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Le juste prix du vin

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Au restaurant, les prix du vin ont tendance à atteindre des sommets sans raisons apparentes. Au détriment des vignerons et des clients. Dans son manifeste, le sommelier Antoine Pétrus appelle les restaurateurs à la raison.


Restaurateurs,

Exagérer sur les tarifs des vins, c’est massacrer le travail et la notoriété du vigneron concerné. Je suis pourtant de ceux qui pensent qu’un coefficient raisonnable n’a rien d’inconcevable. Il reflète la qualité du cadre dans lequel le flacon est servi, la maîtrise et le rythme du service, l’intelligence relationnelle créée par le sommelier, les informations précises et intelligibles que celui-ci est capable de donner, sans oublier le choix humain de la parfaite température de service, du meilleur verre adapté à chaque vin, de l’accord avec les mets choisis et de l’émotion qu’il fait naître à table. Je crois aussi que l’application d’un coefficient de vente plus élevé peut aussi être justifié si le vin proposé a fait l’objet d’un vieillissement lui permettant de s’améliorer. Il y a en effet un surcoût évident à présenter un vin âgé et prêt à boire par rapport à un vin jeune.

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Quoi de pire pour le consommateur que de payer trop cher un vin trop jeune ? Le mérite du restaurateur est le même que celui d’un bon cuisinier: proposer et servir un produit arrivé à maturité et à sa pleine expression de goût, en élaborant une carte des vins avec des vins mûrs, prêts à boire et au sommet de leurs expressions. À l’heure de la transparence dans nos assiettes, la provenance du vin est aussi un sujet à mettre sur la table. Comment être certain que chaque référence mentionnée sur la carte des vins provient bien de la cave du vigneron ? Acceptons-nous de payer l’impact carbone, gustatif et financier, d’une caisse ayant fait le tour du monde ? Demain, peut-être, les cartes des bons restaurants mentionneront la provenance directe des vins proposés. Cela permettrait de mettre en avant les liens précieux tissés avec les producteurs par les meilleurs restaurateurs et les meilleurs sommeliers.

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Certains restaurants sont connus pour leurs cartes des vins bien construites qui savent maintenir des tarifs accessibles. Le mouvement mérite d’être suivi par d’autres, au détriment des comportements des apprentis sommeliers banquiers. Ce modèle d’exploitation commerciale vertueux est permis par une fidélisation des clients et une place donnée au vin respectueuse dans l’écosystème du restaurant. Imaginez un monde dans lequel ces hauts coefficients s’appliqueraient avec la même logique à la carte des plats. Coefficients six sur la salade, sept sur le cabillaud, neuf sur le filet de bœuf : une publicité pour les régimes minceur, mais tant de faillites. Méfiance, ne prenons pas le client pour la banque.

Ce manifeste a été initialement publié dans la revue En Magnum, publiée par le guide Bettane+Desseauve, spécialiste des vins.

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Les pros de l’antiracisme sont plus dangereux que les islamistes!

Je vous invite à la décence. Vous, professionnels de l’antiracisme…


Je vous invite à la décence. Vous, professionnels de l’antiracisme. Vous, que j’ai aux trousses depuis les années 90. Je vous écoute, depuis quelque temps, dénoncer enfin l’antisémitisme qui se dissimule sous le palestinisme. J’entends vos soupirs à la vue des jeunes filles assujetties au voile, cet uniforme politique. Je me félicite de vos indignations quand des professeurs se font insulter par des élèves hostiles à la République. Je suis heureux quand les plus clairvoyants d’entre vous osent désigner l’origine des assassins de Samuel Paty ou de Dominique Bernard, ce professeur de français du lycée Gambetta-Carnot d’Arras, dont la ville a célébré dimanche la première commémoration de son égorgement par un ancien élève appliquant le djihad à la lettre. Je vous observe, ébranlés par la violence qui fracture la société, à la recherche d’une cause pouvant épancher votre curieux besoin de donner des leçons. Comme les carabiniers, vous débarquez bruyamment en assurant avoir identifié le mal, à travers le nouveau totalitarisme islamiste. Bien vu ! Vous avez mis le temps. A ceci près que vous persistez à ne rien voir de vos propres responsabilités dans la libanisation de la nation. Incapables d’admettre le lien entre l’islamisme importé et l’immigration massive, vous continuez à traiter de xénophobes ceux qui récusent la société ouverte à ses ennemis. Votre pharisaïsme signe votre tartufferie. Voyez : c’est la Hongrie de Viktor Orban, ce paria que vous accusez d’antisémitisme, qu’Israël en guerre a choisi pour assurer, jeudi dernier, le match de foot Israël-France. Les Juifs y sont en sécurité.

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La vérité c’est que vous, faux gentils, n’osez aller au bout de votre timide lucidité, qui vous vaut les opprobres de la gauche dogmatique. Le confort intellectuel reste votre refuge. Il vous empêche d’admettre que vous vous êtes trompés dans vos exhibitions humanistes insensibles aux réalités humaines. Vos sermons ne sont d’aucun recours pour résister à la conquête islamiste, que vous mettez en parallèle avec la montée de « l’extrême droite » qui s’y oppose. Dimanche, à Arras, le maire, Frédéric Leturque, l’un des vôtres, a défendu « le vivre ensemble » en citant, devant une foule homogène, Antoine de Saint Exupéry : « Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis ». Une colombe de la paix et des cœurs ont été dessinés. Des poèmes ont été récités, des danses exécutées. Des roses blanches ont été déposées au pied de la plaque « aux victimes des attentats terroristes du 13 novembre 2015 ainsi qu’à tous les innocents tombés en France et dans le monde ».

Pas un instant, l’islamisme qui a tué Dominique Bernard n’a été évoqué. Pourtant, Mohamed Mogouchkov avait précisé avoir égorgé son ancien professeur parce qu’il lui avait appris « la passion, l’amour, l’attachement au système en général de la République, de la démocratie, des droits de l’homme ». À Arras comme à Conflans-Sainte-Honorine, où Samuel Paty fut décapité par Abdoullakh Anzorov le 16 octobre 2020 à la sortie de son lycée, ce n’est pas « la laïcité qui a été attaquée », comme l’a répété Anne Genetet, ministre de l’Education, en cautionnant l’euphémisation des faits. C’est l’islam en guerre qui a lancé ses assauts contre la France, aux portes laissées ouvertes. La gauche bien-pensante ne songe toujours pas à les fermer. C’est pourquoi elle est responsable de ce qu’elle dénonce. Elle est plus dangereuse que les islamistes qu’elle laisse venir.

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De la guimauve pour Dominique Bernard

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L’hommage du maire d’Arras (62) à Dominique Bernard ne nous a pas convaincus. La cause de la mort du professeur, survenue il y a un an, n’a jamais précisément été nommée: l’islamisme.


Six minutes de guimauve prononcée devant une « artiste » peignant des petits cœurs sur une toile, toile qui va entamer une itinérance ! Si c’était moins grave, on hurlerait de rire.

Frédéric Leturque, le maire centriste d’Arras, est parvenu à ne jamais prononcer le mot islam (politique, radical ou identitaire) dans son discours. Et à aligner tous les poncifs sur le vivre-ensemble (sauf avec le RN, sujet sur lequel il est intraitable) ou l’école « qui favorise le dialogue et la paix », avec des phrases comme « La France est solidaire quand elle est rassemblée » qu’on donnerait en exemple de lapalissade si on apprenait encore ce terme dans nos écoles. Bref, de la bienveillance et de la tolérance à jets continus. Et pour finir, cette citation de Saint-Exupéry, enrôlé dans cette croisade de la niaiserie : « Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis ». Pardon, mais je ne crois pas que la différence du tueur de Dominique Bernard nous enrichisse. C’est insupportable.

Tendons la joue gauche ! Le délicieux écrivain anglais catholique Chesterton disait que le monde était plein d’idées chrétiennes devenues folles. Aujourd’hui, on a le sentiment qu’il est plein d’idées chrétiennes devenues sottes.

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Dominique Bernard, Samuel Paty et les dessinateurs de Charlie Hebdo dont on commémorera en janvier les dix ans de l’assassinat méritent un discours plus combatif que ce pensum capitulard et pleurnichard. Le fanatisme islamiste défie la France, pas seulement par la violence, mais en imposant des normes contraires à nos lois et à nos mœurs, et en embrigadant une partie de la jeunesse musulmane dans un délire anti-France. Face à lui, on attend du Churchill – we shall fight them on the beaches, nous les combattrons sur les plages, dans les rues et dans les champs. Et on a à la place des musiciens et des jongleurs, du mère Térésa pour les nuls, un galimatias sur la différence qui enrichit. En quoi la différence de gens qui pensent qu’Allah leur ordonne de tuer des professeurs, des Français, des juifs ou des musulmans mécréants nous enrichit-elle ?

La condition de la paix, c’est la sécurité pour tous. Le vivre-ensemble, nous sommes tous pour. Mais à nos conditions, celles que les Français de toutes origines et de toutes confessions se sont collectivement données au cours des siècles. Quand j’écoute Monsieur Leturque, j’ai l’impression d’assister au suicide de l’Occident. Sauf que la majorité des Français et des Européens ne sont pas d’humeur à se contenter de trémolos sur la laïcité, de petits cœurs ou de minutes de silence dont tout le monde craint qu’elles soient perturbées aujourd’hui dans les établissements scolaires.


Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de J-J. Bourdin sur Sud radio

Viktor Orbán au Parlement Européen: un seul adulte dans l’hémicycle?

Venu présenter les priorités de la présidence hongroise de l’Union européenne (juillet 2024 – janvier 2025), le populiste Viktor Orbán a été vivement critiqué par ses opposants et par Ursula von der Leyen. Au-delà de son euroscepticisme, on lui reproche son népotisme à Budapest et ses accointances avec Moscou. L’analyse de Rodrigo Ballester, du Centre d’Études Européennes du Mathias Corvinus Collegium de Budapest.


Si quelqu’un voulait voir un concentré chimiquement pur de tous les maux dont pâtit la classe politique occidentale, alors il ne pouvait être mieux servi par le débat, aussi affligeant que révélateur, qui a suivi le discours de Viktor Orbán au Parlement européen le 9 octobre. Le Premier Ministre hongrois y est allé en chef d’État présenter les priorités de sa présidence et, en réponse, les honorables membres de cette assemblée n’ont pas manqué d’étaler leur répertoire de sentimentalisme puéril, de signalement vertueux, de messianisme maladif et de pensée magique. Petit tour de piste.

Discours de droite musclé et politique Instagram

Il est d’usage que le chef d’État qui assume la présidence tournante de l’UE vienne expliquer son programme à Strasbourg et qu’un échange s’ensuive avec la Commission et les élus européens. Orbán a pris la tâche au sérieux et en allant au-delà des poncifs habituels a brossé sans langue de bois mais avec politesse, le portrait d’une Europe qu’il juge à la dérive et a suggéré quelques pistes pour y remédier. Compétitivité, migrations, élargissement, géopolitique, un exposé étayé et quelques constats lucides et cinglants, comme le lien irréfutable entre la migration illégale et l’augmentation de l’antisémitisme, l’homophobie et la misogynie. Une occasion pour le Parlement et la Commission d’enterrer la hache de guerre et de se montrer à la hauteur d’un vrai débat de fond… qui a vite tourné à l’hystérie collective, à l’incantation de mantras et à la politique Instagram.

