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Les dix ans du syndicat «la Cocarde étudiante»: la rupture du jeune

Nous nous sommes immiscés au colloque des 10 ans du syndicat étudiant.


Comme le temps passe… En 2015, ils avaient 20 ans. Étudiants dans le Quartier latin, ils étaient jeunes, idéalistes, fougueux, fêtards, bavards intellectuels… Dimanche 29 mars, ils se sont retrouvés sous les lustres du Salon des Miroirs (Paris 9e), devant 300 militants, pour célébrer les dix ans du syndicat étudiant La Cocarde, qui a su s’imposer dans le paysage universitaire français. Comme l’exprime Alexandre Loubet : « La Cocarde vieillit bien et a beaucoup d’enfants. » Alors que les initiatives étudiantes disparaissent souvent avec le départ de leurs fondateurs, La Cocarde en est déjà à son quatrième président. Elle compte plusieurs dizaines de sections et d’élus en province et peut remplir une salle à Paris. « Une pensée, en ce dixième anniversaire, pour Olivier V. (Olivier Vial, le président de l’UNI, syndicat étudiant de droite concurrent de La Cocarde NDLR), qui nous donnait deux ans d’existence… » s’amuse Quentin Limongi, ancien président du syndicat. L’UNI, longtemps organiquement liée au RPR, à l’UMP puis à LR, pâtit du déclin des partis de droite classique. Et La Cocarde ne correspond pas au stéréotype de l’extrême droite universitaire d’autrefois : pas de gilets en cuir ni d’actions coup de poing, tout se passe ici entre jeunes gens de bonne compagnie.

En ce temps-là, j’avais 20 ans…

Plusieurs moments d’émotion ont marqué cet anniversaire. « Nous avons vieilli, mon cher Pierre Gentillet », concède Alexandre Loubet au jeune avocat médiatique et figure tutélaire de La Cocarde. Tout à son humeur lyrique, M. Gentillet retrace au passé simple les âges du mouvement et de ses quatre présidents successifs. Plus intériorisé, plus nostalgique, Pierre-Romain Thionnet, du RNJ, confie à propos de ses premiers engagements militants : « C’est cette jeunesse que je ne retrouverai pas, que je ne pourrai plus retrouver », avant d’ajouter : « Mais ça donne des amis. »

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Sarah Knafo, Pierre Gentillet, Pierre-Romain Thionnet, Alexandre Loubet… Ces figures montantes de la droite nationale ont été maintes fois décrites dans la presse ou dans des ouvrages. L’extrême droite, nouvelle génération, publié en juillet 2024 chez Denoël par Marylou Magal et Nicolas Massol, offrait une véritable radiographie de cette jeunesse. « Nous avons commencé cette histoire rue des Canettes », rappelle Alexandre Loubet, allusion aux bistrots où toute une génération de jeunes cadres de la droite s’est forgée. Jordan Bardella consacre d’ailleurs un chapitre entier à ces années de formation dans son propre livre. « On a beaucoup écrit sur nous », feint de s’étonner Sarah Knafo, avant d’enchaîner sur des anecdotes de jeunesse : « Ces jeunes gens qui refaisaient le monde, parlaient jusqu’à l’aube de Michéa ou d’Henri Guillemin, et rêvaient de l’Union des droites… Ils étaient alors loin d’imaginer jusqu’où cela les mènerait. »

Déracinés, mais déjà recasés

Au-delà des retrouvailles et des anecdotes, les idées restent présentes. Plusieurs intervenants ont exprimé leurs visions et ambitions. Marion Maréchal et Sarah Knafo ont pris la parole successivement, évitant soigneusement de se croiser. La députée européenne conservatrice et fondatrice de l’ISSEP en a profité pour rappeler l’importance du combat intellectuel et l’engagement dans un secteur encore hostile, où subsistent « des étudiants trotskystes et des profs mao ».

Le sondeur et cadre du RN, Jérôme Sainte-Marie, a débattu avec le président de Radio Courtoisie, Pierre-Alexandre Bouclay. Ce dernier plaide pour l’acceptation d’une France qui se communautarise (« La France risque d’être communautarisée dans 50 ans, il faut nous y préparer. Je rêve d’un politique qui voit les défis de l’avenir comme Jean-Marie Le Pen l’avait fait »), tandis que M. Sainte-Marie préfère une stratégie d’union du bloc populaire face à l’Union des droites (« Quand on se proclame de droite aujourd’hui, la seule certitude, c’est de passer un excellent après-midi sur la place du Trocadéro dans l’entre-deux tours et un triste dimanche après-midi au résultat des élections »).

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Quelques conseils pratiques pour les militants : le sénateur de Seine-et-Marne Aymeric Durox vante les mérites du métier d’enseignant, qui « laisse du temps pour la politique ». Pendant ce temps, des étudiants jouent des coudes pour obtenir un demi de bière, mais Pierre Gentillet, ascète de la bande, interdit d’ouvrir la tireuse avant la fin de la conférence. Petit privilège toutefois pour les délégations étrangères : on a vu des membres des fraternités étudiantes hollandaises aller et venir, des canettes à la main…

La Cocarde : un Erasmus réactionnaire

L’Europe était présente. Autrichiens, Italiens, Flamands, Hollandais, Espagnols… La Cocarde n’est pas si chauvine et cocardière et s’est trouvé des interlocuteurs européens qui ont fait le déplacement.

Né d’un élan souverainiste, le mouvement a réussi à élargir sa vision. David Zimmerbauer, représentant du Ring Freiheitlicher Studenten (RFS), organisation étudiante liée au FPO autrichien reconnait que le thème de l’identité « est désormais prioritaire » en France comme en Autriche, ce qui ouvre de larges convergences entre partis. L’identité vire parfois au folklore : avec sa rigueur toute germanique, il affiche des ambitions précises et chiffrés : « Nous espérons passer de 3 à 6% des voix au conseil national étudiant (l’organisme représentatif des étudiants autrichiens). » Elan méridional du côté de l’Alternativa Estudiantil espagnole, fondée en 2023 par Fdedro Beigi, qui adopte un discours sans détour : « Luttez contre la gauche ». Riccardo Combina, étudiant en économie à Turin et membre du FUAN-Azione Universitaria, rappelle les liens historiques entre les mouvements français et italiens, héritiers d’une collaboration ancienne. Son mouvement agit autant au niveau des élections étudiantes, du militantisme politique que dans les stades. Lennert Von Hawverweirer, étudiant en philosophie, arbore fièrement l’uniforme traditionnel de la Katholiek Vlaams Hoogstudentenverbond (KVHV!), fraternité étudiante flamande. Dans le monde germanique, ces structures, qu’il s’agisse des fraternités flamandes ou des Burschenschaften allemandes, jouent un rôle central. Plus que de simples associations étudiantes, elles offrent hébergement, vie communautaire et festivités, tissant des liens souvent informels avec les partis de droite ou nationalistes dont elles constituent un vivier de recrutement.

Initialement souverainiste, La Cocarde a infléchi sa position. Pierre-Romain Thionnet, aujourd’hui au Parlement européen, défend une Europe-puissance qui ne fait pas forcément l’unanimité dans son parti le Rassemblement national. De son côté, Pierre Gentillet, lors d’un échange récent avec François Asselineau, a choisi de mettre en avant la défense de l’identité, avec ou sans Frexit.

Entre Internationale des enracinés et Erasmus réactionnaire, ces jeunes Européens partagent une ambition : construire une alliance continentale. Et ils rêvent d’un vaste congrès réunissant les mouvements étudiants identitaires et nationalistes de toute l’Europe. La Cocarde, née dans un élan souverainiste, a su évoluer et s’ouvrir. Une génération nouvelle s’agrège autour de souvenirs, de textes et de verres partagés. Aujourd’hui, tous ces trentenaires ne sont plus seuls, rejoints par une jeunesse de la vieille Europe qui se réunit autour de l’instinct d’une appartenance profonde. Plus que les programmes, ce sont ces liens qui forgent la matrice du pouvoir.

Culpabilisation du mâle blanc: entre introspection et auto-flagellation, ce que les affaires Bedos et Depardieu révèlent

La virilité occidentale est en berne. D’un côté, des femmes commencent à se lasser des hommes trop « déconstruits ». De l’autre, les mâles, désorientés par une société devenue punitive, cherchent ailleurs une forme de spontanéité perdue. Attention: l’histoire ne fait jamais de cadeau aux civilisations qui se détestent elles-mêmes.


Depuis plusieurs décennies, le monde occidental — et particulièrement l’Europe — a engagé un processus profond de remise en question de son histoire, de ses privilèges, de ses structures patriarcales et coloniales. Dans ce grand mouvement de déconstruction, l’homme blanc hétérosexuel est souvent désigné comme figure centrale d’un système oppressif, cumulant les tares : sexisme, racisme, domination sociale, voire impérialisme culturel.

Cette prise de conscience, dans ses intentions les plus nobles, visait à rééquilibrer les rapports entre les sexes et les cultures. Mais elle a rapidement glissé, dans certains discours et pratiques, vers une forme d’auto-culpabilisation obsessionnelle, où le simple fait d’être un homme blanc est devenu suspect. Ainsi, le mâle occidental est sommé d’expier, de se taire, de se déconstruire — parfois jusqu’à l’effacement.

Le contraste frappant avec d’autres masculinités plus affirmées

Ce qui interroge dans cette dynamique, c’est le contraste criant avec la tolérance, voire la complaisance, dont bénéficient d’autres formes de masculinité, souvent issues de cultures non occidentales, et pourtant bien plus patriarcales dans leurs pratiques. Dans de nombreuses sociétés traditionnelles (qu’elles soient maghrébines, subsahariennes, orientales ou d’Asie du Sud), le rôle de l’homme reste central, viril, parfois dominateur. Le flirt y est direct, parfois brutal. L’autorité masculine y est revendiquée sans gêne.

Or, alors que ces attitudes seraient immédiatement dénoncées comme sexistes si elles venaient d’un homme blanc occidental, elles sont parfois perçues — paradoxalement — comme authentiques, viriles, voire séduisantes. Une part du discours postcolonial, dans son souci de « ne pas juger l’Autre », adopte une posture de tolérance culturelle, au nom de la diversité et de la lutte contre l’ethnocentrisme. La publicité n’est pas en reste qui magnifie l’image de l’homme noir en partenaire sexuel de la femme blanche.

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Cette situation crée une forme de déséquilibre érotique et symbolique. De plus en plus de femmes occidentales, confrontées à ce qu’elles perçoivent comme une « démission affective » ou une « castration symbolique » de l’homme blanc — trop prudent, trop introspectif, trop déconstructeur — se tournent, consciemment ou non, vers des figures masculines plus affirmées.

Cette attirance n’est pas nécessairement idéologique : elle peut être pulsionnelle, charnelle, émotionnelle. Dans un monde où les repères vacillent, où la virilité est sans cesse remise en question, le retour du « mâle dominant » fascine autant qu’il inquiète. Certains appelleront cela un syndrome, d’autres une réaction biologique ou culturelle face à un vide symbolique.

Parallèlement, on observe également chez de nombreux hommes occidentaux, désorientés, rejetés ou simplement fatigués par la rigidité croissante des normes relationnelles dans leur société, une tendance à chercher l’amour ou le désir ailleurs. Ce phénomène — parfois qualifié de « tourisme sexuel inversé » — les pousse vers des régions où les rapports hommes-femmes sont perçus comme plus « clairs », plus traditionnels, moins encadrés par la culpabilité.

Tous frustrés !

Ce n’est pas seulement une quête sexuelle, mais aussi une recherche d’identité, d’un rôle clair dans un jeu de séduction encore régi par des codes masculins assumés. Là où en Occident, l’homme blanc ne sait plus comment aborder une femme sans risquer l’opprobre ou le tribunal, il retrouve à l’étranger une forme d’assurance, de réciprocité directe, parfois archaïque, souvent critiquable, mais profondément humaine.

Il faut s’interroger sur l’hypocrisie d’une société qui, tout en exigeant de l’homme blanc une pureté irréprochable, ferme les yeux sur des comportements similaires ou plus rudes chez d’autres, au nom du relativisme culturel. Le message implicite est le suivant : « Vous, les Occidentaux, vous n’avez plus le droit à l’erreur. Les autres, on les comprend, on les excuse, c’est leur culture. » Cette asymétrie ne peut que nourrir frustration, ressentiment et sentiment d’injustice.

Au fond, ce que cette tension révèle, c’est un basculement plus profond : une crise de la virilité occidentale, un désenchantement amoureux généralisé, et une remise en cause du modèle de séduction hérité des Lumières, de la galanterie, du romantisme européen. Nous assistons à une recomposition des désirs, où les femmes, lassées des hommes trop « déconstruits », et les hommes, désorientés par une société devenue punitive, cherchent ailleurs une forme de spontanéité perdue.

Il est temps d’appeler un chat un chat : la masculinité blanche occidentale est en train de se suicider culturellement, sous les applaudissements d’une élite bien-pensante qui confond progrès social et autodestruction. À force de s’excuser d’exister, de courber l’échine à chaque remontrance idéologique, l’homme occidental est devenu un mendiant affectif, un fantôme social, un être asexué qu’on ne craint plus, qu’on ne désire plus — qu’on méprise.

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Pendant ce temps, d’autres masculinités — plus rugueuses, moins inhibées — imposent leur présence, leur désir, leur droit à séduire, parfois à dominer, sans subir le feu roulant des tribunaux médiatiques ou des lynchages moraux. On les excuse, on les célèbre même, au nom de la diversité, de l’identité, de la culture. Et pendant que l’homme blanc se flagelle pour un compliment mal interprété ou un baiser volé il y a dix ans, d’autres avancent, draguent, séduisent, prennent, et ne s’en excusent jamais.

Assez. Il ne s’agit pas de restaurer un patriarcat archaïque ou de justifier des comportements violents. Il s’agit de refuser cette opération de castration morale et culturelle qui transforme l’homme occidental en suspect permanent, en coupable par défaut. La virilité n’est pas un crime. Le désir n’est pas une faute. La séduction n’est pas un délit. Et le flirt n’est pas un viol.

Il est temps de reconquérir notre droit à l’initiative, à l’audace, au charme, sans trembler à l’idée de finir devant un juge ou sur la place publique numérique. Il est temps de reprendre possession de notre imaginaire, de notre puissance d’être, de notre fierté d’hommes libres. Car si nous renonçons à tout cela, d’autres n’hésiteront pas à prendre notre place. Et ils le font déjà.

L’histoire ne fait jamais de cadeau aux civilisations qui se détestent elles-mêmes. Alors relevons la tête. Sortons du silence, de la honte, de la peur. Défendons notre droit à exister tels que nous sommes — imparfaits, désirants, mais debout. Car à force de ramper, on finit par se faire piétiner. Et ce jour-là, il ne restera plus rien à sauver.

