A une époque où les crises financières se succèdent, la réflexion de Jacques Rueff sur le rôle de l’or est plus utile que jamais alors que la zone euro vacille.
Nous vivons à une époque monétaire étrange. En Europe et au Japon, les banques centrales ont mis en place des taux d’intérêt négatifs pour stimuler les économies léthargiques, en dépit de preuves accablantes que de telles politiques ne fonctionnent pas. La Banque centrale européenne a même relancé son programme d’assouplissement quantitatif mis en place il y a quatre ans pour tenter de surmonter l’anémie de la croissance dans toute la zone euro. De l’autre côté de l’Atlantique, la Réserve fédérale tente de calibrer les taux d’intérêt pour aider l’Amérique à éviter une récession, même s’il n’y a pas de consensus parmi les prévisionnistes quant à une récession imminente. Les appels à la Fed pour qu’elle se dirige vers des taux d’intérêt négatifs s’intensifient.
Ces tendances suggèrent un système monétaire international dans lequel certaines des principales banques centrales du monde semblent motivées par une réaction politique à des événements immédiats et ne se concentrent pas sur l’objectif premier d’un système monétaire sain : fournir une unité de compte stable qui facilite le libre choix économique des consommateurs, des ménages et des entreprises sur le long terme. De ce point de vue, un type de désordre monétaire se développe dans l’ensemble de l’économie mondiale.
Pour s’attaquer au problème de façon globale, il faut certainement examiner ce qui constitue vraiment l’ordre dans un système monétaire. Peu de gens ont réfléchi à cette question plus que l’économiste et fonctionnaire français Jacques Rueff (1896-1978).
Un restaurateur de l’économie française
Peut-être l’économiste français le plus en vue du XXe siècle, Jacques Rueff est surtout connu pour avoir conçu les réformes économiques (Le plan Pinay-Rueff) imposées par le nouveau gouvernement de Charles de Gaulle en décembre 1958 à une France enlisée dans la crise économique, l’endettement et la récession. Ces réformes – libéralisation des échanges commerciaux, réduction des dépenses, modifications majeures de la fiscalité et du bien-être, suppression des subventions à de nombreuses industries et dévaluation du franc – sont largement reconnues comme ayant sauvé la France d’une tempête d’instabilité monétaire, d’inflation élevée, de secteurs non compétitifs, de marchés financiers faibles et de faible productivité. La réforme conduite par Jacques Rueff a assuré la croissance économique des années De Gaulle Pompidou.
A lire aussi: Le JEFTA met Fukushima dans nos assiettes
Au cours des quinze dernières années de sa vie, Rueff est passé de la scène française à la scène internationale, devenant ainsi l’un des principaux artisans du rétablissement de l’étalon-or classique à mesure que le système de Bretton Woods s’effondrait progressivement.
Mais Rueff s’intéressait aussi beaucoup aux questions fondamentales de l’économie politique. Il est devenu un critique public de John Maynard Keynes dès la fin des années 1920. Au cours de la même période, Rueff a acquis la conviction que l’économie de marché et le système monétaire qui la sous-tend constituaient un ensemble fragile d’arrangements susceptibles de corruption et de dégradation. Au cours de sa propre vie, M. Rueff a été témoin de plusieurs défaillances graves des systèmes monétaires occidentaux. Il n’avait guère confiance que des solutions émergeraient spontanément d’en bas, d’une manière ou d’une autre.
L’Ordre social
Comme les libéraux allemands Walter Eucken et Wilhelm Röpke, Rueff a insisté sur le fait que certaines décisions d’ordre étaient nécessaires pour établir et protéger certaines institutions si l’économie de marché devait survivre. Pour M. Rueff, la liberté est sortie de l’ordre, et non…
>>> Retrouvez la suite de cet article sur le site de la revue Conflits <<<
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !