Les voix puissantes et virtuoses de l’opéra nous sauvent des choix hasardeux de certains metteurs en scène contemporains…
C’est peu dire que la direction tonitruante, à la fois nerveuse et sensuelle du chef britannique Mark Wigglesworth restitue à plein, dans l’immensité de la salle Bastille, la stupéfiante modernité de cette musique kolossale entre toutes : sauvage, luxuriante, langoureuse… La puissance sonore des neuf percussionnistes ajoute à l’opulence de l’orchestre, traversé par les cris suraigus de la princesse de Judée, Salomé.
La soprano norvégienne Lise Davidsen, 37 ans, reprend le rôle-titre dévolu il y a deux ans à Elza van den Heever dans la même mise en scène, signée de l’Américaine Lydia Steier. La chanteuse sculpturale y triomphe absolument, musclée d’une voix au volume impressionnant, qui n’interdit jamais la subtilité dans le medium, et la plus parfaite ciselure dans le phrasé. Cette wagnérienne pur jus s’avère néanmoins capable d’incarner, tout aussi bien Leonora dans La force du destin (Verdi), que les mélodies de son compatriote Edvard Grieg… On n’a pas fini d’entendre (parler de) Lise Davidsen.
Salomé : cour de drag-queens, gothiques en lycra
Millésimé 1905, le troisième opéra de Richard Strauss inaugure la forme lyrique du XXème siècle avec un éclat souverain. Le compositeur est lui-même l’auteur du livret, tiré comme l’on sait de la célèbre pièce écrite en français en 1891 par Oscar Wilde. Quatre ans plus tard, Elektra, autre chef-d’œuvre, entamera dans cette même veine névrotique la féconde collaboration avec l’écrivain autrichien Hugo von Hofmannsthal, futur librettiste d’Ariane à Naxos ou du Chevalier à la rose…

