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«Nous sommes prêts pour redresser l’école de la République»

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Notre école est en phase avancée de déliquescence. Pourtant, à écouter de nombreux fonctionnaires ou responsables syndicaux qui sortent de leur rôle, la menace viendrait du Rassemblement national, lequel n’a jamais été aux responsabilités, déplore cette tribune.


« Nous n’obéirons pas » : comme cette pétition, signée par des cadres de l’Éducation nationale en fonction, on voit circuler sur les réseaux sociaux des tribunes et communiqués appelant à la désobéissance civile au cas de victoire du Rassemblement national aux élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet 2024.

De tels appels à la désobéissance, de la part de fonctionnaires de l’État en exercice, sont un grave et scandaleux manquement à leurs obligations statutaires de se conformer à un strict devoir de neutralité dans l’exercice de leurs fonctions. Qu’attend Mme Nicole Belloubet pour rappeler publiquement ces agents à leurs obligations et faire appliquer l’obligation de réserve des fonctionnaires pendant la période électorale ?

Nicole Belloubet, Ministre de l’Education nationale, dans une école primaire près de Toulouse, le 29 avril 2024 © FRED SCHEIBER/SIPA

Au nom de quoi une poignée de militants syndicaux s’arrogeraient-ils un monopole moral pour décider de la légitimité de tel ou tel gouvernement ? La seule règle qui vaille en démocratie est le respect du suffrage universel. Comme toujours, ceux-là mêmes qui donnent des leçons de démocratie sont les premiers à refuser et mépriser les résultats des élections lorsqu’ils ne vont pas dans leur sens.

Ce qui aujourd’hui représente un danger pour la démocratie, ce n’est pas le Rassemblement national. Ce sont les minorités de militants politiques qui appellent à la désobéissance ou à l’insurrection, avant même que les Français ne se soient exprimés. Les syndicats enseignants ont toute légitimité pour représenter les intérêts professionnels des personnels de l’Éducation nationale. En revanche, rien ne justifie qu’ils instrumentalisent leur fonction pour faire de la politique. Depuis des décennies, les syndicats d’extrême gauche se sont arrogés une espèce de monopole moral sur le monde éducatif au point d’exercer sur les personnels une pression idéologique quand ce n’est pas une sorte de terrorisme intellectuel visant les opinions dissidentes. Aujourd’hui, ce monopole idéologique touche à sa fin.

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Comme tous les Français, les enseignants ne se sentent plus en sécurité dans leur pays et aspirent à retrouver l’ordre dans leurs classes mais aussi dans les rues. À ce titre, ils sont de plus en plus nombreux à faire confiance au RN et à adhérer à son programme. Contrairement aux caricatures et aux mensonges répandus par les centrales syndicales, ce programme n’est nullement une menace pour l’école publique.

Ce qui menace dangereusement l’école de la République et ses principes, ce qui provoque les violences, les agressions voire les attentats terroristes, c’est l’islamisme radical. 80 % des enseignants déclarent avoir appréhendé au moins une situation conflictuelle avec leurs élèves, et plus de la moitié des enseignants reconnaissent pratiquer l’autocensure en 2022. Face au danger islamiste, la gauche syndicale pratique le déni voire la soumission. Seul le RN a la volonté politique ferme et intransigeante de mettre fin au « pas de vague » et d’assurer un retour à la sérénité dans les établissements scolaires.

Table ronde organisée par l’association musulmane féministe Lallab :  » Femmes musulmanes et éducation « , 29 mars 2019. (c) D.R.

On ne peut pas accuser le Rassemblement national qui n’a jamais gouverné le pays d’être responsable du déclin de l’école de la République. Ceux qui annoncent aujourd’hui un effondrement annoncé de l’école en cas de victoire du RN, sont les mêmes qui ont exercé, avec les gouvernements successifs, une sorte de gouvernance partagée sur l’institution scolaire durant des décennies. Au lieu de s’attaquer au RN, ils feraient mieux de dénoncer la responsabilité des gouvernements successifs, de droite et de gauche, ainsi que les sept ans de pouvoir d’Emmanuel Macron, qui ont accéléré le déclassement de notre école.

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Notre école est en phase avancée de déliquescence. Après des décennies de réformes intempestives et inefficaces, le niveau de nos élèves n’a pas cessé de s’effondrer : les résultats aux tests internationaux et nationaux (PISA, TIMSS, PIRLS, CEDRE) nous rappellent chaque année le déclin du système éducatif français. 50% des élèves entrants en sixième ne maîtrisent pas la lecture fluide. 11% des jeunes Français qui passent les tests des Journées de défense et de citoyenneté sont en situation d’illettrisme. Un quart d’entre eux connaît des « difficultés de lecture ». Les conditions de travail des enseignants se sont profondément dégradées sur le plan matériel, financier et symbolique.

Non seulement notre diagnostic fait consensus, mais les mesures de notre programme suscitent une forte adhésion chez une partie grandissante du corps enseignant. Ce programme s’articule autour de quelques principes simples : recentrer l’école sur la transmission des savoirs, réaffirmer la double mission de l’école d’ascension sociale et d’assimilation culturelle à la société française, sanctuariser l’institution scolaire en garantissant l’ordre et la sécurité des personnels face aux tensions et violences de la société, revaloriser la condition enseignante pour faire face aux nouveaux enjeux du siècle. Notre école est dans un état d’urgence. L’avenir de notre pays et de nos enfants dépendra de notre capacité à enrayer la déconstruction de notre système scolaire. Si nous n’y mettons pas à un coup d’arrêt, la puissance et la souveraineté de la France en seraient affectées à long terme. Malgré les fractures de la société, l’unité et la cohésion du pays reposent encore largement sur l’institution scolaire, dernière à rassembler tous les enfants de France. L’enjeu est immense, nous y sommes prêts.

Politique: pourquoi nos footballeurs tricolores font bien de la boucler

Marcus Thuram, Kylian Mbappé et Ousmane Dembélé ont déjà pris plus ou moins explicitement position contre le RN au nom de l’équipe, en mettant en avant leurs « valeurs ». Défense de rire (ou de pleurer).


Équipe de France de football: le retour de «caïds immatures»?

« Des caïds immatures qui commandent à des gamins apeurés. » C’est ainsi que la ministre des Sports Roselyne Bachelot s’exprimait à l’Assemblée, il y a dix ans, pour désigner les footballeurs de l’équipe de France qui venaient de faire grève en Afrique du Sud, en pleine Coupe du monde. L’un des plus pitoyables épisodes du sport français, où l’indécence se disputait à la bêtise. On pensait naïvement que ce serait difficile de faire pire. Et pourtant. Une décennie plus tard, nos jeunes Bleus ont donc momentanément délaissé leur console de jeu afin de nous dire pour qui voter ou plutôt ne pas voter, forts d’une noblesse d’âme que le monde entier nous envie et d’une culture historique et politique acquise au terme de nombreuses lectures et d’interminables années d’études.

Même sans Karim Benzema, l’équipe de France garde un goût pour le scandale

À l’heure de l’Euro 2024 et des prochaines élections législatives, le citoyen Marcus Thuram a appelé en conférence de presse, le samedi 15 juin, « à se battre pour que le Rassemblement national ne passe pas », faisant illico la très complaisante Une dominicale du journal L’Équipe, qui s’est étrangement mué en fanzine woke de la France insoumise ces dernières années. « J’ai zéro doute sur le fait que tout le monde (en équipe de France) pense comme moi », tient à préciser le fils du penseur racialiste et accessoirement ex-footballeur Lilian Thuram (lequel développe l’idée que les blancs sont structurellement « racistes sans le savoir » dans son livre La pensée blanche, paru en 2020, et a été accusé rappelons-le de violence conjugale par son ex-compagne Karine Le Marchand). Une précision inquiétante quand on connaît le CV de nombreux joueurs de l’équipe de France, Marcus Thuram inclus.

Trois ans et demi avant de cracher son venin sur l’opposition de droite à Macron, le footeux engagé crachait à bout portant sur le visage d’un adversaire allemand lors d’un match de Bundesliga, qui plus est en pleine épidémie de Covid, ce qui lui vaut cinq matchs de suspension et une lourde amende1. « C’est absolument inadmissible. Je me demande ce qui se serait passé si cela s’était passé dans l’autre sens, s’indigne alors le patron du Bayern Munich et bourreau des Bleus en 1982 à Séville, Karl-Heinz Rummenigge (…) Aurions-nous eu à nouveau un débat sur le racisme ? » 

Sélectionné pour l’Euro, Kingsley Coman appellera-t-il lui aussi à faire front face au RN ? L’attaquant international du Bayern est condamné en septembre 2017 par le tribunal de Meaux à 5 000 euros d’amende pour violences conjugales à l’encontre de son ex-compagne et ex-candidate de télé-réalité, Sephora Goignan. La même année, le défenseur international du PSG Lucas Hernandez est condamné par la justice espagnole à un mois de travaux d’intérêt général et à six mois d’éloignement pour avoir échangé des coups sous l’emprise de l’alcool avec sa dulcinée. En février 2021, le défenseur de l’OGC Nice William Saliba a l’idée géniale de publier sur Snapchat une vidéo datant de son passage en équipe de France des moins de 17 ans, où l’on entrevoit l’un de ses partenaires en train de se masturber nonchalamment. Embarrassée par le bad buzz, la fédération sanctionnera son joueur en roue libre d’un mois sans sélection… avec sursis.

En novembre 2021 le journaliste Romain Molina, connu pour avoir dénoncé de nombreux scandales dans le monde du football notamment dans le New York Times ou le Guardian, prend à partie sur Twitter l’arrière des Bleus et du Real Madrid Ferland Mendy, en publiant l’extrait d’une plainte déposée contre X par peur d’éventuelles représailles. Passablement éméché, le joueur français aurait ramené deux jeunes femmes dans sa chambre d’hôtel avant de faire l’hélicoptère avec son sexe devant ses invitées. Il aurait ensuite saisi la gorge, puis décoché une droite et, une fois à terre, asséné un coup de pied dans la tête de celle qui avait eu l’outrecuidance de se rebeller. La victime sera hospitalisée pour un traumatisme crânien. « Mais son club (a priori Lyon) a réussi à tout cacher, parce qu’il fallait le transférer l’année d’après », ajoute Molina. Ferland Mendy (ne pas confondre avec Benjamin Mendy, autre international français accusé de huit viols outre-Manche et acquitté l’an passé après deux longs procès) n’a à ce jour jamais répondu à cette accusation ni poursuivi en diffamation le journaliste. 

Ousmane Dembélé aussi appelle à « se mobiliser pour aller voter », mais surtout pas pour qui vous savez. Marié à Rima Edbouche, une jeune créatrice de contenus Mode et Lifestyle sur le Net destinés aux femmes voilées (dixit le média marocain Le360), cette grande conscience politique fait scandale à l’été 2019 lors d’une tournée au Japon avec le FC Barcelone. Assis sur le lit de sa chambre d’hôtel aux côtés d’Antoine Griezmann, l’ailier des Bleus se moque des jaunes, en l’occurrence des employés de l’établissement venus installer un jeu vidéo sur la télé. « Toutes ces sales gueule… Pour jouer à PES mon frère, t’as pas honte », pouffe Dembélé en imitant l’accent local devant son coéquipier hilare, avant d’ajouter en filmant les salariés de l’hôtel avec son téléphone : « Vous êtes en avance ou vous n’êtes pas en avance dans votre pays, ouais ?! » Face au tollé que provoque la vidéo, notamment au sein de la communauté asiatique (« Quelle immaturité et manque de respect… on fait quelque chose pour éduquer ces joueurs censés représenter la France ? » s’indigne l’Association des jeunes Chinois de France en interpellant la Fédération française), les deux footballeurs antiracistes font pénitence sur les réseaux sociaux, passage obligé dans ces cas-là.

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Dans une autre vidéo publiée au même moment sur le site officiel du club catalan, on entend également Antoine Griezmann caricaturer grossièrement la façon de parler des Asiatiques. En homme de principe, « Grizou » rompra l’année suivante son contrat publicitaire avec Huawei pour protester contre la répression chinoise des Ouïghours et dénoncera les violences policières en France, n’hésitant pas à interpeller publiquement le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Ballon d’Or 2022, cinquième meilleur buteur de l’histoire chez les Bleus, Karim Benzema coule désormais une semi-retraite aussi paisible que lucrative en Arabie Saoudite, loin du pays de son cœur… l’Algérie. « C’est le pays de mes parents, c’est dans le cœur. Mais bon après, sportivement, c’est vrai que je jouerai en équipe de France », déclarait en décembre 2006 sur RMC et sans forcer son enthousiasme le jeune espoir du football tricolore, qui ne chantera jamais la Marseillaise, allant même jusqu’à lâcher un glaviot lorsque l’hymne français est joué au stade Santiago-Barnabeu de Madrid, à la suite des attentats parisiens de novembre 2015. L’attaquant coche à lui seul toutes les cases du footballeur français du XXIe siècle : citation dans une affaire de proxénétisme de mineures (l’affaire Zahia), condamnation à un an de prison avec sursis et à une lourde amende2 dans l’affaire du chantage à la sextape de Valbuena, son ancien coéquipier chez les Bleus, proches condamnés pour des tentatives d’enlèvement et d’extorsion, envoi de « likes » sur des publications justifiant la décapitation de Samuel Paty et les attentats jihadistes sur les réseaux sociaux, soutien aux habitants de Gaza une semaine après le pogrom du 7 octobre 2023, lien avec les Frères musulmans selon le ministre de l’Intérieur… Certains parlementaires réclameront même sa déchéance de nationalité.

Sorties de route

Parmi les partenaires-citoyens-engagés de Marcus Thuram, le gardien lensois Brice Samba est condamné en février 2016 à six mois de prison avec sursis et dix mois de suspension de permis pour avoir provoqué en sortant de discothèque un accident sur l’autoroute entre Metz et Nancy, blessant légèrement le conducteur de l’autre véhicule. Arrêté avec 1,5 g/l d’alcool dans le sang, le footballeur mentira en prétendant ne pas avoir été au volant cette nuit-là, avant que l’examen ADN du sang retrouvé sur l’airbag ne rétablisse la vérité. C’est avec 1,4 grammes d’alcool dans le sang que Benjamin Pavard est quant à lui arrêté à 2h35 du matin au volant de sa berline par la police munichoise, en août 2022. Celui qui jouait alors au Bayern sera condamné l’année suivante à une suspension de permis et à une amende restée confidentielle. Conduite sans permis et en état d’ivresse, « un classique » pour les joueurs de l’équipe de France selon Romain Molina.

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En septembre 2023, les défenseurs Jules Koundé (déjà auteur d’un tweet contre les violences policières après la mort de Nahel Merzouk trois mois plus tôt) et Ibrahima Konaté s’indignent sur les réseaux sociaux de l’interdiction du port de l’abaya dans les établissements scolaires en partageant une vidéo de l’influenceuse Crazy Sally, laquelle critique la décision du président Macron et dénonce « l’islamophobie » de la France…

Jean-Clair Todibo ne fait en revanche pas partie de la liste des 25 en Allemagne. Ce Guyanais converti à l’islam se distingue avant un match des Bleus contre les Pays-Bas en riant bêtement pendant la minute de silence en hommage aux victimes israéliennes et palestiniennes, moins d’une semaine après le pogrom du 7 octobre. Un rire nerveux, se justifiera le joueur niçois, qui avait accusé son ancien entraîneur Fabien Galtier de l’empêcher de pratiquer le jeûne du ramadan.

Lui aussi converti à l’islam, Paul Pogba ne sait pas s’il pourra un jour rechausser ses crampons. Suspendu quatre ans par le tribunal antidopage italien après un contrôle positif à la testostérone, cet enfant de Lagny-sur-Marne (77) né de parents guinéens est accusé d’évasion fiscale lors du scandale des Football Leaks dévoilé par Der Spiegel en 2016. La star de Manchester United brandit en 2021 un drapeau palestinien à Old Trafford, après un match de Premier League. Menacé à son domicile parisien par des hommes armés la même année, il est victime d’une sombre affaire de « tentative d’extorsion en bande organisée » qui implique son propre frère, Mathias.

« Je partage les mêmes valeurs que Marcus », déclarait dimanche 16 juin en conférence de presse Kylian Mbappé, appelant lui aussi tous les jeunes à voter contre qui vous savez. « J’ai envie d’être fier de porter ce maillot et pas de représenter un pays qui ne correspond pas à mes valeurs. On a besoin de s’identifier à nos valeurs, de mixité, de respect, de tolérance… » C’est donc sans doute au nom de ces valeurs que la star du football français dédicace son maillot et pose fièrement aux cotés du champion russe de MMA Khabib Nurmagomedov, après un match de Ligue des champions à Barcelone, en février 2021.

Apparemment partisan d’un islam modérément modéré, le bourreur de pif du Daghestan s’en était pris quelques mois plus tôt très violemment à Emmanuel Macron, qui avait osé défendre le droit à la caricature après l’assassinat de Samuel Paty. « Que le Tout Puissant défigure cette ordure et tous ses disciples qui au nom de la liberté d’expression insultent la foi de plus d’un milliard et demi de musulmans […] Croyez-moi, ces provocations auront pour eux de graves conséquences car les pieux ont toujours le dernier mot », lâche alors sur les réseaux sociaux l’ami humaniste de Mbappé en publiant une photo du visage du président français, recouvert d’une trace de pied. Ce message abominable, a fortiori dans de telles circonstances, est notamment « liké » par plusieurs joueurs sélectionnés en équipe de France (Karim Benzema, Presnel Kimpembe, Mamadou Sakho, Timoué Bakayoko), mais les médias et L’Équipe en tête préféreront mettre la poussière sous le tapis.