Le meilleur d’entre nous

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La Table Ronde publiera jeudi prochain un recueil d’articles parus à la fin des années 1980, de l’impassible Frédéric Berthet (1954 – 2003), comète à la plume sensitive dont la légende grandit à chaque décennie. Monsieur Nostalgie l’a lu en avant-première et il le valide à 100 %…


Alors que tant d’autres éphémères des Eighties pointent aux abonnés absents, cette longue cohorte des écrivains disparus des bibliothèques, Berthet résiste au grand ménage de printemps. Il n’a pas vieilli, c’est le « privilège » de mourir jeune. Les photos d’époque, donc d’actualité, nous le montrent en romantique dessalé, bouclé, frisoté à la Julien Clerc et portant des lunettes en écaille comme tout bon normalien exilé à New-York. Pour l’éternité, il demeure ce jouvenceau caustique dont la poignée de livres (Daimler s’en va, Paris-Berry ou Journal de Trêve) vaut aujourd’hui sésame dans les cercles littéraires les plus élitistes à droite comme à gauche de l’échiquier.

Béotiens…

Celui qui n’a pas lu Berthet passe pour un béotien. Son prestige grandit à mesure que son œuvre s’éloigne pourtant des radars. Étrange phénomène qui n’est pas sans rappeler la trajectoire d’un Toulet qui fait office de maître à penser entre Hendaye et Anglet. Le nom de Berthet fait donc régulièrement irruption dans les conversations, ses amis se rappellent de lui et son socle de lecteurs s’élargit timidement mais solidement. On peut légitiment estimer qu’on le lira encore dans trente ans avec une ferveur neuve et un appétit retrouvé. Il atteindra son apogée dans un demi-siècle. Pourquoi cette éclosion à retardement ? L’œuvre de Berthet est à maturation lente, sa dissidence amusée ne pouvait pas rencontrer le succès commercial dans des décennies lourdes et mal pensantes, surtout dans ces années 1990 mortifères où la veulerie des apparences empêchait l’émergence d’une phrase libre. Libre dans son ondulation, libre dans son ironie et surtout libre de son humeur. Le prototype de l’écrivain vedette dans ces années noires devait marteler des opinions convenues et s’engager pour exister sur la place publique. Nous savons que l’intelligence du trait se niche ailleurs, dans les voies peu empruntées, celles du faux-roman, de la chronique à rebours ou de l’autofiction désarticulée.

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Berthet, sans bombarde, sans syntaxe hasardeuse, avec une incroyable acuité sur le nébuleux de son époque, nous éclaire et nous emplit. C’est là, l’un des grands paradoxes des surdoués, il n’aborde jamais un sujet de face, il n’est pas buté comme tous ces prosateurs qui empilent des idées, il manœuvre tel un pêcheur à la mouche, par à-coups et saillies. Ses textes souvent courts ont une couleur changeante, on s’y glisse avec une forme de plénitude et de vitalité. Du flou au drôle, du ménager à l’érudit, le lecteur reste perpétuellement sur ses gardes, s’attendant à toutes les facéties de l’écrivain qui se fraye un chemin. Nous sommes en alerte.

Mémoire vive

Quel délice d’être transporté dans ces wagons à suspension que sont chroniques, journées de lecture ou jeux de questions-réponses ; tous ses mots sont de la matière vivante. Ils bougent sans cesse, on les croit écorchés, tristes, fatigués, on se trompe, ils sont mémoriels. Berthet a comprimé notre mémoire vive. Chez lui, l’aventure peut déboucher à l’improviste ; d’une phrase anodine, il se met à dériver vers une maxime de moraliste. « Aujourd’hui, on ne pourra peut-être plus s’attaquer à personne, puisqu’il n’y a aura plus personne » écrit-il. Il devient un classique. La Table Ronde édite cette semaine dans un tirage limité et numéroté de 2 500 exemplaires un précieux recueil, jaune d’or, où l’on retrouve des articles essentiellement des années 1988 et 1989 parus dans Madame Figaro, Le Quotidien de Paris, Le Figaro Littéraire, L’Idiot international, Rive Droite, etc.

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Dans la France de 2025, tout le monde est brillant, tout le monde est formidable, la chanteuse de télécrochet, le jeune loup en politique, le philosophe des studios ou la cartomancienne en mal d’amour si bien que l’échelle des valeurs a perdu tout sens de l’orientation. Lire Berthet, c’est s’imprégner du parfum d’une époque, rameuter des souvenirs, rembobiner les films de Diane Kurys, les nageuses de l’Est, les vols d’Air Inter, les jeunes filles se tartinant de Nivea, l’aérobic, la figure des notaires, les mariages à la campagne, les livres de Patrick Besson, les récurrences de Thomas Bernhard, Carver, Salinger ou Philippe Sollers et s’attarder sur la silhouette de Gabriela Sabatini, mais c’est surtout se confronter à la virtuosité d’un écrivain majeur. Il écrit si bien sur Blondin, « un oncle excentrique presque d’Amérique », sur Drieu « la déception était son faible », ou les mystères de la collection Harlequin. Son défaitisme émaillé d’une souveraine effronterie est un bonheur de lecture.

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Les Nouveaux féminicides

Après le Beaujolais nouveau et les Nouveaux Philosophes, il y a désormais de Nouveaux Féminicides, argumente notre chroniqueur. On a importé en France les « crimes d’honneur » perpétrés dans des sociétés musulmanes archaïques. L’affaire Chahinez Daoud, qui vient d’être jugée, n’est pas isolée.


Vendredi 28 mars, Mounir Boutaa, qui avait immolé son épouse Chahinez Daoud par le feu, a été condamné par la Cour d’assises de la Gironde à la perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de 22 ans. C’est bien le moins que l’on pouvait faire.

Reste que ce procès n’a pas dit toute la vérité sur cette affaire.

Etienne Campion, dans le dernier numéro de Marianne1, pose d’emblée une question qui n’est en rien incongrue : « De quoi est morte Chahine Daoud ? » Et il ajoute immédiatement : « De quoi est morte Aurélie Langelin, rouée de coups par son mari Karim Belkacem ? » Les deux affaires sont jugées en même temps, les médias (aussi bien Le Parisien que Libé ou Le Monde) ont souligné la responsabilité de l’Etat — car ni la police ni la justice n’ont bien pris au sérieux les plaintes des deux femmes, avant que l’irréparable se produise.

Et si l’essentiel était passé sous silence ?

« Ces failles, analyse Etienne Campion, ne sauraient nous dispenser de poser une question fondamentale : pourquoi les féminicides augmentent-ils ? Pourquoi cette gêne à nommer ce qu’ils révèlent de plus glaçant : l’importation révoltante, sur notre sol, des « crimes d’honneur » ? » Et de rappeler comment un certain Samire Lymani, il y a quelques années, coula Aurélie Vaquier dans une dalle de béton pour des raisons similaires, ou comment Mourad brûla vive Shaïna Hansy — elle avait quinze ans, mais il l’avait jugée « impure », quoi que cela veuille dire pour ces meurtriers incrustés dans un Moyen-Âge immobile…

Les organisations féministes, qui à l’occasion de la Journée de la femme ont placardé partout dans nos villes des statistiques morbides affolantes, et qui ont d’ailleurs manifesté toute la semaine devant le tribunal de Bordeaux où était jugée l’affaire, ne se soucient guère d’épingler les particularismes ethniques de ces meurtres. Au nom, sans doute, de l’intersectionnalité des luttes, de la volonté de ne pas stigmatiser, de ne pas faire le jeu de l’extrême-droite, bla-bla-bla. Ni elles, ni Libé, ni Le Monde — etc.

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Clara Lainé, sur France.tv.info, rappelle « l’altération du discernement » évoqué par les psychiatres. Un élément retenu par la Cour, mais qui n’a valu à l’assassin aucune réduction de peine, les jurys populaires sont souverains, et c’est heureux. Car à chercher des excuses aux criminels, on finira par condamner les djihadistes à des peines de principe — tout comme certains violeurs, rarement épinglés par les Chiennes de garde, ont été « excusés » dans la mesure où les mœurs occidentales entraient en conflit avec leur culture… Tu portes un short ou une jupe trop courte, tu passes à la casserole — et au besoin, je mettrai la casserole sur le feu.

Là est le point de rupture. Il n’y a en Occident qu’une culture — la nôtre. C’est même le principe initial du marxisme — mais qui, dans les partis de gauche, a lu Marx, sinon pour le trahir ? Vous pensez, un Blanc cisgenre, et juif de surcroît, ce n’est pas le pain blanc de LFI…

Il n’y a qu’une culture, il n’y a qu’une justice — la nôtre. Un immigré ne transporte pas son code judiciaire inhumain et arriéré à la semelle de ses babouches. Il s’adapte, il envoie sa progéniture à l’Ecole de la république, il n’interdit pas à sa femme de sortir tête nue, il ne refuse pas de serrer la main de ses collègues sous prétexte qu’elles seraient « impures », il n’impose pas le ramadan à ses voisins ni aux copains de classe de ses enfants. Il se coule dans la culture de son pays d’accueil, qui le lui rendra bien.

S’il veut vivre selon des traditions assassines, il peut repartir au Pakistan, en Arabie Saoudite, en Afghanistan — le monde ne manque pas, malheureusement, de pays qui ont conservé leur religion sous leur forme originelle et barbare.

Etienne Campion, Le Président toxique — Enquête sur le véritable Emmanuel Macron, Robbert Laffont, février 2025, 464 p.

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  1. https://www.marianne.net/societe/medias/feminicides-pointer-la-responsabilite-de-letat-ne-suffit-pas-pour-comprendre-leur-augmentation ↩︎

Marine Le Pen inéligible: sa colère froide

Pas à un seul instant, au cours de son interview hier soir dans le JT de TF1, Marine Le Pen ne s’est départie de son regard dur et de son ton sévère. Condamnée en première instance hier matin à deux ans de prison ferme et cinq ans d’inéligibilité avec application immédiate, la députée du Pas-de-Calais vient sans doute de vivre l’une des journées les plus cruelles de sa vie politique.


« Des pratiques que l’on croyait réservées aux régimes autoritaires », a-t-elle cinglé au micro de Gilles Bouleau. Quelques heures après le prononcé des peines dans l’affaire des assistants parlementaires du FN, Marine Le Pen reste outrée. Pour elle, ce procès, « fait par des adversaires politiques, est fondé sur des arguments qui ne tiennent pas la route. Il s’agit là d’un désaccord administratif avec le Parlement européen. Il n’y a pas d’enrichissement personnel, il n’y a pas de corruption, il n’y a rien de tout cela ».

Sévérité inattendue

Les condamnations – d’une sévérité inattendue – n’ont pas seulement provoqué une immense secousse dans la vie politique française. Ailleurs dans le monde, nombre d’observateurs se demandent si la France ne serait pas en train de devenir un de ces pays où les opposants subissent des sanctions exagérées de la part du pouvoir.

Marine Le Pen arrive au tribunal à Paris, le 31 mars 2025. Thibault Camus/AP/SIPA Numéro de photo : ap22947670_000004

Certes Marine Le Pen n’a pas encore été écrouée, contrairement à ce qui se passe en Turquie, où Ekrem Imamoglu, maire d’Istanbul et principal rival de Recep Tayyip Erdoğan, a été arrêté le 18 mars. Mais que diraient, à l’étranger, les amis du pluralisme et des libertés publiques si la femme politique la plus populaire de notre pays devait effectuer les deux ans de prison ferme prononcés hier matin ?

Évidemment plusieurs régimes « illibéraux » ont été prompts à critiquer la décision de justice parisienne. À Moscou, Dimitri Peskov, porte-parole du Kremlin, l’a qualifiée de « violation des normes démocratiques ». À Budapest, Victor Orban a tweeté « Je suis Marine » en guise de soutien. À Washington, la porte-parole du département d’État, Tammy Bruce a déclaré : « L’exclusion de personnes du processus politique est particulièrement préoccupante compte tenu de la guerre judiciaire agressive et corrompue menée contre le président Donald Trump ici aux Etats-Unis. »

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Pas sûr toutefois que Marine Le Pen ait apprécié ces marques de solidarité. Depuis quelques mois, la présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale était en train de parachever sa dédiabolisation. En janvier, lors de la cérémonie d’obsèques de son père, elle a bien pris soin de ne pas revendiquer l’héritage politique gênant du fondateur du Front national. Début mars, elle a écarté les soupçons de trumpolâtrie en déclarant dans Le Figaro que l’attitude américaine envers l’Ukraine est « très critiquable ». Enfin la semaine dernière, son bras droit Jordan Bardella s’est rendu, sur invitation du gouvernement israélien, à Jérusalem, où il s’est recueilli à Yad Vashem, le mémorial israélien des victimes juives de la Shoah, une première pour un représentant du parti à la flamme.

Justice : Le Pen, vite !

Au moment même où elle allait devenir une figure « fréquentable » de la vie politique française, Marine Le Pen voit donc fortement hypothéquer sa candidature à la prochaine présidentielle. Sans que son recours en appel, formulé aussitôt après, ne puisse suspendre l’exécution de la peine, la voilà déclarée inéligible jusqu’en 2030. Autrement dit, il faudrait que les juges d’appel se prononcent en un temps record (d’ici deux ans) et qu’ils décident de rétablir la députée du Pas-de-Calais dans la plénitude de ses droits politiques pour qu’elle puisse se présenter en fin de compte à la course à l’Elysée en 2027. Une hypothèse très incertaine, même si l’intéressée indique y croire encore, puisque, tout en se déclarant à nouveau innocente, elle a lancé un appel hier soir à la télévision à ce que la justice soit diligente.

Pour justifier l’application immédiate de l’inéligibilité, les magistrats du tribunal judiciaire ont invoqué un risque de récidive. Selon eux, les responsables du RN se sont montrés, durant la procédure, inconscients de leurs comportements fautifs et auraient ce faisant laissé penser qu’ils sont susceptibles de recommencer. Un raisonnement contesté par l’avocat de Marine Le Pen, Rodolphe Bosselut, qui rappelle que les accusés ont entièrement admis les faits reprochés – de sorte qu’on ne saurait parler de « déni » – et qu’ils se sont contentés d’en réfuter la gravité – ce qui s’apparente selon lui à une défense classique, ne préjugeant pas de l’avenir.

En attendant, interrogée par Gilles Bouleau sur l’hypothèse, désormais très probable, qu’elle ne puisse pas concourir à la prochaine présidentielle, Marine Le Pen a donné le nom de son potentiel remplaçant pour représenter les couleurs de son parti : « Jordan Bardella est un atout formidable pour le mouvement et je le dis depuis longtemps, a-t-elle confié. J’espère que nous n’aurons pas à user de cet atout plus tôt qu’il n’est nécessaire. »

Révélations: bientôt des trottoirs à sens unique à Paris

L’inauguration de ces trottoirs est prévue le 1er septembre. À titre expérimental, les Champs-Élysées, les Grands Boulevards, la rue de Rivoli, ainsi que les boulevards Saint-Germain et Saint-Michel seront concernés pendant six mois.


À cause d’une « smombification » en pleine expansion et que rien ne semble pouvoir endiguer, source de nombreux incidents entre piétons et aussi d’accidents graves ayant parfois couté la vie à certains d’entre eux, la ville de Paris a décidé de créer des trottoirs à sens unique le long de ses principales artères les plus fréquentées, selon un rapport de 14 pages, classé très confidentiel, que Causeur.fr a pu se procurer auprès d’une source interne haut placée, digne de foi.

