L’article de Libération a été publié le 2 mai, au lendemain donc des défilés syndicaux. Toute la rédaction du journal avait été mobilisée pour en rendre compte. Les journalistes couraient d’un Martinez à un manifestant et d’un manifestant à l’autre.
Et ils s’employèrent à gonfler les chiffres : il y avait 100 000 manifestants dans toute la France. Emportés par leur fougue révolutionnaire, ils en virent beaucoup plus. De cette expédition, ils rentrèrent exténués. Et pour profiter d’un repos bien mérité, ils confièrent les rennes du journal à un stagiaire, frais émoulu d’une école de journalisme dont on connaît le niveau. Il eut l’idée – on ne peut plus originale – de parler du 1er mai de Marine Le Pen.
La patronne du Rassemblement national, fidèle en cela à son père, s’était rendue, comme le veut la tradition lepéniste, à la statue de Jeanne d’Arc pour y déposer une gerbe. Un événement qui valait à coup sûr un article fouillé.
Pour le résumer, il disait que le programme de Marine Le Pen, c’était le « Travail, Famille, Patrie » de Pétain. Il y avait du Vichy à chaque ligne. Et soudainement, Vichy surgit là où on ne l’attendait pas. « La Fête du travail [est] héritée de Pétain » écrivit le stagiaire qui avait dû se renseigner sur Wikipédia.
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Effectivement, le 1er mai fut décrété jour férié par Belin, ministre du Travail du Maréchal. Une initiative totalement démagogique, heureusement bien oubliée depuis. Sauf par la frange la plus extrême de la droite la plus extrême. Il est pour le moins surprenant qu’un journal progressiste et bien sous tous rapports s’en fasse l’écho. L’article eut-il été publié la veille du 1er mai qu’il aurait rendu fous de rage les manifestants qui défilaient avec des drapeaux rouges. On savait que Libération était un journal en perdition. Mais on lui doit toutefois de nous avoir appris que le 1er mai fait partie des heures les plus sombres de notre histoire…