J’aime beaucoup le méchoui mais je déteste le pot-au-feu halal. Le premier se mange avec gourmandise. Le second a un rapport étroit avec l’eau de vaisselle.
C’était une belle journée de mars dernier. Je me rendais chez mon fils qui m’avait invité à diner. Au menu : un pot-au-feu. Il savait que j’adorais ça.
Mon taxi quitta la porte de Montreuil pour s’engager dans la rue de Paris où les kebabs alternent avec les boucheries halal. Nous fûmes ralentis par un embouteillage imprévu. Le taxi demande à un commerçant du coin ce qui se passait. « Mais comment, vous ne savez pas ? Il y a aujourd’hui un match important des quarts de finale du championnat de foot d’Algérie ». Effectivement un événement de cette importance n’aurait pas dû nous échapper.
Devant nous, à quelques dizaines de mètres, les téléviseurs des cafés hurlaient en arabe : la retransmission du match. La rue était barrée par des « jeunes » qui tenaient une banderole aux couleurs de l’Algérie. Les voitures étaient obligées de passer lentement en-dessous.
Comme j’ai mauvais caractère et que je n’aime que le drapeau tricolore je demandais au taxi de prendre un autre itinéraire. Il manœuvra, reçu en échange quelques coups de pieds dans sa carrosserie. Mais avec une somme astronomique au compteur m’amena à bon port. Mon expédition montreuilloise avait bien mal commencé. La suite fut pire encore.
Mon fils m’attendait la gueule enfarinée. « Tu peux venir dans la cuisine ? ». Je le suivis. Il s’arrêta devant la marmite ou mijotait le pot au feu. « Goûte s’il te plait ». Je goûtais. Je recrachais. C’était infâme.
« Je ne comprends pas » me dit-il l’air penaud. « Mais tu l’as achetée où ta viande ? », lui demandais-je. « Ben, à la boucherie de la rue ». « Et c’est quoi comme boucherie ? ». J’entrepris de lui expliquer que le bœuf halal avait à peu près autant (ou aussi peu) de goût que le bœuf cacher. En bas de sa maison, il y avait un restaurant chinois. Nous y allâmes. Nous mangeâmes un sauté de crevettes et un canard laqué.
J’aime beaucoup le pot-au-feu. On en fait un délicieux au Bouillon de la rue Racine. J’aime également le méchoui. Il y en a un formidable à L’Étoile d’Agadir, avenue Michel-Bizot. Le patron de ce restaurant s’abstient sagement de cuisiner un pot-au-feu. Et celui du Bouillon se garde bien de servir du méchoui. Tous deux sont faits pour s’entendre.
Ps : Cet article me paraît quand même un peu trop restrictif. Pour les vrais gourmets – et il n’y a de vrais gourmets qu’antiracistes – un site propose une liste de restaurants tenus par des « racisés » noirs ou arabes. Le site veut que « l’argent ruisselle du bon côté ». Voilà une vraie et bonne action : il ne faudrait pas que l’argent ruisselle dans les poches de quelconque lyonnais, niçois ou breton. Là vous trouverez les meilleurs endroits pour déguster un ragoût de buffle accompagné de manioc ou un tajine aux olives (pour le méchoui vous savez déjà). N’y cherchez pas de restaurant où l’on sert de la carpe farcie ou du foie haché. Ils sont disqualifiés.