Un projet qui sera présenté début juin

Le projet qui devrait être rendu public dans la première semaine de juin s’inspire de ce qui s’est fait à Chongqing, ville du sud-ouest de la Chine, sur le fleuve Yangtze, proche du grand barrage des Trois Gorges, et à Séoul, capitale de la Corée du Sud, suite à la prolifération des « smombies ». Ce mot est une contraction de smartphone et de zombie. Il désigne ces piétons qui ont les yeux en permanence rivés sur l’écran de leur téléphone, tout en se déplaçant à un bon train. Il a été inventé en 2015 en Allemagne suite à la massification de ce phénomène dans les grandes villes du monde que les urbanistes qualifient de « smombification ».

L’un d’entr’eux, Hubert Beroche, fondateur et président d’Urban AI1, qui vient de publier un essai à ce sujet2, estime dans un entretien accordé au Figaro le 18 mars, qu’à « bien des égards, le lancement des smartphones peut être comparé à celui de l’automobile au XIXème siècle. (…) les technologies transforment la matérialité d’une ville. Les ascenseurs ont exhaussé la ville, les métros l’ont densifiée, les voitures l’ont allongée ». Désormais les villes doivent s’adapter à ce qu’il appelle « le basculement des « yeux sur la rue » aux « yeux sur écran »».

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C’est ainsi que Chongqing, qui avec ses 32 millions d’habitants est considérée comme la plus grande ville du monde (en fait, il s’agit d’un conglomérat de villes voisines réunies sous une administration commune), a dédié plusieurs rues de son centre à l’usage exclusif des « smombies » pour leur épargner les accidents de la circulation dont ils étaient victimes (percussion en pleine tronche d’un poteau se trouvant sur leur trajet, collision de front avec un homologue venant en sens inverse, renversement par une voiture lorsqu’ils traversaient un carrefour le regard fixé sur leur écran etc.). Les autorités de Honolulu ont, elles, pris un décret interdisant de traverser une rue en regardant son téléphone sous peine d’une lourde amende et envisageraient des mesures plus drastiques si cette interdiction reste sans effets.

Des feux rouges au sol dans la ville de Hong-Kong afin d’éviter les accidents entre voitures et « smombies » © D.R.

Dans la capitale de la Corée du Sud, 61% des accidents de la circulation impliquaient des « smombies » obnubilés par ce qu’ils voyaient sur leurs smartphones. Alors les autorités municipales, rapporte Hubert Beroche, ont « installé des sortes de feux rouges au sol » de manière à qu’ils n’aient plus besoin de lever des yeux pour être informés qu’ils n’ont pas à traverser. Le pourcentage d’accidents a très sensiblement baissé. Hubert Beroche indique aussi que des « chercheurs ont imaginé une application utilisant la caméra des smartphones couplée à de l’intelligence artificielle, de sorte qu’une notification soit envoyée en cas de danger » à l’utilisateur.

« L’écran médiatise, poursuit Hubert Beroche, un rapport au monde désincarné, insipide. On se rend compte, à travers cette désescalade sensorielle, d’une diminution de notre capacité de cartographie mentale. L’utilisation répétée, prolongée, abusive des écrans atrophie notre mémoire spatiale et nous rend moins aptes à coordonner nos sens avec l’environnement urbain. Chacun le perçoit dans son intimité : alors qu’il y a dix ans, un coup d’œil sur une carte suffisait à se repérer, on a désormais besoin de son smartphone à chaque coin de rue pour s’assurer qu’on est bien sur la bonne voie ».

Mettre fin à une hécatombe

L’usage du smartphone tout en se déplaçant constitue un sérieux péril. D’après la gendarmerie, dans un communiqué du 18 février dernier, 451 « smombies » ont perdu la vie en 2024, en France, dans des accidents de la circulation dont ils étaient les premiers responsables.

Le rapport de la ville de Paris, pour justifier l’instauration de trottoirs à sens unique, recense quelques incidents graves qui se sont produits récemment. Ainsi, en novembre dernier, une septuagénaire qui promenait son petit chien, sur l’allée centrale du Bd des Batignolles, a été percutée par l’arrière par un « smombie » qui faisait son jogging, casque sur les oreilles, regard fixé sur son écran qui lui montrait un concert de rock japonais. Elle est tombée face avant. Sa tête a frappé le sol du trottoir. Fracture du crâne et du fémur, elle est décédée à l’hôpital Cochin ; son petit chien n’a jamais été retrouvé. Une autre fois, Bd St Germain, s’est produit un carambolage entre cinq d’entr’eux. Il s’en est suivie une bagarre, chacun rejetant la responsabilité sur les autres, qui fit un blessé grièvement et deux plus légers. « La liste de ces incidents est loin d’être exhaustive », tient à préciser le rapport.

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Toutefois, la ville de Paris se refuse à recourir à des technologies issues de l’intelligence artificielle comme à Séoul, estimant qu’elles présentent de très graves risques de flicage de la société. Le rapport dit « qu’en cas d’un avènement d’un régime d’extrême-droite, ce qui n’est plus à exclure, ces moyens techniques, sous prétexte d’éviter des accidents, pourraient servir à pister les résistants à la dictature. Dès lors, il est préférable de recourir tout simplement au bon sens humaniste et citoyen : le sens unique. Et ça coûte moins cher. »

L’inauguration de ces trottoirs est programmée pour le 1er septembre prochain. Sont concernés à titre expérimental, pour une durée de six mois, les Champs-Élysées, les Grands boulevards, la rue de Rivoli, les boulevards St Germain et St Michel. Le changement de trottoir ne pourra se faire qu’aux carrefours dans un sens giratoire à l’instar des ronds-points pour les automobiles, à savoir en tournant sur sa gauche.

Le rapport suggère aussi qu’à moyen terme, si le sens unique s’impose et est approuvé par une consultation participative, il serait bon d’envisager la création de trottoirs roulants, comme dans le long couloir du métro de la gare Montparnasse afin de rendre les déplacements plus rapides. En effet, « la vitesse des piétons serait limitée sur les trottoirs à sens unique à 3km/h afin que d’éventuelles collisions entre piétons n’aient pas de conséquences fâcheuses comme c’est trop souvent le cas actuellement », souligne le rapport.

Ces trottoirs roulants seraient expérimentés sur le boulevard des Batignolles, de la place de Clichy jusqu’à Ternes. Leur alimentation électrique serait assurée par du voltaïque et de l’éolien installé en hauteur sur l’allée centrale, formant de la sorte un toit qui protégerait les passants de la pluie et du soleil.

  1. Premier Think Tank qui propose des modes de gouvernance éthiques et des usages durables de l’IA urbaine. ↩︎
  2. Smombies : la ville à l’épreuve des écrans, Hubert Beroche, Editions de l’Aube, 267 p. ↩︎

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Bordeaux : des rues « exclusives » pour vélo à l’étude ?

De son côté, la ville de Bordeaux a engagé depuis quelques mois une étude, considérée par bien des experts en aménagement urbain comme audacieuse, dont l’objet est d’établir les prémices de ce que sera le transport dans la ville du futur où prédomineront « les mobilités douces et non polluantes ».
D’après une source municipale très proche du dossier qui s’est confiée à l’hebdomadaire local d’enquête, L’Avenir girondin, le projet qui n’en est encore qu’à son ébauche porterait sur la création « d’un réseau structurant de rues exclusivement réservées à l’usage de la bicyclette. » L’idée est née à la suite d’un voyage, dans la plus totale discrétion, en janvier 2024, à Copenhague, considérée comme le modèle mondial en matière de déplacement à vélo, bien plus qu’Amsterdam, du maire Pierre Hurmic, dit « l’écolo décalé » à cause de ses initiatives souvent en marge de l’orthodoxie verte, ou encore le « catho basque », en raison de sa religion et de ses origines.
A son retour, il avait convoqué ses plus proches collaborateurs et leur avait dit : « Il faut faire de notre chère Bordeaux, le pendant de la capitale danoise en France. Le vélo, c’est le futur, comme j’ai pu le constater là-bas. »
Il convient de préciser que Pierre Hurmic est un passionné de cyclisme. Le Tour de France que ses prédécesseurs boudaient, c’est lui qui l’a fait revenir à Bordeaux en 2022. Prenant à rebrousse-poil son parti et surtout son homologue lyonnais, Gregory Doucet pour qui le Tour n’est que « machiste et polluant » et ne veut plus l’inviter à faire étape dans la capitale des Gaules tant qu’il ne se sera pas décarboné et inscrit dans une logique durable (et tant qu’on y est pourquoi pas couru par des équipes mixtes et sans pub sur les maillots).
Dans la foulée une mission, conseillée par trois experts danois en ingénierie mobilité urbaine (1), détachés par Copenhague auprès de Bordeaux, s’est mise au travail dans la plus grande discrétion. Selon L’Avenir girondin, ses premières propositions viseraient à créer quatre grands axes de rues « dédiées », un nord-sud, un est-ouest et deux diagonales, strictement réservés à la circulation des vélos qui convergeraient sur la place névralgique de la Victoire transformée en un grand rond-point avec sens giratoire à gauche.
Aux carrefours de ces rues qui seraient baptisées « exclusive-vélo » seraient aménagées de passerelles à escaliers mécaniques pour pouvoir traverser sans interrompre le flux des cyclistes. L’énergie de ces escaliers serait fournie par des panneaux voltaïques faisant office d’ombrelles et de parapluie en fonction du temps; quant aux croisements avec les rares rues où circuleront encore des voitures, il serait envisagé des sortes de passages à niveau automatiques permettant le franchissement de ces derniers en alternance, cinq minutes pour les voitures, dix minutes pour les cyclistes.
Deux questions font débat. Est-ce que les trottoirs de ces rues « exclusive vélo » doivent être rehaussés et être protégés par des rambardes en bois ou par une végétalisation (à définir, arbustes ou fleurs et plantes vertes) pour empêcher les cyclistes de les emprunter ? La seconde est plus cruciale et semble difficile à trancher tant les avis sont partagés au sein de la commission : est-ce que les vélos électriques y seraient autorisés ?
Les opposants estiment qu’il s’agit de deux-roues motorisés, un peu à l’instar de ce que furent autrefois les Vélo-Solex ou les Mobylettes, vu qu’ils peuvent atteindre les 25 km/h, constituant ainsi un danger potentiel pour les autres cyclistes ; pour les partisans, les interdire serait discriminatoire, notamment envers leurs usagers souvent d’un certain âge déjà et qui sans cette assistance motrice ne se seraient pas remis au vélo. Dès lors, ils proposent un « gentleman-agreement » : que la vitesse y soit limitée à 15 km/h, vitesse moyenne de tout cycliste urbain, et tout dépassement sanctionné d’une forte amende.
Le maire souhaiterait inaugurer les deux premiers axes, les nord-sud et est-ouest soit au tout début de 2026, soit moins de trois mois avant les municipales, selon certaines indiscrétions qui n’ont pas pu être confirmées. On lui prête l’intention de se représenter… ce qui serait un atout indéniable pour sa réélection, selon les connaisseurs de la politique locale. Il se murmure aussi que s’il était reconduit, il envisagerait de créer une régie municipale d’une trentaine de taxis tricycles ne desservant que le centre-ville alentour de la Gare Saint-Jean • RU

1 – La municipalité de Copenhague a demandé que la prestation de ces trois ingénieurs soit rétribuée seulement en Grands Crus, selon une note dont a eu connaissance L’Avenir girondin.  

Marine Le Pen, victime du «coup d’Etat» des juges

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Parlementaires européens. Si la majorité des observateurs pensaient bien que la présidente du RN serait condamnée par la justice, ils ne pensaient pas que les juges iraient jusqu’à l’empêcher de concourir à la prochaine élection présidentielle. « Ce n’est pas aux juges de décider pour qui doit voter le peuple » a déclaré Eric Zemmour. « C’est la démocratie française qui est exécutée » se désole Jordan Bardella. Marine Le Pen parlera à 20 heures sur TF1. Analyse.


Cela s’appelle un scandale démocratique : en choisissant d’appliquer, sans retenue ni discernement, l’ « exécution provisoire » de la peine d’inéligibilité prononcée ce lundi contre Marine Le Pen, le tribunal correctionnel de Paris force la candidate à la présidentielle à abandonner la course.

L’abus de pouvoir est d’autant plus révoltant qu’un sondage Ifop-JDD la créditait hier de 37% des suffrages au premier tour, loin devant ses concurrents. Le 13 novembre, le parquet avait requis cinq ans de prison dont deux ferme, 300.000 euros d’amende et l’application de l’exécution provisoire, en sanction d’un détournement de fonds publics liée à l’emploi d’assistants parlementaires européens du RN. Or ce pouvoir exorbitant des magistrats, qui brisent un processus électoral, est une violence.

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La France est semblable à la Roumanie dont la justice a empêché le favori de poursuivre sa course. En 2017, la traque du Parquet national financier contre le présidentiable François Fillon n’avait néanmoins pas empêché le candidat de se présenter. Mais ce sont les parlementaires qui ont accepté, avec la loi Sapin II du 9 décembre 2016 instituant cette exécution provisoire dérogeant à l’appel suspensif, de placer la politique à la merci des gens de robe. Cette légèreté rappelle celle de Louis XVI qui dès 1774 avait rétabli les parlements (qui avaient fonction de cour de justice) dans leurs droits, supprimés par Louis XV en 1771. La suite est connue : se heurtant au judiciaire, Louis XVI en appela aux Etats généraux, qui allaient conduire à la Révolution. Le coup d’Etat des juges, perpétré ce lundi, procède de ce même angélisme du législateur. Jeudi, le réquisitoire infâmant du Parquet financier contre Nicolas Sarkozy dans la nébuleuse affaire libyenne co-instruite par Médiapart (192 articles à charge) – sept ans de prison en dépit d’une absence de preuves – avait dévoilé le ressentiment des magistrats reprochant à l’ancien président, faute de mieux, « une quête effrénée à la recherche de financements nécessaires à la satisfaction de ses ambitions politiques dévorantes » et un « pacte de corruption faustien ».

La Justice, quand elle s’éloigne de l’esprit des lois pour imposer sa vertu vengeresse, devient inquisitoriale et donc dangereuse. Dès lors, elle défigure la démocratie en entravant l’expression de la souveraineté nationale au nom d’un Etat de droit dévoyé. C’est ce qui se passe lorsque des juges, perméables pour certains au militantisme du Syndicat de la magistrature, traquent des mauvaises pensées à défaut de statuer sur des actes. Ces justiciers sont pareils aux théologiens de jadis qui punissaient les péchés des hérétiques. Ils laissent voir « cette sombre superstition qui porte les âmes faibles à imputer des crimes à quiconque ne pense pas comme elles » (Voltaire). La condamnation d’Eric Zemmour, mercredi dernier, à 9000 euros d’amende (qui faute de versement donnerait lieu à son incarcération!) illustre cette dérive doctrinaire. Le tribunal correctionnel de Paris a reproché au président de Reconquête, commentant le meurtre au couteau de Thomas lors d’un bal populaire à Crépol en novembre 2023, d’avoir notamment déclaré : « Nous avons, aujourd’hui, une situation où nous avons deux peuples, deux France, deux jeunesses, celle de Thomas, celle de Chahid ».

