Grâce à Facebook, j’ai appris fin novembre que le groupe EELV au Conseil de Paris avait émis un vœu linguistique pour qu’on parle désormais de « Journée du matrimoine et du patrimoine ». Une semaine plus tard, c’était au tour de Québec solidaire, l’équivalent local des Insoumis, de réclamer une décision similaire dans la Belle Province. Excusez ma franchise, camarades antisexistes, mais tout ça, c’est petit bras.
« Dans le mot “patrie”, les mères n’existent pas. »
Chez nous en Italie, les théoriciennes du néoféminisme ne se contentent pas de demi-mesures dans leur lutte contre le vocabulaire imposé par le mâle blanc hétérosexuel. La plus célèbre d’entre elles, Michela Murgia, vient ainsi de réclamer dans L’Espresso une substitution lexicale radicale : « Le concept de patrie n’a fait que des dégâts. Il faut qu’on commence à parler de matrie. » En vertu de quoi « il faut une nouvelle catégorie, qui arrache à la racine le machisme, strictement lié au concept de patriotisme ».
Bien sûr, cet argumentaire est assorti de tous les grigris géopolitiques des partisans du village global : « Dans un monde où les frontières qui séparent les terres ont bougé mille fois et où les cultures se mélangent sans cesse, le fait de dire “ma patrie” pour désigner une terre précise n’a aucune signification sur le plan logique et géologique. » La conclusion de Murgia est sans appel : « Dans le mot “patrie”, les mères n’existent pas. » Le fait que notre langue italienne ait consacré depuis des siècles l’expression « madre patria » doit donc être considéré comme un détail insignifiant, voire réactionnaire.