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Neuillygate contre Marseillegate


Jacques Chirac, lorsqu’il n’était pas encore sous la tutelle implacable de son épouse, avait parfois quelques bonnes formules pour décrire les événements de la vie politique française. Il constatait ainsi, non sans pertinence, que si l’on jette de la merde dans un ventilateur, beaucoup de gens risquent d’être éclaboussés, même parmi ceux qui n’étaient pas directement visés par ce nauséabond attentat aux bonne mœurs.
Or, il semble que cette rentrée politique, éditoriale et médiatique nous incite à nous mettre à couvert car le volume de matière fécale disponible et le diamètre du ventilateur sont de taille XXL.

Au Monde, à Libération et dans la bobo-gauchosphère, on s’indigne à grand bruit des mauvaises manières de la DCRI (le contre-espionnage français), qui a espionné le relevé de communications téléphoniques (les dites « fadettes ») du journaliste du Monde Gérard Davet, qui enquêtait en 2010 sur l’affaire Woerth-Bettencourt. C’est par ce biais que les pandores sont remontés jusqu’à la gorge profonde de Davet, David Sénat, membre du cabinet de Michèle Alliot-Marie, alors Garde des Sceaux.

Disons-le d’emblée : cette pratique est non seulement illégale, mais détestable. La protection des sources reste la principale garantie d’une presse libre, sans laquelle plus personne ne prendrait le risque de révéler aux médias des faits délictueux ou immoraux dont il ou elle aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions.

Néanmoins, le pouvoir politique est parfaitement dans son droit lorsqu’il lance des investigations pour identifier le, ou les auteurs de fuites intempestives. Aucun pouvoir, aussi démocratique soit-il, ne peut tolérer de déloyauté de la part de ceux qui ont pour vocation de le servir (hauts fonctionnaires, membres des cabinets ministériels, militaires). S’ils sont en désaccord avec les pratiques de ce pouvoir, il leur est toujours loisible de démissionner, avec ou sans bruit, pour se mettre en phase avec leur conscience. Ils ne risquent pas grand chose, sinon de perdre des primes et l’ivresse quotidienne de la proximité du pouvoir. En France, le goulag s’appelle Limoges ou la Guyane (pas le bagne, la préfecture !) avec maintien intégral du salaire et des avantages sociaux.

Par conséquent, autant la traque de David Sénat était légitime, autant le raccourci consistant à le faire aux pattes en allant fouiner dans les poubelles téléphoniques de Gérard Davet relève d’une coupable paresse flicarde. La DCRI a franchi la ligne rouge en remontant, via un journaliste, jusqu’à un informateur, et cela doit être sanctionné, administrativement, et politiquement s’il y a lieu.
Faut-il pour autant se lancer tête baissée dans une vision manichéenne de cette histoire, dont le contexte est opportunément passé sous silence par ceux qui veulent en faire une machine à tronçonner Nicolas Sarkozy ? Rappelons, pour ceux dont la mémoire est lacunaire, que le « Neuillygate », sous-produit des bisbilles internes de la famille Bettencourt, doit beaucoup à la publication, par Mediapart, puis par Le Monde d’enregistrements de conversations téléphoniques de Liliane Bettencourt, volés par un maître d’hôtel indélicat qui les a transmis à des journalistes. Ces conversations relevaient, pour partie, du secret garanti aux entretiens d’un avocat avec sa cliente. On peut comprendre, sans l’excuser, que la hiérarchie policière ait pris quelque ombrage de ces méthodes de voyous, utilisées par des gens qui se drapent constamment dans la toge de la vertu journalistique. Ils ont répondu à cette provocation par la pire des méthodes, celle consistant à calquer son comportement sur celui des délinquants à carte de presse.

Cela est d’autant plus regrettable que ce faux-pas valide les élucubrations insensées de la juge Isabelle Prévost-Desprez qui s’épanche, dans le livre à scandale de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, sur les dessous de l’affaire Bettencourt. Même un vieux compagnon d’armes d’Edwy Plenel en matière d’investigation musclée, Hervé Gattegno estime que cette juge s’est conduite, en l’occurrence, comme la pire des concierges qui n’a rien vu, mais qui sait tout par ouï-dire.

Mais ce n’est pas tout. La semaine prochaine, Jean-Noël Guérini, président du conseil général des Bouches-du-Rhône devrait être mis en examen pour divers délits allant de la prise d’illégales d’intérêts à l’association de malfaiteurs dans le cadre de ses fonctions électives. Pour le coup, le ventilateur à matière fécale va s’orienter du côté gauche, éclaboussant la plupart des candidats à la primaire socialiste. Ces derniers, à l’exception notable d’Arnaud Montebourg, ont tous, à un moment ou à un autre de leur parcours politique, bénéficié des faveurs du patron des socialistes rhodanibucaux. Cette fédération du parti est mûre comme un furoncle : le pus ne demande qu’à sortir…

Si l’on ajoute à cela le prochain retour de DSK, et la vindicte de son épouse pour tous ceux qui ont « manqué » à l’ex-directeur du FMI, nous voilà partis pour un automne de rêve.



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