Pour commencer, juste après son discours, les bancs de la gauche européenne ont entonné un « Bella Ciao » qui a obligé la présidente du Parlement, Roberta Metsola, embarrassée, à leur rappeler littéralement que ce débat n’était pas le festival de l’Eurovision. Propos prophétiques tant les députés furent à la hauteur de leur médiocre réputation de clowns-mandarins hors sol. Mention spéciale à Valérie Hayer et Raphaël Glucksmann qui, dans leur style mièvre habituel, ont invectivé M. Orbán en proposant presque d’aller sauver le peuple hongrois des horribles griffes du dirigeant qu’ils réélisent depuis 2010 ! La porte-parole des Verts, la très excentrique et arc-en-ciel Terry Reintke a décrit un portrait aussi apocalyptique que délirant de la Hongrie, surtout pour les minorités sexuelles, tout en oubliant qu’à Budapest, contrairement à l’Allemagne, l’Autriche ou la Norvège, il est plutôt agréable de manifester sans menaces de barbus. S’en est suivie une litanie de platitudes et de slogans sur l’État de droit, la corruption, la liberté de la presse et, surtout le sempiternel « redcutio at Putinum » qui est devenu la seule et maigre parade intellectuelle pour museler tout débat face à Orban, tout débat sur la guerre en Ukraine et bien au-delà. Seul petit progrès, personne n’a osé cette fois traiter Orbán d’antisémite. La Hongrie étant le seul pays européen qui ose encore organiser les matchs de l’équipe israélienne de foot et l’un des rares où marcher dans la rue avec une kippa est possible, c’eut été quelque peu indécent.

Le Parlement européen, une secte ?

Un spectacle consternant, mais finalement assez banal. En revanche, ce fut une surprise de voir la présidente de la Commission, Ursula Von der Leyen, en faire tout autant et piétiner son rôle institutionnel pour se livrer à une attaque politicienne et mensongère. La Hongrie serait le seul pays à se fournir en énergie fossile russe ? Faux, la France, l’Espagne et la Belgique sont les principaux importateurs de gaz liquéfié russe. La Hongrie accueillerait à bras ouverts des travailleurs russes ? Oui : 7000 Russes vivent en Hongrie, mais 300 000 habitent en Allemagne, lui rétorque Orbán qui lui rappelle, au passage, l’augmentation exponentielle des transactions entre les entreprises européennes et la Russie à travers la Turquie, l’Inde et l’Asie centrale. La Hongrie serait autocratique ? Sauf qu’un gouvernement avec une majorité de deux tiers n’a jamais mis en place un « cordon sanitaire » contre quelque parti que ce soit, comme c’est le cas à Strasbourg contre le groupe des Patriotes. Et surtout, on n’a entendu aucune réaction au discours d’Orbán en tant que tel et aux priorités de sa présidence qu’il était venu présenter de bonne foi. 

Mal en a pris à Mme Von der Leyen, car le Premier Ministre hongrois a le sens de la répartie et l’a renvoyée dans les cordes. Il a profité de l’occasion pour dénoncer l’intenable hypocrisie des dirigeants européens, leur messianisme, leur arrogance d’illuminés, leur incapacité à regarder la réalité en face et leur vision sectaire d’une Europe totem contre laquelle toute critique devient un blasphème. Bref, les maux que l’on prête à un gamin capricieux, si révélateurs de ce « woke state of mind » des élites qui fait sombrer l’Europe dans un désespérant marasme d’incompétence. Seul contre tous, fort de sa légitimé démocratique et de sa lucidité, le Hongrois a survolé le Parlement européen. Et, dans le temple de la politique spectacle et des postures surjouées, il a démontré pendant trois heures, qu’au milieu des enfants gâtés, il n’y avait qu’un seul adulte dans l’hémicycle.

OQTF, un feuilleton français

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Seules 6% des dizaines de milliers d’obligations de quitter le territoire français prononcées chaque année sont exécutées. Une administration mastodonte, des associations hyperactives et un « État de droit » pointilleux bloquent leur application. L’enjeu migratoire est pourtant sécuritaire et moral.


L’inexécution des fameuses obligations de quitter le territoire français (OQTF) est un des symboles de l’impuissance de l’État concernant la sécurité des Français et le contrôle effectif de ses frontières. Elle met ces derniers temps en évidence le mauvais entretien de liens diplomatiques profitables avec les pays desquels sont issus ceux faisant l’objet de ces OQTF.

Cette mesure administrative est pourtant simple et claire à première vue : un étranger en situation irrégulière ou présentant un trouble à l’ordre public doit quitter le territoire. Sauf que cette obligation a été travestie en une invitation déguisée. L’individu doit quitter le territoire dans un délai de 30 jours, spontanément et par ses propres moyens… délai durant lequel il pourra déposer un recours administratif par l’intermédiaire d’associations gavées d’argent public et bloquer ainsi toute exécution de la décision administrative.

Tribunaux encombrés

En dépit des effets d’annonces des ministres successifs, le taux d’exécution des quelque 130 000 OQTF délivrées chaque année stagne à un niveau dérisoire autour de 6%, et la France s’enfonce de plus en plus dans une crise migratoire et sécuritaire où la complaisance de l’État finit par nourrir une insécurité permanente sur l’ensemble du territoire. Le manque d’implication du Quai d’Orsay en charge pourtant de la coopération avec les pays d’origine, pour l’obtention des laissez-passer consulaires, est inexplicable.

Ce fiasco migratoire a plongé la France dans une anomie totale dans laquelle elle ne parvient plus à appliquer ses propres règles en raison de procédures inefficaces, lesquelles sont détournées de leur finalité première par une complexité juridique, des recours judiciaires permanents et des tribunaux administratifs totalement saturés par une politique du chiffre imposée par Beauvau. Les préfectures utilisent régulièrement et à mauvais escient des matrices pour rédiger ces mesures et gagner en rapidité mais non en efficacité car les particularismes de chaque dossier ne sont pas considérés. Il faut noter que des individus, parfaitement insérés dans la société, ont fait l’objet d’une OQTF alors qu’ils attendaient leur rendez-vous en préfecture pour renouveler leur carte de résident arrivée à expiration… C’est dire le bon sens dans ce domaine, tant l’effort devrait être concentré sur les indésirables non insérés, les coupables de crimes ou délits ou les individus fichés S en raison de leur dangerosité ! Mais pour expulser ces individus, la route est malheureusement sinueuse en raison principalement de nos propres lois.

Nos logiques bureaucratiques et humanitaristes poussées à des sommets paroxystiques au détriment de la sécurité des Français ont des conséquences tragiques : l’assassin du professeur à Arras, Mohammed Mogouchkov, ou encore le criminel supposé de Philippine, n’auraient jamais dû être sur le sol français au moment de leur passage à l’acte. Et ils sont loin d’être des cas isolés tant l’actualité pullule de ces drames.

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Ce premier individu, en dépit de ses liens avec des activités terroristes, a pu rester en France par l’agitation frénétique d’associations furibondes, mises sous perfusion d’argent public, et lesquelles agitaient à l’époque les conventions et traités internationaux pour s’assurer de l’échec de l’OQTF.

Le deuxième individu suspecté de la mort de Philippine avait déjà été condamné par la Cour d’assises des mineurs pour un précédent viol et incarcéré en France. Retenu en centre de rétention administrative (CRA), dès sa sortie de prison, pendant 75 jours, soit le délai légal nonobstant une possibilité exceptionnelle de prolonger de 15 jours selon des critères non remplis au cas d’espèce, l’individu a pu être autorisé à sortir du CRA… en toute légalité. Cette mesure ubuesque, imposée par un cadre légal non adapté, a dû être prise dès lors que les autorités administratives françaises n’ont pu obtenir à temps un laissez-passer consulaire de la part du Maroc. Un énième aveu d’échec conduisant à une double tragédie : la disparition d’une jeune fille dans des conditions atroces et le respect d’un cadre légal totalement périmé.

Face à cette situation, l’urgence d’intervenir et de bouleverser le cadre juridique et administratif s’impose pour préserver notre contrat social.

Pour satisfaire un impératif de fermeté et répondre à cette urgence, le nouveau ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a annoncé une série de mesures : allongement de la durée maximale en CRA, fin de la circulaire dite « Valls » de 2012, accords financiers avec les pays d’origine, pression financière, non-délivrance de visas pour les pays non-coopérants… Ces mesures pêle-mêle pourraient avoir un effet sur l’immigration mais pas nécessairement sur l’exécution des OQTF.

À titre d’exemple, la circulaire dite « Valls » de 2012 définit les contours d’application des admissions exceptionnelles au séjour prévues par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESADA). Avant cette circulaire, les préfets pouvaient appliquer le CESADA en interprétant de manière discrétionnaire un texte beaucoup trop vague au risque de le détorquer totalement à des fins idéologiques. La nouvelle circulaire dite prochainement « Retailleau » encadrera de la même manière ces admissions exceptionnelles prévues légalement et permettra sûrement à la marge de les réduire mais ne pourra en aucun cas les interdire. De surcroît, ces admissions exceptionnelles au nombre environ de 35 000 par an concernent, pour un tiers, des travailleurs pour des métiers dits en tension comme la restauration ou le bâtiment et dont la France n’a pas le luxe, à l’évidence, de se passer…

L’allongement du délai de rétention en CRA pour passer de 90 à 210 jours devra être adopté à l’Assemblée nationale en cas de consensus sur le sujet, et sera utile dans une moindre mesure si les pays d’origine délivrent les laissez-passer consulaires. Mais si au terme du 210e jour le « LPC » n’est pas délivré, l’individu sera légalement remis en liberté ou assigné à résidence…

Impuissance et laxisme coupable

L’unique moyen est donc bien au niveau européen et international, en plus d’avoir des moyens de pression suffisamment forts pour contraindre les pays à reprendre leurs ressortissants tout en ne pénalisant pas les enjeux économiques et géopolitiques français. Là encore, le retour du ministère de l’immigration dissous en 2010 semble une piste sérieuse pour concentrer les moyens de l’État afin de répondre à cet enjeu national. Réformer les accords de Schengen qui permettent actuellement à un individu avec un visa de courte durée de se déplacer librement dans l’ensemble des pays signataires, sans contrôle, ne semble pas à l’ordre du jour alors qu’il s’agit d’une priorité.

Les Français n’attendent plus des ministres qu’ils psalmodient des effets d’annonce sans actions concrètes au point de basculer dans une sorte de discours totalement amphigourique qu’ils ne comprennent plus eux-mêmes. Au niveau international, la France doit bousculer, sans évidemment abandonner, les régimes de protection à la chaîne imposés par les traités internationaux et européens, contrôlés par la Cour de justice de l’Union européenne – qu’ils soient liés à l’état de santé, à des attaches familiales ou à des conditions humanitaires – et qui paralysent actuellement toute tentative d’exécution. Ces dispositifs, qui devaient à l’origine protéger les plus démunis de décisions arbitraires, sont devenus des échappatoires systématiques pour éviter l’éloignement.

Enfin, que penser d’un État qui, au nom de principes humanitaires, de lourdeurs administratives ou quelques fois d’une idéologie laxiste et mortifère, met en danger la vie de ses propres citoyens et parfois les condamne à un destin funeste ?

Cette impuissance, conjuguée à un laxisme coupable, est un affront aux victimes, souvent privées de recours face à des agresseurs insolvables, mais aussi une trahison des devoirs régaliens. L’État ne peut plus se dérober à ses responsabilités et ne plus reconnaître sa faute sur son incapacité à protéger les Français. Si l’administration échoue à protéger ses citoyens en ne mettant pas à exécution ces mesures d’éloignement, elle doit en porter la responsabilité et indemniser les victimes. Au-delà de la question financière, il s’agit d’un impératif moral. Ne pas expulser des étrangers en situation irrégulière, en particulier ceux présentant une menace grave pour l’ordre public, constitue une rupture de l’égalité devant les charges publiques. Il faut en finir avec les effets d’annonce et enfin agir concrètement pour assurer la sécurité des Français, ce qui devrait être le principe cardinal d’une politique commune. Mais la vérité qui vaut est bien celle que vont croire les électeurs et partisans, malheureusement.

Il y a une vie après l’Assemblée

Il aura donc fallu plus de deux mois à notre pays pour retrouver un gouvernement qui est loin de faire l’unanimité. Mais il penche plutôt à droite, ce qui n’est déjà pas si mal.


Premier ministre

Ça y est, on les connaît enfin. Non seulement le Premier ministre, Michel Barnier qu’Emmanuel Macron a quand même mis cinquante et un jours à nommer, mais aussi les membres du gouvernement. Je crains que les Français soient déçus. Sûrement trop de macronistes. Nous avions besoin d’une vraie rupture. Difficile dans ces conditions de persuader nos concitoyens que voter sert à quelque chose. Je me surprends à consulter mon téléphone : combien d’entre eux figurent dans mon répertoire ? Vont-ils accepter de m’écouter, de dialoguer, d’entendre les demandes que je voudrais leur soumettre ? Eh oui, c’est cela aussi la vie après l’Assemblée nationale : pouvoir mettre à profit ses contacts – et dans certains cas, ses amitiés – pour faire avancer les choses concrètement à Béziers. Vu sous cet angle, ce gouvernement a quelques avantages…

Incivilités

La vie continue. Et ses incivilités aussi. Parmi ces dernières, un véritable fléau : les dépôts sauvages d’ordures. Je reçois un ami biterrois qui, en promenant son chien, a répertorié pas moins de dix sites où certains indélicats déposent leurs déchets plutôt que les porter à la déchèterie. Photos à l’appui, il me montre un endroit où plus de 80 pneus ont été déposés. Un autre où une caravane taguée a été abandonnée. Et c’est sans compter les gravats laissés par des entreprises pas très scrupuleuses qui n’hésitent pas à faire payer le traitement de leurs déchets à leurs clients avant de les évacuer sur les bords des chemins. Parallèlement, Robert Ménard, le maire de Béziers (je ne vous redis pas qu’il s’agit de mon mari, si ?), a décidé de prendre le taureau par les cornes et de filmer – à l’aide de caméras nomades – les indélicats. Où l’on voit des personnes jeter leurs sacs poubelles depuis la fenêtre de leur voiture ou d’autres abandonner un caddy rempli de déchets avant de repartir tranquillement sur une trottinette électrique. Ces gens seront poursuivis et condamnés. J’essaie simplement de persuader le procureur de la République de laisser la possibilité au maire et à sa police municipale de s’en charger, pour éviter d’encombrer encore un peu plus le commissariat de police nationale. Rien d’illégal à cela, tout est prévu par une loi de 2021. La recette miracle ? Beaucoup de pragmatisme et un peu d’audace. Allons-nous y arriver ? Une impulsion politique de la part du nouveau gouvernement pourrait certainement nous y aider. Je croise les doigts…

Destitution

Quel grand moment de lâcheté ! Le bureau de l’Assemblée nationale a examiné et adopté le 17 septembre dernier la recevabilité de la motion de destitution du président de la République déposée par La France insoumise. La motion n’a pu être adoptée que grâce au vote des trois députés socialistes membres du bureau. Qui ont immédiatement précisé qu’ils voteraient « unanimement » contre la destitution elle-même. Ils ne vont quand même pas se tirer une balle dans le pied et hypothéquer leurs petits calculs électoralistes pour les prochaines échéances locales ou nationales en prenant le risque de se mettre à dos les Insoumis. Chez d’autres, on appelle ça le « en même temps ». Et ce n’est en général guère flatteur.

Jérémy Beier

Il y a des commémorations, il y a des dates anniversaires qu’on préférerait ne pas avoir à honorer. Depuis huit années maintenant, nous nous retrouvons chaque 21 septembre pour nous souvenir de Jérémy Beier, ce jeune pompier de 24 ans mort au feu en 2016. En présence de sa mère, de son père et de ses compagnons d’infortune dont Lucas, rescapé de ce sinistre incendie, mais défiguré et amputé de ses dix doigts. C’est une des cérémonies les plus difficiles à vivre. L’émotion nous saute à la gorge. Je vois sa mère qui essaie de se reconstruire et d’aller de l’avant sans oublier. Qui continue de se battre pour obtenir justice – l’enquête sur les circonstances exactes du drame et ses responsabilités dure depuis plus de huit ans… Je vois son père, qui parle si peu mais qui, tant d’années après, a toujours les larmes au bord des yeux durant le beau discours de Robert qui évoque le souvenir de son fils. Dans ces moments-là, on mesure vite que les paroles ne peuvent pas tout. Et qu’on ne se met jamais vraiment à la place de ceux qui ont vécu la catastrophe dans leur chair. Nous quittons la cérémonie en silence. Le temps n’est plus aux mots.

Refus d’obtempérer

Je croise le commandant de notre police municipale dans les rues de Béziers. Il s’arrête quelques instants pour me raconter la course-poursuite que lui et ses hommes ont menée le matin même alors qu’un véhicule refusait de s’arrêter. Un chauffard coutumier du fait. Chaque fois, les agents de la police municipale ont été contraints d’arrêter la poursuite, car le conducteur mettait en danger la population et les véhicules qu’il croisait sur sa route. Cette fois, pas question d’abandonner. Ils veulent le coincer pour l’empêcher de recommencer. Plus de vingt minutes de poursuite qui se terminent en centre-ville avec quelques dégâts matériels, mais aucun accident corporel. Ouf ! Nos policiers respirent. En cas d’accident grave, ils savent qu’ils risquent gros, aussitôt mis sur le banc des accusés par nos bonnes consciences de gauche. L’affaire Nahel, « ce petit ange parti trop tôt », dixit Kylian Mbappé, est encore dans tous les esprits. C’est aussi à cela que devra s’attaquer Bruno Retailleau, notre nouveau ministre de l’Intérieur. Une cure de réalité.

Identité

J’en suis toujours étonnée. « Espantée », comme on dit à Béziers. Nous sommes en pleine crise politique, mais chez nous, tout va bien. Notre équipe de rugby a remporté brillamment son dernier match à domicile. Fini les râleurs. Exit les jamais-contents. D’un coup, on ne parle plus que de nos sacrés joueurs. Cela ne dure que le temps d’un week-end, mais ça change tout l’état d’esprit de notre ville. Eh oui, comprenne qui pourra mais c’est ça Béziers ! Et c’est tant mieux…

La boîte du bouquiniste

« Paris est la seule ville du monde où coule un fleuve encadré par deux rangées de livres », dixit Blaise Cendras. Causeur peut y dénicher quelques pépites…


En 1866, un certain Frédéric Gaillardet, ex-rédacteur en chef du Courrier des États-Unis, publie un fort volume où, sur la base de « documents authentiques », il entend liquider « l’une des énigmes les plus bizarres et les plus controversées du xviiie siècle », celle concernant le fameux chevalier d’Éon. Était-il un homme ou une femme ? Ou les deux ? Le voilà successivement docteur en droit, avocat au parlement de Paris, censeur pour les belles lettres, secrétaire d’ambassade à Saint-Pétersbourg, capitaine de dragons, chevalier de Saint-Louis. On retient aussi qu’il parvint à se glisser dans l’intimité d’Élisabeth, impératrice de toutes les Russies, devenant sa lectrice attitrée. Élisabeth dite « la Clémente », puisque, accédant au trône, elle promit de ne jamais condamner quiconque à mort. Elle tint parole, nous rappelle Gaillardet, puisque sous son règne, les châtiés n’étaient pas véritablement exécutés, mais pendus par les pieds ou les mains jusqu’à ce qu’ils meurent « d’eux-mêmes », ou encore cloués vivants sur des planches qu’on abandonnait au courant des fleuves. Les souvenirs de la chevalière nous apprennent également que la tsarine pouvait se montrer fort pieuse : « Elle passe des heures entières à genoux devant une image de la Vierge, parlant avec elle, l’interrogeant avec ardeur et lui demandant en grâce dans quelle compagnie des gardes elle doit prendre l’amant dont elle a besoin pour la journée. » Ce qui ne l’empêche nullement d’avoir un goût marqué pour les liqueurs fortes : « Il lui arrive d’en être incommodée. Elle bat alors ses serviteurs et ses femmes. […] Ce sont des misères humaines qui doivent être recouvertes du manteau impérial : on dit quand cela arrive que Sa Majesté à ses vapeurs. » Cent autres « détails secrets de la cour » de Russie et autant d’autres glanés lors des aventures londoniennes de l’espion d’Éon émaillent cet ouvrage qui croule un peu trop sous l’accumulation de pièces d’archives non indispensables. Une profusion dont on se félicite cependant lorsqu’il s’agit de dévoiler le secret des secrets, le sexe véritable de l’individu en question. L’auteur nous livre en effet copie du compte-rendu de l’autopsie. « Je certifie par le présent que j’ai examiné et disséqué le corps du chevalier d’Éon en présence de M. Adair, de M. Wilson, du père Élysée, et que j’ai trouvé les organes mâles de la génération parfaitement formés sous tous les rapports – Willman street, le 23 mai 1810, signé Tho. Copeland, chirurgien. » « Parfaitement formés », fort bien, mais le disséqué a-t-il fait usage de ces attributs sains d’apparence ? Mystère dans le mystère. Il semble que non, si l’on en croit l’intéressé lui-même confessant n’avoir jamais ressenti l’appel de la chair, comme on disait alors. Cela dit, quel crédit peut-on accorder à un individu qui, toute sa vie, sut si bien tromper son monde ?

Mémoires sur la chevalière d’Éon : la vérité sur les mystères de sa vie, de Frédéric Gaillardet, E. Dentu Libraire-Éditeur, 1866.

Patrick Eudeline, la provoc comme on l’aime

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Patrick Eudeline est une sorte de Philippe Manœuvre un peu trop déglingué pour participer à un télé-crochet sur la 6. Notre ami publie Perdu pour la France (Séguier).


Photo de bébé Cadum sur fond rose bonbon, on pourrait prendre l’objet, de loin, pour une réclame pour des savons vintages. Mais non, le dernier livre de Patrick Eudeline, Perdu pour la France, n’est pas la petite chose mignonne qu’il parait être de prime abord. Enjambant les décennies, des années 60 à aujourd’hui, dans un fatras chronologique, le clochard céleste revient sur sa naissance au monde qui coïncide avec la naissance du rock en France.

Journaliste au magazine Best et chanteur et guitariste du groupe Asphalt Jungle, Patrick Eudeline est une sorte de Philippe Manœuvre un peu trop déglingué pour participer à un télé-crochet sur la 6. Dans son récit, on le découvre comme une bizarrerie sociologique. Jeunesse dans le VIème arrondissement, scolarité au Collège Stanislas, Patrick Eudeline nait dans une famille de la France moyenne, avec un père pas très dégourdi pour les affaires (ni pour écrire des chroniques dans la feuille de chou locale du RPR). L’OVNI social décrit son existence, tantôt au bras de telle grande bourgeoise, tantôt à la rue, tantôt dévalant en ski les pistes huppées de Suisse, tantôt escroquant les dentistes à coup de chèques en bois, s’échappant du cabinet avec une demi-dent rafistolée.

Le royaume du linoléum

Musicalement, le père a plutôt des goûts de chiotte (« Ne traînent à la maison qu’un vieux Marcel Amont (« ce vieux Bleu, blanc, blond » que j’ai toujours honni), un affreux François Deguelt (« Marjolaine »), un oublié d’Isabelle Aubret (« La Fanette »), la détestable « Bicyclette » du Montand, un Aznavour mineur et de peu d’intérêt »). Le goût familial pour le linoléum contraste avec les sublimes parquets cirés que l’on trouve chez les petits camarades de classe. La relation père-fils est de toute façon loin d’être mue par l’admiration réciproque. Un peu comme si Sheila (« Tandis que moi, qui ne suis rien/ Qu’une petite fille de Français moyen/ J’apprends chaque jour, en m’amusant,/ Que l’expérience vient avec le temps ») avait enfanté ce snob de Boris Vian (« Je ne fréquente que des baronnes/ Aux noms comme des trombones »). Napoléon se demandait s’il n’était pas plutôt le fils de Pascal Paoli, ou du gouverneur Marbeuf. Eudeline se demande aussi s’il est bien le fils de son père. Pour devenir empereur ou rockeur, il faut avoir des doutes sur la paternité de son paternel.

Eudeline est un enfant des années 60, suffisamment vieux pour avoir connu la messe en latin et la foi dans le progrès. « L’heure est à l’optimisme absolu ». Le garçonnet rêve de mégalopoles robotisés et de moutons électriques. À Stanislas, il met un peu de bazar, mais la sympathie des profs de lettres lui sauve la mise : « Vous m’auriez viré Rimbaud ! Je démissionne ». C’est l’époque où de Gaulle, autre ancien élève de Stan’, refuse d’embastiller Sartre, parce qu’ « on n’emprisonne pas Voltaire ». Plus tard, Patoche découvre les types louches, aux cheveux longs, du jardin du Luxembourg. Notre protagoniste s’en trouve à son tour attifé, de quoi éveiller les doutes du père quant à la possible homosexualité de son rejeton. Doute largement dissipé quand il met en cloque la fille d’un des clients de son père, « héritière d’une grande famille ».

Les cafards anglais et la rue Saint-Denis

On croise dans le livre plusieurs monstres du rock. Il y en a qu’il vaut mieux avoir en poster dans sa chambre que sur le canapé dans son salon. Sid Vicious, des Sex Pistols, et Nancy Spungen, aussi délurés que dans le film qu’Alex Cox leur a consacré, en mal d’argent et d’héroïne, par exemple. La compagne du rocker se lève d’un coup d’un seul et part se prostituer rue de Saint-Denis pour faire rentrer quelques billets. Mauvaise idée ! On ne vient pas disputer comme ça des parts de marché aux maquereaux déjà implantés dans le coin. Il faut la rattraper en taxi. Quant à Sid, il n’est pas long à sortir son cran d’arrêt.

Plusieurs décennies plus tard, Eudeline se retrouve en Angleterre chez Peter Doherty, queue de comète du mouvement rock (« Chanteur pop parmi les plus doués de sa génération. Certes, vu le niveau général, c’est là un compliment tout relatif. L’homme n’est pas un nouveau Ray Davies, mais plutôt un imitateur servile de cette lignée »). Dans l’appartement miteux au « spartiate décor » de l’ex de Kate Moss, les cafards mènent grand train. Eudeline évoque aussi une histoire de jeune homme tombé par la fenêtre, chez Doherty, à la fin des années 2000. Il y a parfois dans les placards des rockers des cadavres encombrants. L’auteur revient ailleurs sur une émission de France Culture, où face à Daniel Cohn-Bendit, il avait déclaré : « Vous aviez les cheveux trop courts pour être crédible. Vous en avez fait moins pour changer le monde et les mœurs qu’Antoine avec ses élucubrations ». On referme l’ouvrage en gardant la même idée que l’on se faisait du personnage : un échalas picaresque et talentueux, doté d’un certain sens de la provocation.

208 pages.

Perdu pour la France

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Deux flics en lévitation

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Monsieur Nostalgie nous parle ce dimanche de l’essence-même des années 1980. Il replonge en septembre 1984, le mois et l’année de diffusion de la série Deux Flics à Miami aux États-Unis. Les enfants de la Mitterrandie ne se réveilleront jamais du choc culturel et esthétique de Sonny Crockett et Ricardo Tubbs sur leur cerveau en formation !


En France, nous nous apprêtions à tourner vers la rigueur. Virage amer après la grande tombola. Espoirs déçus et impasse budgétaire à l’horizon. Le chômage de masse prenait ses aises dans un hexagone en voie de désindustrialisation. Nous l’avons compris beaucoup plus tard, mais déjà, sournoisement s’imposait à nous un nouveau code moral avec ses intouchables et ses tabous. Nous vivions sous emprise idéologique sans le savoir. On nous obligeait à bien penser à l’école et à bien travailler à l’émanation d’un homme nouveau, dépollué, automatisé et terrifiant de certitudes.

Générique punchy

De l’autre côté de l’Atlantique, il y a tout juste quarante ans, deux flics en costard Armani et Versace, conduisant une fausse Ferrari Daytona à moteur Corvette ou une authentique Testarossa allaient réenchanter notre monde en fission. D’abord, nous fûmes saisis par le générique de Jan Hammer, ce synthé entêté et ses envolées puncheuses nous porteraient jusqu’à la cité interdite de Miami, dans une Floride huileuse, chaude, terriblement instable, balayée par des bourrasques de sable, dans les moiteurs d’une marina de carton-pâte entourée de buildings lacustres. La musique de Jan Hammer irréductible, mélodramatique, boucle sans fin, serait le terrain d’expression stylistique de deux flics qui dépoussièreraient nos misérables habitudes.


Cette frime surexposée et indécente fut notre mamelle nourricière. Car dans une France fossilisée, aux perspectives zébrées par la crise, nous suffoquions. L’Amérique avec son génie tentateur marchand, sa cascade d’images décadentes et son sens de l’emphase visuelle nous apporterait ce qui nous manquait cruellement. Un peu de débord, de « n’importe quoi », de premier degré assumé, de marques commerciales à l’écran totalement assumées et de « guest stars » cachetonnant pour se refaire le nez dans une clinique privée de Beverly Hills ou agrandir leur piscine sur un rooftop de Manhattan. Chez ces deux flics sapés comme jamais, nous reprenions peu à peu pied. Tout n’était pas perdu. La flambe était à nouveau une valeur refuge comme si l’insouciance des sixties n’était pas morte. Plus c’était grandiloquent et aveuglant, plus nous adhérions à ce projet sans issue. Pour apprécier cette débauche mêlée à une certaine langueur, ce romantisme hollywoodien rehaussé à la sauce antique, il faut s’abandonner à cette déambulation balnéaire. Se laisser porter par le flot syncopé des flashs d’hébétude. Il faut aimer les fringues qui se voient, les bagnoles crispantes, la démesure latino-américaine et la scénarisation du crime organisé. Cette atmosphère hors-cadre a encapsulé dans un flacon de cristal, une fragrance trop forte, trop osée pour notre époque du pas militaire.

Débardeur rose et flingue apparent

Chaque séquence de Deux Flics à Miami serait aujourd’hui examinée et condamnée sans procès sur l’autel d’un progressisme propret qui cache si mal son casernement mental. J’aimerais vous faire partager cet exhausteur d’existence qu’a représenté la série de 108 épisodes. De 1984 à 1989, deux flics enquêtaient sur les réseaux de la drogue et de la prostitution en lunettes Ray-Ban Wayfarer et en marcel pastel. Ils allaient au bureau en débardeur rose avec leur holster apparent. L’un avait la mèche mouvante, l’autre des frisottis nourris au Pento. Ils étaient souvent en sueur en raison d’une météo insupportable. Ça ne les empêchait pas de conduire décapoté. Dans leur univers, les filles enfilaient des maillots très échancrés comme sur les couvertures de Sports Illustrated. Avec eux, on pourchassait des voyous qui s’échappaient en Lamborghini Countach blanche. Il arrivait que l’on sorte son gun en plein restaurant devant un homard grillé. On roulait souvent la nuit sur des ponts déserts avec l’air que la vie ne sert à rien et que le mal est inhérent à la race humaine. On appelait un indic d’une cabine téléphonique. Des bastons éclataient dans des boîtes où des barons de la drogue ex-opposants castristes se comportaient mal.

Comme dans toutes les séries de ces années-là, les flics avaient des terreurs nocturnes en repensant à la guerre du Vietnam. Et nous, dans nos salons, les actualités parlaient de cohabitation et de crise de la sidérurgie, nous voulions nous échapper de cet univers carcéral. Nous savions qu’à Miami, deux flics ne maraudaient pas en Renault 18 mais en bateau-cigarette, que l’on verrait Leonard Cohen, Pam Grier, Julia Roberts et même l’épouse de BHL faire une apparition, alors nous étions heureux.

Tendre est la province

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Allumer le feu

Le nouveau roman de Céline Laurens se lit d’une traite, autant parce que l’on veut savoir qui a incendié cette maison de maître dans laquelle les propriétaires ont trouvé la mort, que pour son style.


Céline Laurens nous revient avec un troisième roman, La maison Dieu, aussi magnétique que les deux premiers : Là où la caravane passe (prix Roger Nimier 2022) et Sous un ciel de faïence (2023), publiés aux Éditions Albin Michel. La couverture et le titre du livre font référence à une carte – une lame – du tarot de Marseille. Elle représente une tour moyenâgeuse foudroyée – foudroiement surnaturel ? – de laquelle deux personnages tombent. Ce qui étonne, c’est que leurs regards expriment une certaine sérénité. Le feu détruit, mais il libère également. Comme s’il fallait mourir pour mieux renaître. La carte du tarot est une mise en abîme de l’histoire du roman.

Nous sommes en Ariège, au début du siècle, où la lutte entre le Bien et le Mal n’épargne personne. Chacun s’épie dans ce village si bien décrit par Abel, l’un des habitants de La maison Dieu. Ce dernier refuse de grandir, tandis que sa sœur jumelle, Mallora, ne rêve que de fuite à grandes enjambées vers des contrées inconnues. Il y a également Élise, la domestique, arrivée grâce à une lettre de recommandation du curé de la paroisse. On la soupçonne d’être un peu sorcière. Quant au couple propriétaire de la maison à la funeste destinée, le temps a érodé leur amour. Madame passe ses journées à regarder par la fenêtre les lentes variations de la nature, tandis que Monsieur vit, reclus, dans son bureau. Il ne faut pas oublier Justin, le voisin, ancien amoureux éconduit de la maîtresse de maison. Il pêche et picole. Il raconte à Abel qu’il évite d’attraper le silure millénaire qui se cache dans les eaux de l’Hers. « Ce silure, dit-il, transporte dans son ventre un livre sur lequel est consigné l’histoire du passé et du futur de l’humanité. » Céline Laurens se délecte à narrer, non sans humour, la suite de l’anecdote. Ainsi apprend-on que cette pêche diabolique a déjà déclenché le courroux de sorcières hirsutes qui chevauchaient leur balai dans un ciel de suie.

Le roman s’ouvre sur les décombres de la maison ravagée par un incendie. Madame et Monsieur sont morts. La piste criminelle semble ne faire aucun doute. On accuse le « Mérou », un pyromane qui sévit dans la région. Mais chaque personnage peut avoir fait le coup, et le « Mérou » joue peut-être le rôle du bouc émissaire. Le roman devient polyphonique. Chacun prend la parole pour exprimer sa vérité et révéler sa personnalité névrotique. La prouesse de Céline Laurens est de se glisser dans la tête de chaque protagoniste, tout en adoptant le principe de neutralité. On se rapproche de la méthode Simenon utilisée dans les enquêtes du commissaire Maigret.

Du romanesque pur jus jusqu’à l’immorale chute.

Céline Laurens, La maison Dieu, Albin Michel. 240 pages

La Maison Dieu

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Le juste prix du vin

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DR.

Au restaurant, les prix du vin ont tendance à atteindre des sommets sans raisons apparentes. Au détriment des vignerons et des clients. Dans son manifeste, le sommelier Antoine Pétrus appelle les restaurateurs à la raison.


