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Molenbeek: la gauche fracturée par l’islam


Molenbeek: la gauche fracturée par l’islam
Molenbeek, 2015. Sipa. Numéro de reportage : SIPAUSA30138087_000003.
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Molenbeek, 2015. Sipa. Numéro de reportage : SIPAUSA30138087_000003.

Molenbeek, cela vous dit quelque chose ? Son ancien maire relativiste, son église désertée, sa mosquée pleine à ras bord… Tous les djihadistes européens des quinze dernières années ont transité dans cette commune de Bruxelles aux allures d’émirat. Mais motus, il paraît que le simple énoncé de ces faits « stigmatise » une communauté entière du royaume de Belgique, ce paradis du vivre-ensemble où les accommodements déraisonnables font loi.

Reductio ad zemmourum

Il ne fait donc pas bon dire certaines vérités. Fût-on écolo, de gauche et élu du camp du Bien, comme vient de l’expérimenter Annalisa Gadaleta,  échevine – l’équivalent d’adjointe au maire – de Molenbeek. Auteur du fracassant Entretien à Molenbeek coécrit avec un sociologue italien soucieux de comprendre le bouillon de culture bruxellois, l’élue du parti vert flamand (Groen !) a choqué une bonne partie de ses alliés de gauche qui la comparent déjà à Eric Zemmour et Alain Destexhe. Que sa prose défrise les amoureux transis du multicu à peine refroidis par les attentats islamistes, on le comprend aisément à la lecture de ces extraits : « Il y a un patriarcat typique  des sociétés rurales, mais transposé dans une métropole ! On peut remarquer que ceux qui viennent ici, provenant d’un endroit rural, sont de nature à reproduire certains modes de vie : des petits groupes, des clans… Par exemple, il nous a été très difficile de faire comprendre que, pendant la fête du sacrifice, on ne pouvait pas égorger de moutons dans les maisons ».

Et ce n’est pas fini, le mouton dans la baignoire n’étant qu’un symbole. Demandez le programme.

L’endogamie entre musulmans ? « Beaucoup d’hommes, et même leurs familles, considèrent les femmes du pays d’origine comme plus attractives: leurs attentes sont plus conformes aux valeurs normatives de la tradition. Elles ne cherchent pas à mener une vie en dehors du cadre familial, et du coup, elles sont plus fiables que d’autres femmes. »

La phallocratie ? « Une amie proche m’a raconté que souvent les familles encouragent les fils à trouver une épouse au Maroc. De cette façon, ils peuvent exercer une forme de contrôle et une forme de pouvoir sur ces femmes; ce qui n’est pas possible avec les filles qui sont nées et qui ont étudié ici. »

Le natalisme immigré ? «L’existence de tant de familles nombreuses peut s’expliquer aussi par notre système d’allocations familiales qui favorise celles-ci. Ce système a eu ses raisons en son temps, mais un débat devrait avoir lieu sur la pertinence de le conserver »

La hallalisation des rues ? « Le repli identitaire ? C’est un phénomène que nous avons remarqué au cours des dix dernières années. Il s’est vraiment renforcé en rue et dans les magasins. On se croirait au Maghreb, mais nous n’y sommes pas ! », est-il écrit dans un français parfois approximatif.

Comble de la provocation, Annalisa Gadaleta réclame l’imposition de cours de langue obligatoires aux immigrés, une mesure en vigueur depuis belle lurette en Flandre, mais qu’une bonne partie de la gauche francophone juge éminemment « stigmatisante ». Dès qu’il est question de réalités qui dérangent, le champ lexical de la stigmate apparaît comme par magie. On se croirait chez Saint François d’Assise. Ainsi, si Sarah Turine, échevine du parti francophone Ecolo (et islamologue patentée à la ville!) concède que son alliée flamande « pointe des défis intéressants (comme la mixité dans les quartiers, l’émancipation des jeunes et des femmes…) », c’est pour ensuite dénoncer un « livre (…) truffé de contre-vérités et d’amalgames. Notamment par rapport à la communauté marocaine ou la question des musulmans. Des questions qui sont sans nuances et qui stigmatisent toute une population. » Autrement dit, Gadaleta pose quelques bonnes questions, selon le fameux mot de Fabius, mais donne de mauvaises réponses. « On attend désormais d’Annalisa qu’elle se rende compte qu’elle a éventuellement fait des erreurs dans son livre et qu’elle s’excuse auprès des populations concernées. » persifle Sarah Turine, dans un réflexe pacifiste qui tient doublement de la stratégie électorale.

La danse du ventre électorale

Inutile de détailler la tactique Terra Nova de la voiture-balai bobo-immigrés : la gauche belge, singulièrement wallone, en est friande, et ce n’est pas le visage bigarré des rues de Molenbeek qui la fera renoncer à cette danse du ventre électorale.

Mais en coulisses, les grandes manœuvres partisanes ont déjà commencé. Tant et si bien que les écolos francophones aimeraient reprendre du service auprès de leur ancien allié socialiste, relégué dans l’opposition depuis quelques années. Montrer du doigt la gestion clientéliste et islamo-friendly de Molenbeek depuis de nombreuses années revient à mettre en cause les héritiers PS de Philippe Moureaux, maire de la commune de 1992 à 2014. Or, jusqu’au début des années 1990, le futur bourgmestre socialiste faisait campagne au nom de  « stop à l’immigration », s’insurgeait contre la reconnaissance dans l’islam et se faisait un farouche défenseur de l’assimilation des immigrés. « Je  le dis clairement et durement : nous sommes totalement incapables d’intégrer une nouvelle vague d’immigration. On va arriver à des situations conflictuelles ». (Vlan, 29 septembre 1993) », assénait-il naguère. Mais voilà, on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre. Tournant casaque, Moureaux s’est subitement converti, au propre comme au figuré, à l’islamo-gauchisme, nazifiant ici les critiques de l’islam, convolant là avec une jeune militante d’origine marocaine.

En vue des élections municipales de 2018, Catherine Moureaux a repris le flambeau paternel, proposant entre autres l’adaptation de l’enseignement de l’histoire en fonction des origines des élèves (ce qui laisse augurer de grands moments de solitude aux profs racontant les Croisades, les origines du conflit israélo-arabe ou la conquête islamique…). Dans ce petit Liban gangrené par les comptes d’apothicaire et les stratégies d’appareil, Sarah Turine et ses séides ne comptent pas injurier l’avenir, qui pourrait bien s’écrire avec le PS.

Deux gauches belges irréconciliables ?

Et le moins qu’on puisse dire, c’est que l’opposition socialiste molenbeekoise ne suit pas une ligne franchement courageuse. Son chef Jamal Ikazban, émule quadra de Moureaux, tient à la fois de l’entrepreneur communautaire (pour son engagement passé au sein de l’Association des Jeunes Marocains) et du militant « anti-islamophobe ». Dans un jugement que ne renierait pas notre CCIF national, Ikazban balaie d’un trait de plume le livre « poubelle » de Gadaleta  plein de  « clichés islamophobes et racistes ». Il est certainement « islamophobe » et clichetonneux de rappeler l’origine molenbeekoise des assassins du commandant Massoud, des exécutants du 13 novembre ou de rappeler la tentative de prise d’assaut du commissariat qui avait suivi l’arrestation d’une femme en burqa au printemps 2012.

Jamal Ikazban fait pourtant peu de cas de l’incubateur bruxellois. Hier encore défenseur d’un djihadiste maroco-belge criant à la torture, pourfendeur de l’expert sécuritaire Claude Moniquet (« une ordure sioniste », sic), le jeune homme au CV communautaire long comme le bras ne fait pas dans la dentelle lorsque certains intérêts sont en jeu.

L’essai d’Annalisa Gadaleta tombe donc au plus mal. Comme dans la douce France, la panoplie de la gauche multicu (droit de vote des étrangers, campagnes d’Etat contre les discriminations et « l’islamophobie ») sépare « deux gauches irréconciliables », selon la doctrine Valls. À ceci près que Gadaleta, soutenue par le parti vert flamand, fait la course bien seule à Molenbeek.

Investi triomphalement par la Belle alliance populaire, Benoît Hamon pourrait donner des ailes aux terra-novistes belges, qui disposent d’un terrain sociologique encore plus favorable. Sous nos cieux, la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon a néanmoins quelque chance de rivaliser avec la France soumise d’Hamon…



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est journaliste.

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