Un peu à la surprise générale, Emmanuel Macron a annoncé mardi 9 novembre la relance d’un programme de construction de réacteurs nucléaires en France. La crise énergétique des derniers mois et le fait que l’électricité nucléaire soit la plus décarbonée ont soudain balayé les doutes du président sur cette énergie.
Confirmant le retour en grâce de cette source d’énergie, Emmanuel Macron est définitivement sorti de l’ambiguïté sur l’avenir du nucléaire en France lors de son allocution télévisée du 9 novembre. Il a annoncé la relance d’un programme de construction de nouveaux réacteurs. Il a mis en avant les avantages de cette source d’énergie. «Nous allons, pour la première fois depuis des décennies, relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays et continuer de développer les énergies renouvelables… pour garantir l’indépendance énergétique de la France, pour garantir l’approvisionnement électrique de notre pays et atteindre nos objectifs, en particulier la neutralité carbone en 2050».
Des doutes sur les capacités de la filière nucléaire française
La France a cessé de construire des centrales nucléaires sur son sol depuis le début des années 1980 et a relancé la construction d’un réacteur de nouvelle génération, la troisième, dit EPR en 2007 à Flamanville (50). Mais le chantier a tourné au cauchemar accumulant les retards, les surcoûts et les malfaçons. L’EPR de Flamanville devrait entrer en service en 2023. De quoi faire naître de sérieux doutes sur la capacité de la filière nucléaire française à renouveler son parc de centrales vieillissantes. La Cour des Comptes a même parlé de débâcle industrielle. À Flamanville, les coûts ont été multipliés par 3,3 et les délais de construction par 3,5. L’EPR français devait selon le plan initial commencer à produire de l’électricité en 2012…
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Mais les doutes, le président de la République vient de les balayer. Il avait déjà commencé à le faire le mois dernier en annonçant investir un milliard d’euros d’argent public dans un projet de futur petit réacteur modulaire dit SMR. Mais le projet d’EDF, qui envisage de lancer la construction de six EPR supplémentaires, est d’une toute autre ampleur. L’électricien public a remis en mai un dossier au gouvernement sur la faisabilité et les conditions d’un tel programme. Le document d’EDF avait été alors reçu alors sèchement par la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili. Son entourage s’était empressé d’expliquer qu’il s’agissait «d’un document de travail qui correspond à la vision d’EDF. Il n’engage pas le gouvernement».
La nécessité de renouveler rapidement une partie du parc
Il s’est passé beaucoup de choses en six mois. D’autant plus que la France est en quelque sorte dans l’obligation de renouveler rapidement une partie de son parc de réacteurs nucléaire même si elle ramène de 70% à 50% en 2035 la part d’électricité provenant de l’atome comme le prévoit la loi de transition énergétique. Le vieillissement d’un grand nombre de réacteurs ne laisse pas vraiment le choix. Ainsi, 52 des 56 réacteurs en service ont été construits dans les années 1970-1980. Tous arriveront en fin de vie d’ici 2040. Ils ont pour la plupart été construits sur le même modèle. Leurs composants ont été conçus à l’origine pour fonctionner quarante ans au minimum, ce qui ne veut pas dire qu’ils ne peuvent pas durer bien plus longtemps. Le travail de mise à niveau du parc a d’ailleurs commencé depuis 2015. Mais la volonté du gouvernement est de fermer les plus anciens, à l’image des deux réacteurs de Fessenheim stoppés définitivement l’an dernier même s’ils auraient encore pu produire en toute sécurité pendant de nombreuses années.
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Il est de ce fait plus que temps de prendre des décisions. Pour seulement maintenir en 2035 la production électrique de la France à son niveau et à son coût actuels, EDF table, a minima, sur la construction de trois paires de deux réacteurs EPR. Et cela prendra sans doute plus de quatorze ans compte tenu de la faiblesse des capacités industrielles du pays… Plus la décision traîne et plus la France risque d’être confrontée à des pénuries d’électricité comme le prévoit d’ailleurs France Stratégie. Le très sérieux organisme de prévisions rattaché aux services du Premier ministre estime dans une étude publiée au début de l’année que dès 2030, et sans doute avant, le réseau électrique européen «ne pourra plus faire face à toutes les demandes de pointe moyenne».
«Si nous voulons payer notre énergie à des tarifs raisonnables et ne pas dépendre de l’étranger, il nous faut tout à la fois continuer d’économiser l’énergie et d’investir dans la production d’énergies décarbonées sur notre sol», a déclaré Emmanuel Macron. «Ces investissements nous permettront d’être à la hauteur de nos engagements au moment où nous allons clôturer la COP 26 à Glasgow», a-t-il assuré.
Source : Transitions & Energies
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