On trouve sans peine des articles et des reportages intitulés :
Mais on cherchera en vain : « Qui sont les bloqueurs qui s’en prennent aux étudiants non grévistes ? »
Pourtant, le Premier ministre, comme celui de l’Enseignement supérieur, ou encore le président de la République ont insisté sur le caractère minoritaire des étudiants au sein des comités de blocage des universités. Mais il est vrai qu’ils ont tout intérêt à nier la légitimité de ceux qui s’opposent à la réforme portée par le gouvernement :
Je constate quand même que dans beaucoup d’universités occupées, ce ne sont pas des étudiants mais ce sont des agitateurs professionnels, les professionnels du désordre dont parlait Michel Audiard. […] [Et les vrais étudiants] doivent comprendre que s’ils veulent avoir leurs examens en fin d’année, c’est mieux de les réviser, parce qu’il n’y aura pas d’examens en chocolat dans la République. (Emmanuel Macron sur TF1)
Sur les examens en chocolat, on pourra aussi écouter Raphaël Enthoven et son billet matinal particulièrement bien senti :
Le problème est, en réalité, beaucoup plus large et devrait amener les médias à s’interroger sur la manière dont ils traitent les mouvements de contestation en milieu étudiant. On ne devrait pas les aborder comme n’importe quel soulèvement social. A proprement parler, un étudiant ne peut pas être « en grève » puisqu’il n’est pas salarié. La Charte de Grenoble (1946) qui consacre l’avènement du syndicalisme étudiant peut bien présenter les étudiants comme des « travailleurs », reste que les moyens d’action de ces mouvements eux-mêmes et leur capacité de nuisance invalident cette assimilation abusive.
A lire aussi: A Toulouse, l’extrême gauche colonise et bloque l’université du « Mirail »
L’étudiant « gréviste » peut, pour participer à des manifestations, se priver de cours. Mais c’est un risque qu’il prend, un dommage qu’il s’inflige et dont il doit être prêt à assumer les conséquences. Il ne pénalise que lui-même puisque, étant étudiant, il n’apporte rien à l’institution mais a tout à recevoir d’elle.
Un étudiant qui bloque une université nuit seulement aux autres étudiants
A l’inverse, un ouvrier gréviste, au surplus s’il bloque son usine, paralyse les moyens de production et refuse de contribuer par sa force de travail à la prospérité de l’entreprise. Son action a donc un sens, en lien direct avec l’objet de sa colère.
Mais un étudiant qui bloque une université nuit seulement aux autres étudiants. Son action n’a donc aucun sens, manque sa cible et ne peut aboutir qu’à jeter le discrédit sur les revendications du mouvement.
Sans compter que n’importe quel petit lettreux un peu politisé ne saurait, avec ses petits bras, lancer et tenir un blocage. Les infos que j’ai pu recueillir ici et là confirment que « les étudiants » (dixit les médias) qui bloquent telle ou telle fac ne sont que très minoritairement des étudiants de la fac en question, certains n’étant même pas étudiants du tout. Et là, on attendrait un enquête journalistique un peu rigoureuse pour nous donner des informations plus précises sur : qui vient d’où ? dans quel but et dans quelles proportions ? A bon entendeur…
Les bloqueurs ont tous les droits
La focalisation diabolisante sur les anti-bloqueurs, facilement réduits à quelques groupuscules néo-fascistes venus en découdre avec leurs homologues d’extrême gauche (dont tout le monde, en revanche, s’obstine à nier l’existence) prouve une nouvelle fois que, même pour les journalistes, un bon étudiant anti-blocage est un étudiant qui se tait.
Les bloqueurs ont le droit de transformer les AG en séances d’intimidation collective n’ayant absolument rien de démocratique, ils ont le droit de dégrader les locaux et de brutaliser leurs camarades de promo qui persistent à demander la tenue des cours et des examens.
Ils ont une marge de manœuvre très large avant qu’on les accuse de violence. Ceux d’en face ont…
>>> Lisez la suite de l’article sur le blog d’Ingrid Riocreux <<<
La Langue des médias : Destruction du langage et fabrication du consentement
Price: 20,00 €
26 used & new available from 2,89 €
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !