Habitué des plateaux télévisés, l’avocat Gilles-William Goldnadel déplore l’uniformité idéologique du système médiatique. A l’ère de Twitter, cet intellectuel de droite décomplexé (une espèce de plus en plus répandue !) décortique le panurgisme des foules virtuelles en colère.
Causeur. Si j’ai bien lu Névroses médiatiques, vous vous fondez sur les grands textes sur la psychologie des foules pour expliquer que, sous l’empire des médias de masse, les peuples sont devenus fous, et que les réseaux sociaux les transforment en foules déchaînées.
Gilles-William Goldnadel. Plutôt que de parler de peuples, je m’intéresse à l’individu. C’est l’individu qui a perdu son indépendance et qui, assommé – sans doute parce qu’il était assoiffé – d’informations, est connecté en permanence avec les médias et avec tous les autres. Ces individus isolés, mais interconnectés et interactifs, qui ont soif de communion et d’émotion, forment ce que j’appelle les fidèles de la masse médiatique, abreuvés en permanence par l’Église cathodique et son idéologie du pseudo antinazisme devenu fou.
Heureusement, face à l’emprise de ce clergé, quelques esprits libres résistent. Votre point de vue sur ces masses médiatiques manipulées par les médias n’est-il pas un peu méprisant ?
Je ne me vois pas comme un résistant, mais plutôt comme l’acteur-observateur d’un système idéologico-technique que je mets en cause tout en y participant. Le philosophe Günther Anders, mari d’Hannah Arendt, avait réfléchi à cette problématique. Il nommait l’« ermite de masse » l’individu qui compose la masse des consommateurs médiatiques isolés. À son époque, le problème n’était pas aussi aigu qu’il l’est devenu avec internet et les autres technologies de communication. Anders pointait essentiellement la télévision qui donnait à l’ermite de masse le sentiment d’être le centre du monde : le quidam voit l’actualité défiler devant son écran, ce qui lui confère une immense importance. Aujourd’hui, ce phénomène a été aggravé par l’interactivité massive et permanente des nouvelles technologies. La télévision cantonnait le spectateur dans une attitude passive. Aujourd’hui, l’individu membre de la foule médiatique jouit d’un sentiment de puissance décuplé par le nombre et par la possibilité interactive qu’il a de lyncher ou de lécher symboliquement quelqu’un en appuyant sur un bouton. Le tout sans risque et anonymement comme dans une foule. Mon livre s’adresse à ceux qui, comme moi, sont convaincus de l’irrationalité du débat sur un certain nombre de questions jetées en pâture à la masse médiatique. La relecture des « Psychologies » de Le Bon, puis de Freud, qui décrivent sans aménité le suivisme, la puérilité, l’irrationalité, l’animalité de la horde humaine qu’est une foule confirme mon intuition sur l’existence d’une foule médiatique désormais hors de contrôle faute de meneurs crédibles.
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