Attentat de Bruxelles : Mehdi Nemmouche, jihadiste made in France


Attentat de Bruxelles : Mehdi Nemmouche, jihadiste made in France

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Du samedi 24 mai à vendredi dernier, la police française aura mis moins d’une semaine à arrêter l’auteur de l’attentat du musée juif de Bruxelles. Interpellé à la faveur d’un contrôle de routine sur le trajet du bus Amsterdam-Marseille, Mehdi Nemmouche, 29 ans, a été trahi par l’arme de guerre qu’il portait, la kalachnikov avec laquelle il tua les trois victimes de l’attaque.

Grâce à ce qu’il reste de contrôle aux frontières, la piste « nazie », systématiquement avancée puis repoussée dans ce genre d’affaires, est aujourd’hui abandonnée. Au vu des premiers éléments du dossier révélés par les procureurs belge et français responsables de l’enquête, on peut établir le profil sociologique du suspect, désormais passé aux aveux. Certes « issu de l’immigration » maghrébine, Nemmouche tient davantage de la petite frappe de Roubaix que du jihadiste-type. Qui vole un œuf ne termine pas forcément une kalachnikov en bandoulière à mitrailler les visiteurs d’un musée juif. Condamné à sept reprises, principalement pour braquage, Mehdi Nemmouche aurait rencontré l’islamisme en prison, où le prosélytisme fait rage, avant de joindre les actes à la parole en janvier 2013, date de son arrivée en Syrie.

Sur place, il rejoint l’Etat islamique en Irak et au  Levant (désigné en arabe sous l’acronyme Da’ache), groupe plus salafiste que les salafistes du Front Al-Nosra, qu’il combat désormais plus vigoureusement que les propres troupes de Bachar Al-Assad. Après plus d’un an sur le front, Nemmouche revient en France en mars dernier, après un périple épique destiné à brouiller les pistes, chauffé à blanc contre les « mécréants », avec la ferme intention de faire ses preuves en Europe. Bien décidé à « mettre Bruxelles à feu et à sang », selon ses propres dires, le délinquant repenti a ainsi compensé la frustration née de son expérience syrienne. Il est difficile de se figurer l’âpreté des combats entre frères ennemis jihadistes aux confins de l’Irak et de la Syrie, les rivalités entre les différents émirs se réclamant d’Al-Qaïda nous étant aussi impénétrables que les querelles entre jansénistes et jésuites.

Mais revenons à notre loup solitaire. Son ancienne avocate tombe des nues, sa famille se dit bouleversée par la mue criminelle du fils prodigue (on le serait à moins…), mais ces nobles émotions ne nous disent pas grand-chose des dessous de l’attentat. Il semblerait que le Ben Laden du Levant, dans son combat de coqs fratricide avec Al-Zawihiri, rêve de faire tomber la citadelle européenne en y larguant ses meilleurs guerriers. Comme jadis le Vieux de la montagne, Hassan Ibn Sabbah, chef de la secte ismaélienne des Assassins, Al-Baghdadi essaime ses jeunes terroristes aux quatre coins du vieux continent tant pour déstabiliser les sociétés « impies » qu’afin d’asseoir son pouvoir et son prestige personnels. Outre quelques subsides, ce milicien irakien n’a de richesses que d’hommes. Son capital humain se compose notamment des 700 français qui combattraient en Syrie, sur les 12 000 jihadistes partis abattre le régime alaouite de Damas, dont il compte bien rediriger la force de frappe vers leurs pays d’origine pour provoquer un 11 septembre européen.

À en croire Marc Semo, l’excellent rédacteur en chef du service international de Libé, ces légions de volontaires armés et entraînés pourraient faire détonner une bombe prête à exploser. Sans fantasmer sur une cinquième colonne mahométane, ou céder à la tentation de l’amalgame, aussi délétère que l’aveuglement, on peut remarquer avec notre chère directrice que plusieurs loups solitaires finissent par faire une meute. Mohamed Merah en 2012, le britannique au hachoir l’année suivante, puis Mehdi Nemmouche la semaine dernière : le vil métier de terroriste a décidément de l’avenir. Que les enfants de l’immigration en constituent  les forces vives n’a rien de rassurant. Quand bien même ils n’auraient pas agi sous la coupe d’un réseau, mais de leur propre chef, on ne résoudra rien en ânonnant ad libitum « intégration », « république », « diversité », ou « lutte contre l’islamophobie ». On peut tout faire avec des slogans, sauf hélas désamorcer les bombes.

*Photo : Yves Logghe/AP/SIPA. AP21572547_000010. 



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