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Or ce que décrit Zemmour n’est que le reflet d’une fracture identitaire, décrite par votre serviteur dès 2007[1], qui ne cesse de se radicaliser. S’il y a un « pacte » qui corrompt la démocratie, c’est chez ces juges non élus qui veulent reléguer les politiques à des rangs subalternes. Avec leur aval…

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Belgiquistan: Hadja Lahbib, une commissaire européenne problématique?

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La commissaire européenne belge fait le bonheur d’une organisation musulmane séparatiste qui appelle à la démission de Bruno Retailleau.


Recrutée par le Mouvement Réformateur (MR, un parti de centre-droit, mais le plus « à droite » sur l’échiquier politique francophone belge), la journaliste belge Hadja Lahbib a surpris dès sa nomination en 2022 comme ministre des Affaires étrangères en déclarant qu’elle n’était « ni de gauche, ni de droite ». Journaliste, présentatrice du JT de la RTBF, la chaîne publique belge très marquée à gauche, on a ainsi découvert qu’elle avait été la marraine d’un programme international de la mutuelle socialiste belge Solidaris, confirmant le soupçon qu’elle n’était pas vraiment de droite. Son passage aux Affaires étrangères a surtout été marqué par le scandale lié aux visas accordés à des représentants du régime iranien des mollahs, dont Alireza Zakani, maire de Téhéran, impliqué dans la répression brutale des manifestations déclenchées par la mort de Mahsa Amini, une jeune femme tuée par le régime en 2022. Par ailleurs, en mai 2023, Mme Lahbib a contribué à la libération d’Olivier Vandecasteele, retenu en otage par Téhéran mais au prix d’un échange avec un terroriste, Assadollah Assadi, un diplomate iranien condamné à 20 ans de prison pour un projet d’attentat en France.

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Parachutée à la Commission européenne sans raison évidente, sauf sa qualité de femme, elle vient de commettre deux erreurs majeures. La première concerne une vidéo où elle se ridiculise en présentant un « kit de survie européen pour les 72 premières heures », qui a suscité l’indignation, notamment de Pascal Praud sur CNews. Vue trois millions de fois, elle a été rapidement fermée aux commentaires qui étaient tous négatifs.

La seconde est bien plus grave : dans une autre vidéo elle reprend l’argumentaire du Comité contre l’islamophobie en Europe (CCIE), successeur du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF). Dissous en 2020 par Gérald Darmanin au nom du gouvernement français, le CCIF a, selon Florence Bergeaud-Blackler, spécialiste de l’islam en France, « joué un rôle dans l’assassinat de Samuel Paty ». Dans la vidéo, Hadja Lahbib dénonce le « racisme anti-musulman », la « haine anti-musulmane » et les « stéréotypes ». Elle rappelle l’attentat de Christchurch en Nouvelle Zélande, il y six ans (sic) et « rend hommage à ses victimes », mais n’a pas un mot pour toutes celles, bien plus nombreuses, des attentats commis par des terroristes islamistes. Elle réfute également le fait qu’il pourrait y avoir un lien entre islam et terrorisme. Les musulmans sont présentés comme des victimes et seraient « déshumanisés » par certains médias. La situation des femmes portant le foulard serait particulièrement grave car présentées « comme soumises ou cherchant à islamiser la société ». Bref, on retrouve dans cette vidéo le parfait brévaire du militant islamo-gauchiste.

La vidéo plait tellement au CCIE qu’il la reprend en y ajoutant son logo (avec ou sans l’accord de la commissaire, on ne sait ?) et ajoute à la fin un appel aux dons! Le CCIE, simple reformulation du CCIF, entretient un discours proche des Frères musulmans et défend un agenda communautariste, critiquant ouvertement les lois françaises sur la laïcité, le voile et la lutte contre le séparatisme. Cette organisation tente d’institutionnaliser la notion d’islamophobie, la présentant comme un racisme systémique visant spécifiquement les musulmans. Le 28 mars, le CCIE a publié un communiqué virulent : « Bruno Retailleau attise la haine contre les femmes musulmanes portant le foulard. Nous considérons qu’il n’est plus digne d’exercer ses fonctions de ministre de l’Intérieur. Nous exigeons sa destitution immédiate. Il est temps de dire STOP à la haine d’État. » Sur la page Facebook et le compte X, du CCIE, la vidéo de la commissaire et le communiqué visant le ministre de l’Intérieur se succèdent. Hadja Lahbib n’a été élue par personne, mais simplement désignée par le gouvernement belge. En s’exprimant ainsi, elle engage la Commission européenne toute entière qui adhère depuis longtemps à cette notion fausse d’une racisme anti-musulman visant à criminaliser toute forme de critique de l’islam. 

Notons qu’elle ne prend aucun risque professionnel : à tout moment, elle peut retrouver son poste de fonctionnaire à la RTBF où elle est simplement en congé. 

Le violon virtuose de Liya Petrova

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Musique classique: Erich Wolfgang Korngold et Richard Strauss réunis sur un CD. Un très beau diptyque concocté par la violoniste Liya Petrova  


A l’instar de Mozart dont il hérite le prénom, Erich Wolfgang Korngold (1897-1957) fut salué comme un prodige dès sa prime jeunesse par la société cultivée de Vienne. Elève surdoué d’Alexander von Zemlinsky (le beau-frère de Schönberg), génie précoce natif de Brünn, ville alors intégrée à l’empire Austro-Hongrois (l’actuelle Brno, en République tchèque), justement célébré en son temps par Mahler, le compositeur demeure essentiellement connu, de nos jours, pour son œuvre lyrique – hélas trop rarement donnée sur les grandes scènes européennes : Violanta (1914), Die tote Stadt (1920), d’après Bruge-la-Morte, de Rodenbach, sommet de la littérature symboliste, et enfin son opus magnum tragique, Das Wunter der Heliane [le Miracle d’Héliane] (1927)…

A Korngold, cornaqué de bonne heure, tout comme l’avait été Mozart, par un père autoritaire et quelque peu envahissant, s’ouvrait une carrière glorieuse sur le Vieux continent. Il n’avait qu’un défaut : être juif. En 1934, à l’instigation de l’immense metteur en scène et coreligionnaire Max Reinhardt (avec qui il avait déjà collaboré et qui, dès l’Anschluss proclamé, vient lui-même de fuir outre atlantique les persécutions nazies), Korngold s’exile avec femme et enfants aux Etats-Unis (il prendra la nationalité américaine en 1943), et entame une nouvelle carrière à Hollywood : aucun cinéphile n’ignore que Korngold y signe les bandes-son de films fameux, tels les deux Adventures of Robin Hood, celui, muet, de William Dieterle puis celui, parlant, de Michael Curtiz ; sans compter Capitaine Blood, L’Aigle des mers, Le Vaisseau fantôme, du même Curtiz, etc. Le Septième art doit à Korngold près d’une vingtaine de partitions ! Mais outre ballets, lieder, sonates pour piano, le compositeur incroyablement fécond a produit quantité de musique symphonique, de concertos, de musique de chambre, œuvres décidément trop méconnues, elles aussi.

Écrit entre 1937 et 1945 et dédié à Alma Mahler, la veuve de Gustav, le Concerto pour violon en ré majeur op. 35, en trois mouvements, reste pourtant assez célèbre. De fait, c’est un sommet de ce lyrisme opulent où se débondent les torrents d’arrière-saison du post-romantisme tardif, dans ce qu’il a de plus suave, diapré et flamboyant à la fois. Ce chef-d’œuvre est à redécouvrir, dans l’interprétation de toute beauté qui, gravée en CD sous le label Mirare, vient de paraître.      

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Directrice artistique, en outre, de la Musikfest parisienne, salle Cortot, festival chambriste dont l’édition 2025 avait lieu début mars, la violoniste bulgare Liya Petrova avait eu l’idée d’une confrontation entre le concerto pour violon de William Walton (1902-1983) et la sonate pour violon de Respighi (1879-1936). Résultat, baptisé « Momentum 1 » et déjà sous les auspices de Mirare, un premier disque en tous points remarquable.  « Momentum 2 », édition très attendue donc, promettait d’associer, au diamant de Korngold mentionné plus haut, la Sonate pour violon et piano op.18 de Richard Strauss, œuvre de jeunesse certes moins surprenante que le premier Concerto pour cor écrit à 19 ans, avant que ne s’affirme la patte inimitable du compositeur avec, entre autres, l’inoubliable Tod und Verklrung [Mort et transfiguration]… 

L’articulation du morceau virtuose, infiniment raffiné d’un Korngold dans la maturité de son art, avec le jaillissement juvénile d’un Richard Strauss encore alors très nettement sous influence de Brahms ou de Mendelssohn n’a rien d’arbitraire, si l’on se souvient qu’après avoir été l’un de ses premiers soutiens, Strauss, nommé à la tête du Staatoper de Vienne en 1918 et devenu un ami très fidèle, y engagera Korngold comme chef d’orchestre en 1922. De fait, entre la moirure propre au futur créateur d’Elektra ou d’Ariane à Naxos et la luxuriance mélodique polytonale, dissonante et cuivrée du cadet, la parenté est saisissante. Reste que si Richard Strauss est, à raison, un compositeur définitivement adoubé par la postérité, on mesure mal aujourd’hui l’extrême fortune critique dont a joui la musique de Korngold en Europe, dans les débuts du XXème siècle…

L’onctueux nappage orchestral commun aux deux compositeurs est ici restitué par une prise de son exemplaire : sous la baguette du très jeune chef britannique Duncan Ward, le Royal Philharmonic Orchestra pare la texture si finement ouvragée de Korngold d’une rutilance et d’un phrasé éblouissants. Nettes, véhémentes, les attaques de Liya Petrova comme le vibrato si expressif de son archet se marie au jeu perlé, subtil et ardent du jeune pianiste Alexandre Kantorov, prince du clavier à qui, rappelons-le, on doit un enregistrement magistral des sonates de Brahms, et qui accompagne maintenant les effluves maniéristes du jeune Richard Strauss avec une clarté d’exécution sommitale.           


A écouter : 1CD Momentum 2. Sonate pour violon et piano op.18, de Richard Strauss/ Concerto pour violon op.35, de Erich Wolfgang Korngold. Royal Philharmonic Orchestra.  Direction : Duncan Ward. Violon : Liya Petrova. Piano : Alexandre Kantorow. Label Mirare.

Momentum [2]: Korngold, Strauss

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Juges partout, justice nulle part

Les juges seraient-ils paradoxalement plus sévères avec les puissants ? En tout cas, qu’ils puissent décider qui peut gouverner ou pas est problématique, observe Elisabeth Lévy.


À la lumière de notre actualité judiciaire, on peut se demander s’il faut avoir peur de la Justice. Pas de suspense : la réponse est oui. Surtout si vous êtes un élu ou un people. Si vous êtes un mineur multirécidiviste, vous avez en revanche plus de chances de passer au travers.

Des juges et des ambitieux

Revenons sur le réquisitoire Sarkozy. Il n’est pas seulement problématique à cause des peines très lourdes demandées (sept ans ferme, privation des droits civiques et parentaux qui traduisent une volonté d’humilier), mais parce que quels que soient les indices dont on nous parle concernant un financement libyen présumé, il n’y a pas de preuves. Si de l’argent a circulé, on n’en retrouve pas trace dans la campagne. Le rôle de l’ancien président Sarkozy comme grand orchestrateur n’est pas non plus démontré.
L’un des procureurs a parlé de la « soif de pouvoir », de la «cupidité», de « l’ambition dévorante » de l’ex-président. Et alors, c’est illégal ? Les juges se prononcent-ils désormais sur notre moralité ? On ne voit pas bien le rapport. Il est difficile de ne pas voir quelque chose d’un peu personnel, de ne pas penser que c’est alors la haine de Nicolas Sarkozy qui parle.

Proportions

Ce matin, le Tribunal de Paris décidera si Marine Le Pen peut se présenter à la prochaine élection présidentielle. Le Conseil constitutionnel vient de fournir au tribunal l’argumentaire opposé à l’exécution provisoire : il revient au juge « d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que cette mesure est susceptible de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la liberté de l’électeur ». Il est donc très peu probable que le tribunal prenne cette responsabilité.

À ne pas manquer, notre dossier: Ferrand au sommet, Hanouna au bûcher, L’État de droit c’est plus fort que toi!

Premièrement, on pourra toujours se demander si cette décision n’est pas un renvoi d’ascenseur (après la nomination de Richard Ferrand, qui ne serait pas à sa place sans le RN). Deuxièmement, que des juges puissent ainsi décider qui peut se présenter, et donc qui peut gouverner, est évidement problématique.

Est-ce à dire que les politiques devraient être au-dessus des lois ?

Non, mais ils doivent demeurer des justiciables comme les autres, pas être jugés plus sévèrement que les autres !
Problème : dans l’équilibre des pouvoirs, les juges sont-ils au-dessus du suffrage universel ? Peuvent-ils décerner des brevets de fréquentabilité ou de moralité politique, alors qu’eux-mêmes sont souvent très politisés ? (Rappelons qu’un tiers des magistrats sont au Syndicat de la Magistrature, connu pour son fameux « Mur des cons »). Plus que des options politiques, certains magistrats se prennent pour des justiciers qui se pensent en mission de purification de la démocratie avec l’aide de Mediapart. (Rappelons-nous que lors du réquisitoire de l’affaire des attachés parlementaires européens du RN, un des procureurs avait osé dire « j’aurais du mal à demander la relaxe, cela me ferait mal »). En clair, ils savent ce qui est bon pour les électeurs. Mais après le malaise des ZFE, la France périphérique n’a peut-être pas envie qu’on lui dise qu’elle n’a pas le droit de voter pour Marine Le Pen…

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Reste que, même s’ils l’interprètent, les juges appliquent la loi. C’est le Parlement qui a voté ces scandaleuses peines d’inéligibilité automatique. C’est le Parlement qui a voté toutes ces âneries pour démontrer à quel point notre vie politique était super et transparente. Plus généralement, ce sont les élus qui ont abdiqué de leurs prérogatives en acceptant l’extension du contrôle de constitutionnalité et le pouvoir croissant des juridictions internationales.
Bref, les politiques ont donné le pouvoir aux juges. Et il est maintenant trop tard pour s’indigner parce qu’ils s’en servent.


Cette chronique a été d’abord diffusée sur Sud Radio

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Jean-Jacques Bourdin

Les dix ans du syndicat «la Cocarde étudiante»: la rupture du jeune

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Le président de la Cocarde, Edouard Bina, en compagnie des représentants des différents syndicats étudiants européens : italiens, flamands, néerlandais, autrichiens, espagnols... Un véritable Erasmus réactionnaire ! Photos : Lucien Rabouille.

Nous nous sommes immiscés au colloque des 10 ans du syndicat étudiant.


