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Les Gaulois, toujours réfractaires au MMA?

Chic, peut-être du MMA (Martial-Mixed Arts) bientôt en France...


Les Gaulois, toujours réfractaires au MMA?
Combat d'UFC à Stockholm le 1 juin 2019. © Per Haljestam-USA TODAY Sports/Sipa USA/26526659/hb6/1906012256

La Ministre des Sports Roxanna Maracineanu souhaite progressivement ouvrir la voie au développement du MMA (Martial-Mixed Arts) en France. Si certains y voient trop de violence, nombreux sont les amateurs à se réjouir.


La pratique du MMA (Martial-Mixed Arts) en France est-elle en marche ?

A en croire les dernières sorties de l’actuelle Ministre des Sports Roxanna Maracineanu, oui! Elle entendrait bien légaliser cette pratique progressivement, comme dans la majorité des pays européens.

Le MMA est un mélange de jiu-jitsu brésilien, de lutte et de boxe thaï. C’est une discipline qui a pour lointain ancêtre le pancrace grec, où excellait le philosophe-lutteur Platon. C’est également un spectacle mondialement connu, qui engrange des millions de dollars. La discipline a progressivement volé la vedette à la boxe anglaise en terme d’audimat à la télévision et de gros sous.

Des combattants comme Fedor Emelianenko, George Saint-Pierre ou Anderson Silva font rêver des milliers d’adolescents tout autour du globe.

Pourquoi un tel désamour pour le MMA ?

Notre hexagone reste rétif à tout combat de MMA sur son sol. Pourtant, la France est un vrai pays pugilistique et le reste : elle a vu naître sur son sol des champions de la trempe de Marcel Cerdan, Dominique Valera, Youcef Zenaf, Teddy Riner ou Jerôme Le Banner et tant d’autres… Lesquels ont fait partie des meilleurs combattants de leur génération en dominant parfois leur discipline !  Chaque année, des dizaines de combattants s’y entraînent dans nos dojos pour aller ensuite combattre à l’étranger, en Angleterre notamment.

Pourquoi un tel désamour pour cette pratique devenue phare ? Pourquoi cette volonté de toujours prendre du retard, alors que cette pratique finira tôt ou tard par s’imposer comme dans de nombreux pays tout aussi civilisés que le nôtre ? De la même raison que l’Islande a toujours interdit la pratique de la boxe anglaise sur sol, la principale raison invoquée est l’extrême violence supposée de ce sport. Il est vrai qu’au premier abord, les combats peuvent être spectaculaires avec des frappes au sol, l’utilisation de clés ou des gouttes de sang parcourant le visage des « gladiateurs ». Si l’on se balade sur internet, on peut encore voir des combats au temps des pionniers que furent la famille Gracie avec des yeux crevés, des coups dans les parties… Un spectacle d’une rare violence, plus proche du combat sur un parking que du noble art tel que l’avait souhaité le Marquis de Queensberry en 1865 !

Une pratique d’une rare violence désormais bien encadrée

Or, il y a bien longtemps que le MMA a été réglementé ! Les frappes dans les parties sensibles sont strictement interdites, et les combattants sont suivis par des services médicaux, à chaque instant du combat. Il n’y a en réalité pas plus de risques dans l’octogone que dans n’importe quel autre sport de contact. Les blessures sont souvent plus musculaires que liées aux coups. Pis, c’est oublier les nombreuses contusions cérébrales que peut avoir un boxeur classique ! Et la boxe n’a-t-elle pas rendu fier notre pays aux derniers Jeux olympiques avec ses médailles d’or, notamment du couple Yoka-Mossely ? Et que dire du rugby professionnel et des nombreux accidents qui ont émaillé ces dernières années ? Le rugby s’est métamorphosé depuis 20 ans, avec des gabarits toujours plus grands, plus lourds, plus rapides et des combats toujours plus violents. Qui se souvient des jeunes Adrien Descrulhes, Louis Fajfrowski, Nathan Soyeux ou Nicolas Chauvin, tous âgés entre 18 à 21 ans et décédés sur nos terrains entre 2018 et 2019 ? Bien que des voix s’élèvent de plus en plus pour améliorer les choses, le rugby-cassoulet était bien moins dangereux autrefois qu’il ne l’est devenu aujourd’hui…

