On savait que Donald Trump voulait que son retour à la Maison Blanche déclenche une véritable révolution gouvernementale. Qui sont les personnalités dont il s’entoure pour arriver à ses fins ? Gerald Olivier, grand spécialiste des États-Unis, passe en revue les différentes nominations du président. D’abord, le « cabinet », c’est-à-dire ceux à qui il confie les portefeuilles de son administration. Demain, un second article traitera du « bureau exécutif » de Trump, constitué de ses plus proches conseillers.
Donald Trump avait promis de se mettre au travail dès le 1er jour et d’agir vite et fort. Il a tenu promesse. Il est même allé au-delà. Depuis le 20 janvier Washington est pris dans un tourbillon d’activité que le pays n’a pas connu depuis les premiers jours de l’administration Roosevelt en 1933.
Le président Trump a signé plus de deux cents décrets. Il a effectué trois déplacements, deux dans des zones récemment touchées par des catastrophes naturelles et humaines, la Caroline du Nord et Los Angeles, une au Nevada pour remercier ses supporters qui lui ont offert une victoire historique en novembre. Il s’est adressé aux plus grands chefs d’entreprises du monde réunis à Davos, pour leur dire que l’ère de la récréation globaliste et wokiste était finie. Désormais les États-Unis seront guidés par le bon sens et il n’y aura pas de meilleur endroit dans le monde pour investir. Il a donné une demi-douzaine de conférences de presse, certaines impromptues, et répondu à des dizaines de questions dont aucune ne lui avait été communiqué à l’avance et sans avoir besoin de lire une fiche. Il est même venu lui-même dans la salle de presse de la Maison Blanche, accompagné du vice-président, du nouveau secrétaire à la Défense, et du nouveau secrétaire aux Transports pour faire le point après la tragique collision d’un avion de ligne et d’un hélicoptère militaire au-dessus de Washington.
De mémoire de journaliste, jamais une nouvelle administration américaine n’a paru aussi active, impliquée et motivée. En dehors des décrets que Trump continue de signer, les deux premières semaines de son administration ont été dominées par les audiences de confirmation des membres de son cabinet et de son administration. L’occasion de revenir sur qui est qui et qui fait quoi aujourd’hui autour de Donald Trump.
Le « cabinet » et le « bureau exécutif »
Pour rappel, il n’existe pas de « Premier ministre » aux États-Unis. Le président est à la tête de son administration et conduit la nation. C’est lui qui cible l’objectif, donne le cap, décrit le chemin et dirige la manœuvre. Il est entouré d’un cabinet et d’un bureau exécutif.
Le « cabinet » se compose de quinze secrétaires, nommés par le président. Equivalents de ministres ils ont en charge la Justice (Attorney General), la Défense, le Trésor, la Sécurité intérieure (Homeland Security), les Affaires étrangères (State Department), l’Agriculture, le Commerce, l’Éducation, l’Énergie, la Santé (Health and Human Services), le Logement (Housing and Urban Development), le Territoire (Interior), le Travail, les Transports, et les Anciens combattants (Veterans Affairs). Le bureau exécutif rassemble un nombre variable de conseillers en lien direct avec le président : il s’agit du Directeur du renseignement national, du Conseiller à la sécurité nationale, de l’Ambassadeur à l’ONU, du Représentant aux échanges commerciaux, du Directeur de l’Agence pour la protection de l’environnement, du bureau du Budget (OMB, Office of Management and Budget), et d’autres.
Donald Trump s’est adjoint un conseiller exceptionnel très spécial, Elon Musk, qu’il a placé à la tête d’un tout nouveau département le DOGE, pour « Department of Government Efficiency ». Musk a pour tâche de tailler dans la bureaucratie pour rendre l’action du gouvernement plus efficace et moins coûteuse. Au départ il était secondé par Vivek Ramaswamy, milliardaire et ancien candidat présidentiel républicain. Mais Ramaswamy s’est retiré dès les premiers jours, tant il est difficile d’exister à côté de Musk…
Le président peut également révoquer les directeurs de plusieurs grandes agences gouvernementales pour les remplacer par des gens à lui. Ce que Trump ne s’est pas privé de faire à la CIA et au FBI. Enfin il a nommé un nouveau « tsar de la frontière ». Quelles sont donc les personnalités nommées par Trump aux postes-clés de son cabinet ?