En juin 2023, Kylian Mbappé s’indigne de la mort de Nahel, « petit ange parti trop tôt », prélude à plusieurs jours d’émeutes dans toute la France. Comme d’ailleurs tous ses coéquipiers, l’attaquant des Bleus n’aura en revanche jamais un mot pour rendre hommage à Samuel Paty, Dominique Bernard, la petite Lola, le jeune Thomas de Crépol ou encore pour les civils victimes de la sauvagerie du Hamas le 7 octobre. Pas un mot.

En juin 2024, une bande de jeunes pieds nickelés immatures, vulgaires, incultes, et parfois même malfaisants, se permettent donc de faire la leçon aux Français, un signe parmi tant d’autres que l’heure est vraiment grave.

La France vient de sortir des phases de poules de l’Euro en étant 2e du groupe D après l’Autriche, et après un match nul frustrant face à la Pologne. Elle démeure favorite de la compétition. Allez les Bleus ?

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  1. Marcus Thuram se voit infligé par son club, le Borussia Mönchengladbach, 150 000 euros d’amende en sus des 40 000 euros de la Fédération allemande ↩︎
  2. Reconnu coupable, Karim Benzema est condamné par le tribunal de Versailles à verser 75 000 euros d’amende, ainsi que 80 000 euros à Mathieu Valbuena ↩︎

Contre le RN: les incendiaires de luxe ou bas de gamme…

Tout ce que notre pays compte de sommités intellectuelles ou de célébrités trouve urgent de faire savoir au bon peuple que c’est très mal de voter RN.


À partir du moment où son choix politique est fait pour le 30 juin et le 7 juillet, on a tout loisir pour questionner la périphérie de la campagne des élections législatives. Parce que, contrairement à ce que croient certains, la démocratie ne consiste pas seulement à avoir le droit formel de s’exprimer, dans une égalité médiatique apparente, mais devrait profondément assurer, jusqu’au jour du scrutin, un équilibre tant officiel qu’officieux, aussi bien réglementé que spontané. On en est loin. Certes, par rapport au second tour de l’élection présidentielle ayant opposé Jacques Chirac à Jean-Marie Le Pen, qui a été, de mon point de vue, un vrai scandale républicain, le climat d’aujourd’hui est beaucoup moins choquant. Je me sens d’autant plus libre pour interroger les distorsions actuelles que je suis persuadé qu’un rouleau compresseur trop ostentatoirement hostile contribue au succès de la cause adverse. À moins d’un revirement absolu, il me semble que c’est ce qui se déroule avec le RN, loin devant Renaissance et plus modérément devant le Nouveau Front Populaire (NFP) qui sauve les meubles grâce à son unité superficielle.

A lire aussi, Didier Desrimais: Petit tour d’horizon des inquiétudes du «monde de la Culture»

Marianne James et Marcus Thuram semblent presque se réjouir de la situation

Il n’empêche que, si on avait droit à l’ironie, il est frappant de voir comme les périodes de danger réel, surestimé ou fantasmé font pulluler les incendiaires de luxe ou bas de gamme et, pour ces derniers, des personnalités qui profitent des circonstances pour se constituer une petite gloire personnelle. Je songe notamment à Marianne James qui conseille de ne pas voter en faveur du RN parce que celui-ci ne connaîtrait pas l’Histoire de France. Sans pouvoir déterminer au nom de quel savoir et quelle légitimité elle s’exprime avec tant de condescendance, elle représente un exemple de ces anonymes ou de ces artistes sortant de leur lumière très spécifique pour une aura résultant d’un engagement conjoncturel et confortable. Marcus Thuram a perdu son énergie sportive en nous donnant un conseil qu’on ne lui demandait pas. Lui aussi s’est cru autorisé à nous dissuader du RN ! On a l’impression que l’actualité offre, à ces humanistes fortuits, le rôle éphémère de directeurs de conscience, la formidable opportunité de se muer en donneurs de leçons, en guides, en vigies, de faire passer leur dénonciation pour une vérité objective à suivre à la lettre. Ils se poussent du col en changeant de registre. Cette troupe qui surgit, individuellement ou en masse, dans les temps de crise effervescents, est composée de ceux que je nomme les incendiaires bas de gamme. Ils jettent leur huile sur un feu dont on finit par se demander s’il ne les réjouit pas.

Épidémie de tribunes alarmistes et de pétitions

Mais il y a aussi des incendiaires de luxe qui, certains de leur importance, emblèmes médiatiques contestables mais perçus irremplaçables, projettent sur une réalité qu’ils divisent, les lumières pour leur camp, les ombres contre le RN, un soufre dévastateur.

L’incarnation la plus achevée de cette pente est présentée par le journal Le Monde qui, en particulier dans son numéro daté du 23 et 24 juin, a fait preuve d’une totale hypocrisie démocratique, consistant à aggraver des orages qu’on prétend redouter, en mettant en œuvre une démarche poussant jusqu’à la caricature la description d’un futur qualifié systématiquement d’alarmant. La trinité dont ce quotidien, en l’occurrence, nous gratifie, est faite d’information, de l’expression substantielle de son opinion – je n’y trouve rien à redire d’autant plus que cette dernière est chaque jour parfaitement et tranquillement prévisible – d’une sorte d’humanisme mou et progressiste insoucieux des peurs et des attentes populaires. Mais surtout, dans le numéro concerné, d’une considérable dose d’excitation, tant par les analyses des journalistes que par les intervenants et les tribunes choisis. En effet, comme citoyen soucieux de l’éthique républicaine, j’estime que cette incitation constante à sortir le RN – contre la réalité parlementaire et la dédiabolisation opérée par la fille contre le père – de l’espace démocratique est perverse, créatrice de troubles et de désordres. Elle est de nature à valider les oppositions même violentes au vote majoritaire et, pire, la guerre civile au nom de l’idéologie, des suspicions et des procès d’intention.

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Il y a une responsabilité morale de ce média, et de tous, à ne pas user de l’information et de l’opinion pour attiser un feu dont la France n’est que trop friande. Comme si elle était incapable d’accepter, en politique, des contradictions paisibles. Le Monde qui se veut une référence en est très loin sur ce plan.

Il n’est pas seul. Quand on consulte et lit chaque jour Mediapart comme moi, on est effaré par une politique de la haine : obsessionnellement les mêmes cibles, le RN, la police, les mêmes apologies, l’extrême gauche, les délinquants toujours victimes avant d’être coupables ! La dernière recrue dans ces incendiaires somptuaires est Dominique Strauss-Kahn qui, oubliant ses errements privés et la social-démocratie dont il avait été un représentant emblématique, a appelé à voter pour le Nouveau Front Populaire risquant d’être dominé par LFI irresponsable sur le plan économique et immoral car antisémite. Surprenant arbitrage !

Croire que l’ironie serait décente sur de tels sujets n’est pas acceptable. Ces incendiaires de luxe ou bas de gamme démontrent qu’il existe une certaine manière lamentable de faire monter le RN : en étant des pompiers pyromanes.


Elisabeth Lévy : « La France souffre d’une pathologie chronique, la pétitionnite »

Comment Emmanuel Macron attise la guerre civile

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Et si les prévisions les plus pessimistes de notre chroniqueur se révélaient finalement exactes ?


La guerre civile ? Emmanuel Macron la promet s’il perd son pari, insensé, d’un « sursaut » autour de sa personne à l’issue des législatives. Dans un podcast du 21 juin pour le site « Génération do it yourself », le président prévient qu’une victoire du Nouveau Front Populaire ou du RN-Ciotti (LR), le 7 juillet, « mènerait à la guerre civile ».

DR.

Quand, en 2016, j’ai publié La guerre civile qui vient chez mon ami aujourd’hui disparu Pierre-Guillaume de Roux, j’ai eu droit aux haussements d’épaule des médias et autres professionnels du déni. Aujourd’hui, j’écrirais le même livre avec les mêmes mots. J’y ajouterais toutefois un chapitre sur le pyromane arrivé à l’Élysée en 2017.

Quand Darmanin passe aux aveux

En effet, l’accélération des fractures nationales lui doit beaucoup. Pour avoir théorisé dès son premier mandat l’affrontement entre progressisme et populisme, le chef de l’État a attisé les tensions avec le peuple ordinaire, sommé de se taire et de disparaître. A l’époque j’écrivais, bien avant la révolte des gilets jaunes[1] : « (…) Macron, qui ne peut réprimer le mépris que lui inspire la France reléguée dans les périphéries, fait tout pour l’exacerber. À moins qu’il ne se corrige rapidement, son règne finira en cauchemar ». On y est. Mardi, sur Europe 1, Gérald Darmanin a enfin déclaré : « Écoutons notre peuple qui souffre. L’élite a fait sécession. Les gens qui dirigent n’habitent plus parmi le peuple ». Admettons la sincérité de l’aveu tardif. Il n’est néanmoins pas celui du président, qui persiste à jouer avec les peurs pour s’accrocher au pouvoir. Après avoir divisé les gens entre déracinés et enracinés, ceux « qui ne sont rien » et ceux qui savent tout, vaccinés au QRCode et parias non vaccinés, le voici qui ose se poser en rassembleur, en s’exonérant des déchirures françaises. Or si la guerre civile déboule demain, menée par ceux qui refuseraient le verdict des urnes, elle viendrait de sa « société ouverte » appuyée par la gauche islamophile.

Fantasmes de gauche

A dire vrai, Macron n’est pas le seul incendiaire. Même la gauche prétendument modérée continue à déverser ses bidons d’essence sur la cohésion nationale en insultant les électeurs excédés qui se tournent vers la droite nationale. Dans Le Monde du 24 juin, Laurent Berger (ex-CFDT) déclare, en justification de son appui au Front de la honte : « Je crois que, progressivement, le RN veut nous faire glisser vers une société totalitaire ». Il avait brandi cette même menace d’un totalitarisme fantasmé pour accabler la révolte des gilets jaunes, cette classe moyenne occultée, coupable aux yeux des « élites » de relever la tête du fond des provinces oubliées.

Ma détestation de tout système totalitaire m’en fait volontiers déceler les signes précurseurs dans les discours et les mouvements.

Je ne les vois pas dans ce réveil démocratique, mené par un peuple calomnié qui semble déterminé à reprendre son destin en main. Le couple Bardella-Ciotti ne parait pas enclin au sectarisme ni au despotisme. En revanche le front de la gauche, rejoint par Berger et une palanquée de « consciences » (intellectuels, magistrats, enseignants, journalistes, ONG, etc.) appelant à la désobéissance civile en cas de victoire du RN, est bel et bien traversé par des courants violents, sectaires et antisémites qui vont craindre une dérive totalitaire et une « insurrection d’atmosphère ». Ce sont eux qui portent la guerre en France.

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[1] Macron : la grande mascarade (L’Artilleur)

«Le RN devenu bonapartiste s’est installé au cœur de l’imaginaire français en tenant ensemble les questions nationale, sociale et européenne»

Entretien avec le politologue Stéphane Rozès, auteur de Chaos, essai sur les imaginaires des peuples 


Causeur. Alors, que pensez-vous de cette déflagration qu’a été dès le soir des européennes l’annonce de ces législatives de dissolution ?

Stéphane Rozès. Cet apparent coup de tonnerre vient d’assez loin. La décision de la part du président Macron de dissoudre, provient sans doute d’une blessure narcissique, mais pas seulement. Le président s’attendait aussi à des admonestions de l’UE sur l’état de nos comptes et avait également la volonté d’écarter le spectre d’une motion de censure LR-RN-LFI à la rentrée lors du vote du Budget. C’est une stratégie destinée à épuiser le RN à Matignon en cas de cohabitation. Cela, de sorte que Marine Le Pen ne l’emporte pas à la présidentielle…
En tout état de cause, est remonté des profondeurs du pays un désaveu d’Emmanuel Macron datant de la présidentielle de 2022 et qui recompose le paysage politique de façon accélérée. La présidentielle ne s’est pas déroulée dans le rite habituel du déploiement d’une dispute politique commune permettant de réactiver l’imaginaire français et de nouer un lien fort et légitime entre le président et les Français. De sorte que dès les législatives de 2022, le président Macron n’a pas pu dire au pays : donnez-moi les moyens de mettre en œuvre le projet, le contrat que nous avons passé ensemble. Il n’y en avait pas. Emmanuel Macron avait abusé de la peur de la pandémie et de la guerre en Ukraine pour être élu comme par évidence. Il n’a pas mené campagne et il n’a pas eu de majorité au Parlement. Cela a transformé le parlement en foire d’empoigne, attisée par la stratégie de la tension que met en œuvre Jean-Luc Mélenchon. Sans légitimité politique, le président a recouru au 49.3 lors de la réforme des retraites contre la nation et les partenaires sociaux.
Dans le même temps, le quotidien des Français sur ce qu’il advient (la baisse du pouvoir d’achat, la hausse de l’immigration, de l’insécurité, le retrait et dégradation des services publics, la guerre en Ukraine, l’importation du conflit israélo-palestinien, le communautarisme et l’antisémitisme) les met dans un état de sidération et remet de façon encore plus vigoureuse qu’auparavant la question de la maîtrise de notre destin au cœur des attentes politiques.

En quoi cela profite-t-il au RN ?

Le RN s’est éloigné du FN néofasciste et nationaliste en abandonnant depuis les Européennes de 2019, l’idée de « Frexit » pour en venir à une position gaullienne d’Europe des Nations. Marine Le Pen a opéré cette mutation contre son père, en mettant le RN dans le giron de la République, en reprenant l’idéal du bonapartisme. C’est-à-dire le fait de s’adosser à la nation, sa souveraineté, en dépassant les clivages gauche/droite, en installant un lien direct entre le leader et le peuple sous une forme plébiscitaire, instaurant l’autorité de l’État en matière régalienne, économique et sociale.
Le RN s’est mis en cohérence avec l’imaginaire français et son point d’équilibre idéologico-politique actuel. Il le fait en articulant les questions nationales, sociales et européennes.
Le bloc des gauches, lui, oppose question sociale et nationale. Le bloc néolibéral d’Emmanuel Macron fait découler la nation de l’UE néolibérale. Or l’évacuation du cadre national est vue comme un aveu d’impuissance et une absence de protection. Ces enjeux résonnent de façon très prosaïque avec le quotidien des Français. Le RN, ancré dans les catégories populaires, a su faire le lien.

C’est-à-dire ?

Les deux priorités dans les motivations de vote, très largement devant tout le reste, sont d’abord le pouvoir d’achat et l’immigration. Concernant le pouvoir d’achat, le vécu des citoyens est que les prix augmentent selon des logiques de marché ou de tarifications de l’énergie qui échappent aux gouvernants lesquels se sont dessaisis de leurs prérogatives dévolues à des instances « indépendantes » et aux gouvernances néolibérales de l’UE.
Au fond, la hausse des prix viendrait de l’extérieur. Là où l’Europe et la nation devraient protéger des chocs extérieurs, la France semble être ouverte aux quatre vents et l’Europe les amplifie.
La question de l’immigration, n’est pas seulement vécue comme étant un problème social de concurrence capital/travail. Elle n’est pas seulement vécue comme générant de l’insécurité. Elle est vécue comme un danger culturel d’abord à cause de l’islamisme qui progresse en France parmi les arabo-musulmans qui constitue l’essentiel de l’immigration.
La République semble ployer sous les assauts communautaristes relayés par LFI et les wokistes, la laïcité est attaquée du fait de l’islamisme, le terrorisme est en majorité endogène et l’École ne semble plus transmettre la citoyenneté.
Finalement, au travers de ces deux enjeux essentiels, se pose la question de la maitrise des peuples de leurs us et coutumes. Dorénavant cette dimension culturelle pénètre dans les études qualitatives l’électorat traditionnel de la gauche. Les deux tiers des Français estiment qu’« on ne se sent plus en France comme chez soi. ».
La question de la souveraineté nationale, que le RN semble porter seul, fait le lien entre les questions culturelle et sociale et le cadre républicain. Des questions essentielles dans les territoires laissés à l’abandon par la République et les services publics, donc concernant tous les habitants qui vivent hors métropoles.

Selon vous, le fait d’avoir pris de vitesse tout le monde pour se donner les meilleures chances de renverser la table n’avait aucune chance d’aboutir à une sortie par le haut ou à un pari gagné ?

Des législatives de dissolutions sont vécus comme une présidentielle. Lors de la dissolution de 1997, les sondages quantitatifs disaient effectivement que le président allait gagner car les Français pensaient que Jacques Chirac allait s’expliquer sur l’abandon de la « lutte contre la fracture sociale » et réorienter son action. Mais pour que la victoire se réalise, mes sondages qualitatifs confidentiels préconisaient qu’il fallait que ce soit le président Chirac et non Alain Juppé qui mène la campagne… Or Pilhan et lui n’en firent rien. On sait ce qui advint.
Dans cette dissolution, le problème pour les Français c’est le président Macron. Il devait être en première ligne, accuser réception des messages du pays et dire en quoi et comment il allait changer de façon de gouverner et préciser son orientation. Il a fait l’inverse. Il a mis les Français au pied du mur en leur disant :  « Je vais globalement continuer ma politique en étant plus attentif. Mais vous, êtes-vous sûrs de vouloir vous en remettre aux dangereux extrémistes du RN et du NFP, qui vous conduiront au chaos ? » Le problème est que pour une majorité de Français, le chaos est déjà là ou va advenir de toute façon très rapidement. Le sentiment populaire est que la France s’affaisse dans tous les domaines et au sommet de l’État. La cécité présidentielle va entrainer une sévère défaite si on en croit les instituts de sondages.

Et ils font confiance au RN pour y remédier ?

Disons prudemment que le RN semble être la formation qui est la plus adaptée à la situation. Mais attention, c’est le RN qui a muté vers les Français. C’est le bas qui fait le haut. Il n’y a pas de lepénisation des esprits, ni par les autres formations politiques qui « trianguleraient », ni par des médias, ou les réseaux sociaux, ou par des influences et désinformations étrangères. C’est le processus inverse. Le cours des choses en politique procède des expériences collectives des Français dans leur quotidien. Les formations politiques sentent plus ou moins ces évolutions. Celles qui le peuvent le plus facilement sont celles qui sont le plus éloignées du Paris politico médiatique et des institutions. Celles qui ont leurs capteurs dans les catégories populaires. Voilà ce qui a fait la force du RN : son ancrage dans les catégories populaires. S’il décroche des ouvriers, employés et classes moyennes paupérisées ; il disparaitra plus rapidement qu’il n’a pris du temps pour muter de formation néofasciste à bonapartiste, à l’instar du RPF ou du premier RPR.

Et maintenant, que peut-il se passer ?

La situation est instable. La France est rentrée dans une phase historique de décomposition-recomposition politique autour de la question de la souveraineté nationale. Mais son intrication avec l’UE rend la situation chaotique d’autant que le sommet de l’État n’est pas indexé à l’imaginaire de la nation, à ses intérêts ; d’où notre déclin économique, social et l’affaissement de l’autorité de l’État.
Si on en croit les intentions de vote, le RN aura soit une majorité relative, soit une majorité absolue. La RN a dit ne vouloir cohabiter que dans ce dernier cas. Il ne veut pas être dépendant de forces de droite, en rupture avec son orientation sociale et avoir deux fronts ; celui de la cohabitation avec le président Macron adossé à l’UE et celui de l’Assemblée.
Une cohabitation Macron-Bardella serait tendue. Contrairement aux cohabitations Mitterrand-Balladur et Chirac-Jospin qui avaient su y mettre les formes, aidées par des proximités notamment en matière européenne. Aujourd’hui les positions divergent fortement.
Le RN veut réorienter de l’intérieur l’UE avec des alliés en son sein. Le président Macron voudra spontanément au contraire s’adosser à l’UE pour contenir le Premier ministre Bardella. D’une part il n’en aura pas la légitimité politique, et d’autre part les institutions ne définissent pas vraiment un domaine réservé pour le président en matière internationale.
Le Premier ministre a de facto l’essentiel des leviers en la matière et notamment le levier militaire. Jordan Bardella a fixé comme ligne rouge en cas de cohabitation le refus du RN d’envoyer de troupes françaises au sol en Ukraine.
Si le RN avait une majorité relative, alors la Chambre devrait être ingouvernable. Au vu de l’arithmétique, du fait du poids du RN et LFI, je ne vois pas une majorité à l’Assemblée pour un gouvernement du bloc central avec des alliés PS et LR.
Nous irions alors au titre de l’article 7 vers un retrait du président avec un gouvernement purement technique, de gestion des affaires courantes, et les Français seraient appelés aux urnes à la rentrée pour une présidentielle.
L’esprit des institutions voudrait que le président Macron se retire en cas de défaite importante aux législatives. Un président Macron « accompagnant » un Premier ministre Bardella semble difficile à assumer pour la « voix de la France », déjà décrédibilisée sur le plan international. Les institutions sont fortes mais ne supporteraient pas un affrontement au sommet de l’État. Pour éviter une crise institutionnelle, le président devrait alors sinon jouer un rôle purement formel. Le pourra-t-il ?

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Oui, il faut parler à tous les partis politiques…

Les problèmes actuels de la France ont pour la plupart des origines dans le domaine économique. Et pourtant, on parle très peu d’économie dans cette campagne électorale, et quand on le fait, c’est en faisant preuve d’une grande ignorance du sujet, surtout de la microéconomie… Ah si seulement ceux qui s’y connaissaient parlaient haut et fort! Si seulement on les écoutait… Une tribune de Sophie de Menthon.


Cette guerre des clans, certes compréhensible, est une stupidité, surtout en ce moment. « Il ne faut pas parler aux cons, ça les instruit » disait Audiard, et cette répartie hilarante est devenue règle d’or ! La France est à l’image du banquet d’Astérix, c’est-à-dire une guérilla permanente qui fait tache d’huile. Les meilleurs amis ne se parlent plus, et les repas de famille sont à éviter avant le deuxième tour. Tous les commentaires de la presse ne font qu’empirer les choses. Tout contact est devenu le pseudo-signe d’un ralliement honteux. Quant au mouvement Ensemble pour la République, supposé fréquentable, il est l’objet de toutes les rancœurs haineuses. 
Tous les patrons, entrepreneurs et représentants patronaux devraient parler et expliquer à tous les opposants les rudiments d’une économie « normale » et viable, avec ce qui est nécessaire à la survie des entreprises et donc d’une économie de croissance. Pourtant, la plupart d’entre eux se cachent en se pinçant le nez devant les médias, se contentant de chasser d’un geste de mépris les sorcières de l’extrémisme.
Il ne faut pas s’étonner que les courageux prêcheurs de l’économie de marché se dérobent au lieu d’aller expliquer ce qui ne va pas dans un programme politique démago et hors sol. Guettés par la presse, systématiquement suspectés de pactiser avec l’ennemi et de soutenir le parti auquel ils tentent d’expliquer les conséquences de ses largesses programmatiques, ils rasent les murs pour ne pas être cloués au pilori de la bien-pensance.

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La crise que nous vivons est largement due à une ignorance économique crasse. Il faudrait instruire les politiques de tous bords. À commencer par ceux sortis de l’ENA qui ne s’est apparemment jamais penchée sur la micro-économie. Les écoles de commerce évoluent un peu plus vite mais à peine, la macroéconomie étant seule digne d’estime, ce qui nous vaut bien des leçons d’économistes de plateaux TV. Ces derniers sont certes respectables mais ils ne parlent pas aux épiciers que sont les petits patrons. Ceux qui représentent l’État croient tout savoir et prennent des décisions sans jamais consulter le terrain, estimant que le fait de convoquer les « organisations syndicales représentatives » autour d’une table à Matignon suffit amplement. Aucun retour, aucune évaluation sur ce qui a été décidé, seul le constat d’échec final servira… et encore !
Ignorance et indifférence économiques se retrouvent à tous les niveaux de notre système d’éducation : écoles (ne parlons pas des manuels scolaires qui s’intéressent plus au droit de grève qu’aux conditions du succès entrepreneurial), facs, professeurs plutôt anticapitalistes, grandes écoles… Les stages sont la seule voie de sauvetage du malheureux étudiant. Les journalistes n’ont guère plus de culture économique et le peu qu’ils ont est mélangé avec des convictions de générosité sociale. Ajoutez à tout cela la culture de la gratuité : « C’est gratuit, c’est l’État qui paie » (François Hollande), ainsi que l’adage national préféré de la gauche dans son ensemble consistant à « prendre l’argent où il est », et enfin la conviction selon laquelle « quand il n’y a plus d’argent, il y en a encore », et vous obtenez une dette abyssale qui est à combler. En prenant aux riches, bien sûr !

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Rappel : c’est l’entreprise avec ses salariés qui finance tout, absolument tout ! Il y a donc bien quelqu’un qui paie ! 
Il faut expliquer, expliquer encore, faire l’éducation de ceux qui prétendent avoir la science infuse et oser rencontrer les responsables politiques qui veulent bien écouter et – pourquoi pas ? – faire modifier leurs promesses… Donner des chiffres à coups de milliards ne suffit pas lorsque l’ignorance règne.
Il faut donc entrer en résistance contre cet état de fait et, comme pendant la Résistance, sortir masqués pour parler à ceux qui imposeront les règles de marché de demain… On apprendra aussi peut-être que ceux qui briguent le pouvoir ne sont pas aussi infréquentables qu’on le dit, et sont souvent demandeurs ! Courage : ne fuyons pas !

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Mélenchon et la Terreur

Ne vous fiez pas à la fausse bonhomie de son très proche Manuel Bompard, dépêché hier soir sur TF1, pour le remplacer face à MM. Attal et Bardella. Ne vous fiez pas aux pleurnicheries de cette « tortue sagace » qui affirme que ses partenaires politiques aiment le « torturer » et l’ « humilier ». Mélenchon les méprise, et les trouve médiocres. Si la baroque alliance du Nouveau Front Populaire dominée par LFI remportait les législatives, le leader de l’extrême gauche entend bien aller à Matignon.


Lundi soir, dans « l’Évènement, l’interview » – Législatives 2024, sur France 2, Jean-Luc Mélenchon a répondu en direct aux questions de Caroline Roux. Le vieux loup gris est apparu tel qu’en lui-même, sans même prendre la peine de se travestir dans le déshabillé de la Mère-grand. On l’a entendu éructer, babines mousseuses et retroussées sur des canines encore tranchantes. L’histrion aussi patelin que goguenard et menaçant, sans nous épargner ses habituelles rodomontades, s’est répandu en imprécations et autres anathèmes pour nous donner l’un de ses meilleurs numéros. À l’issue de la prestation du bateleur, et c’est toujours ça de pris, ni les ralliés à LFI qui se sont compromis dans le Nouveau Front Populaire ni leur électorat ne douteront plus de l’aspiration farouche du Lider minimo à accaparer un pouvoir qu’il prétend, sans convaincre personne, ne pas désirer pour lui mais qu’il accepterait, bien sûr, s’il se trouvait dans l’obligation de faire don de sa personne à la France.

Il est très show, Méluche !

Le show aura aussi eu le mérite d’édifier sur les joyeux projets pour la France de notre saltimbanque et de ses affidés.  Le drille m’a rappelé le Marat des Mémoires d’outre-tombe, (Livre neuvième- Chapitre 3) décrit par mon cher Chateaubriand : « (…) l’embryon suisse Marat, les pieds nus dans des sabots ou des souliers ferrés, pérorait le premier en vertu de ses incontestables droits. Nanti de l’office de fou à la cour du peuple, il s’écriait avec une physionomie plate et ce demi-sourire d’une banalité de politesse que l’ancienne éducation mettait sur toutes les faces : « Peuple, il te faut couper deux cent soixante-dix mille têtes ! », « Caligula de carrefour ».

Recension de l’épisode savoureux.

Caroline Roux, pour chauffer le briscard madré, a d’abord évoqué la déclaration faite par ce bateleur sans vergogne lors d’un récent meeting : « J’ai l’intention de gouverner ce pays » et le peu d’enthousiasme suscité par celle-ci chez les coalisés contre « l’essstrêssme droite » et leurs soutiens dont François Hollande, Lionel Jospin, Fabien Roussel, Marine Tondelier, Raphaël Glucksmann. Notre birbe encore gaillard s’est alors insurgé avec véhémence contre les attaques que lui infligent les médiocres et les évincés du Nouveau Front Populaire qui « cherchent à le torturer, l’humilier le plus possible » au lieu de s’aplatir, comme il se doit, devant son auguste personne qui garantit le vote musulman : « Mélenchon, c’est un nom qui fait ouvrir les portes quand on est dans les quartiers populaires », assure-t-il. Il poursuit, cherchant à intimider ses partenaires achetés : « Je dis à Olivier Faure : attention, si les électeurs insoumis ne viennent pas voter pour toi, tu ne seras pas élu. » Un seul mot d’ordre pour Mélenchon qui se considère, sans vanité, précise-t-il, comme « l’atout » indispensable à la victoire de la gauche : soumettez-vous aux Insoumis. Il ajoute ensuite qu’en raison de son « expérience » corrélée à son « caractère », lui seul est susceptible de faire plier ces salauds de riches pour les forcer à accepter le nouvel impôt sur la fortune et l’impôt universel sur les sociétés étrangères. Que les blaireaux besogneux des classes moyennes qui se sont fourvoyés au RN se rassurent : « en dessous de 4000 euros, personne ne paiera plus. » Il n’est question, en fait, que de faire raquer les autres: « on rentrera plus d’argent en mettant moins à contribution les classes moyennes » ; avec 8% des plus riches, on financera le programme. Et que ceux qui « ne veulent pas donner un rond » et qui ne connaissent « pas plus le prix du malheur que celui du bonheur » aillent se faire lanlaire !

Il pense pouvoir arrêter Poutine en une nuit

Quand il sera question, plus tard, du tropisme antisémite de notre homme, on ne pourra qu’apprécier sa défense, convaincante, indubitablement : « Pour d’innombrables raisons je ne peux rien avoir avec l’antisémitisme et d’ailleurs je ne vois pas pourquoi je serais antisémite. » Et puis, rappelle ensuite le drôle, montant dans les tours et vociférant pour dissimuler sa diversion, les considérations de boutiquiers sordides, ennemis de genre humain, de la fraternité universelle, de la féminitude et des minorités intégrées dans un pays désintégré, demeurent dérisoires au regard de la guerre qui menace sur tous les fronts et dont tout le monde est responsable, excepté, on s’en doute, LFI et ses sbires. « Nous avons 2000 militaires sur le front de l’est, nous sommes exposés parce que nous avons 700 militaires au Liban, ensuite parce que les territoires de Polynésie et compagnie dans l’océan Pacifique nous exposent en première ligne. » « Tout ce qu’on raconte peut s’arrêter en une nuit si on va trop loin dans l’escalade. », conclut le démagogue, lapidaire. À la dernière question posée par Caroline Roux : « Si le RN arrive aux responsabilités et obtient la majorité absolue, respecterez-vous le verdict des urnes ? », on frémit à réponse de notre républicain : « Par définition, oui (…) qui a peur du peuple souverain n’est pas un démocrate. » Notre « tortue sagace » (Mélenchon se qualifie ainsi) se couplant à l’anguille retorse, précise : « Ça sera à nous de bien nous assurer que le RN respecte la République et ses principes fondamentaux. » On imagine que Mélenchon et ses séides ont une manière toute subjective d’envisager la chose…

Fervente lectrice de Chateaubriand, je ne doute pas de la portée des élucubrations narcissiques du sieur Mélenchon (Qui n’aspire qu’à nous rejouer la Terreur) sur un peuple chauffé à blanc qui ne demande, par conséquent, qu’à investir la scène et m’en inquiète, sachant que : « (…) pris collectivement, le peuple est un poète, auteur et acteur ardent de la pièce qu’il joue ou qu’on lui fait jouer. Ses excès ne sont pas tant l’instinct d’une cruauté native que le délire d’une foule enivrée de spectacles (…) » Mémoires d’outre-tombe, (Livre neuvième – Chapitre 4). Peut-être en est-il de notre Cinquième République comme il en fut autrefois de la royauté. Mais, sans doute, Jean-Luc Mélenchon devrait quand même garder en mémoire, la fin de Danton, Marat, Camille Desmoulins, Fabre d’Églantine ou de Robespierre…

Aux urnes, citoyens!


Après un bref passage par l’isoloir, cette sorte de confessionnal profane où, juste avant le geste décisif et pour quelques instants, on peut enfin s’offrir le vrai luxe de n’être pas sous influence, on se dirige enveloppe en main vers l’urne et sa garde d’exemplaires citoyens plus ou moins commis d’office.

L’urne. Pas grand-chose. Juste un cube, traditionnellement en bois. Aujourd’hui, obsession de la transparence oblige, il est fait d’une matière qui permet d’en voir le contenu, de s’assurer qu’aucun génie malveillant et truqueur ne s’y cache. Ce nouveau modèle se veut technologiquement avancé puisque le voilà muni d’une poignée qu’on abaisse pour faire passer l’enveloppe du vote. Cela lui donne un petit air de machine à sous, de bandit manchot. On ne confondra pas pour autant le jeu démocratique avec celui du casino. Quoique… Pour l’élu, celui qui est parvenu à la remplir, cette urne, ce qui l’attend au bout du bout n’est pas loin de ressembler une sorte de Jackpot. Echarpe tricolore, cocarde au pare-brise, place numérotée à l’Assemblée, salut militaire du garde champêtre, place de choix au bal des pompiers, etc. Considération assurée, du moins jusqu’à une époque récente. Aujourd’hui, l’affaire est moins simple. L’élu devient lui-même fort souvent une espèce d’urne sur pattes dans laquelle viennent se déverser les ressentiments, les colères, les insatisfactions, les rancoeurs de ses concitoyens. Pauvre de lui.

À lire aussi, Elisabeth Lévy: Aux armes, citoyennes!