Le MMA reste un sport de contact, complet et très technique. Pourquoi les jeunes Français seraient-ils plus friables que les autres ? La France possède en son sein des athlètes de toutes spécialités, des « strikers » (combat debout ») aux « grapplers » (combat au sol), dont beaucoup ne demandent qu’à porter les couleurs de la France, dans un sport où les valeurs patriotiques vont de pair avec une certaine virilité et l’humilité de pouvoir perdre à tout un moment. Il est inique qu’un combattant comme Bertrand Amoussou – ancien judoka de l’équipe de France – soit obligé de porter les couleurs allemandes parce que son sport est interdit à la maison.

Pour mettre la pratique au tapis, la fédé de judo dénonce un « sport de djihadistes » !

La seconde raison vient de l’éternelle lutte entre les fédérations en France.

Les instances de nombreux sports sont en lutte entre elles, pour des fins financières et de prestige. Qui se rappelle que la fédération de rugby à XV a fait interdire la pratique du XIII sous Vichy car porteuse des valeurs qui auraient provoqué la défaite de 1940 ? Le principal obstacle à la présence du MMA est la puissante fédération de judo. Sous couvert de montrer du doigt la dangerosité de ce sport, ses instances souhaitent avant tout protéger leur pré-carré. Le judo, apparu dans les années 30, est une valeur sûre dans notre pays. Pas un quartier ou un bourg de France n’ayant son club ! Avec la maison-mère japonaise, la France est le pays le plus performant dans cette discipline. Et son poids n’est que plus important lorsqu’il s’agit de discuter autour d’une table. Le budget de la fédération n’est toutefois que de 30 millions d’euros, très peu pour un sport aussi populaire. L’argent étant le nerf de la guerre, toute discipline concurrente devient un adversaire à abattre. Et quand son président s’appelle Jean-Luc Rougé, la partie prend une tournure… des plus politiques. Franc-maçon revendiqué, ancien garde du corps du trotskyste Pierre Lambert, il reste le premier champion du monde de judo français en 1975. Animal politique qui a su tisser des réseaux à droite comme à gauche, il tire à boulets rouges sur l’apparition du MMA en France en lançant des arguments controversés tels que « le MMA est un repère de djihadistes, c’est la Direction Centrale du Renseignement Intérieur qui me l’a dit. »

Symbole au choix du bien-être collectif ou d’un certain élitisme, le sport a toujours été en France un vecteur de vivre-ensemble comme de promotion sociale. Roger Salengro, le premier sous-secrétaire à la Jeunesse et au Sport disait en 1936 que « notre souci est moins de créer des champions et de conduire sur le stade 22 acteurs devant 40 000 ou 100 000 spectateurs, que d’incliner la jeunesse de notre pays à aller régulièrement sur le stade, sur le terrain de jeux, à la piscine.»

Le rouleau compresseur libéral au secours du MMA ?

Dans le libéralisme effréné auquel la France se plie depuis trente ans, Emmanuel Macron concocte un plan dont il a le secret : des milliers de postes d’enseignants, d’éducateurs et de fonctionnaires qui encadrent les jeunes pourraient sauter. Le rouleau compresseur emporte tout. Paradoxalement, c’est peut-être la chance du MMA. Si les clubs sportifs devaient subir définitivement la loi du marché, avec des financements exclusivement privés, un sport engendrant autant de bénéfices économiques que le MMA rentrerait totalement dans les schémas de notre temps…

Si le sport collectif est touché depuis longtemps, les sports individuels parvenaient quelque peu à s’extraire de cette logique. Mais le MMA est surtout une image de marque ! Malgré la noblesse d’une pratique ancestrale, il correspond totalement au monde tel qu’on nous l’impose : une société où le sport n’est plus qu’une marchandise comme les autres. Aussi, gageons qu’on ne tardera pas à voir des compétitions de MMA en France…

 



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