Restaurateurs,

Exagérer sur les tarifs des vins, c’est massacrer le travail et la notoriété du vigneron concerné. Je suis pourtant de ceux qui pensent qu’un coefficient raisonnable n’a rien d’inconcevable. Il reflète la qualité du cadre dans lequel le flacon est servi, la maîtrise et le rythme du service, l’intelligence relationnelle créée par le sommelier, les informations précises et intelligibles que celui-ci est capable de donner, sans oublier le choix humain de la parfaite température de service, du meilleur verre adapté à chaque vin, de l’accord avec les mets choisis et de l’émotion qu’il fait naître à table. Je crois aussi que l’application d’un coefficient de vente plus élevé peut aussi être justifié si le vin proposé a fait l’objet d’un vieillissement lui permettant de s’améliorer. Il y a en effet un surcoût évident à présenter un vin âgé et prêt à boire par rapport à un vin jeune.

À lire aussi, Elisabeth Lévy: Sans et saufs

Quoi de pire pour le consommateur que de payer trop cher un vin trop jeune ? Le mérite du restaurateur est le même que celui d’un bon cuisinier: proposer et servir un produit arrivé à maturité et à sa pleine expression de goût, en élaborant une carte des vins avec des vins mûrs, prêts à boire et au sommet de leurs expressions. À l’heure de la transparence dans nos assiettes, la provenance du vin est aussi un sujet à mettre sur la table. Comment être certain que chaque référence mentionnée sur la carte des vins provient bien de la cave du vigneron ? Acceptons-nous de payer l’impact carbone, gustatif et financier, d’une caisse ayant fait le tour du monde ? Demain, peut-être, les cartes des bons restaurants mentionneront la provenance directe des vins proposés. Cela permettrait de mettre en avant les liens précieux tissés avec les producteurs par les meilleurs restaurateurs et les meilleurs sommeliers.

A lire aussi, Emmanuel Tresmontant: Philippe Faure-Brac, l’ambassadeur de Bacchus

Certains restaurants sont connus pour leurs cartes des vins bien construites qui savent maintenir des tarifs accessibles. Le mouvement mérite d’être suivi par d’autres, au détriment des comportements des apprentis sommeliers banquiers. Ce modèle d’exploitation commerciale vertueux est permis par une fidélisation des clients et une place donnée au vin respectueuse dans l’écosystème du restaurant. Imaginez un monde dans lequel ces hauts coefficients s’appliqueraient avec la même logique à la carte des plats. Coefficients six sur la salade, sept sur le cabillaud, neuf sur le filet de bœuf : une publicité pour les régimes minceur, mais tant de faillites. Méfiance, ne prenons pas le client pour la banque.

Ce manifeste a été initialement publié dans la revue En Magnum, publiée par le guide Bettane+Desseauve, spécialiste des vins.

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Les pros de l’antiracisme sont plus dangereux que les islamistes!

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Arras, 19 octobre 2023 © Michel Spingler/AP/SIPA

Je vous invite à la décence. Vous, professionnels de l’antiracisme…


Je vous invite à la décence. Vous, professionnels de l’antiracisme. Vous, que j’ai aux trousses depuis les années 90. Je vous écoute, depuis quelque temps, dénoncer enfin l’antisémitisme qui se dissimule sous le palestinisme. J’entends vos soupirs à la vue des jeunes filles assujetties au voile, cet uniforme politique. Je me félicite de vos indignations quand des professeurs se font insulter par des élèves hostiles à la République. Je suis heureux quand les plus clairvoyants d’entre vous osent désigner l’origine des assassins de Samuel Paty ou de Dominique Bernard, ce professeur de français du lycée Gambetta-Carnot d’Arras, dont la ville a célébré dimanche la première commémoration de son égorgement par un ancien élève appliquant le djihad à la lettre. Je vous observe, ébranlés par la violence qui fracture la société, à la recherche d’une cause pouvant épancher votre curieux besoin de donner des leçons. Comme les carabiniers, vous débarquez bruyamment en assurant avoir identifié le mal, à travers le nouveau totalitarisme islamiste. Bien vu ! Vous avez mis le temps. A ceci près que vous persistez à ne rien voir de vos propres responsabilités dans la libanisation de la nation. Incapables d’admettre le lien entre l’islamisme importé et l’immigration massive, vous continuez à traiter de xénophobes ceux qui récusent la société ouverte à ses ennemis. Votre pharisaïsme signe votre tartufferie. Voyez : c’est la Hongrie de Viktor Orban, ce paria que vous accusez d’antisémitisme, qu’Israël en guerre a choisi pour assurer, jeudi dernier, le match de foot Israël-France. Les Juifs y sont en sécurité.

A lire aussi: Causeur: 7-Octobre, un jour sans fin

La vérité c’est que vous, faux gentils, n’osez aller au bout de votre timide lucidité, qui vous vaut les opprobres de la gauche dogmatique. Le confort intellectuel reste votre refuge. Il vous empêche d’admettre que vous vous êtes trompés dans vos exhibitions humanistes insensibles aux réalités humaines. Vos sermons ne sont d’aucun recours pour résister à la conquête islamiste, que vous mettez en parallèle avec la montée de « l’extrême droite » qui s’y oppose. Dimanche, à Arras, le maire, Frédéric Leturque, l’un des vôtres, a défendu « le vivre ensemble » en citant, devant une foule homogène, Antoine de Saint Exupéry : « Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis ». Une colombe de la paix et des cœurs ont été dessinés. Des poèmes ont été récités, des danses exécutées. Des roses blanches ont été déposées au pied de la plaque « aux victimes des attentats terroristes du 13 novembre 2015 ainsi qu’à tous les innocents tombés en France et dans le monde ».

Pas un instant, l’islamisme qui a tué Dominique Bernard n’a été évoqué. Pourtant, Mohamed Mogouchkov avait précisé avoir égorgé son ancien professeur parce qu’il lui avait appris « la passion, l’amour, l’attachement au système en général de la République, de la démocratie, des droits de l’homme ». À Arras comme à Conflans-Sainte-Honorine, où Samuel Paty fut décapité par Abdoullakh Anzorov le 16 octobre 2020 à la sortie de son lycée, ce n’est pas « la laïcité qui a été attaquée », comme l’a répété Anne Genetet, ministre de l’Education, en cautionnant l’euphémisation des faits. C’est l’islam en guerre qui a lancé ses assauts contre la France, aux portes laissées ouvertes. La gauche bien-pensante ne songe toujours pas à les fermer. C’est pourquoi elle est responsable de ce qu’elle dénonce. Elle est plus dangereuse que les islamistes qu’elle laisse venir.

Journal d'un paria: Bloc-notes 2020-21

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De la guimauve pour Dominique Bernard

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Cérémonie à la mémoire de Dominique Bernard, enseignant tué il y a un an par un islamiste, Arras, 13 octobre 2024 © FRANCOIS GREUEZ/SIPA

L’hommage du maire d’Arras (62) à Dominique Bernard ne nous a pas convaincus. La cause de la mort du professeur, survenue il y a un an, n’a jamais précisément été nommée: l’islamisme.


Six minutes de guimauve prononcée devant une « artiste » peignant des petits cœurs sur une toile, toile qui va entamer une itinérance ! Si c’était moins grave, on hurlerait de rire.

Frédéric Leturque, le maire centriste d’Arras, est parvenu à ne jamais prononcer le mot islam (politique, radical ou identitaire) dans son discours. Et à aligner tous les poncifs sur le vivre-ensemble (sauf avec le RN, sujet sur lequel il est intraitable) ou l’école « qui favorise le dialogue et la paix », avec des phrases comme « La France est solidaire quand elle est rassemblée » qu’on donnerait en exemple de lapalissade si on apprenait encore ce terme dans nos écoles. Bref, de la bienveillance et de la tolérance à jets continus. Et pour finir, cette citation de Saint-Exupéry, enrôlé dans cette croisade de la niaiserie : « Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis ». Pardon, mais je ne crois pas que la différence du tueur de Dominique Bernard nous enrichisse. C’est insupportable.

Tendons la joue gauche ! Le délicieux écrivain anglais catholique Chesterton disait que le monde était plein d’idées chrétiennes devenues folles. Aujourd’hui, on a le sentiment qu’il est plein d’idées chrétiennes devenues sottes.

A ne pas manquer: Philippe Val: passer à l’offensive

Dominique Bernard, Samuel Paty et les dessinateurs de Charlie Hebdo dont on commémorera en janvier les dix ans de l’assassinat méritent un discours plus combatif que ce pensum capitulard et pleurnichard. Le fanatisme islamiste défie la France, pas seulement par la violence, mais en imposant des normes contraires à nos lois et à nos mœurs, et en embrigadant une partie de la jeunesse musulmane dans un délire anti-France. Face à lui, on attend du Churchill – we shall fight them on the beaches, nous les combattrons sur les plages, dans les rues et dans les champs. Et on a à la place des musiciens et des jongleurs, du mère Térésa pour les nuls, un galimatias sur la différence qui enrichit. En quoi la différence de gens qui pensent qu’Allah leur ordonne de tuer des professeurs, des Français, des juifs ou des musulmans mécréants nous enrichit-elle ?

La condition de la paix, c’est la sécurité pour tous. Le vivre-ensemble, nous sommes tous pour. Mais à nos conditions, celles que les Français de toutes origines et de toutes confessions se sont collectivement données au cours des siècles. Quand j’écoute Monsieur Leturque, j’ai l’impression d’assister au suicide de l’Occident. Sauf que la majorité des Français et des Européens ne sont pas d’humeur à se contenter de trémolos sur la laïcité, de petits cœurs ou de minutes de silence dont tout le monde craint qu’elles soient perturbées aujourd’hui dans les établissements scolaires.


Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de J-J. Bourdin sur Sud radio

Viktor Orbán au Parlement Européen: un seul adulte dans l’hémicycle?

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Le Premier ministre hongrois à Strasbourg, 9 octobre 2024 © Jean-Francois Badias/AP/SIPA

Venu présenter les priorités de la présidence hongroise de l’Union européenne (juillet 2024 – janvier 2025), le populiste Viktor Orbán a été vivement critiqué par ses opposants et par Ursula von der Leyen. Au-delà de son euroscepticisme, on lui reproche son népotisme à Budapest et ses accointances avec Moscou. L’analyse de Rodrigo Ballester, du Centre d’Études Européennes du Mathias Corvinus Collegium de Budapest.


Si quelqu’un voulait voir un concentré chimiquement pur de tous les maux dont pâtit la classe politique occidentale, alors il ne pouvait être mieux servi par le débat, aussi affligeant que révélateur, qui a suivi le discours de Viktor Orbán au Parlement européen le 9 octobre. Le Premier Ministre hongrois y est allé en chef d’État présenter les priorités de sa présidence et, en réponse, les honorables membres de cette assemblée n’ont pas manqué d’étaler leur répertoire de sentimentalisme puéril, de signalement vertueux, de messianisme maladif et de pensée magique. Petit tour de piste.

Discours de droite musclé et politique Instagram

Il est d’usage que le chef d’État qui assume la présidence tournante de l’UE vienne expliquer son programme à Strasbourg et qu’un échange s’ensuive avec la Commission et les élus européens. Orbán a pris la tâche au sérieux et en allant au-delà des poncifs habituels a brossé sans langue de bois mais avec politesse, le portrait d’une Europe qu’il juge à la dérive et a suggéré quelques pistes pour y remédier. Compétitivité, migrations, élargissement, géopolitique, un exposé étayé et quelques constats lucides et cinglants, comme le lien irréfutable entre la migration illégale et l’augmentation de l’antisémitisme, l’homophobie et la misogynie. Une occasion pour le Parlement et la Commission d’enterrer la hache de guerre et de se montrer à la hauteur d’un vrai débat de fond… qui a vite tourné à l’hystérie collective, à l’incantation de mantras et à la politique Instagram.

