoyés à Pékin pour les Jeux allaient devoir bosser. Imaginez la tête des malheureux, dans leur chambre d’hôtel, privés de leur principale source d’information. Lâchés dans un monde hostile, sans la présence familière de Google obligés d’errer dans une ville où, en plus d’absorber en quinze jours la dose d’oxyde de carbone que leur coach leur concède pour l’année, ils auraient dû se contenter de parler aux autochtones. Lesquels ne sont pas toujours coopératifs : figurez-vous qu’ils sont contents, fiers même, de ces Jeux de la Honte. Faut croire qu’ils sont tous sur écoute. Sinon, c’est sûr, il y aurait un portrait géant de Bob Ménard place Tien An Men.

A la longue, ces manifestations du patriotisme chinois pourraient casser le moral des troupes qui, à Paris, luttent héroïquement contre la dictature. Sevré d’Internet, le reporter dépêché à Pékin pour mettre le spectateur en appétit avant que commencent les « choses sérieuses » et qu’affluent des recettes publicitaires non moins sérieuses n’a guère d’autre solution que de nous infliger des « papiers couleurs ». Et il ne s’en prive pas. Exemple entendu au hasard des ondes : le marché « spécial touriste olympique », juste ce qu’il faut d’exotisme, un chaos digne des Ming et des hôtesses qui jonglent impeccablement avec une bonne dizaine de phrases dans pas mal de langues étrangères. Un entraîneur italien et un athlète américain se fendent de quelques commentaires attendus. Tout le monde est ravi. Ainsi va la Chine nouvelle. Accommodé à cette sauce, tout devient vite kitsch, jusqu’au paysan renvoyé dans son village avec aussi peu de ménagements qu’il en avait été arraché pour contribuer à la construction du grand cirque. Mais je m’égare.

Internet, c’est le cordon ombilical qui relie le reporter au monde, et tout particulièrement à l’ensemble de ses confrères. Pompons-nous les uns les autres. Avec Internet, vous avez l’assurance de ne jamais commettre d’écart par rapport à la doxa : vous savez en temps réel où souffle le vent. Sans ce précieux auxiliaire, on court toujours le risque de dire du bien de ceux qui ont été désignés comme les méchants pendant qu’on était à la piscine. Grâce aux dieux du wifi, l’envoyé spécial sait à la fois ce qui se passe en Chine et ce qu’il convient d’en penser, le tout sans quitter sa chambre d’hôtel. C’est dire si, pour un journaliste, la vie sans web est épuisante.

On ne s’étonnera donc pas que la presse ait unanimement salué la victoire remportée sur le régime chinois après quarante-huit heures d’un d’insoutenable bras de fer. Tout allait bien. Bob Ménard était en vacances. Ingrid Bétancourt aussi. On pouvait même espérer que Siné allait finir par la boucler (sa valise). Voilà que le mercredi 31 juillet, un porte-parole chinois confirme ce que quelques confrères avaient constaté la veille : certains sites ne sont pas accessibles aux journalistes étrangers. En prime, il fait le malin : « On vous avait promis l’accès à Internet, pas à tout Internet ! » Branle-bas de combat dans les rédactions. Pas contents, les confrères : impossible, de Pékin, d’aller sur certains sites que l’on dira donc « sensibles ». Terrorisme ? Pédophilie ? Non, apparemment, ce qui fait peur au régime chinois, c’est l’alliance des grands médias et des grandes boutiques de droits de l’Homme. Dans la première catégorie, bizarrement, tout le monde cite la BBC et la Deutsche Welle (seraient-ils les seuls censurés ? ou les seuls qui manquent réellement ? – dans les deux cas, ce serait vexant pour les autres) ; par ailleurs, on redoute la perspective de Jeux sans Amnesty International et, surtout, sans Reporters Sans Frontières, l’agence d’événementiel humanitaire chargée de leur fournir un supplément d’âme. Interdits de voyage, Ménard et ses troupes ont promis une cyber-manifestation d’enfer. Les malheureux reporters confinés à Pékin veulent en être.

