… Et en même temps, la macronie a longtemps célébré la « libération de la parole ». Il faut choisir, selon Elisabeth Lévy.
C’est beau comme du Finkielkraut. Au sujet de l’affaire Hulot, le président de la République affirme que la Justice ne se fait pas dans les médias.
Rappelons que la semaine dernière, cinq femmes ont accusé Hulot d’agression sexuelle ou de viol dans «Envoyé Spécial». À l’exception d’un cas qui a abouti à un classement sans suite, aucune procédure n’a été engagée, les faits étant prescrits.
Une affaire embarrassante pour l’exécutif qui avait soutenu Hulot en 2018
Certes, conformément à sa nouvelle doctrine, le Parquet a ouvert une enquête, mais celle-ci ne pourra pas donner lieu à un procès. En réalité, les investigations, de la Justice comme des médias, ne peuvent guère aller au-delà du recueil de témoignages. Il s’agit d’apporter une forme de réconfort aux victimes présumées. Aussi légitime soit cet objectif, il ne justifie peut-être pas que l’on dynamite toutes les formes de la Justice.
À lire aussi, Sophie de Menthon: J’aime les hommes…
L’affaire est plutôt embarrassante pour Emmanuel Macron dont tout le monde avait célébré la prise de guerre lorsque l’ex-vedette d’Ushuaïa est entrée au gouvernement. En 2018, après les accusations de l’éphémère Ebdo, le gouvernement était sur la ligne «Tiens bon Nicolas !». Le président fustigeait alors, selon Le Monde, « la République du soupçon ». Il se murmure même que des proches de l’Elysée avaient alors contribué à ce que le journal soit lâché par ses banques et disparaisse. Mais ce sont de purs soupçons, propagés par de mauvais esprits. Aujourd’hui, Emmanuel Macron n’ose ni lâcher ni défendre Hulot.
Le président vent debout contre une société de l’inquisition
D’après le Parisien, il a déclaré lors du Conseil des ministres: «La justice ne se fait pas dans les médias». Ila aussi affirmé son refus, tant « d’une société de l’opacité ou de la complaisance », que « d’une société de l’inquisition ». Des propos que ne peuvent qu’approuver tous ceux qui dénoncent les tribunaux médiatiques.
L’ennui, c’est qu’en même temps, le président s’est félicité de la « libération de la parole ». Il faut choisir: la parole libérée – sur Twitter, à la télévision, dans les journaux – c’est la définition de la Justice médiatique. Ce n’est pas parce qu’une parole est libre qu’elle est vraie. Et quand la parole est unanime comme si elle obéissait à un scénario préétabli, la liberté est très relative.
À lire aussi: Margaux Pinot n’aura pas réussi à faire condamner son conjoint
Il faut aussi rappeler la sidérante déclaration du même Macron, en janvier, en pleine tempête Duhamel. Dans une vidéo, il lançait aux victimes présumées d’inceste : «ON vous écoute et on vous croit». Le ton dramatique, la gorge nouée, le président, habité par sa propre émotion, piétinait allègrement les règles de la justice. « On vous écoute et on vous croit »: cela signifie que le témoignage est une preuve. Et c’est gravissime.
Alors oui, Emmanuel Macron a raison de rappeler que la Justice ne se rend pas dans les médias. Vu qu’il dit tout et son contraire, il y a toujours un moment où il a raison. C’est comme les horloges cassées, elles sonnent l’heure deux fois par jour mais ça ne suffit pas pour qu’on leur fasse confiance !
A relire, Elisabeth Lévy: Sur Olivier Duhamel, “le Parisien” verse dans le journalisme de caniveau
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !