Pour une minorité d’introvertis, la claustration imposée par le confinement n’a rien d’oppressant. Quasi-autistes, misanthropes et hypocondriaques se réjouissent du présent pandémique qui consacre leurs instincts prophylactiques.
À peu de choses près – par exemple, si je n’étais pas empêchée d’aller promener mon humain et mes chiens dans ma forêt préférée située à plus d’un kilomètre de mon domicile –, le présent pandémique n’est pas loin de m’être paradisiaque. Autiste fonctionnelle biberonnée à la littérature concentrationnaire, me voici enfin adaptée au monde contemporain. Ou plutôt c’est lui qui s’est adapté à moi, tout un chacun étant sommé d’appliquer un mode d’existence qui est par défaut le mien : la distanciation sociale. En ces temps tragiques, l’occasion de se réjouir se fait rare, alors que les introvertis et autres névrosés du contact ne boudent pas leur plaisir.
Gare au stress post-traumatique
Évidemment, notre espèce ayant réussi à coloniser la planète comme personne parce qu’elle est un ramassis de primates adorant se tenir chaud et se taper dessus (les deux entretenant une relation symbiotique), la chose est loin d’être facile pour tout le monde. Dans une synthèse sur les effets psychologiques des quarantaines publiée dans The Lancet fin février, l’équipe de Samantha K. Brooks, du King’s College de Londres, fait du confinement le premier facteur des troubles de stress aigu observés chez des soignants taïwanais après l’épidémie de SRAS de 2003. Et cela alors que leur isolement n’avait duré que neuf jours. Selon ces mêmes données, le personnel hospitalier mis en quarantaine était nettement plus susceptible de souffrir d’épuisement, d’angoisse face à des patients fébriles, d’irritabilité, d’insomnies et de problèmes de concentration. Durant cette même épidémie, mais en Chine, le fait d’avoir été mis en quarantaine annonçait la survenue d’un syndrome de stress post-traumatique trois ans plus tard. En 2007, lors d’une flambée de grippe équine en Australie, 34 % des propriétaires de chevaux contraints au confinement évoquaient leur détresse psychologique, contre seulement 12 % dans la population générale. Aux États-Unis et au Canada, lors des pandémies de SRAS et de H1N1 de 2003 et 2009,
