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Long comme un Premier ministre qui vous parle d’Europe à Vesoul

Je ne m'attendais pas à grand-chose, j'ai bien fait


Long comme un Premier ministre qui vous parle d’Europe à Vesoul
Image d'illustration: Edouard Philippe en campagne à Libourne, mai 2019. ©UGO AMEZ/SIPA / 00907567_000086

« Quelle Europe pour demain ? » Pour répondre à la question, la délégation LREM de Vesoul avait carrément convoqué le Premier ministre. Alors le Premier ministre l’a fait. Avec les mots d’un militant de base: l’Europe c’est bien, en douter c’est mal. 


La dernière fois que j’étais allé en reportage à Vesoul, c’était il y a trois ans. Je ne voudrais pas porter la poisse à Edouard Philippe (encore que…), mais c’était pour le lancement de la campagne présidentielle de Bruno Le Maire, et tout cela avait fini autour de 2% à la primaire. Evidemment, le score de la liste menée par Nathalie Loiseau sera beaucoup plus haut dimanche prochain, mais on ne peut exclure que le résultat ne soit pas à la hauteur des espérances en haut lieu. Et nous nous en voudrions d’avoir joué à cette occasion le rôle de chat noir (encore que…).

Il voulait voir Vesoul et il a vu Vesoul…

Dans la bonne ville chantée par Jacques Brel, le maire Alain Chrétien, membre d’AGIR et donc de la majorité, puisque les anciens « constructifs » sont désormais représentés au gouvernement, accueille Edouard Philippe, Premier ministre, et son ancien collègue sur les bancs LR de l’Assemblée nationale. Pas étonnant de l’entendre alors louer le dépassement du clivage droite-gauche qu’il dit mettre en pratique en Haute-Saône, sous les reproches de la droite locale dont il est issu. Drôle de le voir accueillir à bras ouverts le maire de Besançon, passé par à peu près tous les courants du PS, d’Epinay à Reims, avant de succomber au charme d’Emmanuel Macron.

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Après Chrétien, c’est la députée LREM Bessot-Ballot qui prend la parole. Nous n’en dirons rien, puisque ce propos de quelques minutes ne disait rien non plus. Celui de la juppéiste Fabienne Keller, sénatrice et ex-maire de Strasbourg, a au moins le mérite de nous faire rire à ses dépens, s’adressant aux Haut-Saônois en les qualifiant d’ « Haut-Saôniens ». Elle enrôle évidemment Simone Veil pour la cause, et tombe très vite dans un sermon cul-cul-la-praline sur l’Europe, la paix, l’égalité des femmes et des hommes. Les cases sont toutes cochées, ou presque. Il paraît même qu’à Strasbourg, les parlementaires européens lui disent qu’avec Emmanuel Macron, « la France est de retour ». Fabienne Keller a vraiment l’air d’y croire. C’en serait presque rafraîchissant de naïveté.

Le ministre, les gentils et les méchants

Et puis, Edouard Philippe s’empare du micro devant les trois-cents personnes rassemblées dans la salle Parisot. On se dit qu’on ne va peut-être pas s’ennuyer. Il semble être plutôt en mode « Edouard, mon pote de droite » qu’en rigide Premier ministre. Quelques petites notes d’humour, genre british. Un certain flegme, british aussi. Mais très vite, on s’aperçoit que tout cela n’est qu’un vernis pour enrober une liste de poncifs guère plus subtils que ceux de Fabienne Keller. Il y a les gentils qui veulent sauver l’Europe, qui la font « avancer ». Et puis il y a les méchants, qui veulent tout casser, soit alliés aux Russes, soit alliés aux Américains trumpistes, quand ce n’est pas les deux à la fois. Une petite charge contre les « souverainistes » comme ils osent s’appeler, un petit rappel que « sans l’Europe, nous ne sommes que des nains, face à des géants », une ode « à ceux qui nous ont précédés », « ceux de 57 », et sous le regard desquels « il faut être à la hauteur », et le tour est joué, la parole est à la salle.

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Les questions venant d’elle, et les réponses qui leur seront apportées ne nous sauveront pas de l’ennui dans lesquels nous étions plongés. Neuf jours après avoir entendu François-Xavier Bellamy s’adresser aux sympathisants LR, la chute est vertigineuse. Mais le peuple LREM est un peu nouveau en politique. C’est la seule explication envisageable de son manque d’exigence.

Allons enfants de l’a-patrie…

Est-ce aussi ce manque d’expérience qui est à l’origine d’une Marseillaise finale chantée par un-dixième de la salle seulement ? Ou l’assemblée aurait-elle préféré vibrer au son de l’Hymne à la joie, qui ne comporte pas de paroles, ce qui a au moins l’avantage de ne pas appeler à faire verser du sang impur pour en abreuver nos sillons ? A cet instant, on en conclut que les mièvres paroles de Fabienne Keller étaient véritablement raccord avec le public auquel elle s’adressait. Et, nonobstant la promesse faite à notre rédacteur en chef, de nous poser la question fondamentale : « Qu’est-ce que je fous là ? »

La renaissance de la troisième mi-temps

Mais reprenons-nous ! Dans une réunion politique, il se passe toujours quelque chose quand tout le monde a fini de parler. Un incident protocolaire, un militant qui n’est pas content, un vieux copain que l’on retrouve et qui vous fait des confidences off. Sait-on jamais… Et effectivement, nous avons pu sourire, avec notre confrère de France 3 Franche-Comté, aux difficultés du député LREM Eric Alauzet, candidat déclaré à la mairie de Besançon, de forcer le barrage d’un vigile intransigeant, alors qu’il pensait que sa concurrente à l’investiture Alexandra Cordier se trouvait à l’intérieur de la salle annexe où tout le gratin se pressait autour du Premier ministre. Il n’a dû son salut qu’à l’aide du maire de Vesoul, auquel le vigile a cédé plus facilement. La situation était d’autant plus drôle que ladite concurrente ne s’y trouvait pas puisque nous avons pu l’interroger ensuite de l’autre côté de la salle, où elle buvait du cidre avec des militants. Nous lui faisons remarquer que trois-cents personnes à Vesoul avec le Premier ministre en vedette, ce n’est pas beaucoup. Elle n’est pas d’accord. Nous l’informons qu’Arnaud Danjean, seulement troisième de la liste LR a fait le même nombre de personnes à Saint-Dié, dans les Vosges voisines, vendredi soir. Il est pourtant loin d’avoir la notoriété d’Edouard Philippe. Elle n’insiste pas vraiment. Nous lui demandons si c’était une volonté d’avoir organisé la salle de la même manière que lors du « Grand débat ». Elle répond que dès la création d’En Marche, les salles étaient organisées ainsi pour les réunions publiques. Tiens donc ! C’est donc le « Grand débat » qui était organisé comme des réunions LREM. Saperlipopette ! Quel aveu !

En fait, pour les réunions publiques macronistes, il faudrait seulement arriver après le meeting, c’est là que c’est le moins inintéressant. Nous ne sommes malgré tout pas mécontents d’avoir vu Edouard Philippe voir Vesoul. Qui sait si « Edouard mon pote de droite » sera encore Premier ministre dans une semaine ? Qui sait si, alors, je ne serais pas devenu définitivement malgré moi, le chat noir des meetings vésuliens ?

Leurs guerres perdues

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