Comme le temps passe… En 2015, ils avaient 20 ans. Étudiants dans le Quartier latin, ils étaient jeunes, idéalistes, fougueux, fêtards, bavards intellectuels… Dimanche 29 mars, ils se sont retrouvés sous les lustres du Salon des Miroirs (Paris 9e), devant 300 militants, pour célébrer les dix ans du syndicat étudiant La Cocarde, qui a su s’imposer dans le paysage universitaire français. Comme l’exprime Alexandre Loubet : « La Cocarde vieillit bien et a beaucoup d’enfants. » Alors que les initiatives étudiantes disparaissent souvent avec le départ de leurs fondateurs, La Cocarde en est déjà à son quatrième président. Elle compte plusieurs dizaines de sections et d’élus en province et peut remplir une salle à Paris. « Une pensée, en ce dixième anniversaire, pour Olivier V. (Olivier Vial, le président de l’UNI, syndicat étudiant de droite concurrent de La Cocarde NDLR), qui nous donnait deux ans d’existence… » s’amuse Quentin Limongi, ancien président du syndicat. L’UNI, longtemps organiquement liée au RPR, à l’UMP puis à LR, pâtit du déclin des partis de droite classique. Et La Cocarde ne correspond pas au stéréotype de l’extrême droite universitaire d’autrefois : pas de gilets en cuir ni d’actions coup de poing, tout se passe ici entre jeunes gens de bonne compagnie.

En ce temps-là, j’avais 20 ans…

Plusieurs moments d’émotion ont marqué cet anniversaire. « Nous avons vieilli, mon cher Pierre Gentillet », concède Alexandre Loubet au jeune avocat médiatique et figure tutélaire de La Cocarde. Tout à son humeur lyrique, M. Gentillet retrace au passé simple les âges du mouvement et de ses quatre présidents successifs. Plus intériorisé, plus nostalgique, Pierre-Romain Thionnet, du RNJ, confie à propos de ses premiers engagements militants : « C’est cette jeunesse que je ne retrouverai pas, que je ne pourrai plus retrouver », avant d’ajouter : « Mais ça donne des amis. »

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Sarah Knafo, Pierre Gentillet, Pierre-Romain Thionnet, Alexandre Loubet… Ces figures montantes de la droite nationale ont été maintes fois décrites dans la presse ou dans des ouvrages. L’extrême droite, nouvelle génération, publié en juillet 2024 chez Denoël par Marylou Magal et Nicolas Massol, offrait une véritable radiographie de cette jeunesse. « Nous avons commencé cette histoire rue des Canettes », rappelle Alexandre Loubet, allusion aux bistrots où toute une génération de jeunes cadres de la droite s’est forgée. Jordan Bardella consacre d’ailleurs un chapitre entier à ces années de formation dans son propre livre. « On a beaucoup écrit sur nous », feint de s’étonner Sarah Knafo, avant d’enchaîner sur des anecdotes de jeunesse : « Ces jeunes gens qui refaisaient le monde, parlaient jusqu’à l’aube de Michéa ou d’Henri Guillemin, et rêvaient de l’Union des droites… Ils étaient alors loin d’imaginer jusqu’où cela les mènerait. »

Déracinés, mais déjà recasés

Au-delà des retrouvailles et des anecdotes, les idées restent présentes. Plusieurs intervenants ont exprimé leurs visions et ambitions. Marion Maréchal et Sarah Knafo ont pris la parole successivement, évitant soigneusement de se croiser. La députée européenne conservatrice et fondatrice de l’ISSEP en a profité pour rappeler l’importance du combat intellectuel et l’engagement dans un secteur encore hostile, où subsistent « des étudiants trotskystes et des profs mao ».

Le sondeur et cadre du RN, Jérôme Sainte-Marie, a débattu avec le président de Radio Courtoisie, Pierre-Alexandre Bouclay. Ce dernier plaide pour l’acceptation d’une France qui se communautarise (« La France risque d’être communautarisée dans 50 ans, il faut nous y préparer. Je rêve d’un politique qui voit les défis de l’avenir comme Jean-Marie Le Pen l’avait fait »), tandis que M. Sainte-Marie préfère une stratégie d’union du bloc populaire face à l’Union des droites (« Quand on se proclame de droite aujourd’hui, la seule certitude, c’est de passer un excellent après-midi sur la place du Trocadéro dans l’entre-deux tours et un triste dimanche après-midi au résultat des élections »).

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Quelques conseils pratiques pour les militants : le sénateur de Seine-et-Marne Aymeric Durox vante les mérites du métier d’enseignant, qui « laisse du temps pour la politique ». Pendant ce temps, des étudiants jouent des coudes pour obtenir un demi de bière, mais Pierre Gentillet, ascète de la bande, interdit d’ouvrir la tireuse avant la fin de la conférence. Petit privilège toutefois pour les délégations étrangères : on a vu des membres des fraternités étudiantes hollandaises aller et venir, des canettes à la main…

La Cocarde : un Erasmus réactionnaire

L’Europe était présente. Autrichiens, Italiens, Flamands, Hollandais, Espagnols… La Cocarde n’est pas si chauvine et cocardière et s’est trouvé des interlocuteurs européens qui ont fait le déplacement.

Né d’un élan souverainiste, le mouvement a réussi à élargir sa vision. David Zimmerbauer, représentant du Ring Freiheitlicher Studenten (RFS), organisation étudiante liée au FPO autrichien reconnait que le thème de l’identité « est désormais prioritaire » en France comme en Autriche, ce qui ouvre de larges convergences entre partis. L’identité vire parfois au folklore : avec sa rigueur toute germanique, il affiche des ambitions précises et chiffrés : « Nous espérons passer de 3 à 6% des voix au conseil national étudiant (l’organisme représentatif des étudiants autrichiens). » Elan méridional du côté de l’Alternativa Estudiantil espagnole, fondée en 2023 par Fdedro Beigi, qui adopte un discours sans détour : « Luttez contre la gauche ». Riccardo Combina, étudiant en économie à Turin et membre du FUAN-Azione Universitaria, rappelle les liens historiques entre les mouvements français et italiens, héritiers d’une collaboration ancienne. Son mouvement agit autant au niveau des élections étudiantes, du militantisme politique que dans les stades. Lennert Von Hawverweirer, étudiant en philosophie, arbore fièrement l’uniforme traditionnel de la Katholiek Vlaams Hoogstudentenverbond (KVHV!), fraternité étudiante flamande. Dans le monde germanique, ces structures, qu’il s’agisse des fraternités flamandes ou des Burschenschaften allemandes, jouent un rôle central. Plus que de simples associations étudiantes, elles offrent hébergement, vie communautaire et festivités, tissant des liens souvent informels avec les partis de droite ou nationalistes dont elles constituent un vivier de recrutement.

Initialement souverainiste, La Cocarde a infléchi sa position. Pierre-Romain Thionnet, aujourd’hui au Parlement européen, défend une Europe-puissance qui ne fait pas forcément l’unanimité dans son parti le Rassemblement national. De son côté, Pierre Gentillet, lors d’un échange récent avec François Asselineau, a choisi de mettre en avant la défense de l’identité, avec ou sans Frexit.

Entre Internationale des enracinés et Erasmus réactionnaire, ces jeunes Européens partagent une ambition : construire une alliance continentale. Et ils rêvent d’un vaste congrès réunissant les mouvements étudiants identitaires et nationalistes de toute l’Europe. La Cocarde, née dans un élan souverainiste, a su évoluer et s’ouvrir. Une génération nouvelle s’agrège autour de souvenirs, de textes et de verres partagés. Aujourd’hui, tous ces trentenaires ne sont plus seuls, rejoints par une jeunesse de la vieille Europe qui se réunit autour de l’instinct d’une appartenance profonde. Plus que les programmes, ce sont ces liens qui forgent la matrice du pouvoir.

Culpabilisation du mâle blanc: entre introspection et auto-flagellation, ce que les affaires Bedos et Depardieu révèlent

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Ben Stiller, "Zoolander", 2001 © REX FEATURES/SIPA

La virilité occidentale est en berne. D’un côté, des femmes commencent à se lasser des hommes trop « déconstruits ». De l’autre, les mâles, désorientés par une société devenue punitive, cherchent ailleurs une forme de spontanéité perdue. Attention: l’histoire ne fait jamais de cadeau aux civilisations qui se détestent elles-mêmes.


Depuis plusieurs décennies, le monde occidental — et particulièrement l’Europe — a engagé un processus profond de remise en question de son histoire, de ses privilèges, de ses structures patriarcales et coloniales. Dans ce grand mouvement de déconstruction, l’homme blanc hétérosexuel est souvent désigné comme figure centrale d’un système oppressif, cumulant les tares : sexisme, racisme, domination sociale, voire impérialisme culturel.

Cette prise de conscience, dans ses intentions les plus nobles, visait à rééquilibrer les rapports entre les sexes et les cultures. Mais elle a rapidement glissé, dans certains discours et pratiques, vers une forme d’auto-culpabilisation obsessionnelle, où le simple fait d’être un homme blanc est devenu suspect. Ainsi, le mâle occidental est sommé d’expier, de se taire, de se déconstruire — parfois jusqu’à l’effacement.

Le contraste frappant avec d’autres masculinités plus affirmées

Ce qui interroge dans cette dynamique, c’est le contraste criant avec la tolérance, voire la complaisance, dont bénéficient d’autres formes de masculinité, souvent issues de cultures non occidentales, et pourtant bien plus patriarcales dans leurs pratiques. Dans de nombreuses sociétés traditionnelles (qu’elles soient maghrébines, subsahariennes, orientales ou d’Asie du Sud), le rôle de l’homme reste central, viril, parfois dominateur. Le flirt y est direct, parfois brutal. L’autorité masculine y est revendiquée sans gêne.

Or, alors que ces attitudes seraient immédiatement dénoncées comme sexistes si elles venaient d’un homme blanc occidental, elles sont parfois perçues — paradoxalement — comme authentiques, viriles, voire séduisantes. Une part du discours postcolonial, dans son souci de « ne pas juger l’Autre », adopte une posture de tolérance culturelle, au nom de la diversité et de la lutte contre l’ethnocentrisme. La publicité n’est pas en reste qui magnifie l’image de l’homme noir en partenaire sexuel de la femme blanche.

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Cette situation crée une forme de déséquilibre érotique et symbolique. De plus en plus de femmes occidentales, confrontées à ce qu’elles perçoivent comme une « démission affective » ou une « castration symbolique » de l’homme blanc — trop prudent, trop introspectif, trop déconstructeur — se tournent, consciemment ou non, vers des figures masculines plus affirmées.

Cette attirance n’est pas nécessairement idéologique : elle peut être pulsionnelle, charnelle, émotionnelle. Dans un monde où les repères vacillent, où la virilité est sans cesse remise en question, le retour du « mâle dominant » fascine autant qu’il inquiète. Certains appelleront cela un syndrome, d’autres une réaction biologique ou culturelle face à un vide symbolique.

Parallèlement, on observe également chez de nombreux hommes occidentaux, désorientés, rejetés ou simplement fatigués par la rigidité croissante des normes relationnelles dans leur société, une tendance à chercher l’amour ou le désir ailleurs. Ce phénomène — parfois qualifié de « tourisme sexuel inversé » — les pousse vers des régions où les rapports hommes-femmes sont perçus comme plus « clairs », plus traditionnels, moins encadrés par la culpabilité.

Tous frustrés !

Ce n’est pas seulement une quête sexuelle, mais aussi une recherche d’identité, d’un rôle clair dans un jeu de séduction encore régi par des codes masculins assumés. Là où en Occident, l’homme blanc ne sait plus comment aborder une femme sans risquer l’opprobre ou le tribunal, il retrouve à l’étranger une forme d’assurance, de réciprocité directe, parfois archaïque, souvent critiquable, mais profondément humaine.

Il faut s’interroger sur l’hypocrisie d’une société qui, tout en exigeant de l’homme blanc une pureté irréprochable, ferme les yeux sur des comportements similaires ou plus rudes chez d’autres, au nom du relativisme culturel. Le message implicite est le suivant : « Vous, les Occidentaux, vous n’avez plus le droit à l’erreur. Les autres, on les comprend, on les excuse, c’est leur culture. » Cette asymétrie ne peut que nourrir frustration, ressentiment et sentiment d’injustice.

Au fond, ce que cette tension révèle, c’est un basculement plus profond : une crise de la virilité occidentale, un désenchantement amoureux généralisé, et une remise en cause du modèle de séduction hérité des Lumières, de la galanterie, du romantisme européen. Nous assistons à une recomposition des désirs, où les femmes, lassées des hommes trop « déconstruits », et les hommes, désorientés par une société devenue punitive, cherchent ailleurs une forme de spontanéité perdue.

Il est temps d’appeler un chat un chat : la masculinité blanche occidentale est en train de se suicider culturellement, sous les applaudissements d’une élite bien-pensante qui confond progrès social et autodestruction. À force de s’excuser d’exister, de courber l’échine à chaque remontrance idéologique, l’homme occidental est devenu un mendiant affectif, un fantôme social, un être asexué qu’on ne craint plus, qu’on ne désire plus — qu’on méprise.

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Pendant ce temps, d’autres masculinités — plus rugueuses, moins inhibées — imposent leur présence, leur désir, leur droit à séduire, parfois à dominer, sans subir le feu roulant des tribunaux médiatiques ou des lynchages moraux. On les excuse, on les célèbre même, au nom de la diversité, de l’identité, de la culture. Et pendant que l’homme blanc se flagelle pour un compliment mal interprété ou un baiser volé il y a dix ans, d’autres avancent, draguent, séduisent, prennent, et ne s’en excusent jamais.

Assez. Il ne s’agit pas de restaurer un patriarcat archaïque ou de justifier des comportements violents. Il s’agit de refuser cette opération de castration morale et culturelle qui transforme l’homme occidental en suspect permanent, en coupable par défaut. La virilité n’est pas un crime. Le désir n’est pas une faute. La séduction n’est pas un délit. Et le flirt n’est pas un viol.

Il est temps de reconquérir notre droit à l’initiative, à l’audace, au charme, sans trembler à l’idée de finir devant un juge ou sur la place publique numérique. Il est temps de reprendre possession de notre imaginaire, de notre puissance d’être, de notre fierté d’hommes libres. Car si nous renonçons à tout cela, d’autres n’hésiteront pas à prendre notre place. Et ils le font déjà.

L’histoire ne fait jamais de cadeau aux civilisations qui se détestent elles-mêmes. Alors relevons la tête. Sortons du silence, de la honte, de la peur. Défendons notre droit à exister tels que nous sommes — imparfaits, désirants, mais debout. Car à force de ramper, on finit par se faire piétiner. Et ce jour-là, il ne restera plus rien à sauver.

Le meilleur d’entre nous

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L'écrivain français Frédéric Berthet. La Petite Vermillon/DR.

