Michel Denis, c’est près de soixante ans de jazz et de blues. Né en 1941, ce batteur français a accompagné les plus grands, de Dizzy Gillespie à Memphis Slim. Il déplore aujourd’hui la perte de ce qui faisait l’essence du jazz : le swing ! Propos recueillis par Yannis Ezziadi.
Michel Denis, c’est un gamin de Meudon. Un vrai ! Dès mon arrivée devant sa maison, il me raconte qu’il est né en 1941 et qu’ici, quand il était enfant, c’était la campagne… et que c’était mieux avant ! Il y avait une ferme pas loin, sa mère l’y emmenait chercher le lait. Sa mère qui a connu Lucette, la femme de Céline, avec qui elle discutait au marché. Souvenirs de l’enfance. Nostalgie. Plus tard, Michel Denis fait ses études aux Arts déco. Il se prépare à être architecte d’intérieur. Mais il découvre le jazz et se met à la batterie. Un temps amateur, il devient vite professionnel et accompagne les musiciens américains qui viennent jouer à Paris. Il est successivement batteur permanent de plusieurs clubs de jazz comme Les Trois Maillets, Le Bilboquet et Le Caveau de la Huchette. Durant sa longue carrière, Michel Denis a accompagné les plus grandes légendes du jazz et du blues : Memphis Slim, Dizzy Gillespie, Don Byas, Johnny Griffin, B.B. King, Clark Terry, Stéphane Grappelli, John Lee Hooker ou encore Erroll Garner. Pendant trente-cinq ans, Michel Denis joue quasiment tous les soirs. Aujourd’hui, on peut encore, si on est très chanceux, l’entendre dans les clubs de jazz où, jadis, il officiait quotidiennement. Certains de ces clubs sont un peu devenus des musées. Je me souviens l’avoir vu jouer au Caveau de la Huchette. Ça, c’est un musée ! Bourré de touristes d’ailleurs. On y vient pour revivre le passé, les grandes heures du swing, des caves de jazz. J’avais 19 ans. Je me souviens d’une machine à swing. Ça roulait ! Je le retrouve pour Causeur. Rencontre avec un vieux routard du jazz.
Causeur. Vous souvenez-vous de votre première rencontre avec le jazz ?
Michel Denis. Je m’en souviens très bien, car ce fut un choc. J’étais tout jeune. J’avais un voisin qui s’appelait Maurice. Il jouait un peu de piano et avait une collection de disques incroyable. Il avait un disque dédicacé de Charlie Parker ! Un jour, il me dit : « Tu ne connais pas la musique noire américaine ? Tiens, je vais te faire écouter ! » Et j’ai tout de suite été emballé. Ça a été une révélation. Je ressentais quelque chose que je n’avais jamais ressenti, avec aucune autre musique.