Pour commencer, juste après son discours, les bancs de la gauche européenne ont entonné un « Bella Ciao » qui a obligé la présidente du Parlement, Roberta Metsola, embarrassée, à leur rappeler littéralement que ce débat n’était pas le festival de l’Eurovision. Propos prophétiques tant les députés furent à la hauteur de leur médiocre réputation de clowns-mandarins hors sol. Mention spéciale à Valérie Hayer et Raphaël Glucksmann qui, dans leur style mièvre habituel, ont invectivé M. Orbán en proposant presque d’aller sauver le peuple hongrois des horribles griffes du dirigeant qu’ils réélisent depuis 2010 ! La porte-parole des Verts, la très excentrique et arc-en-ciel Terry Reintke a décrit un portrait aussi apocalyptique que délirant de la Hongrie, surtout pour les minorités sexuelles, tout en oubliant qu’à Budapest, contrairement à l’Allemagne, l’Autriche ou la Norvège, il est plutôt agréable de manifester sans menaces de barbus. S’en est suivie une litanie de platitudes et de slogans sur l’État de droit, la corruption, la liberté de la presse et, surtout le sempiternel « redcutio at Putinum » qui est devenu la seule et maigre parade intellectuelle pour museler tout débat face à Orban, tout débat sur la guerre en Ukraine et bien au-delà. Seul petit progrès, personne n’a osé cette fois traiter Orbán d’antisémite. La Hongrie étant le seul pays européen qui ose encore organiser les matchs de l’équipe israélienne de foot et l’un des rares où marcher dans la rue avec une kippa est possible, c’eut été quelque peu indécent.

Le Parlement européen, une secte ?

Un spectacle consternant, mais finalement assez banal. En revanche, ce fut une surprise de voir la présidente de la Commission, Ursula Von der Leyen, en faire tout autant et piétiner son rôle institutionnel pour se livrer à une attaque politicienne et mensongère. La Hongrie serait le seul pays à se fournir en énergie fossile russe ? Faux, la France, l’Espagne et la Belgique sont les principaux importateurs de gaz liquéfié russe. La Hongrie accueillerait à bras ouverts des travailleurs russes ? Oui : 7000 Russes vivent en Hongrie, mais 300 000 habitent en Allemagne, lui rétorque Orbán qui lui rappelle, au passage, l’augmentation exponentielle des transactions entre les entreprises européennes et la Russie à travers la Turquie, l’Inde et l’Asie centrale. La Hongrie serait autocratique ? Sauf qu’un gouvernement avec une majorité de deux tiers n’a jamais mis en place un « cordon sanitaire » contre quelque parti que ce soit, comme c’est le cas à Strasbourg contre le groupe des Patriotes. Et surtout, on n’a entendu aucune réaction au discours d’Orbán en tant que tel et aux priorités de sa présidence qu’il était venu présenter de bonne foi. 

Mal en a pris à Mme Von der Leyen, car le Premier Ministre hongrois a le sens de la répartie et l’a renvoyée dans les cordes. Il a profité de l’occasion pour dénoncer l’intenable hypocrisie des dirigeants européens, leur messianisme, leur arrogance d’illuminés, leur incapacité à regarder la réalité en face et leur vision sectaire d’une Europe totem contre laquelle toute critique devient un blasphème. Bref, les maux que l’on prête à un gamin capricieux, si révélateurs de ce « woke state of mind » des élites qui fait sombrer l’Europe dans un désespérant marasme d’incompétence. Seul contre tous, fort de sa légitimé démocratique et de sa lucidité, le Hongrois a survolé le Parlement européen. Et, dans le temple de la politique spectacle et des postures surjouées, il a démontré pendant trois heures, qu’au milieu des enfants gâtés, il n’y avait qu’un seul adulte dans l’hémicycle.

OQTF, un feuilleton français

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Manifestation contre la loi immigration, Lille, 21 janvier 2024 © Sabrina Dolidze/SIPA

Seules 6% des dizaines de milliers d’obligations de quitter le territoire français prononcées chaque année sont exécutées. Une administration mastodonte, des associations hyperactives et un « État de droit » pointilleux bloquent leur application. L’enjeu migratoire est pourtant sécuritaire et moral.


L’inexécution des fameuses obligations de quitter le territoire français (OQTF) est un des symboles de l’impuissance de l’État concernant la sécurité des Français et le contrôle effectif de ses frontières. Elle met ces derniers temps en évidence le mauvais entretien de liens diplomatiques profitables avec les pays desquels sont issus ceux faisant l’objet de ces OQTF.

Cette mesure administrative est pourtant simple et claire à première vue : un étranger en situation irrégulière ou présentant un trouble à l’ordre public doit quitter le territoire. Sauf que cette obligation a été travestie en une invitation déguisée. L’individu doit quitter le territoire dans un délai de 30 jours, spontanément et par ses propres moyens… délai durant lequel il pourra déposer un recours administratif par l’intermédiaire d’associations gavées d’argent public et bloquer ainsi toute exécution de la décision administrative.

Tribunaux encombrés

En dépit des effets d’annonces des ministres successifs, le taux d’exécution des quelque 130 000 OQTF délivrées chaque année stagne à un niveau dérisoire autour de 6%, et la France s’enfonce de plus en plus dans une crise migratoire et sécuritaire où la complaisance de l’État finit par nourrir une insécurité permanente sur l’ensemble du territoire. Le manque d’implication du Quai d’Orsay en charge pourtant de la coopération avec les pays d’origine, pour l’obtention des laissez-passer consulaires, est inexplicable.

Ce fiasco migratoire a plongé la France dans une anomie totale dans laquelle elle ne parvient plus à appliquer ses propres règles en raison de procédures inefficaces, lesquelles sont détournées de leur finalité première par une complexité juridique, des recours judiciaires permanents et des tribunaux administratifs totalement saturés par une politique du chiffre imposée par Beauvau. Les préfectures utilisent régulièrement et à mauvais escient des matrices pour rédiger ces mesures et gagner en rapidité mais non en efficacité car les particularismes de chaque dossier ne sont pas considérés. Il faut noter que des individus, parfaitement insérés dans la société, ont fait l’objet d’une OQTF alors qu’ils attendaient leur rendez-vous en préfecture pour renouveler leur carte de résident arrivée à expiration… C’est dire le bon sens dans ce domaine, tant l’effort devrait être concentré sur les indésirables non insérés, les coupables de crimes ou délits ou les individus fichés S en raison de leur dangerosité ! Mais pour expulser ces individus, la route est malheureusement sinueuse en raison principalement de nos propres lois.

Nos logiques bureaucratiques et humanitaristes poussées à des sommets paroxystiques au détriment de la sécurité des Français ont des conséquences tragiques : l’assassin du professeur à Arras, Mohammed Mogouchkov, ou encore le criminel supposé de Philippine, n’auraient jamais dû être sur le sol français au moment de leur passage à l’acte. Et ils sont loin d’être des cas isolés tant l’actualité pullule de ces drames.

A lire aussi: Affaire Philippine: Comment le suspect Taha O. s’est-il retrouvé dans la nature?

Ce premier individu, en dépit de ses liens avec des activités terroristes, a pu rester en France par l’agitation frénétique d’associations furibondes, mises sous perfusion d’argent public, et lesquelles agitaient à l’époque les conventions et traités internationaux pour s’assurer de l’échec de l’OQTF.

Le deuxième individu suspecté de la mort de Philippine avait déjà été condamné par la Cour d’assises des mineurs pour un précédent viol et incarcéré en France. Retenu en centre de rétention administrative (CRA), dès sa sortie de prison, pendant 75 jours, soit le délai légal nonobstant une possibilité exceptionnelle de prolonger de 15 jours selon des critères non remplis au cas d’espèce, l’individu a pu être autorisé à sortir du CRA… en toute légalité. Cette mesure ubuesque, imposée par un cadre légal non adapté, a dû être prise dès lors que les autorités administratives françaises n’ont pu obtenir à temps un laissez-passer consulaire de la part du Maroc. Un énième aveu d’échec conduisant à une double tragédie : la disparition d’une jeune fille dans des conditions atroces et le respect d’un cadre légal totalement périmé.

Face à cette situation, l’urgence d’intervenir et de bouleverser le cadre juridique et administratif s’impose pour préserver notre contrat social.

Pour satisfaire un impératif de fermeté et répondre à cette urgence, le nouveau ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a annoncé une série de mesures : allongement de la durée maximale en CRA, fin de la circulaire dite « Valls » de 2012, accords financiers avec les pays d’origine, pression financière, non-délivrance de visas pour les pays non-coopérants… Ces mesures pêle-mêle pourraient avoir un effet sur l’immigration mais pas nécessairement sur l’exécution des OQTF.

À titre d’exemple, la circulaire dite « Valls » de 2012 définit les contours d’application des admissions exceptionnelles au séjour prévues par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESADA). Avant cette circulaire, les préfets pouvaient appliquer le CESADA en interprétant de manière discrétionnaire un texte beaucoup trop vague au risque de le détorquer totalement à des fins idéologiques. La nouvelle circulaire dite prochainement « Retailleau » encadrera de la même manière ces admissions exceptionnelles prévues légalement et permettra sûrement à la marge de les réduire mais ne pourra en aucun cas les interdire. De surcroît, ces admissions exceptionnelles au nombre environ de 35 000 par an concernent, pour un tiers, des travailleurs pour des métiers dits en tension comme la restauration ou le bâtiment et dont la France n’a pas le luxe, à l’évidence, de se passer…

L’allongement du délai de rétention en CRA pour passer de 90 à 210 jours devra être adopté à l’Assemblée nationale en cas de consensus sur le sujet, et sera utile dans une moindre mesure si les pays d’origine délivrent les laissez-passer consulaires. Mais si au terme du 210e jour le « LPC » n’est pas délivré, l’individu sera légalement remis en liberté ou assigné à résidence…

Impuissance et laxisme coupable

L’unique moyen est donc bien au niveau européen et international, en plus d’avoir des moyens de pression suffisamment forts pour contraindre les pays à reprendre leurs ressortissants tout en ne pénalisant pas les enjeux économiques et géopolitiques français. Là encore, le retour du ministère de l’immigration dissous en 2010 semble une piste sérieuse pour concentrer les moyens de l’État afin de répondre à cet enjeu national. Réformer les accords de Schengen qui permettent actuellement à un individu avec un visa de courte durée de se déplacer librement dans l’ensemble des pays signataires, sans contrôle, ne semble pas à l’ordre du jour alors qu’il s’agit d’une priorité.

Les Français n’attendent plus des ministres qu’ils psalmodient des effets d’annonce sans actions concrètes au point de basculer dans une sorte de discours totalement amphigourique qu’ils ne comprennent plus eux-mêmes. Au niveau international, la France doit bousculer, sans évidemment abandonner, les régimes de protection à la chaîne imposés par les traités internationaux et européens, contrôlés par la Cour de justice de l’Union européenne – qu’ils soient liés à l’état de santé, à des attaches familiales ou à des conditions humanitaires – et qui paralysent actuellement toute tentative d’exécution. Ces dispositifs, qui devaient à l’origine protéger les plus démunis de décisions arbitraires, sont devenus des échappatoires systématiques pour éviter l’éloignement.

Enfin, que penser d’un État qui, au nom de principes humanitaires, de lourdeurs administratives ou quelques fois d’une idéologie laxiste et mortifère, met en danger la vie de ses propres citoyens et parfois les condamne à un destin funeste ?

Cette impuissance, conjuguée à un laxisme coupable, est un affront aux victimes, souvent privées de recours face à des agresseurs insolvables, mais aussi une trahison des devoirs régaliens. L’État ne peut plus se dérober à ses responsabilités et ne plus reconnaître sa faute sur son incapacité à protéger les Français. Si l’administration échoue à protéger ses citoyens en ne mettant pas à exécution ces mesures d’éloignement, elle doit en porter la responsabilité et indemniser les victimes. Au-delà de la question financière, il s’agit d’un impératif moral. Ne pas expulser des étrangers en situation irrégulière, en particulier ceux présentant une menace grave pour l’ordre public, constitue une rupture de l’égalité devant les charges publiques. Il faut en finir avec les effets d’annonce et enfin agir concrètement pour assurer la sécurité des Français, ce qui devrait être le principe cardinal d’une politique commune. Mais la vérité qui vaut est bien celle que vont croire les électeurs et partisans, malheureusement.

Il y a une vie après l’Assemblée

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© Ville de Béziers

Il aura donc fallu plus de deux mois à notre pays pour retrouver un gouvernement qui est loin de faire l’unanimité. Mais il penche plutôt à droite, ce qui n’est déjà pas si mal.


Premier ministre

Ça y est, on les connaît enfin. Non seulement le Premier ministre, Michel Barnier qu’Emmanuel Macron a quand même mis cinquante et un jours à nommer, mais aussi les membres du gouvernement. Je crains que les Français soient déçus. Sûrement trop de macronistes. Nous avions besoin d’une vraie rupture. Difficile dans ces conditions de persuader nos concitoyens que voter sert à quelque chose. Je me surprends à consulter mon téléphone : combien d’entre eux figurent dans mon répertoire ? Vont-ils accepter de m’écouter, de dialoguer, d’entendre les demandes que je voudrais leur soumettre ? Eh oui, c’est cela aussi la vie après l’Assemblée nationale : pouvoir mettre à profit ses contacts – et dans certains cas, ses amitiés – pour faire avancer les choses concrètement à Béziers. Vu sous cet angle, ce gouvernement a quelques avantages…

Incivilités

La vie continue. Et ses incivilités aussi. Parmi ces dernières, un véritable fléau : les dépôts sauvages d’ordures. Je reçois un ami biterrois qui, en promenant son chien, a répertorié pas moins de dix sites où certains indélicats déposent leurs déchets plutôt que les porter à la déchèterie. Photos à l’appui, il me montre un endroit où plus de 80 pneus ont été déposés. Un autre où une caravane taguée a été abandonnée. Et c’est sans compter les gravats laissés par des entreprises pas très scrupuleuses qui n’hésitent pas à faire payer le traitement de leurs déchets à leurs clients avant de les évacuer sur les bords des chemins. Parallèlement, Robert Ménard, le maire de Béziers (je ne vous redis pas qu’il s’agit de mon mari, si ?), a décidé de prendre le taureau par les cornes et de filmer – à l’aide de caméras nomades – les indélicats. Où l’on voit des personnes jeter leurs sacs poubelles depuis la fenêtre de leur voiture ou d’autres abandonner un caddy rempli de déchets avant de repartir tranquillement sur une trottinette électrique. Ces gens seront poursuivis et condamnés. J’essaie simplement de persuader le procureur de la République de laisser la possibilité au maire et à sa police municipale de s’en charger, pour éviter d’encombrer encore un peu plus le commissariat de police nationale. Rien d’illégal à cela, tout est prévu par une loi de 2021. La recette miracle ? Beaucoup de pragmatisme et un peu d’audace. Allons-nous y arriver ? Une impulsion politique de la part du nouveau gouvernement pourrait certainement nous y aider. Je croise les doigts…

Destitution

Quel grand moment de lâcheté ! Le bureau de l’Assemblée nationale a examiné et adopté le 17 septembre dernier la recevabilité de la motion de destitution du président de la République déposée par La France insoumise. La motion n’a pu être adoptée que grâce au vote des trois députés socialistes membres du bureau. Qui ont immédiatement précisé qu’ils voteraient « unanimement » contre la destitution elle-même. Ils ne vont quand même pas se tirer une balle dans le pied et hypothéquer leurs petits calculs électoralistes pour les prochaines échéances locales ou nationales en prenant le risque de se mettre à dos les Insoumis. Chez d’autres, on appelle ça le « en même temps ». Et ce n’est en général guère flatteur.

Jérémy Beier

Il y a des commémorations, il y a des dates anniversaires qu’on préférerait ne pas avoir à honorer. Depuis huit années maintenant, nous nous retrouvons chaque 21 septembre pour nous souvenir de Jérémy Beier, ce jeune pompier de 24 ans mort au feu en 2016. En présence de sa mère, de son père et de ses compagnons d’infortune dont Lucas, rescapé de ce sinistre incendie, mais défiguré et amputé de ses dix doigts. C’est une des cérémonies les plus difficiles à vivre. L’émotion nous saute à la gorge. Je vois sa mère qui essaie de se reconstruire et d’aller de l’avant sans oublier. Qui continue de se battre pour obtenir justice – l’enquête sur les circonstances exactes du drame et ses responsabilités dure depuis plus de huit ans… Je vois son père, qui parle si peu mais qui, tant d’années après, a toujours les larmes au bord des yeux durant le beau discours de Robert qui évoque le souvenir de son fils. Dans ces moments-là, on mesure vite que les paroles ne peuvent pas tout. Et qu’on ne se met jamais vraiment à la place de ceux qui ont vécu la catastrophe dans leur chair. Nous quittons la cérémonie en silence. Le temps n’est plus aux mots.

Refus d’obtempérer

Je croise le commandant de notre police municipale dans les rues de Béziers. Il s’arrête quelques instants pour me raconter la course-poursuite que lui et ses hommes ont menée le matin même alors qu’un véhicule refusait de s’arrêter. Un chauffard coutumier du fait. Chaque fois, les agents de la police municipale ont été contraints d’arrêter la poursuite, car le conducteur mettait en danger la population et les véhicules qu’il croisait sur sa route. Cette fois, pas question d’abandonner. Ils veulent le coincer pour l’empêcher de recommencer. Plus de vingt minutes de poursuite qui se terminent en centre-ville avec quelques dégâts matériels, mais aucun accident corporel. Ouf ! Nos policiers respirent. En cas d’accident grave, ils savent qu’ils risquent gros, aussitôt mis sur le banc des accusés par nos bonnes consciences de gauche. L’affaire Nahel, « ce petit ange parti trop tôt », dixit Kylian Mbappé, est encore dans tous les esprits. C’est aussi à cela que devra s’attaquer Bruno Retailleau, notre nouveau ministre de l’Intérieur. Une cure de réalité.

Identité

J’en suis toujours étonnée. « Espantée », comme on dit à Béziers. Nous sommes en pleine crise politique, mais chez nous, tout va bien. Notre équipe de rugby a remporté brillamment son dernier match à domicile. Fini les râleurs. Exit les jamais-contents. D’un coup, on ne parle plus que de nos sacrés joueurs. Cela ne dure que le temps d’un week-end, mais ça change tout l’état d’esprit de notre ville. Eh oui, comprenne qui pourra mais c’est ça Béziers ! Et c’est tant mieux…

La boîte du bouquiniste

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Frédéric Gaillardet. DR.

« Paris est la seule ville du monde où coule un fleuve encadré par deux rangées de livres », dixit Blaise Cendras. Causeur peut y dénicher quelques pépites…


En 1866, un certain Frédéric Gaillardet, ex-rédacteur en chef du Courrier des États-Unis, publie un fort volume où, sur la base de « documents authentiques », il entend liquider « l’une des énigmes les plus bizarres et les plus controversées du xviiie siècle », celle concernant le fameux chevalier d’Éon. Était-il un homme ou une femme ? Ou les deux ? Le voilà successivement docteur en droit, avocat au parlement de Paris, censeur pour les belles lettres, secrétaire d’ambassade à Saint-Pétersbourg, capitaine de dragons, chevalier de Saint-Louis. On retient aussi qu’il parvint à se glisser dans l’intimité d’Élisabeth, impératrice de toutes les Russies, devenant sa lectrice attitrée. Élisabeth dite « la Clémente », puisque, accédant au trône, elle promit de ne jamais condamner quiconque à mort. Elle tint parole, nous rappelle Gaillardet, puisque sous son règne, les châtiés n’étaient pas véritablement exécutés, mais pendus par les pieds ou les mains jusqu’à ce qu’ils meurent « d’eux-mêmes », ou encore cloués vivants sur des planches qu’on abandonnait au courant des fleuves. Les souvenirs de la chevalière nous apprennent également que la tsarine pouvait se montrer fort pieuse : « Elle passe des heures entières à genoux devant une image de la Vierge, parlant avec elle, l’interrogeant avec ardeur et lui demandant en grâce dans quelle compagnie des gardes elle doit prendre l’amant dont elle a besoin pour la journée. » Ce qui ne l’empêche nullement d’avoir un goût marqué pour les liqueurs fortes : « Il lui arrive d’en être incommodée. Elle bat alors ses serviteurs et ses femmes. […] Ce sont des misères humaines qui doivent être recouvertes du manteau impérial : on dit quand cela arrive que Sa Majesté à ses vapeurs. » Cent autres « détails secrets de la cour » de Russie et autant d’autres glanés lors des aventures londoniennes de l’espion d’Éon émaillent cet ouvrage qui croule un peu trop sous l’accumulation de pièces d’archives non indispensables. Une profusion dont on se félicite cependant lorsqu’il s’agit de dévoiler le secret des secrets, le sexe véritable de l’individu en question. L’auteur nous livre en effet copie du compte-rendu de l’autopsie. « Je certifie par le présent que j’ai examiné et disséqué le corps du chevalier d’Éon en présence de M. Adair, de M. Wilson, du père Élysée, et que j’ai trouvé les organes mâles de la génération parfaitement formés sous tous les rapports – Willman street, le 23 mai 1810, signé Tho. Copeland, chirurgien. » « Parfaitement formés », fort bien, mais le disséqué a-t-il fait usage de ces attributs sains d’apparence ? Mystère dans le mystère. Il semble que non, si l’on en croit l’intéressé lui-même confessant n’avoir jamais ressenti l’appel de la chair, comme on disait alors. Cela dit, quel crédit peut-on accorder à un individu qui, toute sa vie, sut si bien tromper son monde ?

Mémoires sur la chevalière d’Éon : la vérité sur les mystères de sa vie, de Frédéric Gaillardet, E. Dentu Libraire-Éditeur, 1866.

Patrick Eudeline, la provoc comme on l’aime

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Patrick Eudeline © Hannah Assouline

Patrick Eudeline est une sorte de Philippe Manœuvre un peu trop déglingué pour participer à un télé-crochet sur la 6. Notre ami publie Perdu pour la France (Séguier).


Photo de bébé Cadum sur fond rose bonbon, on pourrait prendre l’objet, de loin, pour une réclame pour des savons vintages. Mais non, le dernier livre de Patrick Eudeline, Perdu pour la France, n’est pas la petite chose mignonne qu’il parait être de prime abord. Enjambant les décennies, des années 60 à aujourd’hui, dans un fatras chronologique, le clochard céleste revient sur sa naissance au monde qui coïncide avec la naissance du rock en France.

Journaliste au magazine Best et chanteur et guitariste du groupe Asphalt Jungle, Patrick Eudeline est une sorte de Philippe Manœuvre un peu trop déglingué pour participer à un télé-crochet sur la 6. Dans son récit, on le découvre comme une bizarrerie sociologique. Jeunesse dans le VIème arrondissement, scolarité au Collège Stanislas, Patrick Eudeline nait dans une famille de la France moyenne, avec un père pas très dégourdi pour les affaires (ni pour écrire des chroniques dans la feuille de chou locale du RPR). L’OVNI social décrit son existence, tantôt au bras de telle grande bourgeoise, tantôt à la rue, tantôt dévalant en ski les pistes huppées de Suisse, tantôt escroquant les dentistes à coup de chèques en bois, s’échappant du cabinet avec une demi-dent rafistolée.

Le royaume du linoléum

Musicalement, le père a plutôt des goûts de chiotte (« Ne traînent à la maison qu’un vieux Marcel Amont (« ce vieux Bleu, blanc, blond » que j’ai toujours honni), un affreux François Deguelt (« Marjolaine »), un oublié d’Isabelle Aubret (« La Fanette »), la détestable « Bicyclette » du Montand, un Aznavour mineur et de peu d’intérêt »). Le goût familial pour le linoléum contraste avec les sublimes parquets cirés que l’on trouve chez les petits camarades de classe. La relation père-fils est de toute façon loin d’être mue par l’admiration réciproque. Un peu comme si Sheila (« Tandis que moi, qui ne suis rien/ Qu’une petite fille de Français moyen/ J’apprends chaque jour, en m’amusant,/ Que l’expérience vient avec le temps ») avait enfanté ce snob de Boris Vian (« Je ne fréquente que des baronnes/ Aux noms comme des trombones »). Napoléon se demandait s’il n’était pas plutôt le fils de Pascal Paoli, ou du gouverneur Marbeuf. Eudeline se demande aussi s’il est bien le fils de son père. Pour devenir empereur ou rockeur, il faut avoir des doutes sur la paternité de son paternel.

Eudeline est un enfant des années 60, suffisamment vieux pour avoir connu la messe en latin et la foi dans le progrès. « L’heure est à l’optimisme absolu ». Le garçonnet rêve de mégalopoles robotisés et de moutons électriques. À Stanislas, il met un peu de bazar, mais la sympathie des profs de lettres lui sauve la mise : « Vous m’auriez viré Rimbaud ! Je démissionne ». C’est l’époque où de Gaulle, autre ancien élève de Stan’, refuse d’embastiller Sartre, parce qu’ « on n’emprisonne pas Voltaire ». Plus tard, Patoche découvre les types louches, aux cheveux longs, du jardin du Luxembourg. Notre protagoniste s’en trouve à son tour attifé, de quoi éveiller les doutes du père quant à la possible homosexualité de son rejeton. Doute largement dissipé quand il met en cloque la fille d’un des clients de son père, « héritière d’une grande famille ».

Les cafards anglais et la rue Saint-Denis

On croise dans le livre plusieurs monstres du rock. Il y en a qu’il vaut mieux avoir en poster dans sa chambre que sur le canapé dans son salon. Sid Vicious, des Sex Pistols, et Nancy Spungen, aussi délurés que dans le film qu’Alex Cox leur a consacré, en mal d’argent et d’héroïne, par exemple. La compagne du rocker se lève d’un coup d’un seul et part se prostituer rue de Saint-Denis pour faire rentrer quelques billets. Mauvaise idée ! On ne vient pas disputer comme ça des parts de marché aux maquereaux déjà implantés dans le coin. Il faut la rattraper en taxi. Quant à Sid, il n’est pas long à sortir son cran d’arrêt.

Plusieurs décennies plus tard, Eudeline se retrouve en Angleterre chez Peter Doherty, queue de comète du mouvement rock (« Chanteur pop parmi les plus doués de sa génération. Certes, vu le niveau général, c’est là un compliment tout relatif. L’homme n’est pas un nouveau Ray Davies, mais plutôt un imitateur servile de cette lignée »). Dans l’appartement miteux au « spartiate décor » de l’ex de Kate Moss, les cafards mènent grand train. Eudeline évoque aussi une histoire de jeune homme tombé par la fenêtre, chez Doherty, à la fin des années 2000. Il y a parfois dans les placards des rockers des cadavres encombrants. L’auteur revient ailleurs sur une émission de France Culture, où face à Daniel Cohn-Bendit, il avait déclaré : « Vous aviez les cheveux trop courts pour être crédible. Vous en avez fait moins pour changer le monde et les mœurs qu’Antoine avec ses élucubrations ». On referme l’ouvrage en gardant la même idée que l’on se faisait du personnage : un échalas picaresque et talentueux, doté d’un certain sens de la provocation.

208 pages.

Perdu pour la France

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Deux flics en lévitation

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Don Johnson (Sonny Crockett) et Philip Michael Thomas (Ricardo) dans "Deux flics à Miami", 1987 © OXLEY/SIPA

Monsieur Nostalgie nous parle ce dimanche de l’essence-même des années 1980. Il replonge en septembre 1984, le mois et l’année de diffusion de la série Deux Flics à Miami aux États-Unis. Les enfants de la Mitterrandie ne se réveilleront jamais du choc culturel et esthétique de Sonny Crockett et Ricardo Tubbs sur leur cerveau en formation !


En France, nous nous apprêtions à tourner vers la rigueur. Virage amer après la grande tombola. Espoirs déçus et impasse budgétaire à l’horizon. Le chômage de masse prenait ses aises dans un hexagone en voie de désindustrialisation. Nous l’avons compris beaucoup plus tard, mais déjà, sournoisement s’imposait à nous un nouveau code moral avec ses intouchables et ses tabous. Nous vivions sous emprise idéologique sans le savoir. On nous obligeait à bien penser à l’école et à bien travailler à l’émanation d’un homme nouveau, dépollué, automatisé et terrifiant de certitudes.

Générique punchy

De l’autre côté de l’Atlantique, il y a tout juste quarante ans, deux flics en costard Armani et Versace, conduisant une fausse Ferrari Daytona à moteur Corvette ou une authentique Testarossa allaient réenchanter notre monde en fission. D’abord, nous fûmes saisis par le générique de Jan Hammer, ce synthé entêté et ses envolées puncheuses nous porteraient jusqu’à la cité interdite de Miami, dans une Floride huileuse, chaude, terriblement instable, balayée par des bourrasques de sable, dans les moiteurs d’une marina de carton-pâte entourée de buildings lacustres. La musique de Jan Hammer irréductible, mélodramatique, boucle sans fin, serait le terrain d’expression stylistique de deux flics qui dépoussièreraient nos misérables habitudes.


Cette frime surexposée et indécente fut notre mamelle nourricière. Car dans une France fossilisée, aux perspectives zébrées par la crise, nous suffoquions. L’Amérique avec son génie tentateur marchand, sa cascade d’images décadentes et son sens de l’emphase visuelle nous apporterait ce qui nous manquait cruellement. Un peu de débord, de « n’importe quoi », de premier degré assumé, de marques commerciales à l’écran totalement assumées et de « guest stars » cachetonnant pour se refaire le nez dans une clinique privée de Beverly Hills ou agrandir leur piscine sur un rooftop de Manhattan. Chez ces deux flics sapés comme jamais, nous reprenions peu à peu pied. Tout n’était pas perdu. La flambe était à nouveau une valeur refuge comme si l’insouciance des sixties n’était pas morte. Plus c’était grandiloquent et aveuglant, plus nous adhérions à ce projet sans issue. Pour apprécier cette débauche mêlée à une certaine langueur, ce romantisme hollywoodien rehaussé à la sauce antique, il faut s’abandonner à cette déambulation balnéaire. Se laisser porter par le flot syncopé des flashs d’hébétude. Il faut aimer les fringues qui se voient, les bagnoles crispantes, la démesure latino-américaine et la scénarisation du crime organisé. Cette atmosphère hors-cadre a encapsulé dans un flacon de cristal, une fragrance trop forte, trop osée pour notre époque du pas militaire.

Débardeur rose et flingue apparent

Chaque séquence de Deux Flics à Miami serait aujourd’hui examinée et condamnée sans procès sur l’autel d’un progressisme propret qui cache si mal son casernement mental. J’aimerais vous faire partager cet exhausteur d’existence qu’a représenté la série de 108 épisodes. De 1984 à 1989, deux flics enquêtaient sur les réseaux de la drogue et de la prostitution en lunettes Ray-Ban Wayfarer et en marcel pastel. Ils allaient au bureau en débardeur rose avec leur holster apparent. L’un avait la mèche mouvante, l’autre des frisottis nourris au Pento. Ils étaient souvent en sueur en raison d’une météo insupportable. Ça ne les empêchait pas de conduire décapoté. Dans leur univers, les filles enfilaient des maillots très échancrés comme sur les couvertures de Sports Illustrated. Avec eux, on pourchassait des voyous qui s’échappaient en Lamborghini Countach blanche. Il arrivait que l’on sorte son gun en plein restaurant devant un homard grillé. On roulait souvent la nuit sur des ponts déserts avec l’air que la vie ne sert à rien et que le mal est inhérent à la race humaine. On appelait un indic d’une cabine téléphonique. Des bastons éclataient dans des boîtes où des barons de la drogue ex-opposants castristes se comportaient mal.

Comme dans toutes les séries de ces années-là, les flics avaient des terreurs nocturnes en repensant à la guerre du Vietnam. Et nous, dans nos salons, les actualités parlaient de cohabitation et de crise de la sidérurgie, nous voulions nous échapper de cet univers carcéral. Nous savions qu’à Miami, deux flics ne maraudaient pas en Renault 18 mais en bateau-cigarette, que l’on verrait Leonard Cohen, Pam Grier, Julia Roberts et même l’épouse de BHL faire une apparition, alors nous étions heureux.

Tendre est la province

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Allumer le feu

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La romancière Céline Laurens, août 2021 © Jean-Michel Nossant/SIPA

Le nouveau roman de Céline Laurens se lit d’une traite, autant parce que l’on veut savoir qui a incendié cette maison de maître dans laquelle les propriétaires ont trouvé la mort, que pour son style.


Céline Laurens nous revient avec un troisième roman, La maison Dieu, aussi magnétique que les deux premiers : Là où la caravane passe (prix Roger Nimier 2022) et Sous un ciel de faïence (2023), publiés aux Éditions Albin Michel. La couverture et le titre du livre font référence à une carte – une lame – du tarot de Marseille. Elle représente une tour moyenâgeuse foudroyée – foudroiement surnaturel ? – de laquelle deux personnages tombent. Ce qui étonne, c’est que leurs regards expriment une certaine sérénité. Le feu détruit, mais il libère également. Comme s’il fallait mourir pour mieux renaître. La carte du tarot est une mise en abîme de l’histoire du roman.

Nous sommes en Ariège, au début du siècle, où la lutte entre le Bien et le Mal n’épargne personne. Chacun s’épie dans ce village si bien décrit par Abel, l’un des habitants de La maison Dieu. Ce dernier refuse de grandir, tandis que sa sœur jumelle, Mallora, ne rêve que de fuite à grandes enjambées vers des contrées inconnues. Il y a également Élise, la domestique, arrivée grâce à une lettre de recommandation du curé de la paroisse. On la soupçonne d’être un peu sorcière. Quant au couple propriétaire de la maison à la funeste destinée, le temps a érodé leur amour. Madame passe ses journées à regarder par la fenêtre les lentes variations de la nature, tandis que Monsieur vit, reclus, dans son bureau. Il ne faut pas oublier Justin, le voisin, ancien amoureux éconduit de la maîtresse de maison. Il pêche et picole. Il raconte à Abel qu’il évite d’attraper le silure millénaire qui se cache dans les eaux de l’Hers. « Ce silure, dit-il, transporte dans son ventre un livre sur lequel est consigné l’histoire du passé et du futur de l’humanité. » Céline Laurens se délecte à narrer, non sans humour, la suite de l’anecdote. Ainsi apprend-on que cette pêche diabolique a déjà déclenché le courroux de sorcières hirsutes qui chevauchaient leur balai dans un ciel de suie.

Le roman s’ouvre sur les décombres de la maison ravagée par un incendie. Madame et Monsieur sont morts. La piste criminelle semble ne faire aucun doute. On accuse le « Mérou », un pyromane qui sévit dans la région. Mais chaque personnage peut avoir fait le coup, et le « Mérou » joue peut-être le rôle du bouc émissaire. Le roman devient polyphonique. Chacun prend la parole pour exprimer sa vérité et révéler sa personnalité névrotique. La prouesse de Céline Laurens est de se glisser dans la tête de chaque protagoniste, tout en adoptant le principe de neutralité. On se rapproche de la méthode Simenon utilisée dans les enquêtes du commissaire Maigret.

Du romanesque pur jus jusqu’à l’immorale chute.

Céline Laurens, La maison Dieu, Albin Michel. 240 pages

La Maison Dieu

Price: 20,90 €

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