La Table Ronde publiera jeudi prochain un recueil d’articles parus à la fin des années 1980, de l’impassible Frédéric Berthet (1954 – 2003), comète à la plume sensitive dont la légende grandit à chaque décennie. Monsieur Nostalgie l’a lu en avant-première et il le valide à 100 %…


Alors que tant d’autres éphémères des Eighties pointent aux abonnés absents, cette longue cohorte des écrivains disparus des bibliothèques, Berthet résiste au grand ménage de printemps. Il n’a pas vieilli, c’est le « privilège » de mourir jeune. Les photos d’époque, donc d’actualité, nous le montrent en romantique dessalé, bouclé, frisoté à la Julien Clerc et portant des lunettes en écaille comme tout bon normalien exilé à New-York. Pour l’éternité, il demeure ce jouvenceau caustique dont la poignée de livres (Daimler s’en va, Paris-Berry ou Journal de Trêve) vaut aujourd’hui sésame dans les cercles littéraires les plus élitistes à droite comme à gauche de l’échiquier.

Béotiens…

Celui qui n’a pas lu Berthet passe pour un béotien. Son prestige grandit à mesure que son œuvre s’éloigne pourtant des radars. Étrange phénomène qui n’est pas sans rappeler la trajectoire d’un Toulet qui fait office de maître à penser entre Hendaye et Anglet. Le nom de Berthet fait donc régulièrement irruption dans les conversations, ses amis se rappellent de lui et son socle de lecteurs s’élargit timidement mais solidement. On peut légitiment estimer qu’on le lira encore dans trente ans avec une ferveur neuve et un appétit retrouvé. Il atteindra son apogée dans un demi-siècle. Pourquoi cette éclosion à retardement ? L’œuvre de Berthet est à maturation lente, sa dissidence amusée ne pouvait pas rencontrer le succès commercial dans des décennies lourdes et mal pensantes, surtout dans ces années 1990 mortifères où la veulerie des apparences empêchait l’émergence d’une phrase libre. Libre dans son ondulation, libre dans son ironie et surtout libre de son humeur. Le prototype de l’écrivain vedette dans ces années noires devait marteler des opinions convenues et s’engager pour exister sur la place publique. Nous savons que l’intelligence du trait se niche ailleurs, dans les voies peu empruntées, celles du faux-roman, de la chronique à rebours ou de l’autofiction désarticulée.

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Berthet, sans bombarde, sans syntaxe hasardeuse, avec une incroyable acuité sur le nébuleux de son époque, nous éclaire et nous emplit. C’est là, l’un des grands paradoxes des surdoués, il n’aborde jamais un sujet de face, il n’est pas buté comme tous ces prosateurs qui empilent des idées, il manœuvre tel un pêcheur à la mouche, par à-coups et saillies. Ses textes souvent courts ont une couleur changeante, on s’y glisse avec une forme de plénitude et de vitalité. Du flou au drôle, du ménager à l’érudit, le lecteur reste perpétuellement sur ses gardes, s’attendant à toutes les facéties de l’écrivain qui se fraye un chemin. Nous sommes en alerte.

Mémoire vive

Quel délice d’être transporté dans ces wagons à suspension que sont chroniques, journées de lecture ou jeux de questions-réponses ; tous ses mots sont de la matière vivante. Ils bougent sans cesse, on les croit écorchés, tristes, fatigués, on se trompe, ils sont mémoriels. Berthet a comprimé notre mémoire vive. Chez lui, l’aventure peut déboucher à l’improviste ; d’une phrase anodine, il se met à dériver vers une maxime de moraliste. « Aujourd’hui, on ne pourra peut-être plus s’attaquer à personne, puisqu’il n’y a aura plus personne » écrit-il. Il devient un classique. La Table Ronde édite cette semaine dans un tirage limité et numéroté de 2 500 exemplaires un précieux recueil, jaune d’or, où l’on retrouve des articles essentiellement des années 1988 et 1989 parus dans Madame Figaro, Le Quotidien de Paris, Le Figaro Littéraire, L’Idiot international, Rive Droite, etc.

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Dans la France de 2025, tout le monde est brillant, tout le monde est formidable, la chanteuse de télécrochet, le jeune loup en politique, le philosophe des studios ou la cartomancienne en mal d’amour si bien que l’échelle des valeurs a perdu tout sens de l’orientation. Lire Berthet, c’est s’imprégner du parfum d’une époque, rameuter des souvenirs, rembobiner les films de Diane Kurys, les nageuses de l’Est, les vols d’Air Inter, les jeunes filles se tartinant de Nivea, l’aérobic, la figure des notaires, les mariages à la campagne, les livres de Patrick Besson, les récurrences de Thomas Bernhard, Carver, Salinger ou Philippe Sollers et s’attarder sur la silhouette de Gabriela Sabatini, mais c’est surtout se confronter à la virtuosité d’un écrivain majeur. Il écrit si bien sur Blondin, « un oncle excentrique presque d’Amérique », sur Drieu « la déception était son faible », ou les mystères de la collection Harlequin. Son défaitisme émaillé d’une souveraine effronterie est un bonheur de lecture.

L’impassible – recueil d’articles – Frédéric Berthet – La Table Ronde 109 pages

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Les Nouveaux féminicides

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Photos placardées sur les grilles du palais de justice de Bordeaux lors du dernier jour du procès de Mounir Boutaa, accusé d’avoir tué son ex-femme Chahinez Daoud le 4 mai 2021. 28 mars 2025 © UGO AMEZ/SIPA

Après le Beaujolais nouveau et les Nouveaux Philosophes, il y a désormais de Nouveaux Féminicides, argumente notre chroniqueur. On a importé en France les « crimes d’honneur » perpétrés dans des sociétés musulmanes archaïques. L’affaire Chahinez Daoud, qui vient d’être jugée, n’est pas isolée.


Vendredi 28 mars, Mounir Boutaa, qui avait immolé son épouse Chahinez Daoud par le feu, a été condamné par la Cour d’assises de la Gironde à la perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de 22 ans. C’est bien le moins que l’on pouvait faire.

Reste que ce procès n’a pas dit toute la vérité sur cette affaire.

Etienne Campion, dans le dernier numéro de Marianne1, pose d’emblée une question qui n’est en rien incongrue : « De quoi est morte Chahine Daoud ? » Et il ajoute immédiatement : « De quoi est morte Aurélie Langelin, rouée de coups par son mari Karim Belkacem ? » Les deux affaires sont jugées en même temps, les médias (aussi bien Le Parisien que Libé ou Le Monde) ont souligné la responsabilité de l’Etat — car ni la police ni la justice n’ont bien pris au sérieux les plaintes des deux femmes, avant que l’irréparable se produise.

Et si l’essentiel était passé sous silence ?

« Ces failles, analyse Etienne Campion, ne sauraient nous dispenser de poser une question fondamentale : pourquoi les féminicides augmentent-ils ? Pourquoi cette gêne à nommer ce qu’ils révèlent de plus glaçant : l’importation révoltante, sur notre sol, des « crimes d’honneur » ? » Et de rappeler comment un certain Samire Lymani, il y a quelques années, coula Aurélie Vaquier dans une dalle de béton pour des raisons similaires, ou comment Mourad brûla vive Shaïna Hansy — elle avait quinze ans, mais il l’avait jugée « impure », quoi que cela veuille dire pour ces meurtriers incrustés dans un Moyen-Âge immobile…

Les organisations féministes, qui à l’occasion de la Journée de la femme ont placardé partout dans nos villes des statistiques morbides affolantes, et qui ont d’ailleurs manifesté toute la semaine devant le tribunal de Bordeaux où était jugée l’affaire, ne se soucient guère d’épingler les particularismes ethniques de ces meurtres. Au nom, sans doute, de l’intersectionnalité des luttes, de la volonté de ne pas stigmatiser, de ne pas faire le jeu de l’extrême-droite, bla-bla-bla. Ni elles, ni Libé, ni Le Monde — etc.

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Clara Lainé, sur France.tv.info, rappelle « l’altération du discernement » évoqué par les psychiatres. Un élément retenu par la Cour, mais qui n’a valu à l’assassin aucune réduction de peine, les jurys populaires sont souverains, et c’est heureux. Car à chercher des excuses aux criminels, on finira par condamner les djihadistes à des peines de principe — tout comme certains violeurs, rarement épinglés par les Chiennes de garde, ont été « excusés » dans la mesure où les mœurs occidentales entraient en conflit avec leur culture… Tu portes un short ou une jupe trop courte, tu passes à la casserole — et au besoin, je mettrai la casserole sur le feu.

Là est le point de rupture. Il n’y a en Occident qu’une culture — la nôtre. C’est même le principe initial du marxisme — mais qui, dans les partis de gauche, a lu Marx, sinon pour le trahir ? Vous pensez, un Blanc cisgenre, et juif de surcroît, ce n’est pas le pain blanc de LFI…

Il n’y a qu’une culture, il n’y a qu’une justice — la nôtre. Un immigré ne transporte pas son code judiciaire inhumain et arriéré à la semelle de ses babouches. Il s’adapte, il envoie sa progéniture à l’Ecole de la république, il n’interdit pas à sa femme de sortir tête nue, il ne refuse pas de serrer la main de ses collègues sous prétexte qu’elles seraient « impures », il n’impose pas le ramadan à ses voisins ni aux copains de classe de ses enfants. Il se coule dans la culture de son pays d’accueil, qui le lui rendra bien.

S’il veut vivre selon des traditions assassines, il peut repartir au Pakistan, en Arabie Saoudite, en Afghanistan — le monde ne manque pas, malheureusement, de pays qui ont conservé leur religion sous leur forme originelle et barbare.

Etienne Campion, Le Président toxique — Enquête sur le véritable Emmanuel Macron, Robbert Laffont, février 2025, 464 p.

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  1. https://www.marianne.net/societe/medias/feminicides-pointer-la-responsabilite-de-letat-ne-suffit-pas-pour-comprendre-leur-augmentation ↩︎

Marine Le Pen inéligible: sa colère froide

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Marine Le Pen sur TF1, hier soir. «Je ne vais pas me laisser éliminer ainsi» (...) «Il y a un chemin, il est étroit, mais il existe». Boulogne-Billancourt © Thomas Samson/AP/SIPA

Pas à un seul instant, au cours de son interview hier soir dans le JT de TF1, Marine Le Pen ne s’est départie de son regard dur et de son ton sévère. Condamnée en première instance hier matin à deux ans de prison ferme et cinq ans d’inéligibilité avec application immédiate, la députée du Pas-de-Calais vient sans doute de vivre l’une des journées les plus cruelles de sa vie politique.


« Des pratiques que l’on croyait réservées aux régimes autoritaires », a-t-elle cinglé au micro de Gilles Bouleau. Quelques heures après le prononcé des peines dans l’affaire des assistants parlementaires du FN, Marine Le Pen reste outrée. Pour elle, ce procès, « fait par des adversaires politiques, est fondé sur des arguments qui ne tiennent pas la route. Il s’agit là d’un désaccord administratif avec le Parlement européen. Il n’y a pas d’enrichissement personnel, il n’y a pas de corruption, il n’y a rien de tout cela ».

Sévérité inattendue

Les condamnations – d’une sévérité inattendue – n’ont pas seulement provoqué une immense secousse dans la vie politique française. Ailleurs dans le monde, nombre d’observateurs se demandent si la France ne serait pas en train de devenir un de ces pays où les opposants subissent des sanctions exagérées de la part du pouvoir.

Marine Le Pen arrive au tribunal à Paris, le 31 mars 2025. Thibault Camus/AP/SIPA Numéro de photo : ap22947670_000004

Certes Marine Le Pen n’a pas encore été écrouée, contrairement à ce qui se passe en Turquie, où Ekrem Imamoglu, maire d’Istanbul et principal rival de Recep Tayyip Erdoğan, a été arrêté le 18 mars. Mais que diraient, à l’étranger, les amis du pluralisme et des libertés publiques si la femme politique la plus populaire de notre pays devait effectuer les deux ans de prison ferme prononcés hier matin ?

Évidemment plusieurs régimes « illibéraux » ont été prompts à critiquer la décision de justice parisienne. À Moscou, Dimitri Peskov, porte-parole du Kremlin, l’a qualifiée de « violation des normes démocratiques ». À Budapest, Victor Orban a tweeté « Je suis Marine » en guise de soutien. À Washington, la porte-parole du département d’État, Tammy Bruce a déclaré : « L’exclusion de personnes du processus politique est particulièrement préoccupante compte tenu de la guerre judiciaire agressive et corrompue menée contre le président Donald Trump ici aux Etats-Unis. »

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Pas sûr toutefois que Marine Le Pen ait apprécié ces marques de solidarité. Depuis quelques mois, la présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale était en train de parachever sa dédiabolisation. En janvier, lors de la cérémonie d’obsèques de son père, elle a bien pris soin de ne pas revendiquer l’héritage politique gênant du fondateur du Front national. Début mars, elle a écarté les soupçons de trumpolâtrie en déclarant dans Le Figaro que l’attitude américaine envers l’Ukraine est « très critiquable ». Enfin la semaine dernière, son bras droit Jordan Bardella s’est rendu, sur invitation du gouvernement israélien, à Jérusalem, où il s’est recueilli à Yad Vashem, le mémorial israélien des victimes juives de la Shoah, une première pour un représentant du parti à la flamme.

Justice : Le Pen, vite !

Au moment même où elle allait devenir une figure « fréquentable » de la vie politique française, Marine Le Pen voit donc fortement hypothéquer sa candidature à la prochaine présidentielle. Sans que son recours en appel, formulé aussitôt après, ne puisse suspendre l’exécution de la peine, la voilà déclarée inéligible jusqu’en 2030. Autrement dit, il faudrait que les juges d’appel se prononcent en un temps record (d’ici deux ans) et qu’ils décident de rétablir la députée du Pas-de-Calais dans la plénitude de ses droits politiques pour qu’elle puisse se présenter en fin de compte à la course à l’Elysée en 2027. Une hypothèse très incertaine, même si l’intéressée indique y croire encore, puisque, tout en se déclarant à nouveau innocente, elle a lancé un appel hier soir à la télévision à ce que la justice soit diligente.

Pour justifier l’application immédiate de l’inéligibilité, les magistrats du tribunal judiciaire ont invoqué un risque de récidive. Selon eux, les responsables du RN se sont montrés, durant la procédure, inconscients de leurs comportements fautifs et auraient ce faisant laissé penser qu’ils sont susceptibles de recommencer. Un raisonnement contesté par l’avocat de Marine Le Pen, Rodolphe Bosselut, qui rappelle que les accusés ont entièrement admis les faits reprochés – de sorte qu’on ne saurait parler de « déni » – et qu’ils se sont contentés d’en réfuter la gravité – ce qui s’apparente selon lui à une défense classique, ne préjugeant pas de l’avenir.

En attendant, interrogée par Gilles Bouleau sur l’hypothèse, désormais très probable, qu’elle ne puisse pas concourir à la prochaine présidentielle, Marine Le Pen a donné le nom de son potentiel remplaçant pour représenter les couleurs de son parti : « Jordan Bardella est un atout formidable pour le mouvement et je le dis depuis longtemps, a-t-elle confié. J’espère que nous n’aurons pas à user de cet atout plus tôt qu’il n’est nécessaire. »

Révélations: bientôt des trottoirs à sens unique à Paris

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Image d'illustration © Unsplash

L’inauguration de ces trottoirs est prévue le 1er septembre. À titre expérimental, les Champs-Élysées, les Grands Boulevards, la rue de Rivoli, ainsi que les boulevards Saint-Germain et Saint-Michel seront concernés pendant six mois.