Pour les recalés du scrutin aux ambitions réduites en cendres, on peut dire que ce cube vire d’un seul coup d’un seul à l’urne funéraire. Elle l’est aussi fort souvent, du moins à ce que prétendent les ronchons de profession, pour les espérances – si souvent déçues – de l’électeur, le pauvre bougre qui s’est laissé gagner par l’ébriété de la foire aux promesses d’avant scrutin.

Il n’empêche, y glisser son mot demeure bel et bien le geste à la fois le plus simple et le plus sacré de la vie démocratique. On ne s’en privera donc pas…

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La Marge Brute d’Autofinancement, arbitre des programmes économiques 2024

La marge brute d’autofinancement (MBA) des entreprises françaises s’est dégradée de façon lente mais inexorable depuis trois décennies, sous la pression fiscale et sociale publique. 1 000 milliards d’euros de décalage de production de richesse sur une décennie. C’est l’explication de l’insuffisance des moyens financiers des entreprises françaises par rapport aux entreprises allemandes pour financer leurs développements industriels, leurs développements commerciaux à l’exportation, le paiement de bonnes rémunérations à leurs salariés, la promotion de formations adaptées ainsi que le soutien de la recherche et de l’innovation du pays. C’est ainsi une des principales explications de la perte de compétitivité de la France et de la dégradation du pouvoir d’achat des Français. Les programmes économiques pour les élections législatives sont ici analysés sous le prisme de leur impact sur la MBA. Les conclusions sont claires et sans appel.


La MBA, un concept macro-économique peu glamour

MBA : Marge Brute d’Autofinancement des entreprises. Pas très glamour comme concept ! De plus, il s’agit d‘un agrégat de comptabilité nationale et non de comptabilité privée. Donc, encore plus incompréhensible pour le commun des mortels.
Les économistes attitrés – à part quelques individualités comme Christian Saint-Étienne, par ailleurs membre du shadow cabinet d’Éric Ciotti au temps où LR n’était pas encore éclaté – ne suivent pas vraiment cet agrégat économique. Il est proche de l’EBE (excédent brut d’exploitation) de la comptabilité privée, qui est lui même le presque équivalent du célèbre EBITDA anglo-saxon (Earnings Before Interest, Taxes, Amortization and Depreciation, cela ne s’invente pas) des business plans – plans d’affaires en bon français – qui ont envahi les sphères publiques et privées de notre pays.

La meilleure illustration du lent et inexorable déclin français

Pourtant, l’évolution de la MBA des entreprises françaises traduit et exprime le lent et inexorable déclin du pays depuis trois décennies. Personne n’en parle, sinon des structures d’analyse économique internationales confidentielles, dédiées aux grands investisseurs institutionnels, telles que celle de Charles Gave, dont les travaux sont mis en avant en France par l’Institut des Libertés. Analyses connues par quelques grands groupes français. Largement ignorées par la sphère publique.
Quels sont les enseignements de l’analyse de l’évolution de la MBA des entreprises françaises sur une longue période ?

A lire aussi, Laurent Alexandre: Vers un grand remplacement cognitif?

1 000 milliards d’euros d’appauvrissement sur une décennie

En premier lieu, la MBA des entreprises françaises a régressé de 18 % depuis 1990 (24 % du PIB en 1990, 19,7 % en 2023). Sur la base des données 2023, ceci représente 120 milliards d’euros en moins par an pour les entreprises françaises. Une paille. Au-delà de la brutalité de ces données quantitatives, ceci signifie que les entreprises françaises ont tout simplement perdu d’importantes capacités d’investir, d’innover, de rémunérer leurs salariés et de recruter, pour des raisons qui tiennent aux conditions économiques, fiscales et sociales propres à la France. Sur dix ans, ceci correspond à un décalage de richesse économique de plus de 1 000 milliards d’euros, soit un tiers de la dette publique ou encore, les deux-tiers des salaires français annuels.

Graphique: Institut des Libertés

Plus de 500 milliards d’euros annuels de moindre richesse par rapport à l’Allemagne

En second lieu, si l’on compare les évolutions de nos grands partenaires, la MBA annuelle des entreprises allemandes est passée de 22 % du PIB en 1990 à 24,9 % aujourd’hui, soit 1 026 milliards d’euros pour l’Allemagne contre 553 milliards d’euros pour la France, près de deux fois plus. Pour l’Italie, la MBA est passée de 24 % en 1990 à 20,5 % en 2013 puis est remontée à 25,4 % aujourd’hui, soit 530 milliards d’euros, une forme d’effet Draghi/Meloni. Ainsi, les entreprises italiennes enregistrent le même niveau de MBA en volume que les entreprises françaises ! Enfin, les chiffres des États-Unis donnent le vertige : de 16 % en 1990, la machine à produire de la richesse américaine propulse la MBA à 22,7 % du PIB aujourd’hui, soit 5 511 milliards d’euros, cinq fois plus que l’Allemagne, ce qui est en proportion des populations, mais 10 fois plus que la France. Nous touchons là la clé du problème français en matière de pouvoir d’achat, d’emploi, de compétitivité et de décalage technologique, corrélé avec la faible productivité française. Et aussi la problématique du PIB par habitant, où la France est  10 % en dessous de l’Allemagne et 39 % en dessous des États-Unis.

Graphiques: Institut des Libertés

La MBA explique le chômage incompressible français

En troisième lieu, il existe une corrélation entre l’évolution de la MBA et le chômage. Le graphique qui suit est éloquent. Il peut contribuer à l’explication d’un socle incompressible de chômage en France, à un niveau plus élevé que ses partenaires immédiats (France : 7,3 %, Allemagne : 3,2 %, Royaume-Uni : 4,3 %, Italie : 7,2 %, OCDE : 4,9 %, États-Unis : 3,8 % ; données OCDE mars 2024). Les économistes attitrés n’ont pas d’explications satisfaisantes, sinon d’indiquer que la formation professionnelle française n’est pas adaptée, ce qui est un peu court.

Graphique: Institut des Libertés

Le poids de l’État plombe le retour à la croissance

Enfin, et c’est l’enseignement le plus frappant, il existe une corrélation entre l’évolution de la MBA des entreprises et le niveau des prélèvements obligatoires, avec un impact négatif puissant sur la croissance. L’incorrigible propension française à créer des impôts et des ponctions sociales depuis quatre décennies, qui aboutit aujourd’hui à ce que le pays soit le plus imposé au monde, se traduit par une faiblesse structurelle des marges des entreprises. Les entreprises ne peuvent dès lors pas rémunérer et former correctement leurs salariés. Elles sous-investissent. La croissance est plombée par le poids de l’État dans l’économie, ce qui explique que la France se situe durablement sous son niveau de croissance naturelle. Georges Clémenceau ne disait-il pas déjà en 1886 : « La France est un pays extrêmement fertile : on y plante des fonctionnaires et il y pousse des impôts ».

Graphique: Institut des Libertés

Qui en parle ? Personne. Normal, la classe politique française n’est pas vraiment en mesure de se pencher sur les vrais sujets économiques, à l’exception de quelques personnalités de gauche et de droite qui se comptent sur les doigts d’une main.


Les programmes économiques 2024  à travers le prisme de la MBA

Les divers programmes économiques présentés lors des élections législatives de juin/juillet 2024 peuvent être utilement analysés selon cette grille de lecture de la MBA des entreprises.

Le Nouveau Front Populaire et le multiplicateur keynésien négatif

L’économiste Thomas Piketty © LCHAM/SIPA Numéro de reportage: 00684113_000001

Commençons par le Nouveau Front Populaire (NFP). Relance keynésienne, effet multiplicateur sur la croissance, SMIC à 1 600 € net par mois, ponctions sur les 223 milliards d’euros d’aides bénéficiant aux entreprises, 14 tranches d’impôt sur le revenu avec la quatorzième à 90 %, rétablissement d’un ISF dur à vocation climatique. Faire payer les riches et redistribuer aux pauvres. Quant à la dette publique, le stock n’est pas un problème « car, c’est bien connu, personne ne le rembourse ». Seule la charge d’intérêt, le flux donc, doit faire l’objet de vigilance. 125 milliards de dépenses supplémentaires entièrement compensés par des impôts supplémentaires, et, à terme, les retombées fiscales de la relance keynésienne. Il faut reconnaître une certaine cohérence intellectuelle à ce programme, préparé avec l’appui d’économistes stars (Thomas Piketty, Esther Duflo, Gabriel Zucman).
Une seule remarque : le multiplicateur keynésien devient négatif lorsque le niveau des prélèvements obligatoires dépasse un certain seuil. Et nous y sommes depuis 2009. C’est ce que Keynes – qui était un libéral et non un social-démocrate – appelait la trappe à dettes. Pour le dire différemment, les dépenses publiques sont entrées dans la zone des rendements décroissants.  Une forme d’externalité négative de la dépense publique.
Dès lors, le programme du NFP est inéluctablement voué à l’échec, avec la funeste conséquence d’un appauvrissement global du pays. Saluons à cet égard l’économiste Olivier Blanchard qui a su prendre ses distances avec ce programme.

Graphique: Institut des Libertés

La majorité présidentielle dans le bon sens mais un peu tard

Ensuite, le programme de la majorité présidentielle.
Il intègre la nécessité de faire baisser les prélèvements obligatoires et affiche une réduction programmée du déficit budgétaire et de la dette publique dans la durée. Aucun impôt supplémentaire. Baisse des impôts de production. Néanmoins, une maîtrise des dépenses publiques. Cela va évidemment dans le bon sens. Mais c’est un peu tard, après la génération de 900 milliards de dettes supplémentaires en sept ans.

Un RN prudent qui s’est converti au sérieux budgétaire

Enfin, le programme du RN. Remarquons d’abord que le cœur du programme économique de la présidentielle 2022 n’avait pas été affiché dans sa globalité en son temps, pour diverses raisons conjoncturelles (irruption d’Éric Zemmour en septembre 2021, campagne de Valérie Pécresse en décembre 2021, guerre en Ukraine en février 2022). La trajectoire des finances publiques y avait été planifiée sur 10 ans : déficit budgétaire primaire passant à zéro dès 2026, dette publique stabilisée jusqu’en 2027 puis décroissante en proportion du PIB à partir de 2028, baisse drastique des prélèvements obligatoires qui passent en dessous de la barre symbolique des 40 % du PIB en 2030.

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Aujourd’hui, deux ans plus tard, la situation de la France a changé, ce qu’attestent la dégradation de la notation financière française et la procédure pour déficit excessif lancée par la Commission européenne. Toutes les mesures « zakouskis » de la présidentielle ne sont dès lors plus à l’ordre du jour (exonération d’impôt sur le revenu et sur les sociétés pour les moins de trente ans,…). Seules subsistent des mesures majeures pour le pouvoir d’achat : baisse de la TVA sur les produits énergétiques et dispositif de soutien des augmentations de salaires supérieures ou égales à 10 %. Ces mesures, compensées sur un plan budgétaire, correspondent à des baisses de prélèvements obligatoires sans augmentation de la dette publique et vont dès lors  dans le bon sens, du point de vue de la grille d’analyse exposée ci-dessus. Et à n’en point douter, l’efficience relative des mesures sera prise en compte lors des arbitrages budgétaires opérationnels futurs…
À titre anecdotique, il est pour le moins notable que la proposition du RN d’exonération des cotisations patronales pour les augmentations salariales supérieures ou égales à 10 % (pour les salariés en-dessous de 3 fois le SMIC), est plus vertueuse que la prime Macron pouvant aller jusqu’à 10 000 € sans charges sociales : la mesure RN rapporte quand même les cotisations sociales employés, sans effet d’aubaine globalement, avec un choix de l’entreprise en fonction de ses capacités à conférer du pouvoir d’achat à ses salariés sans déstabiliser sa trésorerie (l’Institut Montaigne n’a pas, en l’espèce, correctement intégré les caractéristiques du dispositif pour établir son estimation de coût, à hauteur de 800 M€ par an) ; la prime Macron, quant à elle « one shot », se substitue à du salaire courant et donc coûte immédiatement les cotisations sociales non acquittées (2 milliards d’euros par an).

Un fonds souverain pour les investissements de bien commun qui permet de sortir de l’étau de la dette et du déficit

Enfin, les caractéristiques techniques du fonds souverain de 500 milliards d’euros, constitué progressivement sur cinq ans, annoncé à l’automne 2021, n’ont pas été dévoilées à ce stade. Notons simplement qu’il a vocation à financer les 100 milliards d’euros d’investissements annuels de bien commun (transition environnementale, infrastructures, innovation/recherche, fonds propres des PME) sans augmenter la dette publique et le déficit budgétaire. Avec l’effet d’un multiplicateur keynésien positif et non négatif, car sans augmentation des prélèvements obligatoires. Au bénéfice de la croissance française.
Espérons donc que les femmes et hommes politiques, quel que soit leur bord, intègrent à l’avenir les enseignements lumineux que les analyses de la MBA française et du multiplicateur keynésien effectif apportent à la définition d’une politique économique française pertinente.


La Lettre aux Français de Macron: comme une bouteille à la mer…

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Toute une France humiliée est actuellement portée par le vent de l’histoire, estime notre chroniqueur, qui prévoit qu’elle n’a pas fini de se faire entendre…


Bis repetita : la colère française, que j’annonçais sans grand risque de me tromper dans les européennes du 9 juin, mettra à nouveau les points sur les i, ce dimanche. Et encore le 7 juillet, pour le second tour des législatives. La raison en est simple : les Français excédés ont de la suite dans les idées. 

Le président et les « cloportes »

Les intimidations morales des médias ne fonctionnent plus. D’autant que la « gauche divine » des années 80 a muté en un Front de la honte mêlant des courants sectaires, violents, antisémites, anti-Français. Le parti présidentiel risque de laisser d’autres plumes, singulièrement face au bloc national RN-Ciotti. « Je ne suis pas aveugle », assure Emmanuel Macron dans une Lettre aux Français diffusée dimanche. En réalité, son narcissisme le détourne des réalités. Il se persuade encore de pouvoir susciter le « sursaut » autour de sa personne. Les historiens auront d’ailleurs à se pencher sur son cercle si médiocre (« des cloportes », a dit Bruno le Maire) qui, dit-on, l’a encouragé à dissoudre l’Assemblée dès l’échec du 9 juin pour son camp. 

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Le chef de l’Etat va, très probablement, perdre dimanche de n’avoir su admettre, depuis la révolte des gilets jaunes, que le pays fâché lui échappe et que la démocratie n’est pas la tyrannie des minorités mais l’expression du plus grand nombre. Cette déconnexion, souvent dénoncée ici, explique la crise politique que Macron a accélérée par dépit, à la veille de l’ouverture des Jeux Olympiques de Paris. Le pire qui pourrait advenir serait, en cas de large victoire de Jordan Bardella, de voir la gauche insurrectionnelle, soutenue par des sociaux-démocrates à la ramasse, contester la démocratie dans une guerre des rues.

Face à une hégémonie perdue, chacun joue sa petite musique

Le vent de l’histoire a quitté le camp du Bien. Il paie d’avoir trop longtemps méprisé les gens ordinaires au nom de ses utopies. Gérald Darmanin, ce lundi sur RTL, a rappelé sa sympathie pour « le bon peuple ». Mais, pour la macronie, il est trop tard pour s’amender auprès de lui. La dynamique porte la droite pragmatique et ses anciens parias. « Une vogue philosophique s’impose comme une vogue gastronomique : on ne réfute pas plus une idée qu’une sauce », remarquait Cioran. De fait, les alertes du système unanime sur le retour d’une « extrême droite » qui porterait la moustache d’Hitler sont pathétiques. Ces peurs agitées ne sont plus comprises, majoritairement, que comme un procédé de la gauche paniquée pour tenter de sauver un peu de son hégémonie perdue.

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Le doute s’est d’ailleurs installé dans les rangs des plus lucides des « progressistes ». Samedi, sur LCI, l’acteur-réalisateur de gauche Mathieu Kassovitz a dérogé à l’esprit moutonnier de son camp en déclarant que le RN avait « peut-être sa place en France » et que « c’est peut-être une expérience à essayer ». Le 15 juin, dans Libération, Ariane Mnouchkine, créatrice du Théâtre du Soleil, a notamment reconnu, au nom de la gauche culturelle : « On a lâché le peuple (…) Quand les gens disaient ce qu’ils voyaient, on leur disait qu’ils se trompaient, qu’ils ne voyaient pas ce qu’ils voyaient (…) Puis comme ils insistaient on leur a dit qu’ils étaient des imbéciles, puis (…) on les a traités de salauds. On a insulté un gros tiers de la France par manque d’imagination (…) »

C’est cette France humiliée, que la gauche persiste à traiter de fasciste alors qu’elle-même s’abîme dans l’intolérance, qui va encore faire parler d’elle dimanche. Ce n’est pas fini.

Journal d'un paria: Bloc-notes 2020-21

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«Nous sommes prêts pour redresser l’école de la République»

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Le député Roger Chudeau à l'Assemblée nationale, 3 novembre 2023 © Jacques Witt/SIPA

Notre école est en phase avancée de déliquescence. Pourtant, à écouter de nombreux fonctionnaires ou responsables syndicaux qui sortent de leur rôle, la menace viendrait du Rassemblement national, lequel n’a jamais été aux responsabilités, déplore cette tribune.


« Nous n’obéirons pas » : comme cette pétition, signée par des cadres de l’Éducation nationale en fonction, on voit circuler sur les réseaux sociaux des tribunes et communiqués appelant à la désobéissance civile au cas de victoire du Rassemblement national aux élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet 2024.

De tels appels à la désobéissance, de la part de fonctionnaires de l’État en exercice, sont un grave et scandaleux manquement à leurs obligations statutaires de se conformer à un strict devoir de neutralité dans l’exercice de leurs fonctions. Qu’attend Mme Nicole Belloubet pour rappeler publiquement ces agents à leurs obligations et faire appliquer l’obligation de réserve des fonctionnaires pendant la période électorale ?

Nicole Belloubet, Ministre de l’Education nationale, dans une école primaire près de Toulouse, le 29 avril 2024 © FRED SCHEIBER/SIPA

Au nom de quoi une poignée de militants syndicaux s’arrogeraient-ils un monopole moral pour décider de la légitimité de tel ou tel gouvernement ? La seule règle qui vaille en démocratie est le respect du suffrage universel. Comme toujours, ceux-là mêmes qui donnent des leçons de démocratie sont les premiers à refuser et mépriser les résultats des élections lorsqu’ils ne vont pas dans leur sens.

Ce qui aujourd’hui représente un danger pour la démocratie, ce n’est pas le Rassemblement national. Ce sont les minorités de militants politiques qui appellent à la désobéissance ou à l’insurrection, avant même que les Français ne se soient exprimés. Les syndicats enseignants ont toute légitimité pour représenter les intérêts professionnels des personnels de l’Éducation nationale. En revanche, rien ne justifie qu’ils instrumentalisent leur fonction pour faire de la politique. Depuis des décennies, les syndicats d’extrême gauche se sont arrogés une espèce de monopole moral sur le monde éducatif au point d’exercer sur les personnels une pression idéologique quand ce n’est pas une sorte de terrorisme intellectuel visant les opinions dissidentes. Aujourd’hui, ce monopole idéologique touche à sa fin.

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Comme tous les Français, les enseignants ne se sentent plus en sécurité dans leur pays et aspirent à retrouver l’ordre dans leurs classes mais aussi dans les rues. À ce titre, ils sont de plus en plus nombreux à faire confiance au RN et à adhérer à son programme. Contrairement aux caricatures et aux mensonges répandus par les centrales syndicales, ce programme n’est nullement une menace pour l’école publique.

Ce qui menace dangereusement l’école de la République et ses principes, ce qui provoque les violences, les agressions voire les attentats terroristes, c’est l’islamisme radical. 80 % des enseignants déclarent avoir appréhendé au moins une situation conflictuelle avec leurs élèves, et plus de la moitié des enseignants reconnaissent pratiquer l’autocensure en 2022. Face au danger islamiste, la gauche syndicale pratique le déni voire la soumission. Seul le RN a la volonté politique ferme et intransigeante de mettre fin au « pas de vague » et d’assurer un retour à la sérénité dans les établissements scolaires.

Table ronde organisée par l’association musulmane féministe Lallab :  » Femmes musulmanes et éducation « , 29 mars 2019. (c) D.R.

On ne peut pas accuser le Rassemblement national qui n’a jamais gouverné le pays d’être responsable du déclin de l’école de la République. Ceux qui annoncent aujourd’hui un effondrement annoncé de l’école en cas de victoire du RN, sont les mêmes qui ont exercé, avec les gouvernements successifs, une sorte de gouvernance partagée sur l’institution scolaire durant des décennies. Au lieu de s’attaquer au RN, ils feraient mieux de dénoncer la responsabilité des gouvernements successifs, de droite et de gauche, ainsi que les sept ans de pouvoir d’Emmanuel Macron, qui ont accéléré le déclassement de notre école.

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Notre école est en phase avancée de déliquescence. Après des décennies de réformes intempestives et inefficaces, le niveau de nos élèves n’a pas cessé de s’effondrer : les résultats aux tests internationaux et nationaux (PISA, TIMSS, PIRLS, CEDRE) nous rappellent chaque année le déclin du système éducatif français. 50% des élèves entrants en sixième ne maîtrisent pas la lecture fluide. 11% des jeunes Français qui passent les tests des Journées de défense et de citoyenneté sont en situation d’illettrisme. Un quart d’entre eux connaît des « difficultés de lecture ». Les conditions de travail des enseignants se sont profondément dégradées sur le plan matériel, financier et symbolique.

Non seulement notre diagnostic fait consensus, mais les mesures de notre programme suscitent une forte adhésion chez une partie grandissante du corps enseignant. Ce programme s’articule autour de quelques principes simples : recentrer l’école sur la transmission des savoirs, réaffirmer la double mission de l’école d’ascension sociale et d’assimilation culturelle à la société française, sanctuariser l’institution scolaire en garantissant l’ordre et la sécurité des personnels face aux tensions et violences de la société, revaloriser la condition enseignante pour faire face aux nouveaux enjeux du siècle. Notre école est dans un état d’urgence. L’avenir de notre pays et de nos enfants dépendra de notre capacité à enrayer la déconstruction de notre système scolaire. Si nous n’y mettons pas à un coup d’arrêt, la puissance et la souveraineté de la France en seraient affectées à long terme. Malgré les fractures de la société, l’unité et la cohésion du pays reposent encore largement sur l’institution scolaire, dernière à rassembler tous les enfants de France. L’enjeu est immense, nous y sommes prêts.

Politique: pourquoi nos footballeurs tricolores font bien de la boucler

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Kylian Mbappé et Antoine Griezmann lors d'une séance d'entraînement à Paderborn, en Allemagne, le dimanche 23 juin 2024 © Hassan Ammar/AP/SIPA

Marcus Thuram, Kylian Mbappé et Ousmane Dembélé ont déjà pris plus ou moins explicitement position contre le RN au nom de l’équipe, en mettant en avant leurs « valeurs ». Défense de rire (ou de pleurer).


Équipe de France de football: le retour de «caïds immatures»?

« Des caïds immatures qui commandent à des gamins apeurés. » C’est ainsi que la ministre des Sports Roselyne Bachelot s’exprimait à l’Assemblée, il y a dix ans, pour désigner les footballeurs de l’équipe de France qui venaient de faire grève en Afrique du Sud, en pleine Coupe du monde. L’un des plus pitoyables épisodes du sport français, où l’indécence se disputait à la bêtise. On pensait naïvement que ce serait difficile de faire pire. Et pourtant. Une décennie plus tard, nos jeunes Bleus ont donc momentanément délaissé leur console de jeu afin de nous dire pour qui voter ou plutôt ne pas voter, forts d’une noblesse d’âme que le monde entier nous envie et d’une culture historique et politique acquise au terme de nombreuses lectures et d’interminables années d’études.

Même sans Karim Benzema, l’équipe de France garde un goût pour le scandale

À l’heure de l’Euro 2024 et des prochaines élections législatives, le citoyen Marcus Thuram a appelé en conférence de presse, le samedi 15 juin, « à se battre pour que le Rassemblement national ne passe pas », faisant illico la très complaisante Une dominicale du journal L’Équipe, qui s’est étrangement mué en fanzine woke de la France insoumise ces dernières années. « J’ai zéro doute sur le fait que tout le monde (en équipe de France) pense comme moi », tient à préciser le fils du penseur racialiste et accessoirement ex-footballeur Lilian Thuram (lequel développe l’idée que les blancs sont structurellement « racistes sans le savoir » dans son livre La pensée blanche, paru en 2020, et a été accusé rappelons-le de violence conjugale par son ex-compagne Karine Le Marchand). Une précision inquiétante quand on connaît le CV de nombreux joueurs de l’équipe de France, Marcus Thuram inclus.

Trois ans et demi avant de cracher son venin sur l’opposition de droite à Macron, le footeux engagé crachait à bout portant sur le visage d’un adversaire allemand lors d’un match de Bundesliga, qui plus est en pleine épidémie de Covid, ce qui lui vaut cinq matchs de suspension et une lourde amende1. « C’est absolument inadmissible. Je me demande ce qui se serait passé si cela s’était passé dans l’autre sens, s’indigne alors le patron du Bayern Munich et bourreau des Bleus en 1982 à Séville, Karl-Heinz Rummenigge (…) Aurions-nous eu à nouveau un débat sur le racisme ? » 

Sélectionné pour l’Euro, Kingsley Coman appellera-t-il lui aussi à faire front face au RN ? L’attaquant international du Bayern est condamné en septembre 2017 par le tribunal de Meaux à 5 000 euros d’amende pour violences conjugales à l’encontre de son ex-compagne et ex-candidate de télé-réalité, Sephora Goignan. La même année, le défenseur international du PSG Lucas Hernandez est condamné par la justice espagnole à un mois de travaux d’intérêt général et à six mois d’éloignement pour avoir échangé des coups sous l’emprise de l’alcool avec sa dulcinée. En février 2021, le défenseur de l’OGC Nice William Saliba a l’idée géniale de publier sur Snapchat une vidéo datant de son passage en équipe de France des moins de 17 ans, où l’on entrevoit l’un de ses partenaires en train de se masturber nonchalamment. Embarrassée par le bad buzz, la fédération sanctionnera son joueur en roue libre d’un mois sans sélection… avec sursis.

En novembre 2021 le journaliste Romain Molina, connu pour avoir dénoncé de nombreux scandales dans le monde du football notamment dans le New York Times ou le Guardian, prend à partie sur Twitter l’arrière des Bleus et du Real Madrid Ferland Mendy, en publiant l’extrait d’une plainte déposée contre X par peur d’éventuelles représailles. Passablement éméché, le joueur français aurait ramené deux jeunes femmes dans sa chambre d’hôtel avant de faire l’hélicoptère avec son sexe devant ses invitées. Il aurait ensuite saisi la gorge, puis décoché une droite et, une fois à terre, asséné un coup de pied dans la tête de celle qui avait eu l’outrecuidance de se rebeller. La victime sera hospitalisée pour un traumatisme crânien. « Mais son club (a priori Lyon) a réussi à tout cacher, parce qu’il fallait le transférer l’année d’après », ajoute Molina. Ferland Mendy (ne pas confondre avec Benjamin Mendy, autre international français accusé de huit viols outre-Manche et acquitté l’an passé après deux longs procès) n’a à ce jour jamais répondu à cette accusation ni poursuivi en diffamation le journaliste. 

Ousmane Dembélé aussi appelle à « se mobiliser pour aller voter », mais surtout pas pour qui vous savez. Marié à Rima Edbouche, une jeune créatrice de contenus Mode et Lifestyle sur le Net destinés aux femmes voilées (dixit le média marocain Le360), cette grande conscience politique fait scandale à l’été 2019 lors d’une tournée au Japon avec le FC Barcelone. Assis sur le lit de sa chambre d’hôtel aux côtés d’Antoine Griezmann, l’ailier des Bleus se moque des jaunes, en l’occurrence des employés de l’établissement venus installer un jeu vidéo sur la télé. « Toutes ces sales gueule… Pour jouer à PES mon frère, t’as pas honte », pouffe Dembélé en imitant l’accent local devant son coéquipier hilare, avant d’ajouter en filmant les salariés de l’hôtel avec son téléphone : « Vous êtes en avance ou vous n’êtes pas en avance dans votre pays, ouais ?! » Face au tollé que provoque la vidéo, notamment au sein de la communauté asiatique (« Quelle immaturité et manque de respect… on fait quelque chose pour éduquer ces joueurs censés représenter la France ? » s’indigne l’Association des jeunes Chinois de France en interpellant la Fédération française), les deux footballeurs antiracistes font pénitence sur les réseaux sociaux, passage obligé dans ces cas-là.

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Dans une autre vidéo publiée au même moment sur le site officiel du club catalan, on entend également Antoine Griezmann caricaturer grossièrement la façon de parler des Asiatiques. En homme de principe, « Grizou » rompra l’année suivante son contrat publicitaire avec Huawei pour protester contre la répression chinoise des Ouïghours et dénoncera les violences policières en France, n’hésitant pas à interpeller publiquement le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Ballon d’Or 2022, cinquième meilleur buteur de l’histoire chez les Bleus, Karim Benzema coule désormais une semi-retraite aussi paisible que lucrative en Arabie Saoudite, loin du pays de son cœur… l’Algérie. « C’est le pays de mes parents, c’est dans le cœur. Mais bon après, sportivement, c’est vrai que je jouerai en équipe de France », déclarait en décembre 2006 sur RMC et sans forcer son enthousiasme le jeune espoir du football tricolore, qui ne chantera jamais la Marseillaise, allant même jusqu’à lâcher un glaviot lorsque l’hymne français est joué au stade Santiago-Barnabeu de Madrid, à la suite des attentats parisiens de novembre 2015. L’attaquant coche à lui seul toutes les cases du footballeur français du XXIe siècle : citation dans une affaire de proxénétisme de mineures (l’affaire Zahia), condamnation à un an de prison avec sursis et à une lourde amende2 dans l’affaire du chantage à la sextape de Valbuena, son ancien coéquipier chez les Bleus, proches condamnés pour des tentatives d’enlèvement et d’extorsion, envoi de « likes » sur des publications justifiant la décapitation de Samuel Paty et les attentats jihadistes sur les réseaux sociaux, soutien aux habitants de Gaza une semaine après le pogrom du 7 octobre 2023, lien avec les Frères musulmans selon le ministre de l’Intérieur… Certains parlementaires réclameront même sa déchéance de nationalité.

Sorties de route

Parmi les partenaires-citoyens-engagés de Marcus Thuram, le gardien lensois Brice Samba est condamné en février 2016 à six mois de prison avec sursis et dix mois de suspension de permis pour avoir provoqué en sortant de discothèque un accident sur l’autoroute entre Metz et Nancy, blessant légèrement le conducteur de l’autre véhicule. Arrêté avec 1,5 g/l d’alcool dans le sang, le footballeur mentira en prétendant ne pas avoir été au volant cette nuit-là, avant que l’examen ADN du sang retrouvé sur l’airbag ne rétablisse la vérité. C’est avec 1,4 grammes d’alcool dans le sang que Benjamin Pavard est quant à lui arrêté à 2h35 du matin au volant de sa berline par la police munichoise, en août 2022. Celui qui jouait alors au Bayern sera condamné l’année suivante à une suspension de permis et à une amende restée confidentielle. Conduite sans permis et en état d’ivresse, « un classique » pour les joueurs de l’équipe de France selon Romain Molina.

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En septembre 2023, les défenseurs Jules Koundé (déjà auteur d’un tweet contre les violences policières après la mort de Nahel Merzouk trois mois plus tôt) et Ibrahima Konaté s’indignent sur les réseaux sociaux de l’interdiction du port de l’abaya dans les établissements scolaires en partageant une vidéo de l’influenceuse Crazy Sally, laquelle critique la décision du président Macron et dénonce « l’islamophobie » de la France…

Jean-Clair Todibo ne fait en revanche pas partie de la liste des 25 en Allemagne. Ce Guyanais converti à l’islam se distingue avant un match des Bleus contre les Pays-Bas en riant bêtement pendant la minute de silence en hommage aux victimes israéliennes et palestiniennes, moins d’une semaine après le pogrom du 7 octobre. Un rire nerveux, se justifiera le joueur niçois, qui avait accusé son ancien entraîneur Fabien Galtier de l’empêcher de pratiquer le jeûne du ramadan.

Lui aussi converti à l’islam, Paul Pogba ne sait pas s’il pourra un jour rechausser ses crampons. Suspendu quatre ans par le tribunal antidopage italien après un contrôle positif à la testostérone, cet enfant de Lagny-sur-Marne (77) né de parents guinéens est accusé d’évasion fiscale lors du scandale des Football Leaks dévoilé par Der Spiegel en 2016. La star de Manchester United brandit en 2021 un drapeau palestinien à Old Trafford, après un match de Premier League. Menacé à son domicile parisien par des hommes armés la même année, il est victime d’une sombre affaire de « tentative d’extorsion en bande organisée » qui implique son propre frère, Mathias.

« Je partage les mêmes valeurs que Marcus », déclarait dimanche 16 juin en conférence de presse Kylian Mbappé, appelant lui aussi tous les jeunes à voter contre qui vous savez. « J’ai envie d’être fier de porter ce maillot et pas de représenter un pays qui ne correspond pas à mes valeurs. On a besoin de s’identifier à nos valeurs, de mixité, de respect, de tolérance… » C’est donc sans doute au nom de ces valeurs que la star du football français dédicace son maillot et pose fièrement aux cotés du champion russe de MMA Khabib Nurmagomedov, après un match de Ligue des champions à Barcelone, en février 2021.

Apparemment partisan d’un islam modérément modéré, le bourreur de pif du Daghestan s’en était pris quelques mois plus tôt très violemment à Emmanuel Macron, qui avait osé défendre le droit à la caricature après l’assassinat de Samuel Paty. « Que le Tout Puissant défigure cette ordure et tous ses disciples qui au nom de la liberté d’expression insultent la foi de plus d’un milliard et demi de musulmans […] Croyez-moi, ces provocations auront pour eux de graves conséquences car les pieux ont toujours le dernier mot », lâche alors sur les réseaux sociaux l’ami humaniste de Mbappé en publiant une photo du visage du président français, recouvert d’une trace de pied. Ce message abominable, a fortiori dans de telles circonstances, est notamment « liké » par plusieurs joueurs sélectionnés en équipe de France (Karim Benzema, Presnel Kimpembe, Mamadou Sakho, Timoué Bakayoko), mais les médias et L’Équipe en tête préféreront mettre la poussière sous le tapis.

