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Le kebab de la discorde

Döner de leçons


Le kebab de la discorde
Image d'illustration : propriétaire d'un kebab. AP22035619_000002. Ronald Zak/AP/SIPA.

L’ouverture d’un kebab dans une petite ville tranquille en banlieue d’Evreux annonce-t-elle le début de la fin ?


Près de chez moi, il y a un kebab, un seul…

Mais pour nombre d’habitants de ma petite ville normande, c’est déjà trop. Essayons de les comprendre.

Il y a quelques jours, ils étaient plusieurs centaines à manifester dans Paris contre « les kebabs et les mosquées ». Ça m’a fait penser au mien de kebab… Dans la rue principale de la commune, il détonne. Une présence banale ailleurs, incongrue ici. Il y a là quelques restaurants normands, où la crème fraîche est reine. Un vieux donjon en ruine, envahi par l’herbe. Une église. Et l’inévitable et monstrueux supermarché.

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Le kebab est là, esseulé. Poor loneson kebab… Il ne fait de tort à personne, mais s’inscrit mal dans le paysage local. Le patron de l’établissement, un sympathique jeune maghrébin, est soucieux. « Je peine à avoir des clients. Quelques jeunes de la cité et très peu de jeunes de la ville ».

Et il ajoute : «Vous savez, il y a des gens ici qui ne m’aiment pas. Pourquoi? Qu’ai-je fait?». Le patron du café qui jouxte son kebab fait partie de ceux qui ne l’aiment pas. «Vous savez, je n’ai rien contre lui. Mais l’odeur de ses merguez importune mes clients. Tout ça, c’est à cause de la cité qu’on a construite dans notre ville. Depuis, il y a le kebab et les cambriolages se multiplient».

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Il y a en effet une petite cité à la périphérie de la ville. Elle est située – coïncidence ? – à côté de la gendarmerie. Il fallait désengorger les HLM d’Évreux. Alors, on a délocalisé. Avec une autre population dont une grande partie est au chômage, les aides sociales leur permettant de vivoter.

Un kebab, une petite cité… Nous n’en sommes tout de même pas au grand remplacement.

Mais beaucoup d’habitants de la commune voient ça avec des lunettes grossissantes. Ils regardent le kebab et pensent qu’il en annonce des dizaines. Ils le regardent et voient un futur avec des voitures qui brûlent, des émeutes et des pillages. Ce sont pourtant des braves gens. Ils ne feraient pas mal à une mouche, à un maghrébin, à un Noir, à un Juif. Aux dernières élections européennes, ils ont massivement voté pour la liste lepeniste. Sans doute à cause du kebab.

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est journaliste et essayiste

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