À cause d’une « smombification » en pleine expansion et que rien ne semble pouvoir endiguer, source de nombreux incidents entre piétons et aussi d’accidents graves ayant parfois couté la vie à certains d’entre eux, la ville de Paris a décidé de créer des trottoirs à sens unique le long de ses principales artères les plus fréquentées, selon un rapport de 14 pages, classé très confidentiel, que Causeur.fr a pu se procurer auprès d’une source interne haut placée, digne de foi.

Un projet qui sera présenté début juin

Le projet qui devrait être rendu public dans la première semaine de juin s’inspire de ce qui s’est fait à Chongqing, ville du sud-ouest de la Chine, sur le fleuve Yangtze, proche du grand barrage des Trois Gorges, et à Séoul, capitale de la Corée du Sud, suite à la prolifération des « smombies ». Ce mot est une contraction de smartphone et de zombie. Il désigne ces piétons qui ont les yeux en permanence rivés sur l’écran de leur téléphone, tout en se déplaçant à un bon train. Il a été inventé en 2015 en Allemagne suite à la massification de ce phénomène dans les grandes villes du monde que les urbanistes qualifient de « smombification ».

L’un d’entr’eux, Hubert Beroche, fondateur et président d’Urban AI1, qui vient de publier un essai à ce sujet2, estime dans un entretien accordé au Figaro le 18 mars, qu’à « bien des égards, le lancement des smartphones peut être comparé à celui de l’automobile au XIXème siècle. (…) les technologies transforment la matérialité d’une ville. Les ascenseurs ont exhaussé la ville, les métros l’ont densifiée, les voitures l’ont allongée ». Désormais les villes doivent s’adapter à ce qu’il appelle « le basculement des « yeux sur la rue » aux « yeux sur écran »».

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C’est ainsi que Chongqing, qui avec ses 32 millions d’habitants est considérée comme la plus grande ville du monde (en fait, il s’agit d’un conglomérat de villes voisines réunies sous une administration commune), a dédié plusieurs rues de son centre à l’usage exclusif des « smombies » pour leur épargner les accidents de la circulation dont ils étaient victimes (percussion en pleine tronche d’un poteau se trouvant sur leur trajet, collision de front avec un homologue venant en sens inverse, renversement par une voiture lorsqu’ils traversaient un carrefour le regard fixé sur leur écran etc.). Les autorités de Honolulu ont, elles, pris un décret interdisant de traverser une rue en regardant son téléphone sous peine d’une lourde amende et envisageraient des mesures plus drastiques si cette interdiction reste sans effets.

Des feux rouges au sol dans la ville de Hong-Kong afin d’éviter les accidents entre voitures et « smombies » © D.R.

Dans la capitale de la Corée du Sud, 61% des accidents de la circulation impliquaient des « smombies » obnubilés par ce qu’ils voyaient sur leurs smartphones. Alors les autorités municipales, rapporte Hubert Beroche, ont « installé des sortes de feux rouges au sol » de manière à qu’ils n’aient plus besoin de lever des yeux pour être informés qu’ils n’ont pas à traverser. Le pourcentage d’accidents a très sensiblement baissé. Hubert Beroche indique aussi que des « chercheurs ont imaginé une application utilisant la caméra des smartphones couplée à de l’intelligence artificielle, de sorte qu’une notification soit envoyée en cas de danger » à l’utilisateur.

« L’écran médiatise, poursuit Hubert Beroche, un rapport au monde désincarné, insipide. On se rend compte, à travers cette désescalade sensorielle, d’une diminution de notre capacité de cartographie mentale. L’utilisation répétée, prolongée, abusive des écrans atrophie notre mémoire spatiale et nous rend moins aptes à coordonner nos sens avec l’environnement urbain. Chacun le perçoit dans son intimité : alors qu’il y a dix ans, un coup d’œil sur une carte suffisait à se repérer, on a désormais besoin de son smartphone à chaque coin de rue pour s’assurer qu’on est bien sur la bonne voie ».

Mettre fin à une hécatombe

L’usage du smartphone tout en se déplaçant constitue un sérieux péril. D’après la gendarmerie, dans un communiqué du 18 février dernier, 451 « smombies » ont perdu la vie en 2024, en France, dans des accidents de la circulation dont ils étaient les premiers responsables.

Le rapport de la ville de Paris, pour justifier l’instauration de trottoirs à sens unique, recense quelques incidents graves qui se sont produits récemment. Ainsi, en novembre dernier, une septuagénaire qui promenait son petit chien, sur l’allée centrale du Bd des Batignolles, a été percutée par l’arrière par un « smombie » qui faisait son jogging, casque sur les oreilles, regard fixé sur son écran qui lui montrait un concert de rock japonais. Elle est tombée face avant. Sa tête a frappé le sol du trottoir. Fracture du crâne et du fémur, elle est décédée à l’hôpital Cochin ; son petit chien n’a jamais été retrouvé. Une autre fois, Bd St Germain, s’est produit un carambolage entre cinq d’entr’eux. Il s’en est suivie une bagarre, chacun rejetant la responsabilité sur les autres, qui fit un blessé grièvement et deux plus légers. « La liste de ces incidents est loin d’être exhaustive », tient à préciser le rapport.

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Toutefois, la ville de Paris se refuse à recourir à des technologies issues de l’intelligence artificielle comme à Séoul, estimant qu’elles présentent de très graves risques de flicage de la société. Le rapport dit « qu’en cas d’un avènement d’un régime d’extrême-droite, ce qui n’est plus à exclure, ces moyens techniques, sous prétexte d’éviter des accidents, pourraient servir à pister les résistants à la dictature. Dès lors, il est préférable de recourir tout simplement au bon sens humaniste et citoyen : le sens unique. Et ça coûte moins cher. »

L’inauguration de ces trottoirs est programmée pour le 1er septembre prochain. Sont concernés à titre expérimental, pour une durée de six mois, les Champs-Élysées, les Grands boulevards, la rue de Rivoli, les boulevards St Germain et St Michel. Le changement de trottoir ne pourra se faire qu’aux carrefours dans un sens giratoire à l’instar des ronds-points pour les automobiles, à savoir en tournant sur sa gauche.

Le rapport suggère aussi qu’à moyen terme, si le sens unique s’impose et est approuvé par une consultation participative, il serait bon d’envisager la création de trottoirs roulants, comme dans le long couloir du métro de la gare Montparnasse afin de rendre les déplacements plus rapides. En effet, « la vitesse des piétons serait limitée sur les trottoirs à sens unique à 3km/h afin que d’éventuelles collisions entre piétons n’aient pas de conséquences fâcheuses comme c’est trop souvent le cas actuellement », souligne le rapport.

Ces trottoirs roulants seraient expérimentés sur le boulevard des Batignolles, de la place de Clichy jusqu’à Ternes. Leur alimentation électrique serait assurée par du voltaïque et de l’éolien installé en hauteur sur l’allée centrale, formant de la sorte un toit qui protégerait les passants de la pluie et du soleil.

  1. Premier Think Tank qui propose des modes de gouvernance éthiques et des usages durables de l’IA urbaine. ↩︎
  2. Smombies : la ville à l’épreuve des écrans, Hubert Beroche, Editions de l’Aube, 267 p. ↩︎

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Bordeaux : des rues « exclusives » pour vélo à l’étude ?

De son côté, la ville de Bordeaux a engagé depuis quelques mois une étude, considérée par bien des experts en aménagement urbain comme audacieuse, dont l’objet est d’établir les prémices de ce que sera le transport dans la ville du futur où prédomineront « les mobilités douces et non polluantes ».
D’après une source municipale très proche du dossier qui s’est confiée à l’hebdomadaire local d’enquête, L’Avenir girondin, le projet qui n’en est encore qu’à son ébauche porterait sur la création « d’un réseau structurant de rues exclusivement réservées à l’usage de la bicyclette. » L’idée est née à la suite d’un voyage, dans la plus totale discrétion, en janvier 2024, à Copenhague, considérée comme le modèle mondial en matière de déplacement à vélo, bien plus qu’Amsterdam, du maire Pierre Hurmic, dit « l’écolo décalé » à cause de ses initiatives souvent en marge de l’orthodoxie verte, ou encore le « catho basque », en raison de sa religion et de ses origines.
A son retour, il avait convoqué ses plus proches collaborateurs et leur avait dit : « Il faut faire de notre chère Bordeaux, le pendant de la capitale danoise en France. Le vélo, c’est le futur, comme j’ai pu le constater là-bas. »
Il convient de préciser que Pierre Hurmic est un passionné de cyclisme. Le Tour de France que ses prédécesseurs boudaient, c’est lui qui l’a fait revenir à Bordeaux en 2022. Prenant à rebrousse-poil son parti et surtout son homologue lyonnais, Gregory Doucet pour qui le Tour n’est que « machiste et polluant » et ne veut plus l’inviter à faire étape dans la capitale des Gaules tant qu’il ne se sera pas décarboné et inscrit dans une logique durable (et tant qu’on y est pourquoi pas couru par des équipes mixtes et sans pub sur les maillots).
Dans la foulée une mission, conseillée par trois experts danois en ingénierie mobilité urbaine (1), détachés par Copenhague auprès de Bordeaux, s’est mise au travail dans la plus grande discrétion. Selon L’Avenir girondin, ses premières propositions viseraient à créer quatre grands axes de rues « dédiées », un nord-sud, un est-ouest et deux diagonales, strictement réservés à la circulation des vélos qui convergeraient sur la place névralgique de la Victoire transformée en un grand rond-point avec sens giratoire à gauche.
Aux carrefours de ces rues qui seraient baptisées « exclusive-vélo » seraient aménagées de passerelles à escaliers mécaniques pour pouvoir traverser sans interrompre le flux des cyclistes. L’énergie de ces escaliers serait fournie par des panneaux voltaïques faisant office d’ombrelles et de parapluie en fonction du temps; quant aux croisements avec les rares rues où circuleront encore des voitures, il serait envisagé des sortes de passages à niveau automatiques permettant le franchissement de ces derniers en alternance, cinq minutes pour les voitures, dix minutes pour les cyclistes.
Deux questions font débat. Est-ce que les trottoirs de ces rues « exclusive vélo » doivent être rehaussés et être protégés par des rambardes en bois ou par une végétalisation (à définir, arbustes ou fleurs et plantes vertes) pour empêcher les cyclistes de les emprunter ? La seconde est plus cruciale et semble difficile à trancher tant les avis sont partagés au sein de la commission : est-ce que les vélos électriques y seraient autorisés ?
Les opposants estiment qu’il s’agit de deux-roues motorisés, un peu à l’instar de ce que furent autrefois les Vélo-Solex ou les Mobylettes, vu qu’ils peuvent atteindre les 25 km/h, constituant ainsi un danger potentiel pour les autres cyclistes ; pour les partisans, les interdire serait discriminatoire, notamment envers leurs usagers souvent d’un certain âge déjà et qui sans cette assistance motrice ne se seraient pas remis au vélo. Dès lors, ils proposent un « gentleman-agreement » : que la vitesse y soit limitée à 15 km/h, vitesse moyenne de tout cycliste urbain, et tout dépassement sanctionné d’une forte amende.
Le maire souhaiterait inaugurer les deux premiers axes, les nord-sud et est-ouest soit au tout début de 2026, soit moins de trois mois avant les municipales, selon certaines indiscrétions qui n’ont pas pu être confirmées. On lui prête l’intention de se représenter… ce qui serait un atout indéniable pour sa réélection, selon les connaisseurs de la politique locale. Il se murmure aussi que s’il était reconduit, il envisagerait de créer une régie municipale d’une trentaine de taxis tricycles ne desservant que le centre-ville alentour de la Gare Saint-Jean • RU

1 – La municipalité de Copenhague a demandé que la prestation de ces trois ingénieurs soit rétribuée seulement en Grands Crus, selon une note dont a eu connaissance L’Avenir girondin.  

Marine Le Pen, victime du «coup d’Etat» des juges

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Mme Le Pen a quitté le tribunal avant la fin du prononcé des peines, le 31 mars 2025 © Cyril PECQUENARD/SIPA

Parlementaires européens. Si la majorité des observateurs pensaient bien que la présidente du RN serait condamnée par la justice, ils ne pensaient pas que les juges iraient jusqu’à l’empêcher de concourir à la prochaine élection présidentielle. « Ce n’est pas aux juges de décider pour qui doit voter le peuple » a déclaré Eric Zemmour. « C’est la démocratie française qui est exécutée » se désole Jordan Bardella. Marine Le Pen parlera à 20 heures sur TF1. Analyse.


Cela s’appelle un scandale démocratique : en choisissant d’appliquer, sans retenue ni discernement, l’ « exécution provisoire » de la peine d’inéligibilité prononcée ce lundi contre Marine Le Pen, le tribunal correctionnel de Paris force la candidate à la présidentielle à abandonner la course.

L’abus de pouvoir est d’autant plus révoltant qu’un sondage Ifop-JDD la créditait hier de 37% des suffrages au premier tour, loin devant ses concurrents. Le 13 novembre, le parquet avait requis cinq ans de prison dont deux ferme, 300.000 euros d’amende et l’application de l’exécution provisoire, en sanction d’un détournement de fonds publics liée à l’emploi d’assistants parlementaires européens du RN. Or ce pouvoir exorbitant des magistrats, qui brisent un processus électoral, est une violence.

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La France est semblable à la Roumanie dont la justice a empêché le favori de poursuivre sa course. En 2017, la traque du Parquet national financier contre le présidentiable François Fillon n’avait néanmoins pas empêché le candidat de se présenter. Mais ce sont les parlementaires qui ont accepté, avec la loi Sapin II du 9 décembre 2016 instituant cette exécution provisoire dérogeant à l’appel suspensif, de placer la politique à la merci des gens de robe. Cette légèreté rappelle celle de Louis XVI qui dès 1774 avait rétabli les parlements (qui avaient fonction de cour de justice) dans leurs droits, supprimés par Louis XV en 1771. La suite est connue : se heurtant au judiciaire, Louis XVI en appela aux Etats généraux, qui allaient conduire à la Révolution. Le coup d’Etat des juges, perpétré ce lundi, procède de ce même angélisme du législateur. Jeudi, le réquisitoire infâmant du Parquet financier contre Nicolas Sarkozy dans la nébuleuse affaire libyenne co-instruite par Médiapart (192 articles à charge) – sept ans de prison en dépit d’une absence de preuves – avait dévoilé le ressentiment des magistrats reprochant à l’ancien président, faute de mieux, « une quête effrénée à la recherche de financements nécessaires à la satisfaction de ses ambitions politiques dévorantes » et un « pacte de corruption faustien ».