En juin 2023, Kylian Mbappé s’indigne de la mort de Nahel, « petit ange parti trop tôt », prélude à plusieurs jours d’émeutes dans toute la France. Comme d’ailleurs tous ses coéquipiers, l’attaquant des Bleus n’aura en revanche jamais un mot pour rendre hommage à Samuel Paty, Dominique Bernard, la petite Lola, le jeune Thomas de Crépol ou encore pour les civils victimes de la sauvagerie du Hamas le 7 octobre. Pas un mot.

En juin 2024, une bande de jeunes pieds nickelés immatures, vulgaires, incultes, et parfois même malfaisants, se permettent donc de faire la leçon aux Français, un signe parmi tant d’autres que l’heure est vraiment grave.

La France vient de sortir des phases de poules de l’Euro en étant 2e du groupe D après l’Autriche, et après un match nul frustrant face à la Pologne. Elle démeure favorite de la compétition. Allez les Bleus ?

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  1. Marcus Thuram se voit infligé par son club, le Borussia Mönchengladbach, 150 000 euros d’amende en sus des 40 000 euros de la Fédération allemande ↩︎
  2. Reconnu coupable, Karim Benzema est condamné par le tribunal de Versailles à verser 75 000 euros d’amende, ainsi que 80 000 euros à Mathieu Valbuena ↩︎

Contre le RN: les incendiaires de luxe ou bas de gamme…

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La chanteuse et comédienne Marianne James a pris position contre le RN © NIVIERE/SIPA

Tout ce que notre pays compte de sommités intellectuelles ou de célébrités trouve urgent de faire savoir au bon peuple que c’est très mal de voter RN.


À partir du moment où son choix politique est fait pour le 30 juin et le 7 juillet, on a tout loisir pour questionner la périphérie de la campagne des élections législatives. Parce que, contrairement à ce que croient certains, la démocratie ne consiste pas seulement à avoir le droit formel de s’exprimer, dans une égalité médiatique apparente, mais devrait profondément assurer, jusqu’au jour du scrutin, un équilibre tant officiel qu’officieux, aussi bien réglementé que spontané. On en est loin. Certes, par rapport au second tour de l’élection présidentielle ayant opposé Jacques Chirac à Jean-Marie Le Pen, qui a été, de mon point de vue, un vrai scandale républicain, le climat d’aujourd’hui est beaucoup moins choquant. Je me sens d’autant plus libre pour interroger les distorsions actuelles que je suis persuadé qu’un rouleau compresseur trop ostentatoirement hostile contribue au succès de la cause adverse. À moins d’un revirement absolu, il me semble que c’est ce qui se déroule avec le RN, loin devant Renaissance et plus modérément devant le Nouveau Front Populaire (NFP) qui sauve les meubles grâce à son unité superficielle.

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Marianne James et Marcus Thuram semblent presque se réjouir de la situation

Il n’empêche que, si on avait droit à l’ironie, il est frappant de voir comme les périodes de danger réel, surestimé ou fantasmé font pulluler les incendiaires de luxe ou bas de gamme et, pour ces derniers, des personnalités qui profitent des circonstances pour se constituer une petite gloire personnelle. Je songe notamment à Marianne James qui conseille de ne pas voter en faveur du RN parce que celui-ci ne connaîtrait pas l’Histoire de France. Sans pouvoir déterminer au nom de quel savoir et quelle légitimité elle s’exprime avec tant de condescendance, elle représente un exemple de ces anonymes ou de ces artistes sortant de leur lumière très spécifique pour une aura résultant d’un engagement conjoncturel et confortable. Marcus Thuram a perdu son énergie sportive en nous donnant un conseil qu’on ne lui demandait pas. Lui aussi s’est cru autorisé à nous dissuader du RN ! On a l’impression que l’actualité offre, à ces humanistes fortuits, le rôle éphémère de directeurs de conscience, la formidable opportunité de se muer en donneurs de leçons, en guides, en vigies, de faire passer leur dénonciation pour une vérité objective à suivre à la lettre. Ils se poussent du col en changeant de registre. Cette troupe qui surgit, individuellement ou en masse, dans les temps de crise effervescents, est composée de ceux que je nomme les incendiaires bas de gamme. Ils jettent leur huile sur un feu dont on finit par se demander s’il ne les réjouit pas.

Épidémie de tribunes alarmistes et de pétitions

Mais il y a aussi des incendiaires de luxe qui, certains de leur importance, emblèmes médiatiques contestables mais perçus irremplaçables, projettent sur une réalité qu’ils divisent, les lumières pour leur camp, les ombres contre le RN, un soufre dévastateur.

L’incarnation la plus achevée de cette pente est présentée par le journal Le Monde qui, en particulier dans son numéro daté du 23 et 24 juin, a fait preuve d’une totale hypocrisie démocratique, consistant à aggraver des orages qu’on prétend redouter, en mettant en œuvre une démarche poussant jusqu’à la caricature la description d’un futur qualifié systématiquement d’alarmant. La trinité dont ce quotidien, en l’occurrence, nous gratifie, est faite d’information, de l’expression substantielle de son opinion – je n’y trouve rien à redire d’autant plus que cette dernière est chaque jour parfaitement et tranquillement prévisible – d’une sorte d’humanisme mou et progressiste insoucieux des peurs et des attentes populaires. Mais surtout, dans le numéro concerné, d’une considérable dose d’excitation, tant par les analyses des journalistes que par les intervenants et les tribunes choisis. En effet, comme citoyen soucieux de l’éthique républicaine, j’estime que cette incitation constante à sortir le RN – contre la réalité parlementaire et la dédiabolisation opérée par la fille contre le père – de l’espace démocratique est perverse, créatrice de troubles et de désordres. Elle est de nature à valider les oppositions même violentes au vote majoritaire et, pire, la guerre civile au nom de l’idéologie, des suspicions et des procès d’intention.

A lire aussi, Ivan Rioufol: La Lettre aux Français de Macron: comme une bouteille à la mer…

Il y a une responsabilité morale de ce média, et de tous, à ne pas user de l’information et de l’opinion pour attiser un feu dont la France n’est que trop friande. Comme si elle était incapable d’accepter, en politique, des contradictions paisibles. Le Monde qui se veut une référence en est très loin sur ce plan.

Il n’est pas seul. Quand on consulte et lit chaque jour Mediapart comme moi, on est effaré par une politique de la haine : obsessionnellement les mêmes cibles, le RN, la police, les mêmes apologies, l’extrême gauche, les délinquants toujours victimes avant d’être coupables ! La dernière recrue dans ces incendiaires somptuaires est Dominique Strauss-Kahn qui, oubliant ses errements privés et la social-démocratie dont il avait été un représentant emblématique, a appelé à voter pour le Nouveau Front Populaire risquant d’être dominé par LFI irresponsable sur le plan économique et immoral car antisémite. Surprenant arbitrage !

Croire que l’ironie serait décente sur de tels sujets n’est pas acceptable. Ces incendiaires de luxe ou bas de gamme démontrent qu’il existe une certaine manière lamentable de faire monter le RN : en étant des pompiers pyromanes.


Elisabeth Lévy : « La France souffre d’une pathologie chronique, la pétitionnite »

Comment Emmanuel Macron attise la guerre civile

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Paris, 15 juin 2024 © OLIVIER JUSZCZAK/SIPA

Et si les prévisions les plus pessimistes de notre chroniqueur se révélaient finalement exactes ?


La guerre civile ? Emmanuel Macron la promet s’il perd son pari, insensé, d’un « sursaut » autour de sa personne à l’issue des législatives. Dans un podcast du 21 juin pour le site « Génération do it yourself », le président prévient qu’une victoire du Nouveau Front Populaire ou du RN-Ciotti (LR), le 7 juillet, « mènerait à la guerre civile ».

DR.

Quand, en 2016, j’ai publié La guerre civile qui vient chez mon ami aujourd’hui disparu Pierre-Guillaume de Roux, j’ai eu droit aux haussements d’épaule des médias et autres professionnels du déni. Aujourd’hui, j’écrirais le même livre avec les mêmes mots. J’y ajouterais toutefois un chapitre sur le pyromane arrivé à l’Élysée en 2017.

Quand Darmanin passe aux aveux

En effet, l’accélération des fractures nationales lui doit beaucoup. Pour avoir théorisé dès son premier mandat l’affrontement entre progressisme et populisme, le chef de l’État a attisé les tensions avec le peuple ordinaire, sommé de se taire et de disparaître. A l’époque j’écrivais, bien avant la révolte des gilets jaunes[1] : « (…) Macron, qui ne peut réprimer le mépris que lui inspire la France reléguée dans les périphéries, fait tout pour l’exacerber. À moins qu’il ne se corrige rapidement, son règne finira en cauchemar ». On y est. Mardi, sur Europe 1, Gérald Darmanin a enfin déclaré : « Écoutons notre peuple qui souffre. L’élite a fait sécession. Les gens qui dirigent n’habitent plus parmi le peuple ». Admettons la sincérité de l’aveu tardif. Il n’est néanmoins pas celui du président, qui persiste à jouer avec les peurs pour s’accrocher au pouvoir. Après avoir divisé les gens entre déracinés et enracinés, ceux « qui ne sont rien » et ceux qui savent tout, vaccinés au QRCode et parias non vaccinés, le voici qui ose se poser en rassembleur, en s’exonérant des déchirures françaises. Or si la guerre civile déboule demain, menée par ceux qui refuseraient le verdict des urnes, elle viendrait de sa « société ouverte » appuyée par la gauche islamophile.

Fantasmes de gauche

A dire vrai, Macron n’est pas le seul incendiaire. Même la gauche prétendument modérée continue à déverser ses bidons d’essence sur la cohésion nationale en insultant les électeurs excédés qui se tournent vers la droite nationale. Dans Le Monde du 24 juin, Laurent Berger (ex-CFDT) déclare, en justification de son appui au Front de la honte : « Je crois que, progressivement, le RN veut nous faire glisser vers une société totalitaire ». Il avait brandi cette même menace d’un totalitarisme fantasmé pour accabler la révolte des gilets jaunes, cette classe moyenne occultée, coupable aux yeux des « élites » de relever la tête du fond des provinces oubliées.

Ma détestation de tout système totalitaire m’en fait volontiers déceler les signes précurseurs dans les discours et les mouvements.

Je ne les vois pas dans ce réveil démocratique, mené par un peuple calomnié qui semble déterminé à reprendre son destin en main. Le couple Bardella-Ciotti ne parait pas enclin au sectarisme ni au despotisme. En revanche le front de la gauche, rejoint par Berger et une palanquée de « consciences » (intellectuels, magistrats, enseignants, journalistes, ONG, etc.) appelant à la désobéissance civile en cas de victoire du RN, est bel et bien traversé par des courants violents, sectaires et antisémites qui vont craindre une dérive totalitaire et une « insurrection d’atmosphère ». Ce sont eux qui portent la guerre en France.

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[1] Macron : la grande mascarade (L’Artilleur)

«Le RN devenu bonapartiste s’est installé au cœur de l’imaginaire français en tenant ensemble les questions nationale, sociale et européenne»

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Stéphane Rozès © Hannah Assouline

Entretien avec le politologue Stéphane Rozès, auteur de Chaos, essai sur les imaginaires des peuples 


Causeur. Alors, que pensez-vous de cette déflagration qu’a été dès le soir des européennes l’annonce de ces législatives de dissolution ?

Stéphane Rozès. Cet apparent coup de tonnerre vient d’assez loin. La décision de la part du président Macron de dissoudre, provient sans doute d’une blessure narcissique, mais pas seulement. Le président s’attendait aussi à des admonestions de l’UE sur l’état de nos comptes et avait également la volonté d’écarter le spectre d’une motion de censure LR-RN-LFI à la rentrée lors du vote du Budget. C’est une stratégie destinée à épuiser le RN à Matignon en cas de cohabitation. Cela, de sorte que Marine Le Pen ne l’emporte pas à la présidentielle…
En tout état de cause, est remonté des profondeurs du pays un désaveu d’Emmanuel Macron datant de la présidentielle de 2022 et qui recompose le paysage politique de façon accélérée. La présidentielle ne s’est pas déroulée dans le rite habituel du déploiement d’une dispute politique commune permettant de réactiver l’imaginaire français et de nouer un lien fort et légitime entre le président et les Français. De sorte que dès les législatives de 2022, le président Macron n’a pas pu dire au pays : donnez-moi les moyens de mettre en œuvre le projet, le contrat que nous avons passé ensemble. Il n’y en avait pas. Emmanuel Macron avait abusé de la peur de la pandémie et de la guerre en Ukraine pour être élu comme par évidence. Il n’a pas mené campagne et il n’a pas eu de majorité au Parlement. Cela a transformé le parlement en foire d’empoigne, attisée par la stratégie de la tension que met en œuvre Jean-Luc Mélenchon. Sans légitimité politique, le président a recouru au 49.3 lors de la réforme des retraites contre la nation et les partenaires sociaux.
Dans le même temps, le quotidien des Français sur ce qu’il advient (la baisse du pouvoir d’achat, la hausse de l’immigration, de l’insécurité, le retrait et dégradation des services publics, la guerre en Ukraine, l’importation du conflit israélo-palestinien, le communautarisme et l’antisémitisme) les met dans un état de sidération et remet de façon encore plus vigoureuse qu’auparavant la question de la maîtrise de notre destin au cœur des attentes politiques.

En quoi cela profite-t-il au RN ?

Le RN s’est éloigné du FN néofasciste et nationaliste en abandonnant depuis les Européennes de 2019, l’idée de « Frexit » pour en venir à une position gaullienne d’Europe des Nations. Marine Le Pen a opéré cette mutation contre son père, en mettant le RN dans le giron de la République, en reprenant l’idéal du bonapartisme. C’est-à-dire le fait de s’adosser à la nation, sa souveraineté, en dépassant les clivages gauche/droite, en installant un lien direct entre le leader et le peuple sous une forme plébiscitaire, instaurant l’autorité de l’État en matière régalienne, économique et sociale.
Le RN s’est mis en cohérence avec l’imaginaire français et son point d’équilibre idéologico-politique actuel. Il le fait en articulant les questions nationales, sociales et européennes.
Le bloc des gauches, lui, oppose question sociale et nationale. Le bloc néolibéral d’Emmanuel Macron fait découler la nation de l’UE néolibérale. Or l’évacuation du cadre national est vue comme un aveu d’impuissance et une absence de protection. Ces enjeux résonnent de façon très prosaïque avec le quotidien des Français. Le RN, ancré dans les catégories populaires, a su faire le lien.

C’est-à-dire ?

Les deux priorités dans les motivations de vote, très largement devant tout le reste, sont d’abord le pouvoir d’achat et l’immigration. Concernant le pouvoir d’achat, le vécu des citoyens est que les prix augmentent selon des logiques de marché ou de tarifications de l’énergie qui échappent aux gouvernants lesquels se sont dessaisis de leurs prérogatives dévolues à des instances « indépendantes » et aux gouvernances néolibérales de l’UE.
Au fond, la hausse des prix viendrait de l’extérieur. Là où l’Europe et la nation devraient protéger des chocs extérieurs, la France semble être ouverte aux quatre vents et l’Europe les amplifie.
La question de l’immigration, n’est pas seulement vécue comme étant un problème social de concurrence capital/travail. Elle n’est pas seulement vécue comme générant de l’insécurité. Elle est vécue comme un danger culturel d’abord à cause de l’islamisme qui progresse en France parmi les arabo-musulmans qui constitue l’essentiel de l’immigration.
La République semble ployer sous les assauts communautaristes relayés par LFI et les wokistes, la laïcité est attaquée du fait de l’islamisme, le terrorisme est en majorité endogène et l’École ne semble plus transmettre la citoyenneté.
Finalement, au travers de ces deux enjeux essentiels, se pose la question de la maitrise des peuples de leurs us et coutumes. Dorénavant cette dimension culturelle pénètre dans les études qualitatives l’électorat traditionnel de la gauche. Les deux tiers des Français estiment qu’« on ne se sent plus en France comme chez soi. ».
La question de la souveraineté nationale, que le RN semble porter seul, fait le lien entre les questions culturelle et sociale et le cadre républicain. Des questions essentielles dans les territoires laissés à l’abandon par la République et les services publics, donc concernant tous les habitants qui vivent hors métropoles.

Selon vous, le fait d’avoir pris de vitesse tout le monde pour se donner les meilleures chances de renverser la table n’avait aucune chance d’aboutir à une sortie par le haut ou à un pari gagné ?