Etranglements indignés, cris d’orfraie et mines d’enterrement. D’un bout à l’autre de cette malheureuse planète, on découvre que les Chinois censurent l’Internet. Un scoop mondial ! Ô temps, ô mœurs, sans compter le reste. « Pékin a roulé le CIO dans la farine. Il faut que les journalistes étrangers puissent travailler correctement », tonne Ménard. Et, divine surprise, les Chinois cèdent. Comme quoi il suffisait de hausser le ton. Congratulations générales et assomption de Robert Ménard. C’est la victoire du courage sur la lâcheté, de la liberté sur l’oppression – le triomphe des droits de l’Homme et du Journaliste.

Si vous aviez mauvais esprit, vous diriez que le dissident chinois, il s’en tamponne que l’envoyé spécial du Bien public ait accès au site de la BBC. Et que le rapport d’Amnesty, pour lui, c’est la vraie vie. Ce ne serait pas faux. Mais ce délicieux épisode révèle autre chose. Visiblement, les dirigeants chinois ont compris que les médias sont le dernier attribut de la puissance de l’Occident. Ils savent qu’on ne peut pas les envoyer paître comme un quelconque gouvernement européen. Il faut les nourrir et leur donner l’illusion qu’ils ont gagné, en un mot les rouler dans la farine. De ce point de vue, l’opération « Censure sur Internet » est parfaite. Premier temps : on serre la vis sur un terrain dépourvu de tout enjeu réel ; deuxième temps : on laisse la contestation enfler ; troisième temps : on revient à sa position initiale en ayant l’air d’avoir fait une concession majeure. En clair, les dirigeants de Pékin lâchent sur ce qu’ils ne peuvent pas contrôler et dont, au demeurant, ils se fichent : ce qu’on dit d’eux en Occident. Peu leur importe que les envoyés spéciaux se donnent des émotions avec la littérature subversive, ce qui compte c’est que les Chinois soient contents. Et pour que les Chinois soient contents, il faut les protéger des propagateurs de mauvaises nouvelles et autres ennemis du libéral-communisme. Les râleurs au trou, les journalistes au centre de presse et les vaches seront bien gardées.

D’accord, cette grande victoire n’a pas changé le sort d’un prisonnier politique chinois ni accru d’un iota la liberté de la presse chinoise. Que ne donnerait-on pas pour améliorer les conditions de travail de ceux qui sacrifient leurs vacances pour nous informer ?

En attendant, tout ça l’a énervé, notre Bobby national. Faut dire qu’il y a de quoi. Auréolé de la défaite infligée à Hu Jintao, il ne doutait pas que, dans la foulée, Nicolas Sarkozy allait se rendre à ses exigences – et pas à la cérémonie d’ouverture. Macache. Non seulement le Dalaï Lama devra se contenter de Carla, mais le président lui, se fadera l’aller-retour pour Pékin. Avec Roselyne Bachelot qui est du genre à parler tout le temps, tu parles d’une partie de plaisir. Il est colère, le Ménard. Le premier à ramasser a été le président du CIO, Jacques Rogge : « un Ponce Pilate, un lâche et un salopard ». Nicolas Sarkozy, désigné comme la tête pensante d’une « coalition de lâches », n’a pas eu droit à beaucoup plus de manières. « Nous ne pouvons que constater la lâcheté du CIO et des dirigeants politiques. Ceux qui ont un minimum de respect pour eux-mêmes n’assisteront pas à la cérémonie d’ouverture. Mais certains en sont réduits à toutes les bassesses avec, en tête, Nicolas Sarkozy. » Prends ça dans les dents. On suppose que RSF ne supportera pas un jour de plus de devoir quoi que ce soit à un gouvernement cumulant lâcheté et bassesse et se fera un point d’honneur de reverser au budget de l’Etat la subvention de 525 000 € qui lui a été allouée, au titre de l’exercice 2007, par le ministère des Affaires étrangères.

Ne parlons pas d’argent. Ménard pense qu’il n’est pas convenable de faire passer l’économie avant les droits de l’Homme. Il a raison. Mais alors, qu’il trouve le moyen de faire taire tous ces gens vulgaires qui ne cessent de réclamer plus de pouvoir d’achat. Si le Pain passe avant les Jeux, où va-t-on ?