La Justice, quand elle s’éloigne de l’esprit des lois pour imposer sa vertu vengeresse, devient inquisitoriale et donc dangereuse. Dès lors, elle défigure la démocratie en entravant l’expression de la souveraineté nationale au nom d’un Etat de droit dévoyé. C’est ce qui se passe lorsque des juges, perméables pour certains au militantisme du Syndicat de la magistrature, traquent des mauvaises pensées à défaut de statuer sur des actes. Ces justiciers sont pareils aux théologiens de jadis qui punissaient les péchés des hérétiques. Ils laissent voir « cette sombre superstition qui porte les âmes faibles à imputer des crimes à quiconque ne pense pas comme elles » (Voltaire). La condamnation d’Eric Zemmour, mercredi dernier, à 9000 euros d’amende (qui faute de versement donnerait lieu à son incarcération!) illustre cette dérive doctrinaire. Le tribunal correctionnel de Paris a reproché au président de Reconquête, commentant le meurtre au couteau de Thomas lors d’un bal populaire à Crépol en novembre 2023, d’avoir notamment déclaré : « Nous avons, aujourd’hui, une situation où nous avons deux peuples, deux France, deux jeunesses, celle de Thomas, celle de Chahid ».

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Or ce que décrit Zemmour n’est que le reflet d’une fracture identitaire, décrite par votre serviteur dès 2007[1], qui ne cesse de se radicaliser. S’il y a un « pacte » qui corrompt la démocratie, c’est chez ces juges non élus qui veulent reléguer les politiques à des rangs subalternes. Avec leur aval…

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Belgiquistan: Hadja Lahbib, une commissaire européenne problématique?

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© Virginia Mayo/AP/SIPA

La commissaire européenne belge fait le bonheur d’une organisation musulmane séparatiste qui appelle à la démission de Bruno Retailleau.


Recrutée par le Mouvement Réformateur (MR, un parti de centre-droit, mais le plus « à droite » sur l’échiquier politique francophone belge), la journaliste belge Hadja Lahbib a surpris dès sa nomination en 2022 comme ministre des Affaires étrangères en déclarant qu’elle n’était « ni de gauche, ni de droite ». Journaliste, présentatrice du JT de la RTBF, la chaîne publique belge très marquée à gauche, on a ainsi découvert qu’elle avait été la marraine d’un programme international de la mutuelle socialiste belge Solidaris, confirmant le soupçon qu’elle n’était pas vraiment de droite. Son passage aux Affaires étrangères a surtout été marqué par le scandale lié aux visas accordés à des représentants du régime iranien des mollahs, dont Alireza Zakani, maire de Téhéran, impliqué dans la répression brutale des manifestations déclenchées par la mort de Mahsa Amini, une jeune femme tuée par le régime en 2022. Par ailleurs, en mai 2023, Mme Lahbib a contribué à la libération d’Olivier Vandecasteele, retenu en otage par Téhéran mais au prix d’un échange avec un terroriste, Assadollah Assadi, un diplomate iranien condamné à 20 ans de prison pour un projet d’attentat en France.

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Parachutée à la Commission européenne sans raison évidente, sauf sa qualité de femme, elle vient de commettre deux erreurs majeures. La première concerne une vidéo où elle se ridiculise en présentant un « kit de survie européen pour les 72 premières heures », qui a suscité l’indignation, notamment de Pascal Praud sur CNews. Vue trois millions de fois, elle a été rapidement fermée aux commentaires qui étaient tous négatifs.

La seconde est bien plus grave : dans une autre vidéo elle reprend l’argumentaire du Comité contre l’islamophobie en Europe (CCIE), successeur du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF). Dissous en 2020 par Gérald Darmanin au nom du gouvernement français, le CCIF a, selon Florence Bergeaud-Blackler, spécialiste de l’islam en France, « joué un rôle dans l’assassinat de Samuel Paty ». Dans la vidéo, Hadja Lahbib dénonce le « racisme anti-musulman », la « haine anti-musulmane » et les « stéréotypes ». Elle rappelle l’attentat de Christchurch en Nouvelle Zélande, il y six ans (sic) et « rend hommage à ses victimes », mais n’a pas un mot pour toutes celles, bien plus nombreuses, des attentats commis par des terroristes islamistes. Elle réfute également le fait qu’il pourrait y avoir un lien entre islam et terrorisme. Les musulmans sont présentés comme des victimes et seraient « déshumanisés » par certains médias. La situation des femmes portant le foulard serait particulièrement grave car présentées « comme soumises ou cherchant à islamiser la société ». Bref, on retrouve dans cette vidéo le parfait brévaire du militant islamo-gauchiste.

La vidéo plait tellement au CCIE qu’il la reprend en y ajoutant son logo (avec ou sans l’accord de la commissaire, on ne sait ?) et ajoute à la fin un appel aux dons! Le CCIE, simple reformulation du CCIF, entretient un discours proche des Frères musulmans et défend un agenda communautariste, critiquant ouvertement les lois françaises sur la laïcité, le voile et la lutte contre le séparatisme. Cette organisation tente d’institutionnaliser la notion d’islamophobie, la présentant comme un racisme systémique visant spécifiquement les musulmans. Le 28 mars, le CCIE a publié un communiqué virulent : « Bruno Retailleau attise la haine contre les femmes musulmanes portant le foulard. Nous considérons qu’il n’est plus digne d’exercer ses fonctions de ministre de l’Intérieur. Nous exigeons sa destitution immédiate. Il est temps de dire STOP à la haine d’État. » Sur la page Facebook et le compte X, du CCIE, la vidéo de la commissaire et le communiqué visant le ministre de l’Intérieur se succèdent. Hadja Lahbib n’a été élue par personne, mais simplement désignée par le gouvernement belge. En s’exprimant ainsi, elle engage la Commission européenne toute entière qui adhère depuis longtemps à cette notion fausse d’une racisme anti-musulman visant à criminaliser toute forme de critique de l’islam. 

Notons qu’elle ne prend aucun risque professionnel : à tout moment, elle peut retrouver son poste de fonctionnaire à la RTBF où elle est simplement en congé. 

Le violon virtuose de Liya Petrova

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La violoniste bulgare Liya Petrova © Simon Fowler

Musique classique: Erich Wolfgang Korngold et Richard Strauss réunis sur un CD. Un très beau diptyque concocté par la violoniste Liya Petrova  


A l’instar de Mozart dont il hérite le prénom, Erich Wolfgang Korngold (1897-1957) fut salué comme un prodige dès sa prime jeunesse par la société cultivée de Vienne. Elève surdoué d’Alexander von Zemlinsky (le beau-frère de Schönberg), génie précoce natif de Brünn, ville alors intégrée à l’empire Austro-Hongrois (l’actuelle Brno, en République tchèque), justement célébré en son temps par Mahler, le compositeur demeure essentiellement connu, de nos jours, pour son œuvre lyrique – hélas trop rarement donnée sur les grandes scènes européennes : Violanta (1914), Die tote Stadt (1920), d’après Bruge-la-Morte, de Rodenbach, sommet de la littérature symboliste, et enfin son opus magnum tragique, Das Wunter der Heliane [le Miracle d’Héliane] (1927)…

A Korngold, cornaqué de bonne heure, tout comme l’avait été Mozart, par un père autoritaire et quelque peu envahissant, s’ouvrait une carrière glorieuse sur le Vieux continent. Il n’avait qu’un défaut : être juif. En 1934, à l’instigation de l’immense metteur en scène et coreligionnaire Max Reinhardt (avec qui il avait déjà collaboré et qui, dès l’Anschluss proclamé, vient lui-même de fuir outre atlantique les persécutions nazies), Korngold s’exile avec femme et enfants aux Etats-Unis (il prendra la nationalité américaine en 1943), et entame une nouvelle carrière à Hollywood : aucun cinéphile n’ignore que Korngold y signe les bandes-son de films fameux, tels les deux Adventures of Robin Hood, celui, muet, de William Dieterle puis celui, parlant, de Michael Curtiz ; sans compter Capitaine Blood, L’Aigle des mers, Le Vaisseau fantôme, du même Curtiz, etc. Le Septième art doit à Korngold près d’une vingtaine de partitions ! Mais outre ballets, lieder, sonates pour piano, le compositeur incroyablement fécond a produit quantité de musique symphonique, de concertos, de musique de chambre, œuvres décidément trop méconnues, elles aussi.

Écrit entre 1937 et 1945 et dédié à Alma Mahler, la veuve de Gustav, le Concerto pour violon en ré majeur op. 35, en trois mouvements, reste pourtant assez célèbre. De fait, c’est un sommet de ce lyrisme opulent où se débondent les torrents d’arrière-saison du post-romantisme tardif, dans ce qu’il a de plus suave, diapré et flamboyant à la fois. Ce chef-d’œuvre est à redécouvrir, dans l’interprétation de toute beauté qui, gravée en CD sous le label Mirare, vient de paraître.      

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Directrice artistique, en outre, de la Musikfest parisienne, salle Cortot, festival chambriste dont l’édition 2025 avait lieu début mars, la violoniste bulgare Liya Petrova avait eu l’idée d’une confrontation entre le concerto pour violon de William Walton (1902-1983) et la sonate pour violon de Respighi (1879-1936). Résultat, baptisé « Momentum 1 » et déjà sous les auspices de Mirare, un premier disque en tous points remarquable.  « Momentum 2 », édition très attendue donc, promettait d’associer, au diamant de Korngold mentionné plus haut, la Sonate pour violon et piano op.18 de Richard Strauss, œuvre de jeunesse certes moins surprenante que le premier Concerto pour cor écrit à 19 ans, avant que ne s’affirme la patte inimitable du compositeur avec, entre autres, l’inoubliable Tod und Verklrung [Mort et transfiguration]… 

L’articulation du morceau virtuose, infiniment raffiné d’un Korngold dans la maturité de son art, avec le jaillissement juvénile d’un Richard Strauss encore alors très nettement sous influence de Brahms ou de Mendelssohn n’a rien d’arbitraire, si l’on se souvient qu’après avoir été l’un de ses premiers soutiens, Strauss, nommé à la tête du Staatoper de Vienne en 1918 et devenu un ami très fidèle, y engagera Korngold comme chef d’orchestre en 1922. De fait, entre la moirure propre au futur créateur d’Elektra ou d’Ariane à Naxos et la luxuriance mélodique polytonale, dissonante et cuivrée du cadet, la parenté est saisissante. Reste que si Richard Strauss est, à raison, un compositeur définitivement adoubé par la postérité, on mesure mal aujourd’hui l’extrême fortune critique dont a joui la musique de Korngold en Europe, dans les débuts du XXème siècle…

L’onctueux nappage orchestral commun aux deux compositeurs est ici restitué par une prise de son exemplaire : sous la baguette du très jeune chef britannique Duncan Ward, le Royal Philharmonic Orchestra pare la texture si finement ouvragée de Korngold d’une rutilance et d’un phrasé éblouissants. Nettes, véhémentes, les attaques de Liya Petrova comme le vibrato si expressif de son archet se marie au jeu perlé, subtil et ardent du jeune pianiste Alexandre Kantorov, prince du clavier à qui, rappelons-le, on doit un enregistrement magistral des sonates de Brahms, et qui accompagne maintenant les effluves maniéristes du jeune Richard Strauss avec une clarté d’exécution sommitale.           


A écouter : 1CD Momentum 2. Sonate pour violon et piano op.18, de Richard Strauss/ Concerto pour violon op.35, de Erich Wolfgang Korngold. Royal Philharmonic Orchestra.  Direction : Duncan Ward. Violon : Liya Petrova. Piano : Alexandre Kantorow. Label Mirare.

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Juges partout, justice nulle part

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Les juges seraient-ils paradoxalement plus sévères avec les puissants ? En tout cas, qu’ils puissent décider qui peut gouverner ou pas est problématique, observe Elisabeth Lévy.


À la lumière de notre actualité judiciaire, on peut se demander s’il faut avoir peur de la Justice. Pas de suspense : la réponse est oui. Surtout si vous êtes un élu ou un people. Si vous êtes un mineur multirécidiviste, vous avez en revanche plus de chances de passer au travers.

Des juges et des ambitieux

Revenons sur le réquisitoire Sarkozy. Il n’est pas seulement problématique à cause des peines très lourdes demandées (sept ans ferme, privation des droits civiques et parentaux qui traduisent une volonté d’humilier), mais parce que quels que soient les indices dont on nous parle concernant un financement libyen présumé, il n’y a pas de preuves. Si de l’argent a circulé, on n’en retrouve pas trace dans la campagne. Le rôle de l’ancien président Sarkozy comme grand orchestrateur n’est pas non plus démontré.
L’un des procureurs a parlé de la « soif de pouvoir », de la «cupidité», de « l’ambition dévorante » de l’ex-président. Et alors, c’est illégal ? Les juges se prononcent-ils désormais sur notre moralité ? On ne voit pas bien le rapport. Il est difficile de ne pas voir quelque chose d’un peu personnel, de ne pas penser que c’est alors la haine de Nicolas Sarkozy qui parle.

Proportions

Ce matin, le Tribunal de Paris décidera si Marine Le Pen peut se présenter à la prochaine élection présidentielle. Le Conseil constitutionnel vient de fournir au tribunal l’argumentaire opposé à l’exécution provisoire : il revient au juge « d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que cette mesure est susceptible de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la liberté de l’électeur ». Il est donc très peu probable que le tribunal prenne cette responsabilité.

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Premièrement, on pourra toujours se demander si cette décision n’est pas un renvoi d’ascenseur (après la nomination de Richard Ferrand, qui ne serait pas à sa place sans le RN). Deuxièmement, que des juges puissent ainsi décider qui peut se présenter, et donc qui peut gouverner, est évidement problématique.

Est-ce à dire que les politiques devraient être au-dessus des lois ?

Non, mais ils doivent demeurer des justiciables comme les autres, pas être jugés plus sévèrement que les autres !
Problème : dans l’équilibre des pouvoirs, les juges sont-ils au-dessus du suffrage universel ? Peuvent-ils décerner des brevets de fréquentabilité ou de moralité politique, alors qu’eux-mêmes sont souvent très politisés ? (Rappelons qu’un tiers des magistrats sont au Syndicat de la Magistrature, connu pour son fameux « Mur des cons »). Plus que des options politiques, certains magistrats se prennent pour des justiciers qui se pensent en mission de purification de la démocratie avec l’aide de Mediapart. (Rappelons-nous que lors du réquisitoire de l’affaire des attachés parlementaires européens du RN, un des procureurs avait osé dire « j’aurais du mal à demander la relaxe, cela me ferait mal »). En clair, ils savent ce qui est bon pour les électeurs. Mais après le malaise des ZFE, la France périphérique n’a peut-être pas envie qu’on lui dise qu’elle n’a pas le droit de voter pour Marine Le Pen…

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Reste que, même s’ils l’interprètent, les juges appliquent la loi. C’est le Parlement qui a voté ces scandaleuses peines d’inéligibilité automatique. C’est le Parlement qui a voté toutes ces âneries pour démontrer à quel point notre vie politique était super et transparente. Plus généralement, ce sont les élus qui ont abdiqué de leurs prérogatives en acceptant l’extension du contrôle de constitutionnalité et le pouvoir croissant des juridictions internationales.
Bref, les politiques ont donné le pouvoir aux juges. Et il est maintenant trop tard pour s’indigner parce qu’ils s’en servent.


Cette chronique a été d’abord diffusée sur Sud Radio

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Jean-Jacques Bourdin