Najat et le salafiste: un Etat laissé sans voix


Najat et le salafiste: un Etat laissé sans voix

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Le récent mutisme de la ministre face à un islamiste radical, lors de l’émission « Le supplément » présentée par Ali Badou, quand on attendait la parole de l’Etat, renforce cette ambiance de relativisme culturel et d’affaiblissement  politique dans laquelle nous essayons de surnager. Et son communiqué ne dément en rien cette insuffisance.

Refusant d’abord de s’exprimer, puis se ravisant et limitant la portée de ses propos par un « je n’en dirai pas plus », Mme Vallaud-Belkacem a laissé croire que l’égalité homme-femme n’était qu’une opinion parmi d’autres, pas un préalable civilisationnel, pas un droit. C’est que ses hauts-fonctionnaires ne lui avaient pas fourni les éléments de langage. Et sans colonne vertébrale ni éléments de langage, elle a failli et traduit par son incapacité sémantique l’impuissance politique de ce gouvernement qui a renoncé. C’est pourtant par la sémantique que les attaques commencent toujours. Ce mot d’islamophobe que l’on veut installer dans les consciences et dans le Droit. Et cet adjectif d’orthodoxe que le président de cette drôle d’ONG salafiste veut substituer à celui d’islamiste radical. Ce qu’il est. Rendons à César ce qui appartient à César et aux barbares…

Alors on se paie de mots, de ces mots faibles et vides à force d’avoir trop traîné. Un exemple ? Le vivre-ensemble.

Peste soit du vivre-ensemble.

Prétexte à tous les accommodements, à toutes les compromissions. Chacun de son côté du périph’ tout en célébrant les différences de l’autre. Le glissement se fait entre le cultuel et le culturel. Et le culturel, cela doit se respecter. Sinon, on fait preuve de racisme, de mépris proto ou postcolonial. Le voile ? C’est culturel. Et il y a une vingtaine d’années, les tenants de la même idéologie tentèrent de faire accepter la pratique de l’excision en France au nom du même impératif relativiste. C’est culturel. Madame la ministre, c’est la civilisation occidentale qu’il fallait opposer à ce triste sire. C’est l’histoire de la France et de l’Europe que vous auriez dû opposer à ce monsieur. C’est le rappel de la loi par une ministre d’État qui aurait dû le faire taire. Il y a des choses qui ne se négocient pas. Il y a des valeurs et des lois qui ne s’excusent pas de s’appliquer.

Une preuve de cet accommodement culturel ? La stratégie Al Capone. L’Etat s’en prend au financement, espérant débusquer quelque arnaque ou source illégale, quand c’est l’ONG, son principe sexiste de fonctionnement, sa volonté de ne secourir que des musulmans, qu’il doit mettre en accusation.

J’écris dans un pays dévasté par la peste.

Et ce poème d’Aragon relu dans les circonstances actuelles est d’une étrange actualité :

J’écris dans ce décor tragique où des acteurs
Ont perdu leur chemin leur sommeil et leur rang
Dans ce théâtre vide où les usurpateurs

Ânonnent de grands mots pour les seuls ignorants
[1. Louis Aragon, Le Musée Grévin.]

Il y a un effet cliquet,  qui empêche le retour en arrière d’un processus une fois un certain stade atteint ou dépassé. Les politiques ont laissé cet effet cliquet se répéter. Avec un Observatoire de la laïcité abstinent sur la défense de la laïcité mais prosélyte dans le différentialisme culturel. Avec Jean-Louis Bianco qui est le  bouffon favori du PIR. Avec une Charte de la laïcité dont la ministre de l’Education si peu Nationale nous disait qu’elle devait être signée par tous les parents, avant finalement  de rétropédaler quelques semaines plus tard en affirmant que les parents n’étaient plus qu’invités à la signer. Avec les créneaux horaires de piscine réservés aux femmes, en fait aux musulmanes, dans beaucoup de villes. Avec l’autorisation des femmes voilées dans les sorties scolaires, œuvre d’une ministre qui n’a pourtant pas eu le courage d’abroger la circulaire Chatel proscrivant cette présence. Que les petits garçons et les petites filles s’habituent au port du voile ne la gêne pas.

Nous payons et paierons un lourd tribut à cette mithridatisation. Une livre de chair. Comme Mithridate habituait et immunisait son corps au poison par l’absorption quotidienne de petites doses, à force de renoncements et d’accommodements, nous laissons les consciences s’habituer aux  signes religieux, aux revendications dont on a du mal à séparer la part ethnique de la part religieuse. L’effet cliquet : ces signes religieux n’auront plus rien d’ostentatoire pour ceux qui les auront vus y compris en sortie scolaire. Et ainsi, les petites filles et les petits garçons qui auront grandi dans ces territoires peuplés de voiles trouveront anormale la femme qui n’en portera pas. C’est ce poison qui grandit et immunise tant de jeunes contre les valeurs de la République, régime dont ils ne perçoivent que la faiblesse et la captation par certains. Et d’autres pyromanes ou idiots utiles ajoutent à ce processus le statut de victime perpétuelle qui est celui des Indigènes. Alors qu’Alain Finkielkraut s’est défendu devant une de ses représentantes en croisade, et a, ce faisant, défendu les valeurs de notre pays, Mme Vallaud-Belkacem se serait sans doute murée dans son silence : elle aurait donné quitus au fameux « Taisez-vous ! »

La République ne se tait pas. Madame la comédienne de l’Éducation Nationale, il vous faut des souffleurs ! Pour rappeler, a minima, à vos voisins de plateau salafistes que la loi et la République sont  supérieures aux croyances. La loi, elle, n’est pas une opinion. Ni un élément de langage.



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est secrétaire nationale du Mouvement républicain et citoyen.

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