Morrissey est sur la scène de la salle Pleyel pour deux concerts exceptionnels. L’occasion rare d’entendre la voix de velours de ce chanteur réac’n’roll.
The Queen is dead, la chanson éponyme de l’un des plus célèbres albums du groupe culte de Manchester, The Smiths, a résonné partout dans le monde à la mort d’Elizabeth II. Elle fera sans aucun doute vibrer la salle Pleyel les 8 et 9 mars prochain, car Morrissey, le chanteur du groupe (dont il s’est séparé en 1987), y donnera deux concerts exceptionnels. Les fans sont déjà en transe.
En Amérique du Sud, certains fans lui dédient des autels
Exceptionnel, le mot est faible, parce que les apparitions de Steve Patrick Morrissey sont rares et qu’elles sont donc l’objet d’un véritable culte. Cet artiste à la voix de baryton envoûtante se double d’une diva, d’un trublion qui prend un malin plaisir à dire ce qu’il pense, quitte à heurter la doxa médiatique. Ce showman d’exception qui, au début de sa carrière, montait sur scène avec des glaïeuls dans la poche de son jean pour les jeter dans le public, donne aujourd’hui dans la provoc’ politique. Ainsi, depuis une quinzaine d’années, il n’a de cesse de répéter que l’identité britannique est en péril, qu’il faut mettre fin à l’immigration massive – celle en provenance des pays musulmans en particulier ; et en 2019, invité d’un célèbre show télévisé américain, animé par Jimmy Fallon, il arbore un badge du parti anti-islam britannique : For Britain.
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La brigade de la pensée correcte ne tarde pas à réagir. Les affiches de son album California Son sont retirées de l’espace public et, geste fort symbolique, le patron de la boutique de disques la plus ancienne au monde, située à Cardiff au pays de Galles, déclare qu’il ne vendra plus jamais les disques du « Moz ». Une entreprise de « cancellation » en bonne et due forme… Le quotidien de gauche The Guardian va même jusqu’à harceler certains de ses musiciens en leur intimant l’ordre de cesser de jouer avec lui. De ce côté-ci de la Manche, Christian Fevret et Serge Kaganski, qui ont créé le magazine Les Inrockuptibles par admiration, que dis-je, par dévotion pour Morrissey, admettent que ses prises de position sont devenues « problématiques », mais n’appellent pas à son boycott.
Après avoir été, dans sa jeunesse, un croisement entre James Dean et Oscar Wilde, il est devenu le Elvis britannique. Les deux artistes ont en partage un charisme hors du commun, une façon de bouger unique, une voix extraordinaire. Moz a aussi inventé une façon de chanter : des mélopées entêtantes qui tournent en boucle et se font hypnotiques. En Amérique du Sud, certains fans lui dédient des autels ; le voilà déifié. Morrissey est une idole au sens strict du terme, un saint que l’on vénère. Rien de plus normal dans cet univers du rock’n’roll qui est le dernier avatar du christianisme, et plus précisément du catholicisme, avec son cortège de saints, de Vierges, de rituels sophistiqués et de communions des fidèles – le public – qui participent de la pompe de cette liturgie flamboyante.
Morrissey en concert à la salle Pleyel les 8 et 9 mars 2023 à 20 heures.
www.sallepleyel.com