Dircab et porte-parole
Le directeur de cabinet du président (White House Chief of Staff) est la personne incontournable à la Maison Blanche. Elle gère l’agenda du président et son accessibilité. Le pronom « elle » est ici approprié car pour la première fois de l’histoire des États-Unis le directeur de cabinet du président est une femme. Elle s’appelle Susie Wiles. Elle a 67 ans, vient de Floride. C’est elle qui a dirigé la campagne présidentielle de Donald Trump en 2024. Wiles possède 45 ans d’expérience politique ayant commencé comme assistante dans la campagne de Ronald Reagan en 1980…
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Le propre d’un bon directeur de cabinet est de travailler en coulisse et d’être invisible du grand public. Les Américains verront très peu Susie Wiles. Le visage de l’administration sera celui d’une jeune femme blonde de 27 ans, Karoline Leavitt. Elle a été désignée porte-parole de la Maison Blanche. Elle sera l’interlocutrice des journalistes et dirigera tous les points presse. Sa jeunesse, ses compétences et son dynamisme sont à l’image de la nouvelle administration Trump. Née en 1997, Leavitt est diplômée de Saint Anselm College, une institution privée catholique du New Hampshire. Elle a soutenu Trump dès sa première candidature présidentielle, en juin 2015, alors qu’elle n’avait pas encore l’âge de voter et elle a fait ses classes auprès d’Elise Stéfanik, représentante républicaine de New York, devenue ambassadrice à l’ONU.

Karoline Leavitt a déjà donné plusieurs « briefings » devant la presse où elle a démontré sa connaissance des dossiers – elle s’est présentée sans la moindre note écrite – et son aplomb face aux journalistes et leurs questions parfois pernicieuses. Importante nouveauté, les conférences de presse de la Maison Blanche sont désormais ouvertes aux médias sur internet et au « podcasters ». Au grand dam des médias traditionnels, comme le New York Times ou CNN, qui n’ont plus de monopole d’accès au président. Ces auditions permettent de constater combien Donald Trump a rassemblé autour de lui une équipe de collaborateurs dévoués et loyaux, avec pour mission de recentrer leur ministère sur sa tâche centrale et d’éliminer l’emprise idéologique et en particulier le venin du wokisme au sein de la bureaucratie. Bref, faire le ménage à Washington.
Les grands portefeuilles
Au département d’État, Trump a nommé Marco Rubio, 53 ans, sénateur de Floride, ancien candidat à la présidence chez les Républicains, Américain d’origine cubaine, anti-communiste pur jus et un partisan d’une Amérique forte. Il a déjà tourné son regard vers l’Amérique latine, effectuant son premier déplacement international à Panama le 31 janvier. Lors de son audience de confirmation Rubio a résumé les principes de la politique étrangère de Trump en trois notions simples : si une politique rend les États-Unis plus forts, plus sûrs et plus prospères, elle sera adoptée. Dans le cas contraire, elle sera rejetée.
Au Pentagone, le département de la Défense, Trump a nommé Peter Hegseth, un ancien marine de 44 ans, dont la mission sera de faire le ménage à l’intérieur de l’armée pour en éliminer le venin « wokiste » que les administrations Obama et Biden ont laissé s’infiltrer. Hegseth arrive sans expérience à un tel poste ce qui indique que Donald Trump entend exercer tout seul le rôle de commandant en chef des armées, que la Constitution lui réserve. Les Démocrates ont dénoncé son manque d’expérience et ont attaqué son caractère lors de son audience de confirmation. Sans le déstabiliser. Ni faire dérailler sa nomination. Hegseth a prêté serment le 27 janvier.
Au Trésor, Trump a désigné Scott Bessent, un manager de fonds d’investissement de 62 ans. Bessent, comme Trump, croit à la vertu des tarifs douaniers. Il y voit une source de revenus et une protection pour l’emploi. Bessent est homosexuel et sa nomination à un tel poste est également historique. Très à l’aise lors de ses audiences de confirmation, Bessent a insisté sur ses trois priorités : favoriser la croissance économique, lutter contre l’inflation, soutenir la réindustrialisation des États-Unis.
Le département de la Justice sera dirigé par une autre femme, Pam Bondi, qui a occupé ce poste pendant huit ans en Floride. Initialement Trump avait désigné Matt Gaetz, un jeune élu conservateur de Floride. Mais Gaetz, très controversé et visé par une enquête interne du Congrès, a retiré sa candidature et Trump s’est tourné vers Bondi, qui a déjà travaillé au sein de la Maison Blanche lors du premier procès en destitution intenté contre Trump en 2020. C’est une jolie femme blonde aux cheveux raides qui a 59 ans mais en paraît 39 ! Sa tâche sera de recentrer le département de la Justice sur sa fonction originelle, la lutte contre la criminalité et d’assurer qu’il existe bien aux États-Unis une seule et même justice pour tous. Sous l’administration Biden et la direction de son Attorney General Merrick Garland, la justice américaine a été instrumentalisée et détournée pour nuire aux conservateurs, aux catholiques et aux supporters de Trump.
Éliminer le wokisme
Le Département de la Sécurité Intérieure (DHS) a été confié à Kristi Noem, gouverneur du Dakota du Sud depuis 2018. Noem est une femme de 53 ans qui s’est fait connaître sur le plan national en 2020 et 2021 lors de la pandémie du Covid-19 en s’opposant à la fois au confinement généralisé et à la vaccination obligatoire. Noem est une femme de caractère qui avait été un temps considérée pour le poste de vice-président. Le DHS est un énorme ministère, créé dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001, chargé de la sécurité intérieure des États-Unis et de la lutte contre l’immigration clandestine.
A la santé Trump a désigné Robert Kennedy Jr, neveu de président John Kennedy, et un temps candidat présidentiel démocrate puis indépendant. Kennedy Jr est un inclassable trublion de 70 ans, qui a mené une carrière d’avocat au service de causes environnementales et qui s’est fait connaître comme un ardent défenseur de la liberté d’expression et des libertés individuelles à l’occasion de la pandémie de Covid. Ce n’est pas un Républicain, et encore moins un conservateur. Il est même plutôt à gauche. En revanche, c’est un antisystème qui s’est toujours battu contre l’establishment et les liens incestueux entre l’industrie et la politique. Il s’est rapproché de Donald Trump durant la campagne présidentielle et a fini par se retirer de la course en sa faveur.
Le département de l’Énergie sera confié à Chris Wright, un dirigeant d’entreprise du secteur pétrolier, dont la tâche sera de réaliser l’une des promesses les plus emblématiques de Donald Trump, redonner aux États-Unis une place dominante dans le secteur énergétique. Wright estime « qu’il n’existe pas d’énergie propre, ni d’énergie sale ». Il va développer « toutes les sources sures, peut coûteuses et fiables, pour sécuriser l’approvisionnement américain ».
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Le territoire (Interior) a été confié à Doug Burgum, gouverneur du Dakota du Nord et bref candidat présidentiel républicain en 2024. Burgum vient d’un État dont l’économie dépend largement de l’énergie et il sera l’un des artisans de la renaissance énergétique promise par Trump. Le département de l’Intérieur gère, entre autres, toutes les terres fédérales et délivre les permis d’exploration et d’exploitation. A ce titre Burgum sera aussi co-président du Conseil national de l’énergie que le président Trump entend mettre en place.
Trump a confié l’Éducation à Linda Mac Mahon, une femme chef d’entreprise de 76 ans qu’il connaît depuis des décennies et qui était en charge des petites et moyennes entreprises dans sa première administration. Sa tâche sera difficile et ingrate : un, éliminer toute l’idéologie « woke » qui ruine l’enseignement public ; deux, saborder son propre ministère que Trump estime trop couteux et inutile. Aux États-Unis l’éducation est l’affaire des États, pas du gouvernement fédéral. Ce ministère n’existait pas avant 1979 et les résultats des écoliers américains étaient alors bien meilleurs…
A l’Agriculture, on trouve Brooke Rollins, une femme de 52 ans, déjà présente dans la première administration Trump et qui jusqu’à récemment dirigeait le America First Policy Institute, un club de pensée très influent auprès de Donald Trump. Originaire du Texas et fille d’agriculteurs, Rollins aura pour mission d’assainir le monde de l’agriculture aux États-Unis et d’assurer à la fois la prospérité des fermiers et une alimentation saine pour les Américains. Sa priorité sera de résoudre l’épidémie de grippe aviaire qui touche la volaille américaine et a entrainé l’abattage de dizaine de millions de poules pondeuses provoquant une hausse massive du prix des œufs.
Au Commerce, Trump a nommé Howard Lutnick, un millionnaire de la finance de 63 ans ans, PDG de Cantor Fitzgerald LP, une grande firme d’investissement de Wall Street. Comme Bessent, Lutnick est un partisan de tarifs douaniers élevés.
Pour les autres portefeuilles, Trump a nommé au Logement (Housing and Urban Development), Scott Turner ; au département du Travail, Lori Chavez-DeRemer ; aux Transports, Sean Duffy ; et enfin aux Anciens combattants (Veterans Affairs), Doug Collins.
Découvrez la deuxième partie ici : Ceux qui murmurent à l’oreille de Trump
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Cet article a tout d’abord été mis en ligne sur le blog de Gérald Olivier.