Des législatives de dissolutions sont vécus comme une présidentielle. Lors de la dissolution de 1997, les sondages quantitatifs disaient effectivement que le président allait gagner car les Français pensaient que Jacques Chirac allait s’expliquer sur l’abandon de la « lutte contre la fracture sociale » et réorienter son action. Mais pour que la victoire se réalise, mes sondages qualitatifs confidentiels préconisaient qu’il fallait que ce soit le président Chirac et non Alain Juppé qui mène la campagne… Or Pilhan et lui n’en firent rien. On sait ce qui advint.
Dans cette dissolution, le problème pour les Français c’est le président Macron. Il devait être en première ligne, accuser réception des messages du pays et dire en quoi et comment il allait changer de façon de gouverner et préciser son orientation. Il a fait l’inverse. Il a mis les Français au pied du mur en leur disant :  « Je vais globalement continuer ma politique en étant plus attentif. Mais vous, êtes-vous sûrs de vouloir vous en remettre aux dangereux extrémistes du RN et du NFP, qui vous conduiront au chaos ? » Le problème est que pour une majorité de Français, le chaos est déjà là ou va advenir de toute façon très rapidement. Le sentiment populaire est que la France s’affaisse dans tous les domaines et au sommet de l’État. La cécité présidentielle va entrainer une sévère défaite si on en croit les instituts de sondages.

Et ils font confiance au RN pour y remédier ?

Disons prudemment que le RN semble être la formation qui est la plus adaptée à la situation. Mais attention, c’est le RN qui a muté vers les Français. C’est le bas qui fait le haut. Il n’y a pas de lepénisation des esprits, ni par les autres formations politiques qui « trianguleraient », ni par des médias, ou les réseaux sociaux, ou par des influences et désinformations étrangères. C’est le processus inverse. Le cours des choses en politique procède des expériences collectives des Français dans leur quotidien. Les formations politiques sentent plus ou moins ces évolutions. Celles qui le peuvent le plus facilement sont celles qui sont le plus éloignées du Paris politico médiatique et des institutions. Celles qui ont leurs capteurs dans les catégories populaires. Voilà ce qui a fait la force du RN : son ancrage dans les catégories populaires. S’il décroche des ouvriers, employés et classes moyennes paupérisées ; il disparaitra plus rapidement qu’il n’a pris du temps pour muter de formation néofasciste à bonapartiste, à l’instar du RPF ou du premier RPR.

Et maintenant, que peut-il se passer ?

La situation est instable. La France est rentrée dans une phase historique de décomposition-recomposition politique autour de la question de la souveraineté nationale. Mais son intrication avec l’UE rend la situation chaotique d’autant que le sommet de l’État n’est pas indexé à l’imaginaire de la nation, à ses intérêts ; d’où notre déclin économique, social et l’affaissement de l’autorité de l’État.
Si on en croit les intentions de vote, le RN aura soit une majorité relative, soit une majorité absolue. La RN a dit ne vouloir cohabiter que dans ce dernier cas. Il ne veut pas être dépendant de forces de droite, en rupture avec son orientation sociale et avoir deux fronts ; celui de la cohabitation avec le président Macron adossé à l’UE et celui de l’Assemblée.
Une cohabitation Macron-Bardella serait tendue. Contrairement aux cohabitations Mitterrand-Balladur et Chirac-Jospin qui avaient su y mettre les formes, aidées par des proximités notamment en matière européenne. Aujourd’hui les positions divergent fortement.
Le RN veut réorienter de l’intérieur l’UE avec des alliés en son sein. Le président Macron voudra spontanément au contraire s’adosser à l’UE pour contenir le Premier ministre Bardella. D’une part il n’en aura pas la légitimité politique, et d’autre part les institutions ne définissent pas vraiment un domaine réservé pour le président en matière internationale.
Le Premier ministre a de facto l’essentiel des leviers en la matière et notamment le levier militaire. Jordan Bardella a fixé comme ligne rouge en cas de cohabitation le refus du RN d’envoyer de troupes françaises au sol en Ukraine.
Si le RN avait une majorité relative, alors la Chambre devrait être ingouvernable. Au vu de l’arithmétique, du fait du poids du RN et LFI, je ne vois pas une majorité à l’Assemblée pour un gouvernement du bloc central avec des alliés PS et LR.
Nous irions alors au titre de l’article 7 vers un retrait du président avec un gouvernement purement technique, de gestion des affaires courantes, et les Français seraient appelés aux urnes à la rentrée pour une présidentielle.
L’esprit des institutions voudrait que le président Macron se retire en cas de défaite importante aux législatives. Un président Macron « accompagnant » un Premier ministre Bardella semble difficile à assumer pour la « voix de la France », déjà décrédibilisée sur le plan international. Les institutions sont fortes mais ne supporteraient pas un affrontement au sommet de l’État. Pour éviter une crise institutionnelle, le président devrait alors sinon jouer un rôle purement formel. Le pourra-t-il ?

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Oui, il faut parler à tous les partis politiques…

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Sophie de Menthon Photo: D.R.

Les problèmes actuels de la France ont pour la plupart des origines dans le domaine économique. Et pourtant, on parle très peu d’économie dans cette campagne électorale, et quand on le fait, c’est en faisant preuve d’une grande ignorance du sujet, surtout de la microéconomie… Ah si seulement ceux qui s’y connaissaient parlaient haut et fort! Si seulement on les écoutait… Une tribune de Sophie de Menthon.


Cette guerre des clans, certes compréhensible, est une stupidité, surtout en ce moment. « Il ne faut pas parler aux cons, ça les instruit » disait Audiard, et cette répartie hilarante est devenue règle d’or ! La France est à l’image du banquet d’Astérix, c’est-à-dire une guérilla permanente qui fait tache d’huile. Les meilleurs amis ne se parlent plus, et les repas de famille sont à éviter avant le deuxième tour. Tous les commentaires de la presse ne font qu’empirer les choses. Tout contact est devenu le pseudo-signe d’un ralliement honteux. Quant au mouvement Ensemble pour la République, supposé fréquentable, il est l’objet de toutes les rancœurs haineuses. 
Tous les patrons, entrepreneurs et représentants patronaux devraient parler et expliquer à tous les opposants les rudiments d’une économie « normale » et viable, avec ce qui est nécessaire à la survie des entreprises et donc d’une économie de croissance. Pourtant, la plupart d’entre eux se cachent en se pinçant le nez devant les médias, se contentant de chasser d’un geste de mépris les sorcières de l’extrémisme.
Il ne faut pas s’étonner que les courageux prêcheurs de l’économie de marché se dérobent au lieu d’aller expliquer ce qui ne va pas dans un programme politique démago et hors sol. Guettés par la presse, systématiquement suspectés de pactiser avec l’ennemi et de soutenir le parti auquel ils tentent d’expliquer les conséquences de ses largesses programmatiques, ils rasent les murs pour ne pas être cloués au pilori de la bien-pensance.

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La crise que nous vivons est largement due à une ignorance économique crasse. Il faudrait instruire les politiques de tous bords. À commencer par ceux sortis de l’ENA qui ne s’est apparemment jamais penchée sur la micro-économie. Les écoles de commerce évoluent un peu plus vite mais à peine, la macroéconomie étant seule digne d’estime, ce qui nous vaut bien des leçons d’économistes de plateaux TV. Ces derniers sont certes respectables mais ils ne parlent pas aux épiciers que sont les petits patrons. Ceux qui représentent l’État croient tout savoir et prennent des décisions sans jamais consulter le terrain, estimant que le fait de convoquer les « organisations syndicales représentatives » autour d’une table à Matignon suffit amplement. Aucun retour, aucune évaluation sur ce qui a été décidé, seul le constat d’échec final servira… et encore !
Ignorance et indifférence économiques se retrouvent à tous les niveaux de notre système d’éducation : écoles (ne parlons pas des manuels scolaires qui s’intéressent plus au droit de grève qu’aux conditions du succès entrepreneurial), facs, professeurs plutôt anticapitalistes, grandes écoles… Les stages sont la seule voie de sauvetage du malheureux étudiant. Les journalistes n’ont guère plus de culture économique et le peu qu’ils ont est mélangé avec des convictions de générosité sociale. Ajoutez à tout cela la culture de la gratuité : « C’est gratuit, c’est l’État qui paie » (François Hollande), ainsi que l’adage national préféré de la gauche dans son ensemble consistant à « prendre l’argent où il est », et enfin la conviction selon laquelle « quand il n’y a plus d’argent, il y en a encore », et vous obtenez une dette abyssale qui est à combler. En prenant aux riches, bien sûr !

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Rappel : c’est l’entreprise avec ses salariés qui finance tout, absolument tout ! Il y a donc bien quelqu’un qui paie ! 
Il faut expliquer, expliquer encore, faire l’éducation de ceux qui prétendent avoir la science infuse et oser rencontrer les responsables politiques qui veulent bien écouter et – pourquoi pas ? – faire modifier leurs promesses… Donner des chiffres à coups de milliards ne suffit pas lorsque l’ignorance règne.
Il faut donc entrer en résistance contre cet état de fait et, comme pendant la Résistance, sortir masqués pour parler à ceux qui imposeront les règles de marché de demain… On apprendra aussi peut-être que ceux qui briguent le pouvoir ne sont pas aussi infréquentables qu’on le dit, et sont souvent demandeurs ! Courage : ne fuyons pas !

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Mélenchon et la Terreur

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Jean-Luc Mélenchon en campagne à Montpellier, 23 juin 2024 © Alain ROBERT/SIPA

Ne vous fiez pas à la fausse bonhomie de son très proche Manuel Bompard, dépêché hier soir sur TF1, pour le remplacer face à MM. Attal et Bardella. Ne vous fiez pas aux pleurnicheries de cette « tortue sagace » qui affirme que ses partenaires politiques aiment le « torturer » et l’ « humilier ». Mélenchon les méprise, et les trouve médiocres. Si la baroque alliance du Nouveau Front Populaire dominée par LFI remportait les législatives, le leader de l’extrême gauche entend bien aller à Matignon.


Lundi soir, dans « l’Évènement, l’interview » – Législatives 2024, sur France 2, Jean-Luc Mélenchon a répondu en direct aux questions de Caroline Roux. Le vieux loup gris est apparu tel qu’en lui-même, sans même prendre la peine de se travestir dans le déshabillé de la Mère-grand. On l’a entendu éructer, babines mousseuses et retroussées sur des canines encore tranchantes. L’histrion aussi patelin que goguenard et menaçant, sans nous épargner ses habituelles rodomontades, s’est répandu en imprécations et autres anathèmes pour nous donner l’un de ses meilleurs numéros. À l’issue de la prestation du bateleur, et c’est toujours ça de pris, ni les ralliés à LFI qui se sont compromis dans le Nouveau Front Populaire ni leur électorat ne douteront plus de l’aspiration farouche du Lider minimo à accaparer un pouvoir qu’il prétend, sans convaincre personne, ne pas désirer pour lui mais qu’il accepterait, bien sûr, s’il se trouvait dans l’obligation de faire don de sa personne à la France.

Il est très show, Méluche !

Le show aura aussi eu le mérite d’édifier sur les joyeux projets pour la France de notre saltimbanque et de ses affidés.  Le drille m’a rappelé le Marat des Mémoires d’outre-tombe, (Livre neuvième- Chapitre 3) décrit par mon cher Chateaubriand : « (…) l’embryon suisse Marat, les pieds nus dans des sabots ou des souliers ferrés, pérorait le premier en vertu de ses incontestables droits. Nanti de l’office de fou à la cour du peuple, il s’écriait avec une physionomie plate et ce demi-sourire d’une banalité de politesse que l’ancienne éducation mettait sur toutes les faces : « Peuple, il te faut couper deux cent soixante-dix mille têtes ! », « Caligula de carrefour ».

Recension de l’épisode savoureux.

Caroline Roux, pour chauffer le briscard madré, a d’abord évoqué la déclaration faite par ce bateleur sans vergogne lors d’un récent meeting : « J’ai l’intention de gouverner ce pays » et le peu d’enthousiasme suscité par celle-ci chez les coalisés contre « l’essstrêssme droite » et leurs soutiens dont François Hollande, Lionel Jospin, Fabien Roussel, Marine Tondelier, Raphaël Glucksmann. Notre birbe encore gaillard s’est alors insurgé avec véhémence contre les attaques que lui infligent les médiocres et les évincés du Nouveau Front Populaire qui « cherchent à le torturer, l’humilier le plus possible » au lieu de s’aplatir, comme il se doit, devant son auguste personne qui garantit le vote musulman : « Mélenchon, c’est un nom qui fait ouvrir les portes quand on est dans les quartiers populaires », assure-t-il. Il poursuit, cherchant à intimider ses partenaires achetés : « Je dis à Olivier Faure : attention, si les électeurs insoumis ne viennent pas voter pour toi, tu ne seras pas élu. » Un seul mot d’ordre pour Mélenchon qui se considère, sans vanité, précise-t-il, comme « l’atout » indispensable à la victoire de la gauche : soumettez-vous aux Insoumis. Il ajoute ensuite qu’en raison de son « expérience » corrélée à son « caractère », lui seul est susceptible de faire plier ces salauds de riches pour les forcer à accepter le nouvel impôt sur la fortune et l’impôt universel sur les sociétés étrangères. Que les blaireaux besogneux des classes moyennes qui se sont fourvoyés au RN se rassurent : « en dessous de 4000 euros, personne ne paiera plus. » Il n’est question, en fait, que de faire raquer les autres: « on rentrera plus d’argent en mettant moins à contribution les classes moyennes » ; avec 8% des plus riches, on financera le programme. Et que ceux qui « ne veulent pas donner un rond » et qui ne connaissent « pas plus le prix du malheur que celui du bonheur » aillent se faire lanlaire !

Il pense pouvoir arrêter Poutine en une nuit

Quand il sera question, plus tard, du tropisme antisémite de notre homme, on ne pourra qu’apprécier sa défense, convaincante, indubitablement : « Pour d’innombrables raisons je ne peux rien avoir avec l’antisémitisme et d’ailleurs je ne vois pas pourquoi je serais antisémite. » Et puis, rappelle ensuite le drôle, montant dans les tours et vociférant pour dissimuler sa diversion, les considérations de boutiquiers sordides, ennemis de genre humain, de la fraternité universelle, de la féminitude et des minorités intégrées dans un pays désintégré, demeurent dérisoires au regard de la guerre qui menace sur tous les fronts et dont tout le monde est responsable, excepté, on s’en doute, LFI et ses sbires. « Nous avons 2000 militaires sur le front de l’est, nous sommes exposés parce que nous avons 700 militaires au Liban, ensuite parce que les territoires de Polynésie et compagnie dans l’océan Pacifique nous exposent en première ligne. » « Tout ce qu’on raconte peut s’arrêter en une nuit si on va trop loin dans l’escalade. », conclut le démagogue, lapidaire. À la dernière question posée par Caroline Roux : « Si le RN arrive aux responsabilités et obtient la majorité absolue, respecterez-vous le verdict des urnes ? », on frémit à réponse de notre républicain : « Par définition, oui (…) qui a peur du peuple souverain n’est pas un démocrate. » Notre « tortue sagace » (Mélenchon se qualifie ainsi) se couplant à l’anguille retorse, précise : « Ça sera à nous de bien nous assurer que le RN respecte la République et ses principes fondamentaux. » On imagine que Mélenchon et ses séides ont une manière toute subjective d’envisager la chose…

Fervente lectrice de Chateaubriand, je ne doute pas de la portée des élucubrations narcissiques du sieur Mélenchon (Qui n’aspire qu’à nous rejouer la Terreur) sur un peuple chauffé à blanc qui ne demande, par conséquent, qu’à investir la scène et m’en inquiète, sachant que : « (…) pris collectivement, le peuple est un poète, auteur et acteur ardent de la pièce qu’il joue ou qu’on lui fait jouer. Ses excès ne sont pas tant l’instinct d’une cruauté native que le délire d’une foule enivrée de spectacles (…) » Mémoires d’outre-tombe, (Livre neuvième – Chapitre 4). Peut-être en est-il de notre Cinquième République comme il en fut autrefois de la royauté. Mais, sans doute, Jean-Luc Mélenchon devrait quand même garder en mémoire, la fin de Danton, Marat, Camille Desmoulins, Fabre d’Églantine ou de Robespierre…

Aux urnes, citoyens!

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DR.

Après un bref passage par l’isoloir, cette sorte de confessionnal profane où, juste avant le geste décisif et pour quelques instants, on peut enfin s’offrir le vrai luxe de n’être pas sous influence, on se dirige enveloppe en main vers l’urne et sa garde d’exemplaires citoyens plus ou moins commis d’office.

L’urne. Pas grand-chose. Juste un cube, traditionnellement en bois. Aujourd’hui, obsession de la transparence oblige, il est fait d’une matière qui permet d’en voir le contenu, de s’assurer qu’aucun génie malveillant et truqueur ne s’y cache. Ce nouveau modèle se veut technologiquement avancé puisque le voilà muni d’une poignée qu’on abaisse pour faire passer l’enveloppe du vote. Cela lui donne un petit air de machine à sous, de bandit manchot. On ne confondra pas pour autant le jeu démocratique avec celui du casino. Quoique… Pour l’élu, celui qui est parvenu à la remplir, cette urne, ce qui l’attend au bout du bout n’est pas loin de ressembler une sorte de Jackpot. Echarpe tricolore, cocarde au pare-brise, place numérotée à l’Assemblée, salut militaire du garde champêtre, place de choix au bal des pompiers, etc. Considération assurée, du moins jusqu’à une époque récente. Aujourd’hui, l’affaire est moins simple. L’élu devient lui-même fort souvent une espèce d’urne sur pattes dans laquelle viennent se déverser les ressentiments, les colères, les insatisfactions, les rancoeurs de ses concitoyens. Pauvre de lui.

