La fondation Res Publica, présidée par Jean-Pierre Chevènement, a invité Pierre Brochand, ambassadeur de France et ex-patron de la DGSE, à présenter sa vision du défi migratoire. Marcel Gauchet a reconnu la qualité de sa contribution dont nous proposons ici une synthèse.
Pierre Brochand a représenté la France sur plusieurs continents, en Afrique tribale, aux États-Unis, au Vietnam, au Proche-Orient… Il a été le témoin direct de crises violentes et en retire « une vision du monde qui n’est ni fraîche ni joyeuse ». Retraité depuis quelques années – il a 78 ans –, il est rentré vivre dans la maison de son enfance. Mais « quand […] l’on constate que ce petit village au cœur de la petite ville est devenu une parcelle d’un autre continent […], comment ne pas en éprouver de l’étonnement ? »
De cet étonnement est née une certitude. La France n’a plus de politique migratoire depuis cinquante ans. Le Droit et la Justice supranationale se sont attribué les pleins pouvoirs, pour favoriser la plus large ouverture possible des frontières. Les gouvernements successifs, soulagés du fardeau, ont paré leur impotence des atours de la générosité, parfois tempérée par des déclarations incantatoires sans lendemain. Alors que les enjeux climatiques bénéficient du principe de précaution et des moyens de la recherche scientifique, le dossier migratoire relève lui du principe d’ignorance par l’interdiction, entre autres, des statistiques ethniques.
Reprendre le contrôle
Cet aveuglement devant la création de diasporas et de communautés comptant aujourd’hui des millions de membres a abouti à une situation lourde de tensions. L’ex-patron de la DGSE estime ainsi que l’explosion simultanée des banlieues constitue un risque sécuritaire très supérieur à celui du terrorisme. Un feu couve, mal contrôlé par des dirigeants qui tentent de compenser leur cécité face à la question culturelle, par le déversement d’aides sociales toujours plus généreuses. Pour l’ambassadeur, au contraire, l’immigration est bien le sujet central, puisqu’elle peut mettre en péril la paix civile.
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La suggestion de Pierre Brochand pour l’improbable gouvernement qui entendrait se réattribuer ce dossier axial : « Take back control » – le slogan du Brexit. « Si nous ne prenions pas en charge nos intérêts vitaux, nul ne le ferait à notre place. » Une politique migratoire devrait même, selon lui, être le préalable à toutes les autres. Il sait la vigueur des oppositions à une telle reprise en main, mais dénonce « le parallélisme mensonger qui voudrait que toute politique migratoire restrictive et sélective soit le signe d’un nazisme renaissant ».
À lire son intervention, ce sont pourtant moins les mesures proposées qui retiennent l’attention – une trentaine, toutes pertinentes
