Vendredi, le tribunal correctionnel de Paris a rendu un verdict ouvrant une jurisprudence aux lourdes conséquences sur la liberté de création. Le chanteur Orelsan, alors qu’il avait été relaxé l’an dernier suite à la plainte d’une association féministe pour « provocation au crime », a été cette fois-ci condamné, après trois ans de procédures, à 1000 euros d’amende avec sursis pour injure publique et pour incitation à la violence contre un groupe de personnes. « Mais ferme ta gueule ou tu vas t’faire marie-trintigner » et « les meufs c’est des putes » étaient les passages cités par les associations plaignantes. Orelsan a beau expliquer que cette chanson, comme la plupart des chansons, est une fiction, que le personnage « monstre » ne représente pas son avis personnel, un tribunal de la République lui a donné tort. Najat Vallaud-Belkacem a dit sa satisfaction à l’annonce de ce verdict et l’un de ses conseillers, répondant à ceux qui s’inquiétaient pour la liberté d’expression a twitté : « #Orelsan facile d’invoquer la fiction ou le second degré, et oublier la responsabilité sociale des artistes ». Si l’on reste seulement sur le plan de la chansonnette, la Justice de notre pays, auquel il faut dire sa confiance, peut avoir du boulot dans les semaines à venir. Au gnouf, Michel Sardou, s’il se laisse aller à inclure Les villes de grande solitude dans son tour de chant. Le personnage de la chanson y confie son « envie de violer des femmes ». Un tenancier de bar de nuit se devra également d’appeler la police lorsque l’équipe de rugby locale, à la fin d’une troisième mi-temps forcément arrosée, chantera à tue-tête « Jeanneton et sa faucille », où il est tout de même question, larirette, larirette, d’un viol en réunion. Mais pourquoi, après tout, s’arrêterait-on à la chanson ? La mise aux arrêts de Jean-Marie Bigard, auteur du « lâcher de salopes », constituerait un exemple pour ceux qui stigmatisent honteusement, au prétexte de provoquer des rires gras, l’ensemble des femmes. Après le temps des comiques devrait venir celui de la littérature, du théâtre et du cinéma. Et là, nous réglerons définitivement les problèmes d’emploi dans ce pays. Entre les postes de juges, de greffiers, de policiers, de surveillants pénitentiaires, et tous les métiers du bâtiment créés pour construire tribunaux, postes de polices et prisons, la courbe du chômage pourrait prendre de manière vertigineuse la direction descendante souhaitée par le président de la République. Le tribunal correctionnel de Paris a trouvé la solution ! Chouette !
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