À lire aussi, Elisabeth Lévy: Aux armes, citoyennes!

Pour les recalés du scrutin aux ambitions réduites en cendres, on peut dire que ce cube vire d’un seul coup d’un seul à l’urne funéraire. Elle l’est aussi fort souvent, du moins à ce que prétendent les ronchons de profession, pour les espérances – si souvent déçues – de l’électeur, le pauvre bougre qui s’est laissé gagner par l’ébriété de la foire aux promesses d’avant scrutin.

Il n’empêche, y glisser son mot demeure bel et bien le geste à la fois le plus simple et le plus sacré de la vie démocratique. On ne s’en privera donc pas…

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La Marge Brute d’Autofinancement, arbitre des programmes économiques 2024

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Eric Coquerel et Boris Vallaud du "Nouveau Front populaire" ont présenté des mesures économiques inquiétantes devant le MEDEF à Paris, 20 juin 2024 © Philemon Henry/SIPA

La marge brute d’autofinancement (MBA) des entreprises françaises s’est dégradée de façon lente mais inexorable depuis trois décennies, sous la pression fiscale et sociale publique. 1 000 milliards d’euros de décalage de production de richesse sur une décennie. C’est l’explication de l’insuffisance des moyens financiers des entreprises françaises par rapport aux entreprises allemandes pour financer leurs développements industriels, leurs développements commerciaux à l’exportation, le paiement de bonnes rémunérations à leurs salariés, la promotion de formations adaptées ainsi que le soutien de la recherche et de l’innovation du pays. C’est ainsi une des principales explications de la perte de compétitivité de la France et de la dégradation du pouvoir d’achat des Français. Les programmes économiques pour les élections législatives sont ici analysés sous le prisme de leur impact sur la MBA. Les conclusions sont claires et sans appel.


La MBA, un concept macro-économique peu glamour

MBA : Marge Brute d’Autofinancement des entreprises. Pas très glamour comme concept ! De plus, il s’agit d‘un agrégat de comptabilité nationale et non de comptabilité privée. Donc, encore plus incompréhensible pour le commun des mortels.
Les économistes attitrés – à part quelques individualités comme Christian Saint-Étienne, par ailleurs membre du shadow cabinet d’Éric Ciotti au temps où LR n’était pas encore éclaté – ne suivent pas vraiment cet agrégat économique. Il est proche de l’EBE (excédent brut d’exploitation) de la comptabilité privée, qui est lui même le presque équivalent du célèbre EBITDA anglo-saxon (Earnings Before Interest, Taxes, Amortization and Depreciation, cela ne s’invente pas) des business plans – plans d’affaires en bon français – qui ont envahi les sphères publiques et privées de notre pays.

La meilleure illustration du lent et inexorable déclin français

Pourtant, l’évolution de la MBA des entreprises françaises traduit et exprime le lent et inexorable déclin du pays depuis trois décennies. Personne n’en parle, sinon des structures d’analyse économique internationales confidentielles, dédiées aux grands investisseurs institutionnels, telles que celle de Charles Gave, dont les travaux sont mis en avant en France par l’Institut des Libertés. Analyses connues par quelques grands groupes français. Largement ignorées par la sphère publique.
Quels sont les enseignements de l’analyse de l’évolution de la MBA des entreprises françaises sur une longue période ?

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1 000 milliards d’euros d’appauvrissement sur une décennie

En premier lieu, la MBA des entreprises françaises a régressé de 18 % depuis 1990 (24 % du PIB en 1990, 19,7 % en 2023). Sur la base des données 2023, ceci représente 120 milliards d’euros en moins par an pour les entreprises françaises. Une paille. Au-delà de la brutalité de ces données quantitatives, ceci signifie que les entreprises françaises ont tout simplement perdu d’importantes capacités d’investir, d’innover, de rémunérer leurs salariés et de recruter, pour des raisons qui tiennent aux conditions économiques, fiscales et sociales propres à la France. Sur dix ans, ceci correspond à un décalage de richesse économique de plus de 1 000 milliards d’euros, soit un tiers de la dette publique ou encore, les deux-tiers des salaires français annuels.

Graphique: Institut des Libertés

Plus de 500 milliards d’euros annuels de moindre richesse par rapport à l’Allemagne

En second lieu, si l’on compare les évolutions de nos grands partenaires, la MBA annuelle des entreprises allemandes est passée de 22 % du PIB en 1990 à 24,9 % aujourd’hui, soit 1 026 milliards d’euros pour l’Allemagne contre 553 milliards d’euros pour la France, près de deux fois plus. Pour l’Italie, la MBA est passée de 24 % en 1990 à 20,5 % en 2013 puis est remontée à 25,4 % aujourd’hui, soit 530 milliards d’euros, une forme d’effet Draghi/Meloni. Ainsi, les entreprises italiennes enregistrent le même niveau de MBA en volume que les entreprises françaises ! Enfin, les chiffres des États-Unis donnent le vertige : de 16 % en 1990, la machine à produire de la richesse américaine propulse la MBA à 22,7 % du PIB aujourd’hui, soit 5 511 milliards d’euros, cinq fois plus que l’Allemagne, ce qui est en proportion des populations, mais 10 fois plus que la France. Nous touchons là la clé du problème français en matière de pouvoir d’achat, d’emploi, de compétitivité et de décalage technologique, corrélé avec la faible productivité française. Et aussi la problématique du PIB par habitant, où la France est  10 % en dessous de l’Allemagne et 39 % en dessous des États-Unis.

Graphiques: Institut des Libertés

La MBA explique le chômage incompressible français

En troisième lieu, il existe une corrélation entre l’évolution de la MBA et le chômage. Le graphique qui suit est éloquent. Il peut contribuer à l’explication d’un socle incompressible de chômage en France, à un niveau plus élevé que ses partenaires immédiats (France : 7,3 %, Allemagne : 3,2 %, Royaume-Uni : 4,3 %, Italie : 7,2 %, OCDE : 4,9 %, États-Unis : 3,8 % ; données OCDE mars 2024). Les économistes attitrés n’ont pas d’explications satisfaisantes, sinon d’indiquer que la formation professionnelle française n’est pas adaptée, ce qui est un peu court.

Graphique: Institut des Libertés

Le poids de l’État plombe le retour à la croissance

Enfin, et c’est l’enseignement le plus frappant, il existe une corrélation entre l’évolution de la MBA des entreprises et le niveau des prélèvements obligatoires, avec un impact négatif puissant sur la croissance. L’incorrigible propension française à créer des impôts et des ponctions sociales depuis quatre décennies, qui aboutit aujourd’hui à ce que le pays soit le plus imposé au monde, se traduit par une faiblesse structurelle des marges des entreprises. Les entreprises ne peuvent dès lors pas rémunérer et former correctement leurs salariés. Elles sous-investissent. La croissance est plombée par le poids de l’État dans l’économie, ce qui explique que la France se situe durablement sous son niveau de croissance naturelle. Georges Clémenceau ne disait-il pas déjà en 1886 : « La France est un pays extrêmement fertile : on y plante des fonctionnaires et il y pousse des impôts ».

Graphique: Institut des Libertés

Qui en parle ? Personne. Normal, la classe politique française n’est pas vraiment en mesure de se pencher sur les vrais sujets économiques, à l’exception de quelques personnalités de gauche et de droite qui se comptent sur les doigts d’une main.


Les programmes économiques 2024  à travers le prisme de la MBA

Les divers programmes économiques présentés lors des élections législatives de juin/juillet 2024 peuvent être utilement analysés selon cette grille de lecture de la MBA des entreprises.

Le Nouveau Front Populaire et le multiplicateur keynésien négatif

L’économiste Thomas Piketty © LCHAM/SIPA Numéro de reportage: 00684113_000001

Commençons par le Nouveau Front Populaire (NFP). Relance keynésienne, effet multiplicateur sur la croissance, SMIC à 1 600 € net par mois, ponctions sur les 223 milliards d’euros d’aides bénéficiant aux entreprises, 14 tranches d’impôt sur le revenu avec la quatorzième à 90 %, rétablissement d’un ISF dur à vocation climatique. Faire payer les riches et redistribuer aux pauvres. Quant à la dette publique, le stock n’est pas un problème « car, c’est bien connu, personne ne le rembourse ». Seule la charge d’intérêt, le flux donc, doit faire l’objet de vigilance. 125 milliards de dépenses supplémentaires entièrement compensés par des impôts supplémentaires, et, à terme, les retombées fiscales de la relance keynésienne. Il faut reconnaître une certaine cohérence intellectuelle à ce programme, préparé avec l’appui d’économistes stars (Thomas Piketty, Esther Duflo, Gabriel Zucman).
Une seule remarque : le multiplicateur keynésien devient négatif lorsque le niveau des prélèvements obligatoires dépasse un certain seuil. Et nous y sommes depuis 2009. C’est ce que Keynes – qui était un libéral et non un social-démocrate – appelait la trappe à dettes. Pour le dire différemment, les dépenses publiques sont entrées dans la zone des rendements décroissants.  Une forme d’externalité négative de la dépense publique.
Dès lors, le programme du NFP est inéluctablement voué à l’échec, avec la funeste conséquence d’un appauvrissement global du pays. Saluons à cet égard l’économiste Olivier Blanchard qui a su prendre ses distances avec ce programme.

Graphique: Institut des Libertés

La majorité présidentielle dans le bon sens mais un peu tard

Ensuite, le programme de la majorité présidentielle.
Il intègre la nécessité de faire baisser les prélèvements obligatoires et affiche une réduction programmée du déficit budgétaire et de la dette publique dans la durée. Aucun impôt supplémentaire. Baisse des impôts de production. Néanmoins, une maîtrise des dépenses publiques. Cela va évidemment dans le bon sens. Mais c’est un peu tard, après la génération de 900 milliards de dettes supplémentaires en sept ans.

Un RN prudent qui s’est converti au sérieux budgétaire

Enfin, le programme du RN. Remarquons d’abord que le cœur du programme économique de la présidentielle 2022 n’avait pas été affiché dans sa globalité en son temps, pour diverses raisons conjoncturelles (irruption d’Éric Zemmour en septembre 2021, campagne de Valérie Pécresse en décembre 2021, guerre en Ukraine en février 2022). La trajectoire des finances publiques y avait été planifiée sur 10 ans : déficit budgétaire primaire passant à zéro dès 2026, dette publique stabilisée jusqu’en 2027 puis décroissante en proportion du PIB à partir de 2028, baisse drastique des prélèvements obligatoires qui passent en dessous de la barre symbolique des 40 % du PIB en 2030.

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Aujourd’hui, deux ans plus tard, la situation de la France a changé, ce qu’attestent la dégradation de la notation financière française et la procédure pour déficit excessif lancée par la Commission européenne. Toutes les mesures « zakouskis » de la présidentielle ne sont dès lors plus à l’ordre du jour (exonération d’impôt sur le revenu et sur les sociétés pour les moins de trente ans,…). Seules subsistent des mesures majeures pour le pouvoir d’achat : baisse de la TVA sur les produits énergétiques et dispositif de soutien des augmentations de salaires supérieures ou égales à 10 %. Ces mesures, compensées sur un plan budgétaire, correspondent à des baisses de prélèvements obligatoires sans augmentation de la dette publique et vont dès lors  dans le bon sens, du point de vue de la grille d’analyse exposée ci-dessus. Et à n’en point douter, l’efficience relative des mesures sera prise en compte lors des arbitrages budgétaires opérationnels futurs…
À titre anecdotique, il est pour le moins notable que la proposition du RN d’exonération des cotisations patronales pour les augmentations salariales supérieures ou égales à 10 % (pour les salariés en-dessous de 3 fois le SMIC), est plus vertueuse que la prime Macron pouvant aller jusqu’à 10 000 € sans charges sociales : la mesure RN rapporte quand même les cotisations sociales employés, sans effet d’aubaine globalement, avec un choix de l’entreprise en fonction de ses capacités à conférer du pouvoir d’achat à ses salariés sans déstabiliser sa trésorerie (l’Institut Montaigne n’a pas, en l’espèce, correctement intégré les caractéristiques du dispositif pour établir son estimation de coût, à hauteur de 800 M€ par an) ; la prime Macron, quant à elle « one shot », se substitue à du salaire courant et donc coûte immédiatement les cotisations sociales non acquittées (2 milliards d’euros par an).

Un fonds souverain pour les investissements de bien commun qui permet de sortir de l’étau de la dette et du déficit

Enfin, les caractéristiques techniques du fonds souverain de 500 milliards d’euros, constitué progressivement sur cinq ans, annoncé à l’automne 2021, n’ont pas été dévoilées à ce stade. Notons simplement qu’il a vocation à financer les 100 milliards d’euros d’investissements annuels de bien commun (transition environnementale, infrastructures, innovation/recherche, fonds propres des PME) sans augmenter la dette publique et le déficit budgétaire. Avec l’effet d’un multiplicateur keynésien positif et non négatif, car sans augmentation des prélèvements obligatoires. Au bénéfice de la croissance française.
Espérons donc que les femmes et hommes politiques, quel que soit leur bord, intègrent à l’avenir les enseignements lumineux que les analyses de la MBA française et du multiplicateur keynésien effectif apportent à la définition d’une politique économique française pertinente.


La Lettre aux Français de Macron: comme une bouteille à la mer…

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La députée RN sortante Caroline Parmentier en campagne pour les prochaines élections législatives à Neuve-Chapelle (62), le 22 juin 2024. DR.

Toute une France humiliée est actuellement portée par le vent de l’histoire, estime notre chroniqueur, qui prévoit qu’elle n’a pas fini de se faire entendre…


Bis repetita : la colère française, que j’annonçais sans grand risque de me tromper dans les européennes du 9 juin, mettra à nouveau les points sur les i, ce dimanche. Et encore le 7 juillet, pour le second tour des législatives. La raison en est simple : les Français excédés ont de la suite dans les idées. 

Le président et les « cloportes »

Les intimidations morales des médias ne fonctionnent plus. D’autant que la « gauche divine » des années 80 a muté en un Front de la honte mêlant des courants sectaires, violents, antisémites, anti-Français. Le parti présidentiel risque de laisser d’autres plumes, singulièrement face au bloc national RN-Ciotti. « Je ne suis pas aveugle », assure Emmanuel Macron dans une Lettre aux Français diffusée dimanche. En réalité, son narcissisme le détourne des réalités. Il se persuade encore de pouvoir susciter le « sursaut » autour de sa personne. Les historiens auront d’ailleurs à se pencher sur son cercle si médiocre (« des cloportes », a dit Bruno le Maire) qui, dit-on, l’a encouragé à dissoudre l’Assemblée dès l’échec du 9 juin pour son camp. 

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Le chef de l’Etat va, très probablement, perdre dimanche de n’avoir su admettre, depuis la révolte des gilets jaunes, que le pays fâché lui échappe et que la démocratie n’est pas la tyrannie des minorités mais l’expression du plus grand nombre. Cette déconnexion, souvent dénoncée ici, explique la crise politique que Macron a accélérée par dépit, à la veille de l’ouverture des Jeux Olympiques de Paris. Le pire qui pourrait advenir serait, en cas de large victoire de Jordan Bardella, de voir la gauche insurrectionnelle, soutenue par des sociaux-démocrates à la ramasse, contester la démocratie dans une guerre des rues.

Face à une hégémonie perdue, chacun joue sa petite musique

Le vent de l’histoire a quitté le camp du Bien. Il paie d’avoir trop longtemps méprisé les gens ordinaires au nom de ses utopies. Gérald Darmanin, ce lundi sur RTL, a rappelé sa sympathie pour « le bon peuple ». Mais, pour la macronie, il est trop tard pour s’amender auprès de lui. La dynamique porte la droite pragmatique et ses anciens parias. « Une vogue philosophique s’impose comme une vogue gastronomique : on ne réfute pas plus une idée qu’une sauce », remarquait Cioran. De fait, les alertes du système unanime sur le retour d’une « extrême droite » qui porterait la moustache d’Hitler sont pathétiques. Ces peurs agitées ne sont plus comprises, majoritairement, que comme un procédé de la gauche paniquée pour tenter de sauver un peu de son hégémonie perdue.

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Le doute s’est d’ailleurs installé dans les rangs des plus lucides des « progressistes ». Samedi, sur LCI, l’acteur-réalisateur de gauche Mathieu Kassovitz a dérogé à l’esprit moutonnier de son camp en déclarant que le RN avait « peut-être sa place en France » et que « c’est peut-être une expérience à essayer ». Le 15 juin, dans Libération, Ariane Mnouchkine, créatrice du Théâtre du Soleil, a notamment reconnu, au nom de la gauche culturelle : « On a lâché le peuple (…) Quand les gens disaient ce qu’ils voyaient, on leur disait qu’ils se trompaient, qu’ils ne voyaient pas ce qu’ils voyaient (…) Puis comme ils insistaient on leur a dit qu’ils étaient des imbéciles, puis (…) on les a traités de salauds. On a insulté un gros tiers de la France par manque d’imagination (…) »

C’est cette France humiliée, que la gauche persiste à traiter de fasciste alors qu’elle-même s’abîme dans l’intolérance, qui va encore faire parler d’elle dimanche. Ce n’est pas fini.

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